La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/12/2001 | FRANCE | N°2001/00385

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 10 décembre 2001, 2001/00385


DU 10 DECEMBRE 2001

ARRET N°574 Répertoire N° 2001/00385 Première Chambre

Première Section

MZ/CD

TGI BORDEAUX

18.12.1995 Monsieur A

S.C.P BOYER LESCAT MERLE C/ MUTUALITE B

S.C.P BOYER LESCAT MERLE

Monsieur C

S.C.P CANTALOUBE FERRIEU CERRI GROSSE DELIVREE LE A

COUR D'APPEL DE TOULOUSE REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Arrêt de la Première Chambre, Première Section Prononcé: A l'audience publique du Dix décembre deux mille un, par H. MAS, président, assisté de E. KAIM MARTIN, greffier. C

omposition de la cour lors des débats et du délibéré: Président : H. MAS Assesseurs : J.J. BENSOUSSAN

R. METTAS

M. ZAV...

DU 10 DECEMBRE 2001

ARRET N°574 Répertoire N° 2001/00385 Première Chambre

Première Section

MZ/CD

TGI BORDEAUX

18.12.1995 Monsieur A

S.C.P BOYER LESCAT MERLE C/ MUTUALITE B

S.C.P BOYER LESCAT MERLE

Monsieur C

S.C.P CANTALOUBE FERRIEU CERRI GROSSE DELIVREE LE A

COUR D'APPEL DE TOULOUSE REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Arrêt de la Première Chambre, Première Section Prononcé: A l'audience publique du Dix décembre deux mille un, par H. MAS, président, assisté de E. KAIM MARTIN, greffier. Composition de la cour lors des débats et du délibéré: Président : H. MAS Assesseurs : J.J. BENSOUSSAN

R. METTAS

M. ZAVARO

C. PERRIN Greffier lors des débats: E. KAIM MARTIN Débats: A l'audience publique du 5 Novembre 2001 . La date à laquelle l'arrêt serait rendu a été communiquée.

Avant l'ouverture des débats, les parties ont été informées des noms des magistrats composant la cour. Nature de l'arrêt : contradictoire

DEMANDEUR SUR RENVOI APRES CASSATION

Monsieur A Ayant pour avoué la S.C.P BOYER LESCAT MERLE

Ayant pour avocat Maître CRESCENCE du barreau de Bordeaux DEFENDEURS SUR RENVOI APRES CASSATION MUTUALITE B Ayant pour avoué la S.C.P BOYER LESCAT MERLE

Ayant pour avocat Maître CRESCENCE du barreau de Bordeaux

Monsieur C Ayant pour avoué la S.C.P CANTALOUBE FERRIEU CERRI

Ayant pour avocat Maître BARTHET du barreau de Toulouse

******** EXPOSE DES FAITS, MOYENS ET PRETENTIONS :

M. A, atteint d'une hydrocéphalie, a fait l'objet d'une intervention chirurgicale réalisée par M. C neurochirurgien, consistant à dériver le liquide céphalo-rachidien suivant la technique Lombo-péritonéale. Immédiatement après l'intervention, il présentait une paralysie irréversible des membres inférieurs associée à une incontinence urinaire et anale. Par jugement du 18 décembre 1995, le tribunal de grande instance de Bordeaux, après avoir relevé que M. A avait présenté une paraplégie en rapport avec un infarctus directement lié à l'opération, retenait que l'intervention pratiquée par M.C l'avait été dans le respect des règles inhérentes à l'état des connaissances médicales et qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à celui-ci, la complication opératoire ne pouvant faire l'objet d'une prévention et étant imprévisible. Il déboutait donc M. A de ses demandes. La Cour d'appel de Bordeaux, dans un arrêt du 14 décembre 1998 infirmait cette décision. Elle retenait qu'aucune faute du chirurgien n'était établie, tant en ce qui concerne la pertinence du choix de l'acte chirurgical qu'en ce qui concerne les modalités techniques d'exécution de l'opération. Elle considérait que, dans la mesure où il était acquis que le risque réalisé, cause du dommage subi par le patient ne pouvait être prévu même à titre exceptionnel, aucun manquement au devoir d'informer ne pouvait être retenu à la charge du médecin. Toutefois elle estimait que le médecin était investi à l'égard de son patient d'une obligation contractuelle de sécurité. Elle considérait qu'indépendamment de toute faute prouvée lorsqu'un dommage a été causé au patient, sans relation avec l'échec des soins ou le résultat des investigations et sans rapport connu avec l'évolution prévisible de l'état du patient, mais découlant d'un fait détachable de l'acte médical, sans l'exécution duquel il ne se serait pas produit, la réparation en incombe à l'auteur de l'acte médical incriminé.

Elle condamnait donc M. C à réparer le préjudice subi par M. A.

Par un arrêt du 8 novembre 2000, cette décision était annulée, la Cour de cassation relevant qu'en statuant comme elle l'avait fait alors qu'elle avait constaté la survenance d'un risque accidentel inhérent à l'acte médical et qui ne pouvait être maîtrisé en dehors de toute faute du praticien, la Cour d'appel avait violé les articles 1135 et 1147 du Code civil. M.A a saisi cette Cour de renvoi. Il soutient que M. C a manqué à son obligation de sécurité lorsqu'il a réalisé l'intervention en cause en s'abstenant de faire procéder à un examen radiologique ou un IRM qui aurait permis de constater que M. A présentait un canal lombaire étroit ce qui constituerait un état pathologique potentiel et aurait justifié l'emploi de techniques différentes ou la mise en oeuvre de précautions supplémentaires. Il soutient par ailleurs que le médecin a manqué à son devoir d'information. Il sollicite une nouvelle expertise et, en toute hypothèse la condamnation de M. C à lui payer : - 20.000 Frs au titre de l'ITT, - 800.000 Frs au titre de l'IPP, - 240.000 Frs au titre des souffrances, du préjudice esthétique et du préjudice d'agrément, - 566.800 Frs au titre des frais de séjour en maison de retraite, - 20.000 Frs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. M. C souligne que l'intervention s'étant produite en 1992, son obligation de moyens doit s'apprécier au regard de l'état des connaissances à cette date. Il soutient que l'accident opératoire était imprévisible, que même des investigations complémentaires ne pouvaient révéler des difficultés possibles, ni amener à modifier la technique opératoire. Il affirme que l'intervention était absolument nécessaire, toute autre technique présentant des risques bien plus importants. Il soutient qu'il convient de distinguer le devoir d'informer le malade de son état, que le praticien, apprécie en conscience et de l'informer des risques de complication d'une intervention. Seul un défaut d'intervention sur ce dernier point mettrait en jeu la responsabilité du praticien. Or il soutient qu'en l'espèce le défaut d'information d'un risque imprévisible ne saurait être critiqué. Il conclut donc à la confirmation du jugement du 18 décembre 1995 et sollicite 30.000 Frs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Le rapport d'expertise mentionne que les troubles neurologiques du bassin et des membres inférieurs présentés par M. A réalisent un syndrome du cône médullaire qui a immédiatement suivi l'intervention chirurgicale. Il précise qu'il n'existe aucune séquelle d'hématome et que ces troubles procèdent d'un infarctus, c'est à dire d'un accident vasculaire ischémique du cône médullaire. Cette infarctus est une complication directe de l'intervention, mais elle n'est pas en rapport avec l'étroitesse du canal rachidien ni avec l'arthrose lombaire que présentait M. A. Par ailleurs ces derniers éléments ne constituaient pas une contre indication de dérivation du liquide céphalo rachidien par la voie lombo-péritonéale. Ils ont rendu l'intervention plus difficile, expliquent que plusieurs tentatives de ponctions des espaces sous-arachno diens se sont soldées par un échec et ont, d'une façon générale, compliqué le processus opératoire. Mais il ressort clairement des constatations de l'expert que l'accident vasculaire n'est pas en rapport avec ces propriétés du processus opératoire et que les précautions prises par le médecin au cours de l'opération ou avant celle-ci étaient satisfaisantes, ainsi que l'acte chirurgical lui-même. Par ailleurs même si l'infarctus en cause est une complication directe de l'intervention, il constitue un trouble grave du système circulatoire provoqué par l'agression opératoire, mais sans rapport direct avec les modalités précises de l'intervention pratiquée. L'expert précise que, en l'état actuel de nos connaissances, la constitution de lésions ischémiques secondaires à une lésion artérielle ne peut faire l'objet d'une prévention. Il est donc sans portée de faire grief à M. C d'avoir choisi un mode opératoire plutôt qu'un autre ou de n'avoir pas mesuré par avance la dimension du canal lombaire. Il n'existe aucun élément de nature à établir un manquement de M.C à ses obligations de délivrer des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science. L'appelant invoque un manquement à une obligation de sécurité, mais il rappelle également que cette obligation est limitée à la garantie de produits prothèses ou instruments utilisés, qui ne sont pas en cause en l'espèce. En dehors de ces cas, la responsabilité du praticien est fondée sur un manquement à une obligation de moyens qui n'est pas caractérisée en la cause. L'appelant sollicite subsidiairement une nouvelle mesure d'instruction. Il ne conteste pas les constations de l'expert judiciaire mais en propose une analyse différente au vu de deux revues médicale. Toutefois les indications visées dans ces documents, qui ne sont pas datés, n'apparaissent pas de nature à remettre en cause les développements critiqués. Il convient en conséquence de rejeter cette demande qui n'avait été présentée ni au Tribunal ni à la première Cour d'appel alors même que les données de la science à prendre en considération pour apprécier l'obligation de M. C sont celles qui étaient acquises au jour de l'intervention, il y a près de dix ans. M. C ne rapporte pas la preuve qu'il ait informé son patient du risque particulier de survenance d'un infarctus au titre des complications opératoires possibles. Toutefois il convient de relever que ce risque est exceptionnel et qu'il n'est pas spécifiquement inhérent au type d'intervention pratiqué. Par ailleurs il ne peut être prévenu, ce qui n'ouvre donc comme seul choix que la renonciation à une intervention dont la nécessité est reconnue par tous. Or le fondement de la réparation d'un manquement au devoir d'information est la perte d'une chance d'échapper au risque, par une décision éventuellement plus judicieuse. En l'espèce il apparaît que compte tenu de la nature du risque et de la nécessité d'une intervention aucune autre décision ne pouvait raisonnablement être envisagée, qui aurait écartée le risque encouru. Dans ces conditions il n'existe pas de manquement de M. C à ses obligations susceptible d'ouvrir droit à réparation et il convient de confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions. L'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. PAR CES MOTIFS :

La cour, dit n'y avoir lieu à nouvelle expertise, confirme le jugement déféré, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

condamne M.A aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. LE PRESIDENT ET LE GREFFIER ONT SIGNE LA MINUTE. LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 2001/00385
Date de la décision : 10/12/2001

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin chirurgien - Responsabilité contractuelle - Intervention chirurgicale - Atteinte du patient - Faute du praticien - Exclusion - / JDF

Le médecin chirurgien ne manque pas à ses obligations de délivrer des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science lorsque celui-ci a choisi un mode opératoire n'ayant aucun rapport direct avec l'accident vasculaire du patient


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2001-12-10;2001.00385 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award