ARRET DU 31 OCTOBRE 2000
N° 969
A L'AUDIENCE DU TRENTE ET UN OCTOBRE DEUX MILLE LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE, CHAMBRE D'ACCUSATION, siégeant en CHAMBRE du CONSEIL, a rendu l'arrêt suivant : COMPOSITION DE LA COUR lors des débats, du délibéré et du prononcé de l'arrêt : PRESIDENT : Monsieur BELLEMER ASSESSEURS : Monsieur X... et Madame GIROT, conseillers tous trois désignés conformément à l'article 191 du Code de Procédure Pénale GREFFIER : Madame ROCCHINI MINISTERE PUBLIC : représenté aux débats par Monsieur Y... substitut général et au prononcé de l'arrêt par Monsieur Y... substitut général
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Vu l'information suivie contre,
Monsieur A
des chefs de complicité d'infractions à la législation sur les stupéfiants en tant que propriétaire d'un débit de boissons où se déroule un trafic de résine de cannabis ;
VU l'appel interjeté par le mis en examen le 4 octobre 2000 à l'encontre d'une ordonnance de fermeture pour six mois du bar X rendue le 3 octobre 2000 par le juge d'instruction de TOULOUSE ;
VU la notification de la date de l'audience faite conformément aux dispositions de l'article 197 du Code de Procédure Pénale le 13 octobre 2000 ;
VU le réquisitoire écrit et signé de Monsieur le Procureur Général en date du 16 octobre 2000 ;
VU le mémoire déposé au greffe de la chambre d'accusation par Maître MARTIN, avocat de Monsieur A le 25 octobre 2000 à 15h 15 ;
Pendant le délai prévu par la loi, le dossier de la procédure a été déposé au greffe de la chambre d'accusation et tenu à la disposition des avocats des parties ;
La cause a été appelée à l'audience du 26 Octobre 2000 à laquelle les débats ont eu lieu en Chambre du Conseil;
Monsieur BELLEMER, Président, a fait le rapport,
Maître MARTIN, avocat de Monsieur A
et Monsieur Y... , substitut général ont été entendus en leurs observations sommaires ;
Maître MARTIN, qui a eu la parole en dernier ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience du 31 octobre 2000 ;
Et, ce jour, Trente et Un Octobre Deux Mille, la Chambre d'Accusation, a rendu en Chambre du Conseil, son arrêt comme suit après avoir délibéré conformément à la Loi, hors la présence du Ministère Public et du Greffier.
Vu les articles 706.26. et 706.33. 194. 197. 198. 199. 200. 216 et 217 du Code de Procédure Pénale.
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ATTENDU que, par ordonnance en date du 3 octobre 2000, le juge d'instruction saisi de faits de nature à caractériser notamment des offres ou cessions non autorisées de stupéfiants, a ordonné la fermeture, pour une durée de six mois, d'un bar exploité à TOULOUSE sous l'enseigne X et appartenant à une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée ayant pour gérant Monsieur A ;
ATTENDU que, dans le mémoire déposé et à l'audience, il est soutenu que ce dernier n'a jamais participé aux infractions poursuivies, sur lesquelles il avait appelé dès le mois d'avril 2000 l'attention du parquet ;
Qu'il n'aurait pas assumé les fonctions de gérant au sens de la loi, une autonomie complète ayant été laissée aux personnels présents sur les lieux, et que sa mise en examen, support artificiel de la décision attaquée, ne satisferait pas aux conditions légales, à défaut de charges suffisantes de culpabilité ;
ATTENDU, en droit qu'aux termes de l'article 706-33 du code de procédure pénale, le juge d'instruction, saisi de poursuites engagées pour trafic de stupéfiants, peut interdire, pendant la durée indiquée à ce texte, l'ouverture au public de tout établissement dans lequel ont été commises par l'exploitant ou avec la complicité de celui-ci les infractions visées ;
ATTENDU que ces dispositions n'impliquent pas qu'au moment où il est statué, le responsable identifié ait été mis en examen, la seule condition exigée étant la réunion d'indices graves et concordants d'action, de co-action ou de complicité ;
QUE par ailleurs, la désignation de l'exploitant doit s'entendre de toute personne propriétaire du fonds de commerce ou assurant, par délégation de celle-ci, la gestion, de la direction ou l'administration de l'affaire ;
ATTENDU qu'en l'espèce, il n'est justifié d'aucun transfert d'attributions de nature à décharger Monsieur A de la responsabilité qui lui incombait au regard de l'application de la loi;
Que des éléments probants de la procédure établissent que ce dernier, qui se rendait quotidiennement sur les lieux de l'exploitation et auquel il était régulièrement et exactement rendu compte des modalités et des résultats de l'activité, exerçait effectivement, dans cette entreprise de dimension moyenne (12 employés environ), les pouvoirs attachés à sa qualité de gérant;
ATTENDU, par ailleurs, qu'il ressort de l'information, notamment de nombreuses déclarations précises et convergentes et des constatations des enquêteurs, que, depuis 1998, le bar X servait de cadre à un trafic important de résine de cannabis, dont un des protagonistes a été trouvé en possession de plus de 40 kilos de produits et aurait exporté une somme de l'ordre de 800.000frs provenant de son commerce illicite (cotes du dossier D303, 304, 305) ;
Qu'ainsi tous les principaux fournisseurs ou "grossistes" de la place
Wilson et de ses abords, secteur connu pour être le siège d'une distribution particulièrement développée de stupéfiants, se tenaient en permanence dans le bar, où ils recevaient leurs clients et revendeurs et effectuaient des transferts incessants de drogue et d'argent (D13, 83, 101, 111, 114,116, 118, 119, 166, 167, 169, 175, 179, 180, 190, 201, 207, 208, 209, 226, 227, 304) ;
Qu'à raison de leur importance et de leur fréquence, ces opérations, qui avaient eu pour effet d'évincer la clientèle habituelle de l'établissement, ne pouvaient échapper à l'attention des personnels de service et d'encadrement, dont divers témoignages paraissent révéler qu'ils les toléraient avec complaisance voire même y contribuaient activement par le "rabattage" d'acheteurs potentiels, faveurs récompensées par des cessions gratuites de haschich, outre des consommations importantes de boissons (D 116, 118, 166, 169, 175, 180, 207, 209, 226, 304) ;
QU'il est avéré et expressément reconnu par les intéressés que Monsieur A comme Monsieur B employé en qualité de directeur de salle, étaient complètement informés de cette situation, tant par les signalements de leurs employés et clients que par leurs constatations personnelles (D 101, 119, 167, 169, 207, 208, 229, 304,) ;
QUE l'intéressé et son proche collaborateur, responsables des conditions d'exploitation de leur commerce, ne démontrent pas qu'ils ne pouvaient mettre fin à des pratiques dénoncées depuis plus d'un an, alors qu'aucune mesure autre que de simples recommandations de discrétion n'a été mise en oeuvre à l'égard des personnes impliquées, en particulier certains employés, et que le personnel chargé du service du soir comme les responsables d'établissements voisins
auraient réussi à éviter pour leur part tout désordre grave, (D 116) ;
QUE la lettre adressée au Parquet par Monsieur A le 3 mai 2000 faisait essentiellement état de comportements "incorrects", de "disputes" et de l'utilisation occasionnelle d'armes à feu et de couteaux mettant en danger la clientèle et le personnel, avec une simple allusion à un commerce possible de "matières illicites" sans indications précises ;
QUE dans une déposition recueillie le 23 mai et également inspirée par une volonté d'apaisement, Monsieur B confirmait que des perturbateurs venaient importuner la clientèle et les serveurs par des insultes et des menaces, provoquant des altercations et des dégradations matérielles à l'origine d'un absentéisme des employés, et faisant "leur commerce" au sein de l'établissement, et sollicitait "la coopération des services de police, afin que cesse ce climat" ;
QU'il n'est pas contesté que le trafic durait alors depuis plusieurs mois et qu'il s'est poursuivi ultérieurement, sans autre réaction, même après les premières interpellations effectuées au mois d'août et au début de septembre 2000, ainsi qu'en font foi notamment les surveillances organisées par la police ;
QUE, sans méconnaître une alerte donnée tardivement et en rapport avec la crainte de débordements préjudiciables à la conservation du fonds, c'est au vu de considérations pertinentes que les intéressés sont soupçonnés d'avoir mis les lieux de leur commerce à la disposition des trafiquants et favorisé leurs activités répréhensibles, se rendant ainsi coupables de complicité ;
QUE, dans ces conditions, la fermeture de l'établissement a pu se révéler nécessaire pour éviter le renouvellement des infractions et préserver l'ordre public du trouble occasionné, en sorte que la décision attaquée apparaît justifiée, tant dans son principe que pour la durée indiquée, et doit être, en conséquence, confirmée ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Déclare recevable, en la forme, l'appel interjeté;
Au fond, le dit injustifié et confirme, en toutes ses dispositions, l'ordonnance attaquée ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour d'Appel de TOULOUSE, Chambre d'Accusation, en son audience en Chambre du Conseil, tenue au Palais de Justice de ladite ville les jour, mois et an sus-dits.
Le présent arrêt est signé par le Président et le Greffier
LE GREFFIER:
LE PRESIDENT: Le Greffier certifie que le dispositif du présent arrêt a été porté à la connaissance des parties et de leurs avocats
conformément aux dispositions de l'article 217 du Code de Procédure Pénale (récépissés joints au dossier).
LE GREFFIER: