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05/09/2000 | FRANCE | N°2000/00180

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 05 septembre 2000, 2000/00180


ARRET DU 5 Septembre 2000

N°808

A L'AUDIENCE DU CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE, CHAMBRE D'ACCUSATION, siégeant en CHAMBRE du CONSEIL, a rendu l'arrêt suivant : COMPOSITION DE LA COUR lors des débats, du délibéré et du prononcé de l'arrêt : PRESIDENT : Monsieur BELLEMER ASSESSEURS : Monsieur Y... et Madame GIROT, conseillers tous trois désignés conformément à l'article 191 du Code de Procédure Pénale GREFFIER : Madame DURAND MINISTERE PUBLIC : représenté aux débats par Monsieur Z... substitut général et au prononcé de l'arrêt par Mons

ieur Z... substitut général

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Vu l'information suivie contre,

Mons...

ARRET DU 5 Septembre 2000

N°808

A L'AUDIENCE DU CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE, CHAMBRE D'ACCUSATION, siégeant en CHAMBRE du CONSEIL, a rendu l'arrêt suivant : COMPOSITION DE LA COUR lors des débats, du délibéré et du prononcé de l'arrêt : PRESIDENT : Monsieur BELLEMER ASSESSEURS : Monsieur Y... et Madame GIROT, conseillers tous trois désignés conformément à l'article 191 du Code de Procédure Pénale GREFFIER : Madame DURAND MINISTERE PUBLIC : représenté aux débats par Monsieur Z... substitut général et au prononcé de l'arrêt par Monsieur Z... substitut général

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Vu l'information suivie contre,

Monsieur A des chefs d'infractions à la législation sur les installations classées - infraction à la législation sur l'élimination des déchets - pollution des eaux ; sur plainte avec constitution de partie civile de

COMMUNE B

VU les appels interjetés par la partie civile le 28 décembre 1999 à l'encontre de deux ordonnances - une de non-lieu et une de publication de non-lieu - rendues le 17 décembre 1999 par le juge d'instruction de FOIX ;

VU le réquisitoire écrit et signé de Monsieur le Procureur Général en date du 22 février 2000

VU la notification de la date de l'audience faite conformément aux

dispositions de l'article 197 du Code de Procédure Pénale le 25 février 2000

VU le mémoire déposé au greffe de la chambre d'accusation par Maître HUGLO-LEPAGE, avocat de la partie civile le 10 mars 2000 à 14 heures ;

Vu le mémoire déposé au greffe de la chambre d'accusation par Maître DOMENACH, avocat de Monsieur A le 14 mars 2000 à 12h 46 ;

La cause a été appelée à l'audience du 16 Mars 2000 à laquelle les débats ont eu lieu en Chambre du Conseil;

La Chambre d'Accusation a ordonné la comparution des parties conformément aux dispositions de l'article 199 du Code de Procédure Pénale,

Monsieur A , préfet de l'Ariège d'une part,

Mme A... de la commune B, d'autre part, ont assisté à l'audience,

Monsieur BELLEMER, Président, a fait le rapport,

Maître X... (SCP HUGO LEPAGE) du barreau de Paris, avocat de la partie civile ;

Maître DOMENACH, du barreau de PARIS, avocat de Monsieur A ,

Monsieur Z... , substitut général ont été entendus en leurs

observations sommaires ;

Maître X... ayant eu la parole en dernier,

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience du 22 juin 2000 prorogé à l'audience du 5 Septembre 2OOO, Et, ce jour, Cinq Septembre Deux Mille, la Chambre d'Accusation, a rendu en Chambre du Conseil, son arrêt comme suit après avoir délibéré conformément à la Loi, hors la présence du Ministère Public et du Greffier.

Vu les articles 177. 183. 186. 194. 197. 198. 199. 200. 216 et 217 du Code de Procédure Pénale.

Attendu que par lettre du 29 septembre 1998, la commune B (Ariège) représentée par son maire a déposé plainte avec constitution de partie civile entre les mains du doyen des juges d'instruction de Foix des chefs des délits d'exploitation d'installation classée sans autorisation, pollution d'un site vierge par des déchets et pollution des eaux par abandon de déchets, commis à l'occasion de la mise en exploitation par voie de réquisition préfectorale d'un centre d'enfouissement technique départemental provisoire sur son territoire;

que, formée contre X suivant son libellé, la plainte visait explicitement le préfet du département de l'Ariège ainsi que le syndicat mixte d'études, collecte et traitement des ordures ménagères (SMECTOM), syndicat intercommunal;

Attendu que par une ordonnance en date du 17 décembre 1999 conforme aux réquisitions du Ministère Public , le Juge d'Instruction de Foix a dit n'y avoir lieu à suivre;

que par une ordonnance séparée en date du même jour, le juge d'instruction a ordonné la publication intégrale de la décision de non-lieu dans la Dépêche du Midi, édition de l'Ariège, le Journal de l'Ariège, la Gazette de l'Ariège et la Croix du Midi, édition de l'Ariège;

Attendu que par déclarations faites au greffe du Tribunal de Grande Instance de Foix le 28 décembre 1999, le conseil de la commune B a interjeté appel de ces deux décisions, notifiées le 20 décembre;

Attendu qu'aux termes de ses deux mémoires régulièrement déposés, la commune B conclut à la réformation des ordonnances déférées et à l'organisation d'un supplément d'information;

Attendu que le Ministère Public requiert confirmation de la décision déférée.

Attendu que Monsieur A conclut à titre principal à l'irrecevabilité de l'appel, au rejet de la demande de supplément d'information et à la confirmation de la décision entreprise; MOTIFS DE LA DECISION

Attendu, sur la recevabilité des appels, interjetés le 28 décembre 1999 par le maire de la commune avant que le conseil municipal en ait spécialement délibéré le 30 décembre 1999, qu'aux termes de l'article L.2132-1 du code des communes, le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune;

Attendu cependant qu'il résulte des dispositions de l'article L.2132-3 du code des collectivités territoriales que le maire peut toujours, sans autorisation préalable du conseil municipal, faire tous actes conservatoires ou interruptifs des déchéances;

que l'exercice du droit d'appel dans les brefs délais légaux impartis entre bien dans les actes de cette nature, et que l'approbation apportée par la délibération postérieure du conseil municipal régularise la déclaration de l'appel et l'instance ultérieure;

Attendu que l'appel a été interjeté dans le délai de 10 jours de la notification, tel qu'il est prévu à l'article 186 du Code de Procédure Pénale et satisfait aux conditions de forme requises,

Attendu qu'il n'est pas utilement discuté que la commune soit recevable à se prétendre lésée par les infractions d'exploitation sans autorisation d'un établissement classé et de pollutions dénoncées comme portant atteinte à l'intégrité de son territoire, et que son action soit en conséquence recevable, notamment sur le fondement des dispositions des articles 26-1 de la loi du 19 juillet 1976 et 4-2 de la loi du 15 juillet 1975;

Attendu, sur le délit d'exploitation d'une installation classée sans autorisation, que l'article 18 de la loi du 19 juillet 1976 incrimine quiconque exploite une installation sans l'autorisation requise;

que selon l'article 22-4, les personnes morales peuvent être déclarées responsables de cette infraction dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal;

Attendu qu'il résulte de l'article 18 précité que seul le SMECTOM, personne publique, pourrait voir sa responsabilité pénale engagée du

chef de l'infraction d'exploitation d'une installation sans l'autorisation requise;

que la responsabilité pénale du préfet, qui n'exploite pas, ne pourrait être retenue que dans le cadre d'une complicité par ordre ou abus d'autorité ou de pouvoir au sens de l'article 121-7 alinéa 2 du code pénal;

Attendu que pour être poursuivie, la complicité exige l'existence d'un fait principal punissable, indépendamment de la culpabilité de l'auteur principal;

qu'au regard des dispositions de l'article 122-4 du code pénal, n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l'autorité légitime sauf si cet acte est manifestement illégal et qu'en l'occurrence, la responsabilité pénale du préfet, autorité légitime, ne pourrait être envisagée que si les actes commis par celui-ci étaient manifestement illégaux.

Attendu que la qualification, pour être applicable aux faits de l'espèce, supposerait donc que les réquisitions établies par le préfet et adressées au SMECTOM qui les a exécutées d'une part constituaient un tel abus d'autorité ou de pouvoir, et d'autre part que l'acte commandé, c'est-à-dire l'exploitation du centre d'enfouissement, caractérisait une illégalité manifeste, ce qui en l'occurrence revient à l'illégalité manifeste des réquisitions successives;

que l'incrimination impose dès lors une appréciation de la légalité des arrêtés préfectoraux, tout au moins dans la perspective de l'acception particulière des deux incriminations considérées;

qu'en application des dispositions de l'article 111-5 du code pénal, les juridictions pénales sont compétentes pour apprécier la légalité

des actes administratifs dès lors que de cet examen dépend la solution du procès pénal, ce qui est bien le cas d'espèce;

Attendu qu'aux termes de sa plainte et de ses mémoires, la partie civile fait valoir:

- que l'élément matériel de l'infraction résiderait dans la circonstance que les arrêtés ont été renouvelés et exécutés au mépris des sursis à exécution ordonnés à deux reprises par le juge administratif;

- que l'élément moral de l'infraction résiderait dans la conscience qu'avaient le préfet et le SMECTOM d'une part de violer l'autorité de la chose jugée, d'autre part de méconnaître les prescriptions légales requises pour la délivrance d'une autorisation d'exploitation d'une installation classée;

Attendu que l'existence et l'étendue du pouvoir de réquisition du préfet considéré isolément ne font pas l'objet de discussion;

Attendu, sur la violation des décisions de justice exécutoires, que l'examen de l'enchaînement chronologique des arrêtés préfectoraux, des décisions de justice rendues, et de l'exploitation concrète du site font apparaître que le préfet a constamment corrigé son action afin de la rendre conforme aux exigences sanctionnées par la juridiction administrative:

- décision en date du 2 avril 1998 portant sursis à l'exécution de l'arrêté du 16 février: interruption des travaux d'installation du premier casier, réalisation de l'étude d'impact dont l'absence avait motivé la décision de sursis, puis arrêté du 22 avril 1998 portant à nouveau réquisition; commencement d'exploitation du site le 13 mai 1998 par les premiers dépôts de déchets;

- décision en date du 4 juin 1998 portant sursis à exécution de cet arrêté du 13 mai au motif de l'absence d'enquête publique ; suspension de l'exploitation; arrêté du 8 juin portant d'une part mise en demeure du SMECTOM de déposer un dossier conforme de demande d'autorisation d'exploitation du site afin de mettre en mouvement la procédure d'enquête publique, et d'autre part nouvelle réquisition d'exploitation; reprise de l'exploitation, puis dépôt du dossier le 30 juin, dans le délai prescrit; décision en date du 23 octobre rejetant la demande de sursis à exécution de ce dernier arrêté en considération des impératifs de salubrité publique;

Attendu que le préfet a licitement la possibilité de reprendre un arrêté sur le même objet que celui contesté en justice en redressant l'irrégularité constatée sur ce dernier, sans que l'invalidation du premier soit susceptible d'entraîner nécessairement celle du second; qu'il en résulte que l'illégalité qui serait résultée de la violation de la chose jugée n'est pas caractérisée pour ce qui concerne les arrêtés des 22 avril et 8 juin 1998;

Attendu, sur la méconnaissance des prescriptions légales requises pour la délivrance d'une autorisation d'exploitation d'une installation classée, que, selon les articles 1er, 3 et 5 de la loi du 19 juillet 1976 et 2 de la loi du 10 juillet 1976, l'autorisation d'exploiter des installations qui peuvent présenter de graves dangers ou inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments, est délivrée par le préfet du département d'implantation, qui ne peut l'accorder qu'après

étude d'impact et enquête publique, et seulement si les dangers ou inconvénients encourus peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral;

qu'il est constant que les règles de procédure que constituent l'étude d'impact et l'enquête publique n'ont pas été respectées, l'une et l'autre lors de la signature de l'arrêté de réquisition du 16 février 1998, la seconde seule lors de la signature des arrêtés des 22 avril et 8 juin 1998;

Attendu que la circonstance que le préfet ait en l'espèce agi par voie de réquisition et non d'autorisation ne modifie pas l'appréciation des faits sur le plan juridique;

qu'en effet, la mise en oeuvre des pouvoirs de police générale invoqués en l'espèce par le préfet ne peut tendre à éviter une formalité substantielle imposée par une réglementation spéciale, même dans le cas où comme en l'espèce, la même autorité est détentrice des deux pouvoirs de police, par voie de substitution légale pour l'un d'eux;

que, réserve faite du péril imminent, la violation de règles substantielles de procédure est bien de nature à entraîner l'illégalité de la décision;

Attendu toutefois qu'il résulte des éléments de l'information et n'est pas discuté que les arrêtés pris par le préfet de l'Ariège à compter du 16 février 1998 sont intervenus dans le contexte d'une situation de blocage complet de 'organisation du traitement des déchets au niveau de la zone la plus peuplée du département, et après que le représentant de l'Etat ait réuni d'urgence les élus locaux concernés, sans qu'il se dégage aucune issue;

que ce blocage est apparu à la fin de l'année 1997, malgré l'adoption

l'année précédente d'un plan départemental d'élimination des déchets, à raison de l'échec du projet qui y avait été retenu, de l'épuisement complet des sites d'enfouissement existants, et des importants dangers que présentaient, pour la protection de l'environnement, la poursuite de l'exploitation de ces derniers;

Attendu qu'il n'est pas discuté que le temps matériel pour tout à la fois susciter un projet déterminé, mener à terme sur celui-ci la procédure d'étude d'impact et d'enquête publique, puis construire un centre d'enfouissement adapté aux moyens actuels, laissait sans solution une période d'une durée importante, de l'ordre d'une année; que ce temps permettait encore moins d'envisager et réaliser une solution plus élaborée assurant un traitement complet des déchets avant enfouissement conforme aux voeux du législateur en la matière; Attendu que la commune B, qui se borne à l'affirmer sans argumenter sérieusement, ne démontre pas que le préfet aurait eu à sa disposition une autre solution provisoire réellement utile, solution qui ne se distingue pas en l'état des éléments documentés de l'information;

qu'à cet égard, la circonstance que la mise en balle des déchets ou l'utilisation du site de Saint-Quentin aient pu être pratiquées dans l'intervalle de l'exploitation des premier et second casiers de Berbiac n'est pas utile au moyen dès lors qu'au mois de février 1998, le préfet n'avait aucune solution suffisamment proche en perspective, ce qui n'est nécessairement pas le cas de la situation rencontrée avant la mise en exploitation du second casier de Berbiac un an plus tard, les dispositions provisoires ne se concevant, et surtout comme

en l'espèce celles présentant des risques, que relativement à leur durée prévisible et dans la perspective d'une solution à plus long terme réellement envisageable;

Attendu que les périodes d'interruption des opérations d'enfouissage constatées entre l'épuisement des centres précédemment exploités et la mise en service de celui de Berbiac ont démontré, s'il en était besoin, la certitude des atteintes à la salubrité et la santé publique ainsi qu'à l'environnement résultant de l'interruption de ce service public, et la gravité des risques résultant de sa prolongation (cf rapport de l'inspecteur des installations classées en date du 6 mai 1998);

Attendu qu'il en résulte que la situation de fait rencontrée caractérisait bien un cas d'urgence et qu'en outre elle faisait apparaître un péril imminent dans un domaine, celui de la salubrité publique, qui concerne l'exercice de la police générale;

Attendu que la partie appelante n'allègue pas utilement une carence antérieure du représentant de l'Etat qu'elle n'argumente pas précisément, et ne s'explique pas sur celle des communes elles-mêmes qui ont la charge d'assurer la collecte et l'élimination des déchets, précision ici faite que, fût-ce indirectement, la commune B est cliente du SMECTOM;

qu'au demeurant, cette carence ne saurait être imputée à Monsieur A personnellement, puisqu'installé en qualité de préfet de l'Ariège le 27 octobre 1997;

qu'il apparaît que M A a accompli toutes les diligences qui étaient possibles pour trouver d'autres solutions tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du département et limiter l'interruption du service

public en obtenant une ultime prolongation de trois mois, expirant le 31 mars 1998, d'un des centres d'enfouissement;

Attendu enfin qu'il est constant que le site de Berbiac choisi par le préfet était le premier en rang des sites identifiés par le plan départemental d'élimination des déchets adopté en 1996, après étude d'impact et enquête publique à l'époque, pour son aptitude à recevoir une décharge, bien que dans des conditions d'exploitation différentes; que dans ses arrêtés successifs le préfet a énoncé de nombreuses prescriptions auxquelles le SMECTOM devait se conformer, qui ne font pas l'objet de discussion de la part de la plaignante et qui étaient bien destinées à préserver de façon précise et adaptée les intérêts dont le législateur exige la prise en considération dans le cadre des législations spéciales invoquées dans la plainte, toutes exigences qui sont reprises par la législation sur les installations classées;

que dès lors, le principe de précaution énoncé par l'article L.200-1 du code rural n'est pas mis en cause par ces décisions;

Attendu qu'il n'est pas indifférent d'observer ici que le déroulement complet de la procédure a abouti ultérieurement à une validation des choix anticipés et imposés par le préfet dans les conditions contestées ;

Attendu que l'ensemble de ces éléments de fait font apparaître que les décisions critiquées ont été prises par le représentant de l'Etat dans une situation de nature à caractériser une urgence et un péril imminent réels, rendant de fait impossible, pour y parer utilement, l'observation des règles substantielles de procédure, et que les mesures prises ont été proportionnées à ces circonstances et adaptées

aux exigences légales de fond;

que c'est à tort qu'il est fait grief au préfet d'un acharnement frauduleux alors qu'il n'a fait que redresser son action, qu'il maintenait, pour réintégrer l'opération urgente dans les règles normales de procédure;

Attendu que l'ensemble de ces éléments de fait et de droit sont insusceptibles de caractériser à la charge de Monsieur A un ordre illégal ou un abus d'autorité ou de pouvoir au sens de l'article 121-7 alinéa 2 du code pénal;

que le SMECTOM, qui a exécuté les commandements résultant des trois réquisitions préfectorales examinées, ne se trouvait pas dans la situation de l'exécution d'actes manifestement illégaux;

Attendu, sur le délit de pollution d'un site vierge par des déchets, que selon la plainte et les mémoires, les commentaires de M.BENOIT, expert, ainsi que les constatations de l'expert pressenti par le juge d'instruction et du bureau d'études ANTEA mettraient en évidence le caractère nocif pour le sol, la dégradation du site et la pollution des eaux engendrées par l'exploitation du CET, sans que l'élimination soit prise en charge ni l'absence de pollution démontrée;

Attendu que l'article 24, 3 bis, de la loi du 15 juillet 1975 incrimine toute personne qui aura abandonné, déposé ou fait déposer, dans des conditions contraires à la présente loi, des déchets appartenant aux catégories visées à l'article 8, c'est-à-dire celles définies par décret comme pouvant, soit en l'état soit lors de leur élimination, causer des nuisances telles que celles mentionnées à l'article 2, à savoir des effets nocifs sur le sol, la flore et la faune, la dégradation des sites ou des paysages, la pollution de

l'air ou des eaux, l'émission de bruits ou d'odeurs et, d'une façon générale une atteinte à la santé de l'homme et à 'environnement;

que, selon 'article 7 de ladite loi, les installations d'élimination des déchets sont soumises, quel qu'en soit l'exploitant, à la loi du 19 juillet 1976 sur les installations classées;

que cette loi du 19 juillet 1976 fait également référence aux termes de son article 4-1, aux objectifs et mesures imposées par la loi du 15 juillet 1975;

Attendu qu'en l'occurrence où n'est relevé par la plaignante que le caractère nocif du dépôt et le défaut de preuve de l'absence de pollution, le délit n'a pas de consistance matérielle distincte de celui d'exploitation dä'une installation classée sans autorisation;

que l'exigence spécifique d'élimination des déchets telle qu'elle est définie par les dispositions de l'article 2 alinéa 2 de la loi du 15 juillet 1975, dont aucune violation précise n'est du reste caractérisée, outre qu'elle relève d'une impossibilité précédemment indiquée, est de plus à mettre en relation avec les dispositions de l'article 2-1 alinéa 2 selon lesquelles ce n'est qu'à compter du 1er juillet 2002 que les installations d'élimination des déchets ne seront autorisées à accueillir que des déchets ultimes, c'est-à-dire les déchets, résultant ou non d'un traitement, qui ne sont plus susceptibles d'être traités dans les conditions techniques et économiques du moment, notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de leur caractère polluant ou dangereux; Attendu, sur le délit de pollution des eaux par abandon de déchets, que selon la plainte et les mémoires:

- la pollution des eaux par les quantités importantes de déchets

abandonnés sur le site de BERBIAC résulterait des conclusions des experts précédemment cités,

- tant le SMECTOM que, sur le fondement des dispositions des articles 121-3 du code pénal et 11bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le préfet lui-même, faute d'avoir accompli les diligences normales compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait, même au regard des missions que la loi lui confie, seraient pénalement responsables;

Attendu d'une part que le dépôt de déchets en tant qu'activité systématisée est de nature à entrer dans les installations soumises à autorisation ou déclaration au sens de l'article 10 paragraphe III de la loi du 3 janvier 1992 comme susceptible ou non de porter atteinte gravement à la qualité du milieu aquatique ou soumis au respect des prescriptions de l'article 8 tendant à réglementer les dépôts de matière et généralement tout fait susceptible d'altérer la qualité des eaux et du milieu aquatique;

qu'à ce titre, l'infraction, qui est celle prévue à l'article 23 de la loi du 3 janvier 1992 incriminant l'exploitation sans autorisation, non visée par la plainte quoique juridiquement plus adaptée aux faits de la cause, n'a pas non plus de consistance matérielle différente de l'infraction d'exploitation d'une installation classée;

Attendu d'autre part que l'article 22 de la loi du 3 janvier 1992, visé par la plainte, incrimine quiconque aura jeté, déversé ou laissé s'écouler dans les eaux superficielles, souterraines, directement ou indirectement, une ou des substances quelconques dont l'action ou les réactions ont, même provisoirement, entraîné des effets nuisibles sur

la santé ou des dommages à la flore ou à la faune, précision faite que lorsque l'opération de rejet aura été autorisée par arrêté, l'incrimination n'est applicable que si les prescriptions de cet arrêté n'ont pas été respectées;

Attendu qu'aucun des effets nuisibles spécialement et limitativement énumérés par cette loi n'a été constaté;

que de tels effets nuisibles ne paraîssent pas non plus pouvoir être constatés faute de la moindre observation susceptible d'orienter valablement des investigations , et que la demande de complément d'information présentée par l'appelante et qui n'est pas autrement et précisément argumentée, quand elle ne l'est pas de façon purement hypothétique, ne peut être admise;

Attendu qu'en l'état, ce qui est articulé par la plainte et peut être constaté comme effets nocifs n'a pas d'autre consistance qu'un risque indéfini et non déterminable à un terme concret, risque dont l'existence est précisément le fondement des législations invoquées, et dont l'objectif est sa prévention;

que l'invocation de l'existence du risque, voire même de sa réalisation en l'état seulement possible ou éventuelle, n'est par conséquent pas de nature à déterminer l'existence d'une infraction, alors que la loi permet l'acte générateur sous condition de l'existence d'une autorisation administrative fondée sur la possibilité de définir des moyens propres à prévenir ce risque, et de la mise en oeuvre effective de ceux-ci;

Attendu que les éléments de l'espèce, tant au niveau du choix du site, identifié en premier rang dans le plan départemental d'élimination des déchets, que dans la définition par le premier

arrêté préfectoral des mesures de prévention à mettre en oeuvre, font apparaître que le préfet a satisfait aux exigences de fond de cette législation, comme d'ailleurs de celles des deux autres invoquées, toutes en fait nécessairement convergentes, et du reste coordonnées; que de même, les éléments d'expertises privées mis en avant par la commune plaignante, abstraction faite du caractère excessif voire même partisan de certains (divers éléments des rapports de M.BENOIT), d'autre part leur caractère incomplet et à ce titre peu significatif (rapport ANTEA qui souligne avec objectivité son caractère unilatéral, et plus encore les premières constatations faite par l'expert pressenti par le juge d'instruction dans la seule perspective d'une définition des opérations à envisager pour en chiffrer le coût) ne font pas apparaître plus que d'éventuelles imperfections matérielles de la réalisation de ces mesures de prévention, en liaison notamment avec la précipitation dans laquelle l'opérateur s'est trouvé contraint d'agir pour diverses raisons (urgence sanitaire de la situation, multiples interruptions des travaux);

Attendu qu'à la supposer démontrée, la réalisation de ces risques revêtirait un caractère involontaire;

qu'aux termes de l'article 121-3 du code pénal, il n'y a point de délit sans intention de le commettre, et que s' il y a délit, et lorsque la loi le prévoit, en cas d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou les règlements l'auteur des faits est exonéré de toute responsabilité dès lors qu'il a accompli les diligences normales, compte tenu de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait;

que selon l'article 11 bis A de la loi 83-634 du 13 juillet 1983, les fonctionnaires ne peuvent être condamnés sur le fondement de l'article 121-3 du code pénal pour des faits non intentionnels commis dans l'exercice de leurs fonctions que s'il est établi qu'ils n'ont pas accompli les diligences normales compte tenu de leurs compétences, du pouvoir et des moyens dont ils disposaient ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi leur confie;

Attendu que les circonstances précédemment analysées, les situations de carence et d'urgence constatées, conduiraient à retenir que tant le préfet que le SMECTOM ont accompli les diligences normales, compte tenu des moyens dont ils disposaient, ainsi que, pour le préfet, des difficultés propres à ses missions;

Attendu en conséquence qu'aucun élément constitutif d'infraction pénale n'existe à la charge de quiconque, de sorte que la décision de non-lieu, qui n'est pas utilement critiquée, doit être confirmée;

Attendu que la décision de publication, qui n'est pas en elle-même discutée et dont la Cour adopte les motifs, doit également être confirmée;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, En la forme, déclare l'appel recevable; Au fond, confirme les ordonnances dont appel.

Ainsi jugé et prononcé par la Cour d'Appel de TOULOUSE, Chambre d'Accusation, en son audience en Chambre du Conseil, tenue au Palais de Justice de ladite ville les jour, mois et an sus-dits.

Le présent arrêt est signé par le Président et le Greffier

LE GREFFIER:

LE PRESIDENT: Le Greffier certifie que le dispositif du présent arrêt a été porté à la connaissance des parties et de leurs avocats conformément aux dispositions de l'article 217 du Code de Procédure Pénale (récépissés joints au dossier).

LE GREFFIER:


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 2000/00180
Date de la décision : 05/09/2000

Analyses

RESPONSABILITE PENALE - Causes d'irresponsabilité ou d'atténuation - Ordre de la loi et commandement de l'autorité légitime

La responsabilité pénale de l'auteur principal qui, sur réquisition, exécute l'acte punissable, commandé par le préfet, autorité légitime, n'est engagée que dès lors que l'acte serait manifestement illégal selon l'article 122-4 du Code pénal, la responsabilité pénale du préfet étant susceptible d'être engagée au titre d'une complicité par abus d'autorité ou de pouvoir au terme de l'article 121-7, alinéa 2, du Code pénal. L'appréciation de l'illégalité manifeste de l'acte commandé, comme de l'existence d'un abus d'autorité ou de pouvoir, impose une appréciation de la légalité des arrêtés préfectoraux de réquisition, actes administratifs, que les juridictions pénales sont compétentes pour apprécier dès lors que de cet examen dépend bien la solution du procès pénal en vertu de l'article 111-5 du Code pénal


Références :

Code pénal, articles 111-5, 121-7, alinéa 2, 122-4

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2000-09-05;2000.00180 ?
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