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27/07/2000 | FRANCE | N°1999/01381

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 27 juillet 2000, 1999/01381


DU 27 juillet 2OOO ARRET N° Répertoire N° 1999/01381 Première Chambre Première Section HM/EKM 12/02/1999 TGI CASTRES ( C. CONSIGNY) M. A Me CHATEAU Mme A Me CHATEAU C / M. B Me DE LAMY SARL C S.C.P SOREL DESSART SOREL CONFIRMATION GROSSE DELIVREE LE A COUR D'APPEL DE TOULOUSE REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Arrêt de la Première Chambre, Première Section Prononcé: A l'audience publique du vingt sept juillet deux mille, par H. MAS, président, assisté de E. KAIM-MARTIN, greffier. Composition de la cour lors des débats et du délibéré: Président :

H. MA

S Conseillers :

R. METTAS

M. ZAVARO Greffier lors des débats: E. KAIM-MA...

DU 27 juillet 2OOO ARRET N° Répertoire N° 1999/01381 Première Chambre Première Section HM/EKM 12/02/1999 TGI CASTRES ( C. CONSIGNY) M. A Me CHATEAU Mme A Me CHATEAU C / M. B Me DE LAMY SARL C S.C.P SOREL DESSART SOREL CONFIRMATION GROSSE DELIVREE LE A COUR D'APPEL DE TOULOUSE REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Arrêt de la Première Chambre, Première Section Prononcé: A l'audience publique du vingt sept juillet deux mille, par H. MAS, président, assisté de E. KAIM-MARTIN, greffier. Composition de la cour lors des débats et du délibéré: Président :

H. MAS Conseillers :

R. METTAS

M. ZAVARO Greffier lors des débats: E. KAIM-MARTIN Débats: A l'audience publique du 19 Juin 2000. La date à laquelle l'arrêt serait rendu a été communiquée. Avant l'ouverture des débats, les parties ont été informées des noms des magistrats composant la cour. Nature de l'arrêt : contradictoire APPELANTS Monsieur et madame A Ayant pour avoué Maître CHATEAU Ayant pour avocat Maître WEIL du barreau de Paris INTIMES Monsieur B Ayant pour avoué Maître DE LAMY Ayant pour avocat la SCP SALVAIRE, VEAUTE, ARNAUD-LAUR, du barreau de Castres SARL C Ayant pour avoué la S.C.P SOREL DESSART SOREL Ayant pour avocat Maître BOUYSSOU Pierre du barreau de Castres

*********

FAITS ET PROCEDURE :

Le 15 juillet 1997, M. Gilles B d'une part, Monsieur A et son épouse citoyens allemands, d'autre part, ont signé un acte intitulé "vente d'immeuble sous conditions suspensives sans recours à un prêt" concernant une propriété agricole avec maisons, dépendances et terrain sise à MASSAGUEL pour le prix de 1.340.000 francs dont

134.000 francs payables à titre d'acompte entre les mains de M. C , négociateur de la vente, que les parties ont choisi comme séquestre. L'acte authentique de vente devait être régularisé au plus tard le 14 octobre 1997.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 septembre 1997, les époux A ont indiqué qu'ils renonçaient à la vente faute d'avoir obtenu un concours bancaire pour le financement.

Les époux A ayant maintenu leur refus malgrè la demande de M. B exposant qu'ils avaient dans l'acte du 15 juillet 1997 expressément renoncé à se prévaloir de la condition suspensive relative l'obtention d'un prêt qu'ils n'envisageaient pas de solliciter, M.B. les a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Castres pour que soit constatée la résolution du compromis et que lui soit allouée la somme de 134.000 francs correspondant au dépôt de garantie, 100.000 francs à titre de dommages-intérêts complémentaires et 10.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société C est intervenue volontairement aux débats pour obtenir la condamnation des époux A à lui payer la somme de 110.000 francs avec intérêts, anatocisme compter du 14 octobre 1997 ainsi que 10.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et le droit de prélever les sommes sur celle consignée entre ses mains, en faisant valoir que l'indemnité susvisée était prévue au contrat en cas de résiliation du contrat à titre de dommages-intérêts forfaitaires.

Les époux A ont conclu au rejet en soutenant que ne comprenant pas le Français ils n'avaient pu valablement renoncer par la mention figurant au compromis à la condition suspensive relative l'obtention d'un prêt qu'ils ont sollicité sans succès.

Ils ont reconventionnellement sollicité la restitution de la somme séquestrée et 20.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en précisant que le compromis de vente étant résilié de plein droit par l'effet de la loi, la clause indemnitaire prévue audit compromis ne peut trouver application.

Ils ont en outre demandé la condamnation de l'agent immobilier à payer 110.000 francs à titre de dommages-intérêts et demande la garantie de la SARL C pour le cas où ils seraient condamnés.

Par jugement du 12 février 1999 auquel le présent se réfère pour plus ample exposé des faits et moyens des parties, le tribunal de grande instance de Castres a : - prononcé le résolution de la vente conclue par l'acte du 15 juillet 1997, - condamné les époux A à payer à M.B. 134.000 francs avec intérêts à compter du jugement et 5.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - ordonné la remise de la somme de 134.000 francs à M.B. par la SARL C , - condamné les époux A à payer à la SARL C 110.000 francs avec les intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 1997 à titre de dommages-intérêts et capitalisation conformément à l'article 1154 du code civil et 5.000 francs à titre de dommages-intérêts avec exécution provisoire, sauf pour les sommes allouées en application de l'article 7OO du nouveau code de procédure civile.

Les époux A ont régulièrement fait appel de cette décision.

Dans leurs dernières écritures au fond en date du 25 avril 2000, ils concluent à la réformation complète de la décision déférée et demandent à la cour de rejeter les demandes de M.B. et de la SARL C ; de dire qu'ils sont en droit de se prévaloir du défaut d'obtention d'un prêt bancaire et de la non réalisation consécutive de la vente, et de condamner solidairement M.B. et la SARL C à leur payer la somme de 134.000 francs augmentée des intérêts à compter du 1er octobre 1997.

Ils demandent subsidiairement à la cour dans l'hypothèse où le caractère parfait de la vente serait retenu de constater leur acceptation de ladite vente et de leur offre de payer contre délivrance de la chose le prix de 1.340.000 francs, l'indemnité de 134.000 francs prévue au contrat et une indemnité de 110.000 francs à la société C.

Ils sollicitent également en ce cas la condamnation de la société C à leur payer 110.000 francs à titre de dommages-intérêts et la condamnation de M.B. et de ladite société à leur payer 20.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Ils soutiennent que la mention manuscrite de renonciation à obtention d'un prêt ne peut leur être opposée compte tenu de leur méconnaissance du Français et du fait qu'elle aurait dû être rédigée en langue Allemande, la renonciation expresse étant prévue par une loi d'ordre public dans un souci d'une parfaite information du consommateur qui ne peut être réalisée que si celui-ci a été en mesure de comprendre parfaitement la portée de ses engagements.

Ils ajoutent que bien que Madame A ait des connaissances de Français elle ne maîtrise pas le langage juridique ; que M. A qui est le rédacteur de la première mention manuscrite ne parle pas le Français et que le recours à l'agence C spécialiste allemand du marché immobilier français aurait dû les protéger des problèmes de compréhension.

Ils prétendent par ailleurs que la résolution prononcée n'a aucun fondement juridique dès lors que par les mentions des compromis, le vendeur a renoncé à l'action résolutoire ne se réservant que la possibilité de demander l'exécution forcée avec dommages-intérêts forfaitairement fixés dans le contrat, exécution qu'ils acceptent à ce jour dans les conditions du contrats.

A l'égard de la société C ils font valoir qu'elle ne peut rien leur réclamer dans la mesure où elle a failli à son devoir de conseil en ne leur précisant pas qu'ils pouvaient rédiger en allemand la mention manuscrite relative à l'obtention du prêt avec traduction en Français ; en omettant de leur transmettre une traduction en allemand de la mention litigieuse et de leur conseiller de choisir un notaire bilingue.

M.B. conclut à la confirmation sauf à lui allouer une somme de 20.000 francs à titre de dommages intérêts du fait du peu de sérieux de l'appel interjeté et 10.000 francs au titre des frais irrépétibles.

Il demande subsidiairement la condamnation de la SARL C à lui verser la somme de 134.000 francs à titre de dommages-intérêts et 10.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile dans l'hypothèse où il serait fait droit à la demande principale des époux A ce qui révèlerait une faute certaine de l'intermédiaire.

Il soutient que les époux A ont eu du fait de leur connaissance du Français de la longueur des négociations et de leurs aptitudes à appréhender les problèmes financier et immobilier une parfaite compréhension de la portée de leurs engagements et qu'ils ne peuvent sérieusement soutenir qu'il a renoncé à la résolution judiciaire du seul fait de l'aménagement contractuel de l'exécution forcée.

La SARL C conclut à la confirmation et réclame 30.000 francs à titre de dommages-intérêts et 20.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle soutient avoir parfaitement informé les époux A des conditions de la vente tout au long des négociations qui ont duré plusieurs mois, et que ceux-ci rompus aux affaires immobilières pour M. A et connaissant parfaitement la langue Française pour Madame A professeur de Français en Allemagne ont exprimé un consentement parfaitement

éclairé.

Elle ajoute que les époux A compte tenu de leurs moyens financiers pouvaient acquérir sans recourir à l'emprunt et qu'ils se sont entourés tant en Allemagne qu'en France de tous les renseignements utiles avant de signer l'acte.

Elle soutient que l'action engagée a porté atteinte à sa réputation, ce qui justifie l'octroi de dommages-intérêts complémentaires.

Les intimés n'ont pas, malgrè la révocation de l'ordonnance de clôture et renvoi de l'audience de plaidoirie initialement prévue déposé de conclusions postérieures à celles qu'ils jugeaient tardives des appelants.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que si les appelants ne contestent pas avoir chacun le mari et l'épouse rédigé de leur main la mention relative à la renonciation à la condition suspensive d'obtention d'un prêt; que l'ordre dans lequel ils ont rédigé ladite mention est sans importance ;

Attendu que s'il peut être exigé, compte tenu du but de protection des emprunteurs dans le domaine immobilier poursuivi par le législateur, que la mention manuscrite prévue par la loi soit rédigée dans la langue maternelle de l'acquéreur lorsqu'il est établi que celui-ci n'entend pas la langue Française et n'est pas assisté d'un interpréte ou d'une personne susceptible de l'éclairer sur la portée de ses engagements cette exigence n'est pas requise lorsque il est établi que l'acquéreur étranger a eu parfaite connaissance du texte rédigé en Français qu'il devait être amené à signer, qu'il a eu le temps, les moyens et la possibilité de s'entourer de tous les renseignements nécessaires et qu'il a de fait utilisé ces possibilités ;

Attendu alors qu'il est clairement établi en l'espèce que les époux A qui avaient donné mandat de négocier à la SARL C , spécialisée dans

les relations immobilières entre la France et l'Allemagne et qui ont pour Madame, professeur de Français en Allemagne, une parfaite connaissance du Français et pour Monsieur, fondé de pouvoir d'une société allemande spécialisée dans l'immobilier, une grande maîtrise des transactions immobilières, ont eu communication du projet de contrat dès le mois de juin 1997 et ont accepté sans restriction la rédaction en langue Française après contrôle par leur soin et prise de conseil en Allemagne, M. A précisant en outre dans un courrier du 19 juin 1997 que certains points pourraient être éclaircis par téléphone avec l'aide de son épouse qui maîtrise la langue Française ;

Attendu que c'est donc à bon droit et par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a écarté les prétentions des époux A tendant à la nullité de la clause manuscrite de renonciation à la condition suspensive d'obtention d'un prêt ;

Attendu qu'en raison de la renonciation précitée et de la réalisation non sérieusement contestée des conditions suspensives, le refus réitéré des époux A de passer l'acte après la sommation adressée à leur conseil par celui de M.B. et encore après l'assignation qui leur a été délivrée apparaît fautif ;

Attendu que les époux A soutiennent vainement devant la cour que M.B. ne pouvait solliciter la résolution judiciaire de la vente en l'état des énonciations de l'acte sous seing privé, mais seulement son exécution ;

Attendu en effet que si ont été précisées dans cet acte les modalités permettant d'obtenir la réalisation forcée de la vente et la possibilité pour le mandataire commun de faire publier l'acte, ces mentions n'impliquent pas une renonciation, qui ne peut être que formelle et explicite, à la possibilité légale d'obtenir la résolution pour inexécution sur la base de l'article 1184 du code

civil ;

Attendu en outre qu'il est expressément prévu à l'acte, en page 4, que la somme versée à titre d'acompte restera acquise au vendeur à titre d'indemnité perdant ainsi sa nature d'acompte, si la vente n'est pas régularisée par acte notarié par le fait de l'acquéreur que cette attribution n'est pas soumise la mise en oeuvre d'une procédure d'exécution forcée, les mentions relatives à l'exécution forcée précisant seulement qu'en ce cas une somme supplémentaire équivalente devra tre payée en sus du prix sur lequel doit s'imputer la somme versée à titre d'acompte si la vente se réalise ;

Attendu que les époux A ne peuvent donc à ce jour solliciter la réalisation d'une vente qu'ils ont déjà refusée justifiant ainsi la demande de résolution pour inexécution formée par M.B. ;

Attendu que l'inexécution étant imputable aux époux A l'acompte de 134.000 francs doit comme le premier juge l'a justement décidé être remis à M.B. ;

Attendu que c'est également à bon droit que le premier juge a condamné les époux A à verser à la SARL C la somme de 110.000 francs à titre de dommages intérêts cette somme équivalente à la commission prévue à la charge des acquéreurs dans le compromis étant justifiée par la carence des époux A qui ne démontrent aucunement l'existence d'une faute de l'agent immobilier dans son devoir de conseil alors que celui-ci établit au contraire qu'il a pris un soin particulier dans cette affaire en recevant à plusieurs reprises les époux A , en les assistant dans leurs différentes démarches, et en communiquant au vendeur les exigences qu'ils ont manifestées au cours des négociations ;

Attendu que pour être infondé l'appel des époux A n'apparaît pas abusif ; que rien ne justifie donc les demandes de dommages-intérêts complémentaires formées à ce titre ;

Attendu par contre qu'il apparaît équitable d'allouer à M.B. la somme complémentaire de 8.000 francs par application de l'article 7OO du nouveau code de procédure civile et la même somme sur le même fondement à la SARL C ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR :

Déclare l'appel recevable ;

Confirme la décision déférée ;

Y ajoutant :

Rejette les demandes de dommages-intérêts complémentaires formées par les intimés ;

Condamne les époux A à payer en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile : - M.B. la somme de 8.000 francs - la SARL C la somme de 8.000 francs ;

Condamne les époux A aux dépens avec distraction au profit de M° DE LAMY et de la SCP SOREL-DESSART-SOREL. Le présent arrêt a été signé par le président et le greffier. LE GREFFIER :

LE PRESIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 1999/01381
Date de la décision : 27/07/2000

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit immobilier - Offre préalable

S'il peut être exigé, compte tenu du but de protection des emprunteurs dans le domaine immobilier poursuivi par le législateur, que la mention manuscrite prévue par la loi soit rédigée dans la langue maternelle de l'acquéreur lorsqu'il est établi que celui-ci n'entend pas la langue française et n'est pas assisté d'un interprète ou d'une personne susceptible de l'éclairer sur la portée de ses engagements, cette exigence n'est pas requise lorsqu'il est établi que l'acquéreur étranger a eu parfaitement connaissance du texte rédigé en français qu'il devait être amené à signer, qu'il a eu le temps, les moyens et la possibilité de s'entourer de tous les renseignements nécessaires et qu'il a, de fait, utilisé ces possibilités


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2000-07-27;1999.01381 ?
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