La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/11/1999 | FRANCE | N°1998-02333

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 02 novembre 1999, 1998-02333


DU 2 novembre 1999 ARRET N° Répertoire N° 98/02333 Première Chambre Première Section HM/EKM 21/04/1998 TGI SAINT GAUDENS (M. DOUCHEZ-BOUCARD) Consorts A Me DE LAMY C/ Consorts B S.C.P NIDECKER PRIEU M. C S.C.P NIDECKER PRIEU Mme D Sans avoué constitué M.E Me CHATEAU CONFIRMATION GROSSE DELIVREE LE A COUR D'APPEL DE TOULOUSE REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Arrêt de la Première Chambre, Premère Section Prononcé: A l'audience publique du deux novembre mil neuf cent quatre vingt dix neuf, par H. MAS, président, assisté de E. KAIM-MARTIN, greffier. Composition de

la cour lors des débats et du délibéré: Président :

H. MAS Cons...

DU 2 novembre 1999 ARRET N° Répertoire N° 98/02333 Première Chambre Première Section HM/EKM 21/04/1998 TGI SAINT GAUDENS (M. DOUCHEZ-BOUCARD) Consorts A Me DE LAMY C/ Consorts B S.C.P NIDECKER PRIEU M. C S.C.P NIDECKER PRIEU Mme D Sans avoué constitué M.E Me CHATEAU CONFIRMATION GROSSE DELIVREE LE A COUR D'APPEL DE TOULOUSE REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Arrêt de la Première Chambre, Premère Section Prononcé: A l'audience publique du deux novembre mil neuf cent quatre vingt dix neuf, par H. MAS, président, assisté de E. KAIM-MARTIN, greffier. Composition de la cour lors des débats et du délibéré: Président :

H. MAS Conseillers :

R. METTAS

M. ZAVARO Greffier lors des débats: E. KAIM-MARTIN Débats: A l'audience publique du 05 Octobre 1999. La date à laquelle l'arrêt serait rendu a été communiquée. Avant l'ouverture des débats, les parties ont été informées des noms des magistrats composant la cour. Nature de l'arrêt : réputé contradictoire APPELANTS Consorts A Ayant pour avoué Maître DE LAMY Ayant pour avocat la SCP LASSUS, NDOME-MANGA- LASSUS du barreau de Saint Gaudens INTERVENANTE VOLONTAIRE Madame A Ayant pour avoué Maître DE LAMY Ayant pour avocat la SCP LASSUS, NDOME-MANGA du barreau de Saint Gaudens INTIMES Consorts B Ayant pour avoué la S.C.P NIDECKER PRIEU Ayant pour avocat la SCP MALESYS, du barreau de Saint Gaudens Monsieur C Ayant pour avoué la S.C.P NIDECKER PRIEU Ayant pour avocat Maître BOUSCATEL du barreau de Toulouse Madame D régulièrement assignée n'ayant pas constitué avoué Monsieur E Ayant pour avoué Maître CHATEAU

PROCEDURE :

Un chemin dit "de Laubeto" partant du chemin dit de "Hourni à Auriet"

sur la commune d'ESCOULIS (Haute-Garonne) rejoint le hameau de Laubeto au niveau d'une parcelle cadastrée 140.

Ce hameau comporte deux groupes d'habitations séparés par un passage ouvrant sur un espace au milieu duquel se trouve un puits. Ce passage et l'espace susvisé sont cadastrés sous le n° 147 séparé du bout du chemin de Laubeto par les parcelles 140, 143 et 144.

Au-delà de l'espace 147 se trouvent plusieurs parcelles

Sur les plans cadastraux ancien et nouveau les parcelles 131, 130 et 129 au nord sont séparées des parcelles 597, 563 et 564 au sud par un tracé en pointillés. Le cadastre ancien fait continuer ces pointillés le long des parcelles aujourd'hui 603, 622, 144, 143, 140 jusqu'au chemin public.

Par acte du 20 avril 1994 les consorts B se disant propriétaires de la parcelle 130 et d'une partie de la parcelle 147 (espace sur lequel ouvrent les maisons du hameau) ont fait assigner les consorts A pour faire reconnaître leur droit à passer sur la parcelle 147 pour rejoindre leur parcelle 130 par le chemin d'exploitation qu'ils estiment exister entre les parcelles 131, 130 et 129 au nord et les parcelles 597, 563 et 564 au sud.

Au vu d'une expertise diligentée dans le cadre de la mise en état et après mise en cause de M.C propriétaire des parcelles 129 et 131 et de M.E propriétaire de la parcelle 564, le tribunal a : - ordonné un complément d'expertise au vu duquel après mise en cause de Mme D propriétaire indivise de la parcelle 147, il a dit que le chemin desservant la parcelle 147 à partir du chemin public en bordure des parcelles 144, 143 et 140 et le même chemin, desservant la parcelle 130 à partir de la parcelle 147, situé en bordure des parcelles 597, 563, 564 et 131 est un chemin d'exploitation pouvant être utilisé par les consorts B à partir de la parcelle 147 dont ils sont propriétaires indivis, - dit que le passage devrait se faire en

conformité avec le tracé fixé par l'expert aux annexes 7 et 8 de son rapport du 14 avril 1997, - condamné les consorts A à régler aux consorts B 10.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

M.M A ont régulièrement relevé appel de cette décision.

Ils concluent à la réformation et demandent à la cour de: - dire que le passage revendiqué par l'indivision B, reliant la parcelle 130 à la parcelle 147 de la commune d'ESCOULIS, est une servitude de passage, - dire, dans l'hypothèse où la cour estimerait qu'il s'agit d'un chemin d'exploitation, que l'indivision B n'étant propriétaire d'aucune parcelle riveraine, elle ne dispose que d'un droit d'usage qui s'est éteint par la non utilisation plus que trentenaire de ce passage par ses anciens bénéficiaires, - dire que le chemin d'exploitation doit correspondre à l'intérêt de ses utilisateurs et la nature du fonds terminus, - constater que celle-ci est une cour commune, sur laquelle les consorts B ont perdu tout droit ou un bien indivis ou encore un bien non délimité, - dire qu'il ne peut être établi quelque tracé que ce soit servant de passage aux consorts B sur la parcelle n° 147, - condamner l'indivision B à payer la somme de 30.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à payer les entiers dépens.

Ils soutiennent que le chemin d'exploitation n'existait pas en 1898 puisque l'acte du 21 novembre 1898 ne le mentionnait pas et qu'il a cessé d'être utilisé en 1939 (selon : les attestations des défendeurs, l'absence de mention du chemin sur le plan cadastral révisé en 1955, la présence d'arbres quadragénaires sur l'assiette de l'ancien tracé).

Ils affirment que tous les éléments constitutifs d'origine jurisprudentiels relatifs au chemin d'exploitation ne sont pas remplis. Ils font observer, à ce titre, que le tracé du chemin a

complètement disparu dans sa première partie, faute d'entretien depuis 1939 et que l'indivision B, dont la parcelle 130 est enclavée, utilise un autre chemin depuis plusieurs décennies.

Ils considèrent que l'indivision B ne peut pas se prévaloir de l'article L 162-3 du code rural parce qu'elle n'est pas propriétaire riveraine du chemin. Elle note que celle-ci n'a qu'un droit d'usage en tant que propriétaire du fonds terminus. Elle en déduit que celle-ci a renoncé tacitement à ce droit par le non usage.

***

MM. B et Mme B concluent à la confirmation du jugement et sollicitent la condamnation des consorts A à payer 20.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et payer les entiers dépens.

Ils considèrent que le chemin litigieux est un chemin d'exploitation et invoquent les deux rapports de l'expert (du 6 janvier 1995 et du 10 avril 1997) sur ce point.

Ils ajoutent que ce chemin ne peut être supprimé que dans les conditions prévues à l'article L 162-3 du code rural, qui ne sont pas remplies en l'espèce et que donc la prescription extinctive applicable aux servitudes de passage n'est pas applicable.

Ils font aussi remarquer, par ailleurs, que l'usage du chemin s'est arrêté récemment et invoquent plusieurs attestations (celles de X, Y, Z, F, G et H, PV de constat du 23 juillet 1984).

M.E, propriétaire de la parcelle n° 564 riveraine du chemin litigieux, conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamné aux dépens.

Il sollicite la condamnation des succombants aux entiers dépens et leur condamnation à lui payer 10.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il rappelle avoir été appelé à l'instance pour des raisons

d'opposabilité et s'en remet à justice sur le fond.

M.C, propriétaire des parcelles cadastrées section A n° 129, 131 et 563 riveraines du chemin litigieux, s'en remet à sagesse de la cour sur le bien fondé des prétentions respectives des parties et sollicite la condamnation des succombants à lui payer 12.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à payer les entiers dépens.

Il déclare avoir été appelé à l'audience par les consorts A pour des raisons d'opposabilité.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que l'état d'enclave de la parcelle 130 appartenant aux consorts B n'est pas contesté ;

Attendu qu'il convient de rechercher si le chemin reliant la parcelle 147 à la parcelle 130 tel qu'il figure aux cadastres ancien et rénové peut être revendiqué à ce jour comme chemin d'exploitation par les consorts B propriétaires de la parcelle 130 ;

Attendu qu'en application de l'article L 162-1 du code rural les chemins d'exploitation sont ceux qui servent à la communication entre divers fonds ou à leur exploitation ; qu'en l'absence de titre ils sont présumés appartenir aux propriétaires riverains chacun en droit soi ;

Attendu que contrairement à ce que soutiennent les appelants les consorts B propriétaires de la parcelle 130 sont riverains du chemin tel qu'il figure au cadastre entre la parcelle 147 et la parcelle 574 à laquelle il aboutit, qu'ils peuvent donc être présumés propriétaires du chemin dans sa partie située sur leur parcelle et revendiquer l'usage de l'entier chemin s'il s'avère que celui-ci sert à la communication entre divers fonds ou à leur exploitation étant observé qu'en application de l'article L 162-3 les chemins

d'exploitation ne peuvent être supprimés que du consentement de tous les propriétaires qui ont le droit de s'en servir ;

Attendu que l'expert SAINT AUBIN a retrouvé sur le terrain les traces de l'ancien chemin tel que figurant au cadastre entre les parcelles 147 et 130 et précise que si ce chemin apparaît ne pas avoir été utilisé vraisemblablement depuis plus de trente ans en tout cas pour le passage d'engins agricoles dans la mesure où des arbres importants ont poussé sur son assiette, celle-ci existe encore et n'est occupée par personne à titre privatif ;

Attendu qu'il a précisé que compte tenu de la nature de bois des terrains entourant les parcelles riveraines du tracé litigieux, ce tracé apparaissait comme le seul pratique pour l'exploitation des terres cultivables ;

Attendu que s'agissant de l'abandon du tracé contournant par le sud le hameau de Laubeto pour rejoindre le chemin public au niveau de la parcelle 140, l'expert précise que des constructions ont été édifiées sur l'assiette de l'ancien contournement et que la jonction pourrait s'opérer par l'espace cadastré 147 sur laquelle les consorts B auraient des droits indivis pour 3 a 39 ca ;

Attendu que les consorts A soutiennent vainement que le tracé litigieux dont ils invoquent la disparition aurait été un chemin de servitude ;

Attendu en effet qu'aucun acte ne mentionne un tel chemin grevant un fonds au profit d'un autre alors que les actes et notamment les plus anciens rappelaient avec précision les chemins de servitude et se montraient plus laconiques quant aux chemins d'exploitation dans la mesure où leur existence n'emportait pas création d'un droit réel sur le fonds servant d'assiette ;

Attendu par contre que le positionnement du tracé à cheval sur les limites parcellaires, son aboutissement d'un côté à une propriété

privée et de l'autre à un espace libre manifestement destiné l'usage commun des habitants du hameau de Laubeto permettant de rejoindre le chemin public et l'impossibilité ancienne d'utiliser un autre accès pour la desserte des parcelles riveraines (dont certaines sont aujourd'hui accessibles par ailleurs) montre que le tracé litigieux constituait un chemin destiné l'exploitation des parcelles ;

Attendu que le fait relevé par les époux A que le chemin soit sur une partie de son tracé entièrement sur une parcelle privée ne peut contredire cette nature de chemin d'exploitation mais entraîne seulement la conséquence que, pour cette partie, l'assiette du chemin appartient enti rement au propriétaire de la parcelle traversée ;

Attendu que cette nature de chemin d'exploitation est confirmée par le fait relevé par l'expert que son assiette bien qu'encombrée de végétaux n'a pas fait l'objet d'utilisation privative en tout cas depuis plus de trente ans ;

Attendu que le fait que la parcelle 147 soit à l'évidence destinée à l'usage commun des habitants du hameau, comme le démontrent les actes anciens accordant une portion indivise de ladite parcelle aux propriétaires des parcelles qui l'entourent, n'exclut pas la possibilité d'utiliser partie de cette parcelle comme assiette du chemin d'exploitation qui devait nécessairement desservir les bâtiments d'exploitation du hameau et assurer la jonction avec la voie publique pour permettre l'exploitation des terres desservies par les propriétaires de bâtiments situés hors du hameau ;

Attendu que le fait que des constructions anciennes aient été édifiées sur l'ancienne assiette contournant le hameau par le sud montre la volonté des utilisateurs d'accéder au chemin au travers de la parcelle 147 ;

Attendu qu'en toute hypothèse les appelants ne contestent pas les

droits indivis des consorts B sur la parcelle 147 et ne peuvent donc s'opposer à leur circulation sur cette parcelle qui compte tenu de sa nature ne peut faire l'objet d'un partage et d'une appropriation privative ;

Attendu enfin que le chemin d'exploitation ne peut être supprimé que de la volonté de tous les utilisateurs concernés, que rien ne démontre qu'à un moment quelconque tous les copropriétaires concernés ont entendu supprimer ce chemin dont l'assiette a été conservée même si elle n'a pas été entretenue ; qu'en outre les consorts B produisent plusieurs attestations et un constat d'huissier démontrant que le passage a été utilisé dans les années 60 et encore en 1984 les consorts A ayant alors tenté de s'y opposer ;

Attendu que le seul défaut d'entretien ou d'utilisation permanente à l'aide d'engins agricoles ne peut entraîner la suppression d'un chemin d'exploitation ;

Attendu que la décision déférée qui a reconnu l'existence du chemin d'exploitation revendiqué par les consorts B doit donc être confirmée ;

Attendu qu'il apparaît équitable d'allouer aux consorts B, M.C et à M.E la somme complémentaire de 3.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que les consorts A outre le paiement de ces sommes supporteront les entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR :

Déclare l'appel recevable ;

Confirme entièrement la décision déférée ;

Y ajoutant :

Condamne les consorts A à payer en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile : * aux consorts B la somme de 3.000 francs (trois mille francs) * à M.C la somme de 3.000 francs (trois

mille francs) * à M. E la somme de 3.000 francs (trois mille francs) Les condamne aux entiers dépens d'appel avec distraction au profit de la SCP NIDECKER-PRIEU PHILIPPOT et de M° CHATEAU. Le présent arrêt a été signé par le président et le greffier. LE GREFFIER :

LE PRESIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 1998-02333
Date de la décision : 02/11/1999

Analyses

VOIRIE - Chemin d'exploitation - IDENTIFICATION

Le seul défaut d'entretien ou d'utilisation permanente à l'aide d'engins agricoles d'un chemin d'exploitation ne peut en entraîner la suppression et le fait qu'une partie de son tracé se situe sur une parcelle privée ne peut contredire sa nature mais entraîne seulement la conséquence que, pour cette partie, l'assiette du chemin d'exploitation appartient entièrement au propriétaire de la parcelle.


Références :

Code rural article L. 162-1 et L.162-3

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;1999-11-02;1998.02333 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award