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11/01/1999 | FRANCE | N°1997-00853

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 11 janvier 1999, 1997-00853


DU 11 JANVIER 1999 ARRET N° Répertoire N° 97/00853 Première Chambre Première Section MZ/CD 25/11/1996 T. COMMERCE TOULOUSE (M. X...) SOCIETE A S.C.P BOYER LESCAT MERLE Y.../ Monsieur Z... Me DE LAMY SOCIETE Y... S.C.P SOREL DESSART GROSSE DELIVREE LE A COUR D'APPEL DE TOULOUSE REPUBLIQUE A...

B... NOM DU PEUPLE FRANCAIS Arrêt de la Première Chambre, Première Section Prononcé: A l'audience publique du Onze janvier mil neuf cent quatre vingt dix neuf, par H. MAS, président, assisté de E. KAIM MARTIN, greffier. Composition de la cour lors des débats et du délibéré: Préside

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H. MAS Conseillers :

R. METTAS

M. ZAVARO C... lors des déba...

DU 11 JANVIER 1999 ARRET N° Répertoire N° 97/00853 Première Chambre Première Section MZ/CD 25/11/1996 T. COMMERCE TOULOUSE (M. X...) SOCIETE A S.C.P BOYER LESCAT MERLE Y.../ Monsieur Z... Me DE LAMY SOCIETE Y... S.C.P SOREL DESSART GROSSE DELIVREE LE A COUR D'APPEL DE TOULOUSE REPUBLIQUE A...

B... NOM DU PEUPLE FRANCAIS Arrêt de la Première Chambre, Première Section Prononcé: A l'audience publique du Onze janvier mil neuf cent quatre vingt dix neuf, par H. MAS, président, assisté de E. KAIM MARTIN, greffier. Composition de la cour lors des débats et du délibéré: Président :

H. MAS Conseillers :

R. METTAS

M. ZAVARO C... lors des débats: E. KAIM MARTIN Débats: A l'audience publique du 23 Novembre 1998 . Les parties ont été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. Nature de l'arrêt : contradictoire APPELANTE SOCIETE A D... pour avoué la S.C.P BOYER LESCAT MERLE et pour avocat la SCP CHANON,CARLOT,DEYGAS du barreau de Lyon INTIMES Monsieur Z... D... pour avoué Me DE LAMY et pour avocat Me BARTHET M. du barreau de Toulouse SOCIETE Y... D... pour avoué la S.C.P SOREL DESSART et pour avocat Me FARNE du barreau de Toulouse

EXPOSE :

Le 10 janvier 1991, M. Z... commandait à la société A 1250 plants de fruitiers "Medana Tayberry", pour un montant total de 14 000 F, la livraison étant prévue les 20 et 21 février 1991.

Une première livraison eut lieu le 15 mars 1991, de 250 plants. Un courrier du 2 mai 1991 annonçait la livraison des 1000 plants restant, dans la semaine du 20 mai.

La société Y..., à qui la société A avait confié l'exécution de la

commande de M. Z... faisait savoir à ce dernier que le produit commandé n'était plus disponible avant fin juin.

Pour se prémunir contre ces retards, M. Z... a obtenu des pépinières D livraison de 500 plants le 30 mai 1991 et de 320 petits plants le 5 juin.

La livraison complémentaire n'ayant finalement pas été honorée, M. Z... saisissait le tribunal de commerce de Toulouse qui, par jugement en date du 25 novembre 1996, après qu'un jugement avant dire droit ait ordonné une expertise, condamnait la société A à lui payer une somme de 159.600 F à titre de dommages et intérêts plus 1.623,60 F au titre de son préjudice complémentaire et 8.000 F par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il rejetait les demandes de la société A tant à l'encontre de M.B qu'à l'encontre de la société Y...

Par déclaration en date du 21 janvier 1997, la société Arelevait appel de cette décision.

Elle relève d'abord que, faute de mise en demeure, M. Z... serait déchu de tout droit à indemnisation. Elle soutient ensuite qu'aucun délai contractuel de livraison n'était arrêté, sinon directement entre M. Z... et la société Y..., ce qui ne l'engagerait en rien elle-même. Elle affirme enfin qu'elle serait bien fondée à bénéficier de la force majeure invoquée par la société Y... qui expose que sa production avait été désorganisée par deux incendies et en partie perdue du fait d'un accident routier.

Subsidiairement, elle conteste l'existence d'un lien de causalité entre sa faute éventuelle et le préjudice allégué. Elle sollicite en toute hypothèse la garantie de la société Y..., qui se serait reconnue débitrice envers M. Z... d'une obligation de livraison dans un délai non respecté.

Enfin elle conteste le préjudice de M. Y..., qui ne saurait être

supérieur à son manque à gagner soit 43.301,02 F et sollicite l'allocation d'une somme de 15.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société Y... relève qu'elle n'était pas partie au contrat passé entre la société A et M. Z... et qu'elle ne s'est engagée à aucun moment à respecter un quelconque délai. Elle souligne n'avoir reçu aucun règlement des plants qu'elle a livré et conclut à la confirmation de la décision déférée, sauf à solliciter une somme de 8.000 F du chef de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

M. Z... conclut à la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté sa demande d'indemnisation du préjudice moral au titre duquel il demande l'allocation d'une somme de 100.000 F ainsi que 10.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

DISCUSSION : Sur le délai contractuel et la mise en demeure :

Les engagements contractuels entre la société A et M. Z... découlent d'une lettre émanant de la société A en date du 1° décembre 1990, qui répond à une demande de prix en mentionnant que les plants sont disponibles à compter du 15 janvier.

Un courrier du 10 janvier 1991 est adressé à cette société confirmant, conformément à un accord téléphonique, une commande prévoyant livraison les 20 ou 21 février.

Il n'est pas contesté que 250 plants seront livrés le 15 mars 1991. Le 2 mai, la société A adresse à M. Z... un courrier dans lequel il annonce que les 1000 sujets restant seront livrés dans la semaine du 20 mai 1991, sauf contre ordre de la part de M. Z..., qui ne fut pas donné.

Il ressort de ces différents éléments de fait que la réponse à la demande de prix comportait l'indication de la disponibilité des

plants à date précise ; que la commande tenait compte de cet élément, qu'elle mentionnait un délai de livraison et se rapportait à un accord téléphonique ; qu'elle n'a pas donné lieu à démenti de la part de la société en cause ; qu'une livraison partielle a eu lieu avec un retard de trois semaines ; qu'une proposition fut faite de livrer le reste de la commande avec retard et que cette proposition ne fut pas rejetée ; que ces dernières dispositions ne furent pas honorées.

Il convient dès lors de retenir que la société A s'était effectivement engagée contractuellement à livrer les plants commandés à la date visée dans le bon de commande. B... surplus, faisant état des difficultés rencontrées, elle propose une nouvelle date de livraison, qui sera acceptée dans la mesure où aucun contre ordre n'est donné alors qu'il est demandé en cas de désaccord, mais qui ne sera pas davantage honorée.

La société A a donc violé ses obligations contractuelles en ne livrant pas la chose commandée dans le délai initialement prévu ou négocié en cours d'exécution du contrat.

Elle invoque les dispositions de l'article 1146 du code civil pour conclure au rejet des prétentions de M. Z... E... cet article prévoit que les dommages et intérêts ne sont dus que lorsque le débiteur est en demeure de remplir son obligation, sauf "lorsque la chose que le débiteur s'était obligé de donner ou de faire ne pouvait être donnée ou faite que dans un certain temps qu'il a laissé passer".

Or le Medana Tayberry est un fruit dont il n'est pas contesté qu'il doit être planté au printemps. Dès lors, la commande devait nécessairement être honorée avant la fin de cette saison, car passé ce délai les plants ne pouvaient plus utilement être mis en terre. La mise en demeure n'était donc, aux termes mêmes de l'article 1146 du code civil, pas nécessaire. Sur la force majeure :

La société A se présente comme un intermédiaire, contraint de se fournir auprès d'une société belge, la société Y... Elle relève que celle-ci invoque un sinistre incendie et un accident routier pour expliquer sa carence et sollicite le bénéfice, pour elle-même, de ces événements.

Cependant, sa position d'intermédiaire ne découle nullement du contrat qu'elle a conclu avec M. Z... B... surplus, elle ne rapporte pas la preuve d'un cas de force majeure, dans la mesure où , d'une part elle pouvait toujours chercher auprès d'un autre fournisseur le produit qui manquait chez celui qu'elle avait choisie elle même et où , d'autre part, les événements invoqués par la société Y... ne sont pas établis autrement que par les affirmations de cette derni re société. Sur le préjudice :

M. Z... sollicite l'indemnisation d'un préjudice qu'il évalue à 1.629,75 F au titre d'un surcoût d'approvisionnement, 159.600 F au titre d'une perte de productivité et 100.000 F au titre d'un préjudice financier et moral.

Devant la carence de son fournisseur, M. Z... s'est adressé à la société D qui lui a fourni 820 plants à un tarif supérieur à celui que proposait la société A. Ce surcoût représente une somme de 1.629,75 F qui est due.

Les plants commandés à la société D ont été livrés le 30 mai pour 500 d'entre eux et le 5 juin pour le reste. Dans le dernier état de leurs relations contractuelles, les 1000 plants restant de la commande faite à la société A devaient être livrés le 20 mai. Ce délai supplémentaire de 10 à 15 jours imposé une implantation des fruits à une date tardive qui, selon l'expert, ne pouvait manquer d'entraîner une perte de production qu'il évalue à 149.000 F. M. Z... sollicite de ce chef 159.600 F en considérant que les frais d'exploitation doivent être retenus pour 25 % seulement.

Cependant, la société A relève que la production de M. Z... s'est élevée, malgré les difficultés qui viennent d'être examinées, à 849 kg, la premère année, ce qui représente un volume indiscutablement inférieur à ce qu'il aurait du être si tous les plans avaient été livrés conformément aux engagements contractuels. Mais elle affirme également, sans être démentie, que M. Z... n'a commercialisé que 511,6 kg de Tayberry en 1992 et 539 kg en 1993.

Il apparaît que, s'agissant d'un fruit nouveau, la commercialisation en était aléatoire. Même si l'on peut retenir que le fait de disposer d'un volume plus important aurait pu entraîner la conquête d'autres marchés, on ne peut que constater que, globalement, ce fruit n'a pas réalisé sur le marché français une percée spectaculaire.

Il est dès lors impossible de retenir l'existence d'un préjudice correspondant à l'ensemble de la perte de production, faute d'éléments de nature à établir de façon certaine que l'ensemble de la production aurait été commercialisée.

De même le préjudice financier allégué par M. Z... découle de l'écart existant entre les investissements réalisés et les rentrées espérées en cas de succès de la production.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la cour dispose d'éléments suffisants pour fixer le préjudice de M. Z... à la somme de 50.000 F, outre le surcoût déjà examiné. Sur les autres demandes :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. Z... l'intégralité des frais non compris dans les dépens exposés au cours de l'instance. Il convient d'allouer à ce titre une somme de 10.000 F à M. Z... et de condamner la société A aux dépens. Sur la garantie demandée à la société Y... :

La société Y... a commandé les plants qu'elle devait livrer à M. Z... à la société Y... Cette dernière soutient cependant ne pas s'être engagée contractuellement à respecter quelque délai de livraison que ce soit.

La société A soutient le contraire.

Les engagements contractuels entre la société A et la société Y... ont été conclus par télécopie. Un premier document est adressé le 27 novembre 1990 par la société A à la société Y... sous forme d'un bon de commande de 1500 plants Tayberry taille P7, avec comme mention : "pour réception début janvier. Voulez-vous nous confirmer avec tarif".

Le 29 novembre, le même fax est renvoyé à la société A par la société Y... avec une mention manuscrite sous la signature non contestée d'un responsable de l'entreprise qui précise : "disponible en P9 pris départ 21 FB"

Il n'existe pas de document marquant l'acceptation par la société A de ces conditions et valant confirmation de la commande. E... cette situation n'est pas sérieusement contestable dans la mesure où le 28 février 1992, la société A adressait une lettre valant mise en demeure à la société Y... rappelant l'existence de la commande et de nombreux contacts téléphoniques. Ce courrier ne provoquait aucune protestation et une livraison partielle était effectuée.

Il apparaît en conséquence que la société Y... s'était engagée envers la société A à livrer courant janvier 1991 des plants de taille P9 et il n'est pas contestable que ces engagements contractuels n'ont pas été tenus.

Cette situation est à l'origine directe de la violation par la société A de ses propres engagements contractuels et donc de sa condamnation. Il convient en conséquence de condamner la société Y... à réparer le préjudice ainsi provoqué en lui imposant de garantir celle-là de toutes les condamnations prononcées à son encontre.

Il n'apparaît cependant pas inéquitable de laisser à la charge de la société A les frais non compris dans les dépens qui ont été exposés au cours de la procédure.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

infirme le jugement du tribunal de commerce de Toulouse en date du 25 novembre 1996,

condamne la société A à payer à M. Z..., une somme de 50.000 F ainsi que 1.629,75 F en réparation de son préjudice et 10.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

la condamne aux dépens en ce compris les frais d'expertise,

condamne la société Y... à relever et garantir la société A de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,

rejette la demande de la société A présentée au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

ordonne la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, excédant les condamnations ci-dessus prononcées,

dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. LE PRESIDENT ET LE C... ONT SIGNE LA MINUTE. LE C...

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 1997-00853
Date de la décision : 11/01/1999

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Exécution - Obligation de faire - Exécution tardive

Un vendeur manque à son obligation contractuelle en ne livrant pas dans le délai prévu des plants qui devaient impérativement être mis en terre au printemps. Dès lors, des dommages et intérêts sont dus à l'acquéreur, en application de l'article 1146 du Code civil, nonobstant le fait que le débiteur n'ait pas été mis en demeure


Références :

Code civil, article 1146

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;1999-01-11;1997.00853 ?
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