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19/06/2024 | FRANCE | N°22/01392

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre commerciale, 19 juin 2024, 22/01392


ARRÊT N°24/

SL





R.G : N° RG 22/01392 - N° Portalis DBWB-V-B7G-FYKE













SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TR AVAUX PUBLICS (SMABTP)





C/



S.A.R.L. AARON FREDERIC CONSTRUCTION



S.E.L.A.S. EGIDE









RG 1ERE INSTANCE : 2020J00163







COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS



ARRÊT DU 19 JUIN 2024



Chambre commerciale



Appel d'une décision rendue par le TRIBU

NAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT-DENIS en date du 31 AOUT 2022 RG n° 2020J00163 suivant déclaration d'appel en date du 22 SEPTEMBRE 2022





APPELANTE :



SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TR AVAUX PUBLICS (SMABTP)

[Adresse 3]

[Localit...

ARRÊT N°24/

SL

R.G : N° RG 22/01392 - N° Portalis DBWB-V-B7G-FYKE

SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TR AVAUX PUBLICS (SMABTP)

C/

S.A.R.L. AARON FREDERIC CONSTRUCTION

S.E.L.A.S. EGIDE

RG 1ERE INSTANCE : 2020J00163

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 19 JUIN 2024

Chambre commerciale

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT-DENIS en date du 31 AOUT 2022 RG n° 2020J00163 suivant déclaration d'appel en date du 22 SEPTEMBRE 2022

APPELANTE :

SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TR AVAUX PUBLICS (SMABTP)

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Guillaume jean hyppo DE GERY de la SELARL GERY-SCHAEPMAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

S.A.R.L. AARON FREDERIC CONSTRUCTION

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentant : Me Pierre HOARAU, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

PARTIE INTERVENANTE FORCEE :

S.E.L.A.S EGIDE représentée par Me [H] [J] ès qualités de liquidateur judiciaire de la S.A.R.L. AARON FREDERIC CONSTRUCTION

[Adresse 1]

[Localité 5]

CLOTURE LE : 29/01/2024

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 avril 2024 devant la cour composée de :

Président : Madame Séverine LEGER, Conseillère

Conseiller : Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère

Conseiller : Madame Anne-Charlotte LEGROIS, Vice-présidente placée affectée à la cour d'appel de Saint-Denis par ordonnance de Monsieur le Premier Président

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, la présidente a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 19 juin 2024.

Greffiere lors des débats et de la mise à disposition : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.

ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 19 juin 2024.

* * *

LA COUR

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La société Aaron Frédéric Construction a souscrit auprès de la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (ci-après SMABTP) un contrat d'assurance construction à effet du 1er janvier 2005 et un contrat d'assurance professionnelle à effet du 1er janvier 2014.

Aux termes des conditions générales de ces contrats, il a été convenu que le montant de la cotisation annuelle serait établi par l'assureur de manière provisionnelle, à charge pour l'assuré de déclarer en cours d'année les éléments permettant de déterminer son montant définitif et pour l'assureur, à défaut de cette déclaration, à majorer d'office la cotisation professionnelle de 50 %.

La SMABTP a adressé à la société Aaron Frédéric Construction en date du 26 décembre 2017 les comptes de cotisations définitives pour les exercices 2015 et 2016 à hauteur respective de 92767,32 euros et de 167 102,80 euros. Elle lui a adressé en date du 28 mai 2018 le montant de la cotisation définitive pour l'exercice 2017 à hauteur de 108 449,84 euros.

Se prévalant d'un arriéré de cotisations pour chacun de ces exercices, la SMABTP a fait assigner la société Aaron Frédéric Construction devant le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion par acte d'huissier du 19 août 2020 afin d'obtenir le paiement des sommes suivantes:

- 91 218,12 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 novembre 2015 au titre de l'arriéré des cotisations ;

- 3 035,69 euros en règlement des franchises contractuelles dont elle a fait l'avance dans les dossiers de sinistre construction ;

- 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

- 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Par jugement contradictoire du 31 août 2022, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion a :

- déclaré prescrite l'action en paiement de la SMABTP au titre des cotisations impayées ;

- condamné la société Aaron Frédéric Construction à payer à la SMABTP la somme de 3 035,69 euros au titre des factures dont elle a fait l'avance ;

- débouté les parties de leurs demandes d'indemnités en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- rappelé que le jugement est exécutoire de droit à titre provisoire ;

- condamné la société Aaron Frédéric Construction aux entiers dépens liquidés à la somme de 66,32 euros.

Par déclaration du 22 septembre 2022, la SMABTP a interjeté appel de cette décision.

L'affaire a été renvoyée à la mise en état par ordonnance du 5 octobre 2022.

L'appelante a notifié ses conclusions d'appel par voie électronique le 22 décembre 2022 et l'intimée s'est constituée le 31 janvier 2023.

Par ordonnance du 18 septembre 2023, l'interruption de l'instance a été constatée du fait de la liquidation judiciaire de la société Aaron Frédéric Construction suivant jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion du 22 mars 2023.

Par lettre du 25 septembre 2023 adressée au greffe de la cour, Maître Alix Brenac, membre de la Selas Egide, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Aron Frédéric Construction a indiqué que la SMABTP avait procédé à sa déclaration de créance pour un montant de 97 718,12 euros.

Par acte d'huissier du 5 juin 2023 remis à domicile, la SMABTP a assigné en intervention forcée Maître Alix Brenac, membre de la Selas Egide, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Aaron Frédéric Construction, lequel n'a pas constitué avocat.

Les conclusions d'appel lui ont été signifiées par acte d'huissier du 18 septembre 2023.

Par ordonnance du 29 janvier 2024, la procédure a été clôturée et l'affaire fixée à l'audience du 3 avril 2024 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe de la décision le 19 juin 2024.

La décision sera rendue par défaut en application des dispositions de l'article 473 du code de procédure civile.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS

Dans ses dernières conclusions n°2 notifiées par voie électronique le 14 septembre 2023, l'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré prescrite l'action en paiement de la SMABTP au titre des cotisations impayées et statuant à nouveau, de:

- juger la SMABTP recevable et bien fondée en son appel ;

- juger recevable et bien fondée l'intervention forcée régularisée par l'appelante ;

- juger que l'arrêt à intervenir sera déclaré commun et opposable à la Selas Egide prise en la personne de Maître [H] [J], désigné en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Aaron Frédéric Construction ;

- juger que les déclarations annuelles rectifiées pour les années 2015 et 2016 avec la mention expresse 'annule et remplace' transmises par la SARL Aaron Frédéric Construction à la SMABTP suivant courriel du 11 décembre 2017 marquent le point de départ du délai de prescription biennal prévu à l'article L114-1 du code des assurances ;

- juger qu'à compter de cette date s'est donc ouvert un délai de 2 ans lequel a pris fin le 11 décembre 2019 ;

- juger qu'avant l'expiration de ce délai, la SMABTP a adressé le 4 novembre 2019 en recommandé avec accusé de réception à la société Aaron Frédéric Construction une lettre de mise en demeure pour le règlement des cotisations définitives restant dues pour les exercices 2015/2016/2017 réceptionné par la partie adverse le 6 novembre 2019 ;

- juger qu'en application de l'article L114-2 du code des assurances cette LRAR constitue un acte interruptif faisant courir à compter de sa date un nouveau délai de prescription de deux ans lequel a expiré uniquement le 4 novembre 2021 ;

- juger par conséquent que l'assignation en paiement du 19 août 2020 est recevable car introduite avant l'expiration du délai biennal ;

- juger en tout état de cause que la prescription alléguée ne saurait en aucun cas concernent la cotisation définitive due au titre de l'année 2017 en considération de la déclaration de chiffre d'affaires de la société Aaron Frédéric Construction réalisée le 28 mai 2018 et de l'effet interruptif de la LRAR du 4 novembre 2019 ;

- rejeter tout moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription biennale prévue par l'article L114-1 du code des assurances ;

- juger que la SAARL Aaron Frédéric Construction a été défaillante dans l'exécution de son obligation de paiement des cotisations d'assurance définitives dues au titre des années 2015/2016/2017 ;

- juger que la SARL Aaron frédéric Construction est débitrice à l'égard de la SMABTP au titre des cotisations d'assurance définitives d'un montant de 91 218,12 euros ;

- juger que la créance de la SMABTP d'un montant de 91 218,12 euros devra être fixée au passif de la SARL Aaron Frédéric Construction avec intérêts au taux légal à compter de la lettre de mise en demeure du 23 novembre 2015 en règlement des cotisations définitives pour les années 2015,2016 et 2017;

- à défaut et conformément à la demande formée à titre subsidiaire, juger que la créance due au titre des cotisations impayées ne peut être inférieure à la somme de 71 053,80 euros et inscrire au passif de la SARL Aaron Frédéric Construction cette somme, avec intérêts au taux légal à compter de la lettre de mise en demeure du 23 novembre 2015 ;

- confirmer la condamnation de la SARL Aaron Frédéric Construction à payer à la SMABTP la somme de 3 035,69 euros en règlement des franchises contractuelles ;

En tout état de cause,

- juger que les manquements contractuels de la SARL Aaron Frédéric Construction sont pleinement caractérisés et que le préjudice financier et moral qui en a résulté pour la SMABTP doit être intégralement indemnisé ;

- juger que la créance de la SMABTP est fondée dans son principe comme dans son montant ;

- juger que la créance de la SMABTP d'un montant de 3 000 euros devra être fixée au passif de la SARL Aaron Frédéric Construction en réparation du préjudice subi par l'appelante du fait de la résistance abusive de l'assuré dans l'exécution de ses engagements contractuels ;

- fixer au passif de la SARL Aaron Frédéric Construction la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens dont distraction au profit de la SAS Géri-Schaepman.

La SARL Aaron Frédéric Construction n'a pas déposé de conclusions.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur l'intervention forcée :

L'appelante a délivré une assignation aux fins d'intervention forcée à l'encontre du mandataire liquidateur de la SARL Aaron Frédéric Construction ayant fait l'objet d'une liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion du 22 mars 2023. Elle a également justifié d'une déclaration de sa créance entre les mains du mandataire liquidateur par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 mai 2023.

La procédure est ainsi parfaitement régulière à l'égard de la société Aaron Frederic Construction qui ne peut faire l'objet d'une condamnation prononcée à son encontre mais dont l'appelante peut exercer son action aux fins de voir fixer sa créance au passif de la procédure collective de l'intimée.

Sur la prescription de l'action :

Selon l'article L114-1 du code des assurances, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance.

Toutefois, ce délai ne court :

1° En cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, que du jour où l'assureur en a eu connaissance ;

2° En cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s'ils prouvent qu'ils l'ont ignoré jusque-là.

En application de l'article L114-2 du code des assurances, l'interruption de la prescription peut résulter de l'envoi d'une lettre recommandée ou d'un envoi recommandé électronique avec accusé de réception adressés par l'assureur à l'assuré en ce qui concerne l'action en paiement de la prime.

Le tribunal a retenu que le point de départ de la prescription de l'action en paiement au titre des cotisations d'assurance devait être fixé à la date de l'échéance de la prime telle que déterminée par la police d'assurance soit en l'espèce au 1er janvier suivant chaque exercice et qu'aucun acte interruptif de prescription n'était intervenu dans le délai de deux ans antérieurement à la délivrance de l'assignation, la lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 6 novembre 2019 ne pouvant avoir eu d'effet interruptif sur une prescription déjà acquise.

L'appelante soutient que le point de départ de la prescription doit être fixé à la date du 11 décembre 2017, date de l'envoi d'un courriel par l'assuré dans lequel il était procédé aux déclarations rectificatives permettant la fixation du montant des échéances d'assurance par l'assureur, conformément aux stipulations de la police d'assurance pour le calcul des cotisations définitives des années 2015 et 2016.

L'appelante se prévaut d'une omission ou réticence de l'assuré qui a tardé à procéder à la déclaration de son chiffre d'affaires à l'assureur qui n'a ainsi été en mesure de procéder au réajustement du montant des cotisations des années 2015 et 2016 qu'à partir du 11 décembre 2017, raison pour laquelle le décompte de régularisation établi par l'assureur a été transmis le 26 décembre 2017.

Elle considère en outre que la déclaration de l'assuré effectuée à cette date doit s'analyser comme une reconnaissance par le débiteur du droit contre lequel il prescrit au sens de l'article 2240 du code civil et se prévaut des paiements de cotisations effectués jusqu'au 13 novembre 2017 valant également reconnaissance de dette.

Comme l'a très exactement relevé le premier juge, l'article 42-2 des conditions générales du contrat souscrit afférent aux modalités de calcul des cotisations, bien que faisant obligation à l'assuré de déclarer chaque année avant le 1er mars les assiettes du dernier exercice, n'emporte pas pour conséquence de reporter le point de départ de la prescription de l'action en paiement des cotisations d'assurance mais se contente de prévoir, à défaut de déclaration des éléments nécessaires au calcul de la cotisation annuelle, l'exigibilité d'une cotisation égale à celle de l'année précédente majorée de 50 %.

L'article 42-2-3 prévoit d'ailleurs que 'si vous ne réglez pas cette cotisation majorée, nous pourrons suspendre et résilier votre contrat dans les conditions indiquées à l'article 40 ci-avant, tout en conservant le droit de poursuivre en justice le recouvrement des sommes dues'.

L'argumentation développée par l'appelante est par conséquent inopérante et elle ne peut non plus prétendre au report du point de départ de la prescription fondé sur une prétendue omission de déclaration au sens de l'article L114-1 du code des assurances, lequel ne vise que l'omission afférente au risque couru et ne peut dès lors s'appliquer à la déclaration des encaissements prévue au contrat pour le calcul de la prime.

Il incombait par conséquent à l'assureur de faire diligence pour engager son action judiciaire en recouvrement des cotisations d'assurance impayées dans le délai de deux ans courant à compter de l'exigibilité des primes d'assurance conformément aux dates retenues par le premier juge soit à compter du 1er janvier 2016 pour l'exercice 2015, à compter du 1er janvier 2017 pour l'exercice 2016 et à compter du 1er janvier 2018 pour l'exercice 2017.

C'est également de manière pertinente et par des motifs exempts de toute critique que le premier juge a considéré que l'envoi par l'assuré à la date du 11 décembre 2017 des déclarations d'encaissement au titre des années 2015 et 2016 n'induisait pas la reconnaissance de l'existence d'une créance au profit de l'assureur puisque le montant de la cotisation d'assurance devait être établi par l'assureur et que la seule communication d'informations par l'assuré ne pouvait valoir approbation par anticipation de l'existence d'un surplus de prime au titre de la cotisation définitive non encore établie.

L'appelante justifie en revanche avoir adressé une lettre recommandée avec accusé de réception reçue par l'assuré le 6 novembre 2019 aux termes de laquelle il lui était demandé de régler la somme de 135 352,49 euros que le détail du décompte permet de ventiler comme suit :

- 16 540,89 euros au titre de la cotisation définitive de l'exercice 2016 ;

- 3 623,48 euros au titre de la cotisation définitive de l'exercice 2015 ;

- trois échéances de 38 396,04 euros chacune au titre d'une cotisation provisionnelle pour la période comprise entre le 1er avril 2017 et le 31 décembre 2017.

Comme l'a exactement retenu le premier juge, cette lettre recommandée n'a pu produire aucun effet interruptif de prescription s'agissant de l'action en recouvrement des échéances de cotisations des années 2015 et 2016 dont l'exigibilité était respectivement fixée au 1er janvier 2016 et au 1er janvier 2017 de sorte que le délai biennal de prescription était écoulé lors de l'envoi de cette lettre de mise en demeure.

L'action en paiement au titre des cotisations impayées des années 2015 et 2016 sera ainsi déclarée irrecevable pour cause de prescription par voie de confirmation du jugement déféré sur ce point.

C'est cependant à tort que le premier juge a considéré que le délai biennal de prescription était également écoulé pour les échéances trimestrielles provisionnelles de l'année 2017 alors que l'exigibilité de la cotisation annuelle 2017 doit être fixée au 1er janvier 2018 ainsi que l'avait retenu le tribunal.

Le délai biennal de prescription de l'action en recouvrement de la cotisation 2017, dont le point de départ courait à compter du 1er janvier 2018, a ainsi été régulièrement été interrompu par la lettre recommandée reçue le 6 novembre 2019, ce qui a eu pour effet de faire courir un nouveau délai de deux ans à compter de cette date.

L'assignation ayant été délivrée par l'assureur le 19 août 2020, l'action en recouvrement de la cotisation 2017 n'est pas éteinte par la prescription contrairement au jugement déféré qui sera réformé sur ce point et cette action sera déclarée recevable.

Sur la demande en paiement au titre des cotisations d'assurance :

L'appelante justifie du quantum des sommes restant dues au titre de la cotisation définitive d'assurance pour l'année 2017 à hauteur de 71 053,80 euros telle que calculée sur la base de la déclaration du chiffre d'affaires de l'assuré réalisée le 28 mai 2018 et il sera ainsi fait droit à la demande subsidiaire de l'appelante sur ce point.

La créance de l'appelante sera ainsi fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Aaron Frédéric construction pour ce montant de 71 053,80 euros sans qu'elle soit fondée à exciper du point de départ des intérêts légaux à compter de la lettre de mise en demeure du 23 novembre 2015, laquelle est sans lien avec la créance litigieuse qui n'était pas encore exigible à cette date.

Cette lettre de mise en demeure a en effet été adressée à l'assuré pour le règlement de cotisations de l'année 2014 et 2015 et cette demande ne peut par conséquent prospérer.

Sur la demande en paiement au titre des franchises :

L'appelante sollicite la confirmation du jugement déféré sur la condamnation prononcée à l'encontre de la société Aaron Frédéric Construction au paiement de la somme de 3 035,69 euros au titre des franchises impayées, somme établie par le décompte produit par l'appelante.

En l'absence de discussion sur ce chef de condamnation, ce chef de décision sera confirmé.

Sur la résistance abusive :

En l'absence de preuve d'un préjudice moral et financier éprouvé par l'appelante qui ne saurait découler du montant de la créance alléguée pour laquelle l'appelante a partiellement obtenu gain de cause, l'appelante sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive par voie de confirmation du jugement déféré sur ce point.

Sur les autres demandes :

Les entiers dépens de l'appel seront fixés au passif de la procédure collective de la SARL Aaron Frédéric Construction en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile au regard de la succombance de cette société.

L'équité commande par ailleurs d'allouer la somme de 3 000 euros à la SMABTP destinée à compenser les frais irrépétibles exposés par celle-ci au titre de l'article 700 du code de procédure civile et cette créance sera également fixée au passif de la procédure collective de la SARL Aaron Frédéric Construction.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré prescrite l'action en paiement de la SMABTP au titre des cotisations impayées ;

Statuant à nouveau sur ce chef,

Déclare irrecevable pour cause de prescription l'action en paiement de la SMABTP pour les cotisations d'assurance de l'année 2015 et de l'année 2016;

Déclare recevable l'action en paiement de la SMABTP pour les cotisations d'assurance de l'année 2017 ;

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Aaron Frédéric Construction la créance de la SMABTP pour un montant de 71 053,80 euros au titre de la cotisation définitive d'assurance pour l'année 2017 ;

Confirme le jugement déféré pour le surplus de ses dispositions soumises à la cour ;

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Aaron Frédéric Construction les entiers dépens de l'appel ;

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Aaron Frédéric Construction la créance de la SMABTP de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame Séverine LEGER, Conseillère, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 22/01392
Date de la décision : 19/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-19;22.01392 ?
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