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14/06/2024 | FRANCE | N°17/01869

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile ti, 14 juin 2024, 17/01869


ARRÊT N°2024/227

PC



R.G : N° RG 17/01869 - N° Portalis DBWB-V-B7B-E5UU





[G] VEUVE [K]



C/



[N]

[K]



[K]

[K]

[K]

[K]



























COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS



ARRET DU 14 JUIN 2024



Chambre civile TI







Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE SAINT-PIERRE en date du 02 OCTOBRE 2017 suivant déclaration d'a

ppel en date du 19 OCTOBRE 2017 rg n° 11-16-0007





APPELANTE :



Madame [W] [G] VEUVE [K]

[Adresse 5]

[Localité 10]



Représentant : Me Normane OMARJEE de la SELARL KER AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale...

ARRÊT N°2024/227

PC

R.G : N° RG 17/01869 - N° Portalis DBWB-V-B7B-E5UU

[G] VEUVE [K]

C/

[N]

[K]

[K]

[K]

[K]

[K]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRET DU 14 JUIN 2024

Chambre civile TI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE SAINT-PIERRE en date du 02 OCTOBRE 2017 suivant déclaration d'appel en date du 19 OCTOBRE 2017 rg n° 11-16-0007

APPELANTE :

Madame [W] [G] VEUVE [K]

[Adresse 5]

[Localité 10]

Représentant : Me Normane OMARJEE de la SELARL KER AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017008190 du 06/12/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIMÉS :

Madame [A] [O] [N] épouse [K]

[Adresse 6]

[Localité 10]

Représentant : Me Christel VIDELO CLERC, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/008190 du 06/12/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

Monsieur [F] [K]

[Adresse 6]

[Localité 10]

Représentant : Me Christel VIDELO CLERC, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/008190 du 06/12/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

PARTIE INTERVENANTE :

Monsieur [H] [U] [K]

[Adresse 5]

[Localité 10], représentant : Me Mohamad OMARJEE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Monsieur [T] [Z] [K]

[Adresse 5]

[Localité 10], représentant : Me Mohamad OMARJEE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Madame [R] [E] [K]

[Adresse 8]

[Localité 9], représentant : Me Christel VIDELO CLERC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Monsieur [X] [L] [K]

[Adresse 6]

[Localité 10], représentant : Me Christel VIDELO CLERC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

DATE DE CLOTURE: 28 septembre 2023

DÉBATS : en application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Mars 2024 devant Patrick CHEVRIER, président de chambre, assisté de Sarah HAFEJEE, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 14 Juin 2024.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Chantal COMBEAU, Présidente de chambre

Conseiller : Monsieur Vincent ALDEANO-GALIMARD, Président de chambre

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 14 Juin 2024.

* * *

Par jugement du 2 octobre 2017, le tribunal d'instance de SAINT-PIERRE a, à la demande des époux [F] [K] :

- ordonné l'expulsion des lieux occupés par Madame [W] [G], veuve de [C] [V] [K], et tous occupants de son chef, cadastrés AX n° [Cadastre 7], [Adresse 6] à [Localité 10], au besoin avec le concours de la force publique,

- accordé à Madame [W] [G] un délai de trois mois à compter de la signification du jugement pour libérer les lieux,

- dit qu'à défaut de respecter ce délai, Madame [W] [G] sera redevable d'une astreinte de 50,00 € par jour de retard limitée à six mois,

- condamné Madame [W] [G] à payer aux époux [F] [K] la somme de 2.000,00 € à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- rejeté la demande d'indemnité présentée par Madame [W] [G],

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Madame [W] [G] aux dépens de l'instance,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration au greffe de la cour d'appel de SAINT-DENIS du 19 octobre 2017, Madame [W] [G] a interjeté appel de cette décision.

Par arrêt avant dire droit du 15 mars 2019, la cour a ordonné à Madame [W] [G] de mettre en cause l'ensemble des successibles de [C] [V] [K], les mineurs étant représentés par leur représentant légal, cette mise en cause pouvant s'effectuer par une intervention volontaire ou par une assignation en intervention forcée,

- révoqué l'ordonnance de clôture,

- réservé les demandes et les dépens.

Madame [W] [G] ès qualités de représentante légale de ses enfants mineurs [H] et [T] est intervenue volontairement à l'instance.

* * *

Par arrêt avant dire droit en date du 30 octobre 2020, la cour d'appel a statué en ces termes :

Donne acte à Madame [W] [G] de son intervention volontaire ès qualités de représentante légale de ses enfants mineurs [T] [Z] [K] et [H] [U] [K],

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- ordonné l'expulsion des lieux occupés par Madame [W] [G] et tous occupants de son chef, cadastrés AX n° [Cadastre 7], [Adresse 6] à [Localité 10], au besoin avec le concours de la force publique,

- accordé à Madame [W] [G] un délai de trois mois à compter de la signification du jugement pour libérer les lieux,

- dit qu'à défaut de respecter ce délai, Madame [W] [G] sera redevable d'une astreinte de 50,00 € par jour de retard limitée à six mois,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame [W] [G] de sa demande d'indemnité,

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit que Madame [W] [G] à titre personnel et ès qualités de représentante légale de ses enfants mineurs a droit à l'indemnité prévue au 3ème alinéa de l'article 555 du code civil,

Avant dire droit sur le calcul de cette indemnité, ordonne une expertise et désigne pour y procéder Madame [M] [D] [P], demeurant [Adresse 1], avec pour mission, notamment de :

- décrire la construction y édifiée,

- déterminer la valeur que cette construction a conférée au fonds,

- déterminer le coût des matériaux et le prix de la main-d''uvre estimés à la date du remboursement, compte tenu de l'état dans lequel se trouve la construction,

- déterminer la valeur locative de l'habitation,

- d'une façon générale, donner tous éléments propres à apporter une solution définitive au litige.

Après changement d'expert, Monsieur [Y] [J] a déposé son rapport définitif le 13 septembre 2021.

***

Une première ordonnance de clôture est intervenue le 5 avril 2022 pour renvoi de l'affaire à une audience d'incident du 3 mai 2022, tenant compte du décès de Monsieur [F] [K], décédé le [Date décès 3] 2019 en cours d'instance.

Une nouvelle ordonnance d'incident a été rendue le 13 juillet 2023 recevant l'intervention de Monsieur [X] [L] [K], majeur sous curatelle renforcée, et de Madame [R] [E] [K] en sa qualité personnelle et en sa qualité de curatrice de son frère.

Madame [W] [G], Veuve [K], a déposé ses conclusions après expertise le 30 novembre 2021.

Madame [A] [O] [N], épouse [K], et son époux, décédé depuis, Monsieur [F] [K], ont remis leurs dernières conclusions par RPVA le 16 février 2022.

Puis, Monsieur [X] [L] [K] et sa s'ur, Madame [R] [E] [K], en sa qualité personnelle et en sa qualité de curatrice de son frère, indivisaires de la succession de Feu [F] [K], sont intervenus volontairement par conclusions du 19 août 2022.

La clôture est intervenue le 28 septembre 2023.

***

Selon le dispositif de ses dernières conclusions remises le 30 novembre 2021, Madame [W] [G], Veuve [K], demande à la cour de :

DONNER ACTE à Monsieur [H] [K] de son intervention volontaire,

DÉCLARER recevable la demande d'intervention volontaire de Monsieur [H] [K],

DÉCLARER recevables les prétentions formulées par Monsieur [H] [K], Madame [W] [G], en son nom et ès qualité de représentante légale de l'enfant mineur [T] [K],

En outre,

INFIRMER le jugement du Tribunal d'Instance de Saint Pierre rendu le 2 octobre 2017 en ce qu'il a :

Rejeté la demande d'indemnité présentée par Madame [W] [G], veuve [K] ;

Rejeté les demandes formulées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau :

A TITRE PRINCIPAL,

JUGER que Madame [A] [O] [N] épouse [K] et Monsieur [F] [K] sont solidairement redevables envers Monsieur [H] [K] et Madame [W] [G], en son nom personnel et en sa qualité de représentante légale de l'enfant mineur [T] [K], du paiement de la somme, à leur choix, de 175.000 euros au titre de la valeur que la construction a apporté au fonds ou de 150.000 € représentant le coût des matériaux et de la main d''uvre au jour où le juge statue, au titre de l'article 555 du code civil ;

DEBOUTER Madame [A] [O] [N] épouse [K] et Monsieur [F] [K] de toutes leurs demandes, fins et conclusions;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER Madame [A] [O] [N] épouse [K] et Monsieur [F] [K] à payer à Monsieur [H] [K] et Madame [W] [G], en son nom personnel et en sa qualité de représentante légale de l'enfant mineur [T] [K], la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles.

***

Aux termes de leurs dernières conclusions, remises par RPVA le 16 février 2022, Madame [N], épouse [K], et son mari, décédé depuis, demandent à la cour de :

« A titre principal :

- DIRE ET JUGER qu'il y a lieu de confirmer le jugement rendu le 02 octobre 2017 par le Tribunal d'instance de Saint-Pierre en ce qu'il a :

$gt; Condamné Mme [W] [G] veuve [K] à payer la somme de 2 000 € à Mme [A] [O] [N] épouse [K] et M. [F] [K] à titre de dommages et intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

$gt; Condamné Mme [W] [G] veuve [K] aux dépens de l'instance ;

- DEBOUTER Monsieur [H] [K] et Madame [G] en sa qualité personnelle et en sa qualité de représente légale de l'enfant mineur [T] [K] de toute leurs demandes,

- CONSTATER que pour satisfaire aux exigences de l'article 555 du Code Civil les époux [K] font le choix d'indemniser les consorts [K]-[G] à hauteur du coût des travaux et de la main d''uvre soit à la somme de 113.352.99 euros telle que fixée par l'Expert ;

- FIXER l'indemnisation des consorts [K]-[G] à la somme de 113.352.99 euros telle que fixée par l'Expert ;

- CONDAMNER les consorts [K]-[G] à payer aux époux [G] la somme de 60.000 euros au titre des fruits perçus ;

- CONDAMNER par les consorts [K]-[G] à payer au époux [K] la somme de 61.800 euros au titre de la perte de chance de percevoir des loyers plus élevés ;

- JUGER qu'il y a lieu à compensation entre la créance des époux [K] à l'encontre des consorts [K]-[G] et la créance des consorts [K]-[G] à l'encontre de celle des époux [K] ;

- JUGER qu'après compensation les consorts [K]-[G] sont redevables de la somme de la somme de 53.352.99 euros aux époux [G]. 

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

- CONDAMNER les consorts [K]-[G] aux entiers dépens.»

***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées, figurant au dossier de la procédure, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » lorsqu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

Sur les interventions :

La cour d'appel a déjà reçu l'intervention volontaire de Madame [W] [G], ès qualités de représentante légale de ses enfants mineurs [T] [Z] [K] et [H] [U] [K].

Il n'y a plus lieu de statuer de ce chef tout en relevant néanmoins que [H] [U] [K] est né le [Date naissance 4] 2003, selon les mentions des conclusions d'incident, du 6 mars 2023. Il est donc majeur et n'a plus besoin de représentation de sa mère.

[T] [Z] [K] est né le [Date naissance 2] 2007. Il est encore mineur.

Pour les intimés, Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K] en sa qualité personnelle et en sa qualité de curatrice de son frère interviennent volontairement en qualité d'ayants droits de Feu [F] [K], décédé en cours d'instance.

Le conseiller de la mise en état ayant déjà déclaré recevable leur intervention volontaire, il n'y a pas lieu de statuer.

Compte tenu de ces événements procéduraux, les appelants sont donc Madame [A] [N], Veuve [K] et ses deux enfants, Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K].

Les intimés sont désormais Madame [W] [G], Veuve [K], et ses enfants, [H] [U] [K], majeur, ainsi que [T] [Z] [K], encore mineur, représenté par sa mère.

Sur le périmètre du litige résiduel après l'arrêt du 30 octobre 2020 :

L'arrêt du 30 octobre 2020 a donné acte à Madame [W] [G] de son intervention volontaire ès qualités de représentante légale de ses enfants mineurs [T] [Z] [K] et [H] [U] [K], confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné sous astreinte l'expulsion des lieux occupés par Madame [W] [G] et tous occupants de son chef, cadastrés AX n° [Cadastre 7], [Adresse 6] à [Localité 10].

Il l'a infirmé seulement sur le rejet de la demande d'indemnité formée par Madame [W] [G], à titre personnel et ès qualités de représentante légale de ses enfants mineurs, en application du troisième alinéa de l'article 555 du code civil.

Pour statuer sur cette demande d'indemnisation, une expertise a été ordonnée.

C'est donc au regard de cette expertise et des développements des parties sur les conséquences de l'application de l'article 555 du code civil que la cour doit encore statuer.

Mais Madame [N], épouse [K], et son mari, décédé, aux droits duquel viennent Monsieur [X] [L] [K] et sa s'ur, Madame [R] [E] [K], demandent aussi à la cour « de confirmer le jugement rendu le 02 octobre 2017 par le Tribunal d'instance de Saint-Pierre en ce qu'il a condamné Mme [W] [G] veuve [K] à payer la somme de 2 000 € à Mme [A] [O] [N], épouse [K] et M. [F] [K] à titre de dommages et intérêts au taux légal à compter du présent jugement. »

En effet, la cour a aussi réservé les autres demandes sans trancher cette prétention. Il conviendra donc d'y répondre.

Les appelants plaident pour la fixation de l'indemnisation des consorts [K]-[G] à la somme de 113.352.99 euros telle que fixée par l'Expert mais de les condamner aussi à leur payer la somme de 60.000 euros au titre des fruits perçus, celle de 61.800 euros au titre de la perte de chance de percevoir des loyers plus élevés, et d'ordonner la compensation des sommes dues réciproquement pour considérer finalement que « les consorts [K]-[G] sont redevables de la somme de la somme de 53.352.99 euros aux époux [G]. »

Madame [W] [G], veuve [K], et ses enfants, plaident pour que la valeur du fonds soit fixée à 175.000,00 euros ou que la valeur des matériaux soit fixée à la somme de 150.000,00 euros.

Mais ils n'ont pas conclu sur la demande de dommages et intérêts bénéficiant au couple [N]/ [K].

Sur la demande de dommages et intérêts :

Le tribunal a condamné Mme [W] [G] veuve [K] à payer la somme de 2 000 € à Mme [A] [O] [N], épouse [K] et M. [F] [K] à titre de dommages et intérêts au taux légal à compter du présent jugement.

En l'absence de griefs formulés à cet égard dans les dernières conclusions des appelants, la cour ne peut que confirmer le jugement de ce chef.

Sur l'indemnité due à Madame [W] [G] :

La cour d'appel a ordonné une expertise technique afin de déterminer le montant de l'indemnité due à Madame [W] [G] à titre personnel et à ses enfants, en application de l'article 555 du code civil.

Madame [W] [G] et ses enfants sollicitent la somme de 175.000 euros au titre de la valeur que la construction ou de 150.000 euros représentant le coût des matériaux, au choix des intimés.

Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, optent pour l'indemnité fondée sur le coût des matériaux et de la main d''uvre qu'ils évaluent à la somme de 113.352,99 euros, à dire de l'expert.

Sur ce,

Aux termes de l'article 555 du code civil, lorsque les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers et avec des matériaux appartenant à ce dernier, le propriétaire du fonds a le droit, sous réserve des dispositions de l'alinéa 4, soit d'en conserver la propriété, soit d'obliger le tiers à les enlever.

Si le propriétaire du fonds exige la suppression des constructions, plantations et ouvrages, elle est exécutée aux frais du tiers, sans aucune indemnité pour lui ; le tiers peut, en outre, être condamné à des dommages-intérêts pour le préjudice éventuellement subi par le propriétaire du fonds.

Si le propriétaire du fonds préfère conserver la propriété des constructions, plantations et ouvrages, il doit, à son choix, rembourser au tiers, soit une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur, soit le coût des matériaux et le prix de la main-d''uvre estimés à la date du remboursement, compte tenu de l'état dans lequel se trouvent lesdites constructions, plantations et ouvrages.

Si les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers évincé qui n'aurait pas été condamné, en raison de sa bonne foi, à la restitution des fruits, le propriétaire ne pourra exiger la suppression desdits ouvrages, constructions et plantations, mais il aura le choix de rembourser au tiers l'une ou l'autre des sommes visées à l'alinéa précédent.

En l'espèce, les intimés optent pour le coût des matériaux et le prix de la main-d''uvre estimés à la date du remboursement.

Selon l'expert judiciaire, le coût de la main d''uvre et des matériaux doit être estimé à la somme de 113.352,99 euros TTC (Page 36 du rapport).

Pour parvenir à cette somme, l'expert a synthétisé les factures et les bons de livraison qui lui ont été communiqués, à hauteur de 37.155,71 euros TTC. Il a ajouté le montant des prestations à partir de devis validés, pour 6.072,28 euros TTC, puis évalué le temps de travail pour estimer le coût de la main d''uvre à 70.125,00 euros pour 8500 heures.

Le total de ces montants correspond bien à la somme de 113.352,99 euros.

Les appelants plaident pour que le coût des matériaux et de la main d''uvre soit fixé à la somme de 150.000,00 euros. Ils reprochent à l'expert de ne pas avoir tenu compte du coût réel des matériaux, en le sous-évaluant, en particulier s'agissant des matériaux bois. Selon les appelants, ayant souligné la qualité de menuiseries en bois massif, l'expert n'a pas tiré les conséquences de ses constatations dans sa réponse au dire qui lui a été adressé (« prestations de bonne qualité : carrelage, menuiseries bois massif, sanitaires »).

Le dire du conseil des appelants, en date du 24 août 2021, Annexe A4 du rapport d'expertise, énonce à ce sujet que : « S'agissant du coût des matériaux il convient de souligner que les factures transmises ne représentent pas la totalité des factures. La perspective au moment de la construction n'était pas celle d'un procès. En particulier, les factures s'agissant du matériau boit n'ont pu être retrouvé. Or vous avez pu constater, lors de votre visite des lieux, la qualité des aménagements en bois massif réalisé par feu [V] [K], qui comptait lancer une activité de menuiseries. Vous en relevez l'existence et en soulignez la qualité. Dès lors le montant de 37 155,71 euros ne sauraient représenter l'ensemble du coût des matériaux. Il vous est demandé de bien vouloir intégrer au coût de la construction les menuiseries en bois massif. »

L'Expert n'a pas répondu à ces observations dans son rapport définitif tout en reprenant exactement la somme contestée par l'avocat des appelants.

Or, il est certain que celui-ci aurait dû expliquer pourquoi il ne prenait pas en compte certains matériaux dont il avait pourtant la certitude de la qualité et de leur utilisation dans la construction litigieuse.

Ainsi, il est équitable, en l'absence de justificatifs mais en compréhension de l'impossibilité matérielle de fournir certaines factures, de relever le montant des matériaux de 25 %,

La somme estimée par l'expert de 37.155,71 euros doit être augmentée d'un quart, soit de 9.289 euros, portant ainsi le coût actualisé et complété des matériaux à la somme de 46.444,71 euros TTC, arrondie à la somme de 46.445,00 euros.

Eu égard à la valeur des prestations, validées, pour 6.072,28 euros TTC, et du coût de la main d''uvre fixé à la somme de 70.125,00 euros, il convient de fixer le montant de l'indemnité due en application de l'article 555 du code civil à la somme définitive de 122.642,28 euros.

Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], seront donc condamnés à payer à Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K], la somme de 122.642,28 euros au titre de l'indemnité de l'article 555 du code civil.

Sur le remboursement des fruits perçus par les intimés :

Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], réclament le remboursement des fruits perçus par l'appelante et les ayants droits de son époux défunt, constitués par les loyers reçus pour l'appartement du bas depuis le 1er janvier 2012 à hauteur de 500,00 euros par mois, alors que la valeur locative a été proposée par l'expert à hauteur de 1.015,00 euros par mois.

Madame [W] [G] et ses enfants n'ont pas discuté cette demande dans leurs dernières écritures.

Sur ce,

Vu les articles 2, 4 et 5 du code de procédure civile ;

En l'absence de contestation de la demande par Madame [W] [G] et ses enfants, qui ont eu largement le temps de répondre à cette prétention, il convient de l'accueillir.

Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K] seront condamnés à payer à Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], la somme de 60.000 euros au titre des fruits perçus.

Sur le préjudice financier :

Vu les articles 2, 4 et 5 du code de procédure civile ;

Les intimés sollicitent en outre la condamnation des Consorts [K]-[G] à leur payer la somme de 61.800 euros au titre de la perte de chance de percevoir des loyers plus élevés. Au soutien de cette prétention, ils affirment que le montant des loyers perçus a été minoré de moitié, conformément à l'appréciation de la valeur locative de l'expert.

Sur ce point, les appelants n'ont pas répliqué à cette demande dans leurs dernières conclusions.

La cour d'appel ne peut qu'y faire droit.

Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K] seront condamnés à payer à Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], la somme de 61.800 euros au titre de la perte de chance de percevoir des loyers plus élevés.

Sur la compensation :

Aux termes de l'article 1347 du code civil, la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes.

Elle s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies.

Selon les articles 1348 et 1348-1 du même code, la compensation peut être prononcée en justice, même si l'une des obligations, quoique certaine, n'est pas encore liquide ou exigible. A moins qu'il n'en soit décidé autrement, la compensation produit alors ses effets à la date de la décision.

Le juge ne peut refuser la compensation de dettes connexes au seul motif que l'une des obligations ne serait pas liquide ou exigible.

Dans ce cas, la compensation est réputée s'être produite au jour de l'exigibilité de la première d'entre elles.

Dans le même cas, l'acquisition de droits par un tiers sur l'une des obligations n'empêche pas son débiteur d'opposer la compensation.

Il résulte de ce qui précède que Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K] sont créanciers de Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur, pour la somme de 122.642,28 euros au titre de l'indemnité de l'article 555 du code civil.

Ils sont en même temps débiteurs de la somme de 121.800,00 euros au titre de l'indemnisation des fruits perçus et du préjudice financier résultant de la perte de chance de percevoir des loyers plus élevés.

Il convient de faire droit à la demande de compensation en l'absence de contestation sur ce point de la part des appelants.

Après compensation de ces sommes, Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K] restent créanciers de Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur, pour la somme de 842,28 euros.

En conséquence, Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], doivent être condamnés à payer à Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K], la somme de 842,28 euros après compensation des sommes dues réciproquement.

Sur les autres demandes :

Il est équitable de laisser les parties supporter leurs propres dépens et de rejeter la demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du Code de procédure civile,

Vu l'arrêt mixte du 30 octobre 2020 ;

Vu les ordonnances d'incident ;

Vu le rapport d'expertise déposé le 13 septembre 2021 ;

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme [W] [G], Veuve [K], à payer la somme de 2 000 euros à Mme [A] [O] [N], épouse [K] et M. [F] [K], à titre de dommages et intérêts ;

FIXE le montant de l'indemnité due en application de l'article 555 du code civil à la somme définitive de 122.642,28 euros ;

CONDAMNE Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], à payer à Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K], la somme de 122.642,28 euros au titre de l'indemnité de l'article 555 du code civil ;

CONDAMNE Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K] à payer à Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], la somme de 60.000 euros au titre des fruits perçus ;

CONDAMNE Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K] à payer à Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], la somme de 61.800 euros au titre de la perte de chance de percevoir des loyers plus élevés ;

ORDONNE la compensation entre les sommes dues réciproquement par les parties ;

En conséquence,

CONDAMNE Madame [N], Veuve [K] et ses enfants, ayants droits de Feu [F] [K], Monsieur [X] [L] [K] majeur sous curatelle renforcée et Madame [R] [E] [K], à payer à Madame [W] [G], Veuve [K], et à ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K], la somme de 842,28 euros après compensation des sommes dues réciproquement ;

DEBOUTE Madame [W] [G], Veuve [K], et ses deux enfants, [T] [Z] [K], représenté par sa mère, et [H] [U] [K], de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

LAISSE les parties supporter leurs propres dépens.

Le présent arrêt a été signé par monsieur Patrick CHEVRIER, président de chambre, et par Sarah HAFEJEE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

SIGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre civile ti
Numéro d'arrêt : 17/01869
Date de la décision : 14/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-14;17.01869 ?
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