Arrêt N°23/
SP
R.G : N° RG 21/02030 - N° Portalis DBWB-V-B7F-FUMB
[V]
C/
Etablissement Public PRESIDENT DU TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT-P IERRE
LE PROCUREUR GENERAL DE SAINT-DENIS
Etablissement Public AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT (TRESOR PUBLIC)
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
ARRÊT DU 31 MAI 2023
Chambre commerciale
Appel d'une ordonnance rendue par le PRESIDENT DU TC DE [Localité 8] en date du 08 NOVEMBRE 2021 suivant déclaration d'appel en date du 30 NOVEMBRE 2021 rg n° 2021003254
APPELANT :
Monsieur [L] [V] représentant légal de la Société SELARL DR [V] [L], dont le siège social est [Adresse 1], immatriculé au RCS de [Localité 8] de la Réunion sous le numéro 505 136 655
[Adresse 6]
[Localité 9]
Représentant : Me Stéphane BIGOT, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
INTIMEES :
Etablissement Public PRESIDENT DU TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT-P IERRE
[Adresse 3]
[Localité 8]
Madame LE PROCUREUR GENERAL DE SAINT-DENIS
[Adresse 2]
[Localité 7]
Etablissement Public AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT (TRESOR PUBLIC)
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentant : Me Audrey BOUVIER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
CLÔTURE LE : 08 mars 2023
DÉBATS : en application des dispositions des articles 760 à 762 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Mars 2023 devant la cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère
Conseiller : Monsieur Franck ALZINGRE, Conseiller
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le Président a indiqué que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 31 Mai 2023.
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 31 Mai 2023.
Greffiere lors des débats et de la mise à disposition : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.
* * * * *
LA COUR
Par ordonnance du 21 septembre 2021, le président du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre de la Réunion a :
-enjoint à M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L], de procéder au dépôt des comptes des exercices clos le 31 décembre 2020, le 31 décembre 2019 et le 31 décembre 2018, dans le mois de la notification de la présente ordonnance, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à compter de la notification de ladite ordonnance';
-fixé une audience le 8 novembre 2021 à 16h30 pour statuer sur la liquidation de cette astreinte en l'absence de régularisation des pièces comptables d'ici là et en ordonnance la comparution de M. [V], à ladite audience';
-dit que les dépens de l'ordonnance et sa notification sont liquidés à la somme de 26,83 euros TTC mis à la charge de la SELARL Dr [V] [L], y compris le coût de la signification si nécessaire';
- ordonné l'exécution provisoire.
Par ordonnance du 8 novembre 2021, le président du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre de la Réunion a :
-liquidé l'astreinte due par M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L] au Trésor Public à la somme de 14.850 euros';
-condamné en tant que de besoin M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L] à payer la somme de 14.900 euros au Trésor Public sur avis de ce dernier qui recouvrera comme en matière de créance étrangères à l'impôt';
-dit en outre qu'il devra supporter les dépens de la présente instance, liquidés pour frais de greffe à la somme de 12,90 euros ainsi que ceux de la signification à venir pour mémoire entre les mains de l'huissier instrumentaire';
-dit que la présente sera conformément à l'article R611-16 du code de commerce communiquée au trésor Public et signifiée à la diligence du Greffier';
-dit qu'il nous en sera référé par voie de requête en cas de difficultés.
M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L] a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration du 30 novembre 2021 et intimé le président du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre, le procureur général de Saint Denis et l'agent judiciaire de l'état (AJE).
M. [V] a déposé ses premières conclusions d'appel par RPVA le 28 février 2022.
L'affaire a été fixée à bref délai selon avis en date du 7 mars 2022.
L'appelant a signifié la déclaration d'appel et ses premières conclusions au président du tribunal mixte de commerce (remise à domicile), au procureur général de Saint Denis (remise à personne morale) et à l'AJE (remise à personne morale) par actes du 9 mars 2022.
L'agent judiciaire de l'état (AJE) s'est constituée par acte du 5 avril 2022.
L'AJE a déposé ses conclusions d'intimée par RPVA le 7 avril 2022.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 20 septembre 2022, M. [V] demande à la cour de':
-déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par M. [V]';
Y faisant droit,
-infirmer la décision entreprise';
Et, statuant à nouveau,
A titre liminaire,
-débouter l'AJE de toutes ses demandes, sa mise hors de cause n'étant pas justifiée';
Au principal,
-dire et juger que la SELARL Dr [V] [L] n'est pas soumise à l'obligation de dépôt des comptes annuels';
En conséquence
-dire et juger n'y avoir lieu à astreinte contre M. [V]';
Subsidiairement,
-dire et juger que l'étendue et la portée de l'ordonnance du 21 septembre 2021 est ambiguë';
En conséquence,
-dire et juger que l'astreinte n'a pas pu commencer à courir du fait de cette ambiguïté';
-dire et juger n'y avoir lieu à astreinte contre M. [V]';
Plus subsidiairement,
-donner acte à M. [V] de sa bonne foi et de la régularisation du dépôt des comptes annules demandés
En conséquence,
-réduire à néant le montant de l'astreinte prononcée contre lui';
En tout état de cause,
-statuer ce que de droit sur les dépens.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 7 novembre 2022, l'AJE demande à la cour, au visa de l'article 38 de la loi n°55-366 du 3 avril 1955 relative au développement des crédits affectés aux dépenses du ministère des finances et des affaires économiques, de':
-prononcer la mise hors de cause l'AJE';
-débouter M. [V] de toutes ses demandes à l'encontre de l'AJE';
-condamner M. [V] à payer à l'AJE la somme de 1.800 euros au titre des frais irrépétibles';
-laisser les dépens à la charge de l'appelant.
Ni le président du tribunal mixte de commerce de Saint Denis de la Réunion, ni le procureur général de la cour d'appel de Saint Denis de la Réunion n'ont constitué avocat.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l'exposé de leurs prétentions et moyens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 mars 2023 et l'affaire a reçu fixation pour être plaidée à l'audience de circuit court du 15 mars 2023. Le prononcé de l'arrêt, par mise à disposition du greffe, a été fixé au 31 mai 2023.
SUR CE, LA COUR
A titre liminaire
La cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.
Elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de «'constatations'» ou de «'dire et juger'» qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Sur la mise hors de cause de l'AJE
Sur le fondement de l'article 38 de la loi n°55-366 du 3 avril 1955, l'AJE soutient que dès lors que l'action formée contre l'État n'a pas pour objet principal une demande pécuniaire et que toute demande concernant des condamnations pécuniaires accessoires n'entre pas dans le champ de compétence de l'AJE, telles les demandes d'astreinte et de liquidation d'astreinte., l'AJE doit être mis en cause.
M. [V] fait valoir pour l'essentiel que la liquidation d'astreinte n'a rien d'accessoire au présent litige, s'agissant de son objet principal et en déduit que la mise hors de cause de l'AJE n'est pas justifiée.
Sur quoi,
Aux termes de l'article 38 alinéa 1er de la loi n°55-366 du 3 avril 1955':
«'Toute action portée devant les tribunaux de l'ordre judiciaire et tendant à faire déclarer l'État créancier ou débiteur pour des causes étrangères à l'impôt et au domaine doit, sauf exception prévue par la loi, être intentée à peine de nullité par ou contre l'agent judiciaire de l'État.'»
La compétence de l'agent judiciaire du Trésor suppose une action engagée devant les juridictions de l'ordre judiciaire et tendant à l'obtention de condamnations pécuniaires à titre principal.
Les dispositions de cet article 38 s'entendent strictement. Ainsi, l'agent judiciaire du Trésor ne saurait être mis en cause si l'action ne tend pas à faire déclarer l'État débiteur, si aucune action indemnitaire n'est formée à titre principal contre l'État dans l'instance en cours.
En l'espèce, la condamnation à payer une somme au titre de la liquidation d'une astreinte n'est pas formée à titre principal mais à titre accessoire à la demande principale d'injonction de déposer les comptes annuels.
Dans ces conditions, il y a lieu de mettre hors de cause l'AJE.
Sur la liquidation de l'astreinte
A l'appui de son recours, sur le fondement des articles L611-2 II et L611-2-1 du code de commerce, M. [V] soutient à titre principal que l'astreinte n'est pas due, la SELARL Doc [V] [L] n'ayant pas l'obligation de déposer ses comptes annules au greffe de commerce. Il fait valoir que les SELARL sont des sociétés commerciales par la forme mais civiles par l'objet et que compte tenu du fait que l'extension des dispositions de l'article L611-2 par l'article L611-2-1 ne concerne pas le II de cet article, il en résulte que cet article ne s'applique pas aux SELARL.
A titre subsidiaire, M. [V] soutient que l'astreinte doit être supprimée en raison de l'ambiguïté affectant son étendue et sa portée. Il fait valoir qu'il appartient au juge saisi d'une demande de liquidation d'une astreinte de s'assurer, au besoin d'office, que l'astreinte a commencé à courir et de déterminer son point de départ, le créancier ayant la charge de prouver la date de la notification. Or, en l'espèce, tandis que l'ordonnance présidentielle du 21 septembre 2021 lui ordonnait de déposer au greffe les comptes de sa société pour les trois derniers exercices, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de cette ordonnance, le courrier de notification de cette ordonnance a modifié le sens de cette ordonnance en rajoutant des documents non prévus dans l'ordonnance, à savoir le procès-verbal d'assemblée générale ou la résolution d'affectation du résultat, le rapport du commissaire aux comptes, le cas échéant, ainsi qu'un chèque de règlement du coût des dépôts des comptes annuels et frais de procédure. Il estime que cette contradiction entre ces documents ne lui a pas permis d'identifier avec précision l'étendue de ses obligations et l'a privé d'une compréhension claire et intelligible du sens et de la portée de cette décision de justice. Il en déduit que cette ambiguïté a empêché de faire courir cette astreinte dans la mesure où elle affecte le courrier de notification de cette ordonnance qui est censée être le point de départ de ce délai.
Enfin, sur le fondement de l'article L131-4 du code des procédures civiles d'exécution, M. [V] soutient que le montant de l'astreinte doit être réduit à néant en raison de sa bonne foi. Il fait valoir qu'il tient une comptabilité et fait établi ses bilans par un professionnel et que son comptable lui a confirmé que les SELARL n'étaient pas soumises à cette formalité. Il ajoute que depuis, il a procédé au dépôt des bilans au greffe. Il sollicite l'indulgence de la cour.
M. [V] verse aux débats, notamment':
-les bilans des exercices 2018, 2019 et 2020';
-les récépissés de dépôts des comptes et bilans annuels du greffe datés du 28 février 2022';
-un courriel de son comptable daté du 16 décembre 2021 lui confirmant que les SELARL ayant un objet civil, le dépôt des comptes sociaux n'est pas une obligation mais une option.
Sur quoi,
D'une part,
Aux termes de l'article L611-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige (modifié par la loi n°2015-1268 du 14 octobre 2015 et antérieurement à l'ordonnance du n°2021-1193 du 15 septembre 2021 qui, conformément au I de l'article 73 de l'ordonnance n'est pas applicables aux procédures en cours au jour de l'entrée en vigueur de ladite ordonnance, soit le 1er octobre 2021)
«'I.-Lorsqu'il résulte de tout acte, document ou procédure qu'une société commerciale, un groupement d'intérêt économique, ou une entreprise individuelle, commerciale ou artisanale connaît des difficultés de nature à compromettre la continuité de l'exploitation, ses dirigeants peuvent être convoqués par le président du tribunal de commerce pour que soient envisagées les mesures propres à redresser la situation.
A l'issue de cet entretien ou si les dirigeants ne se sont pas rendus à sa convocation, le président du tribunal peut, nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire, obtenir communication, par les commissaires aux comptes, les membres et représentants du personnel, les administrations publiques, les organismes de sécurité et de prévoyance sociales ainsi que les services chargés de la centralisation des risques bancaires et des incidents de paiement, des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière du débiteur.
II.-Lorsque les dirigeants d'une société commerciale ne procèdent pas au dépôt des comptes annuels dans les délais prévus par les textes applicables, le président du tribunal peut, le cas échéant sur demande du président d'un des observatoires mentionnés à l'article L910-1 A, leur adresser une injonction de le faire à bref délai sous astreinte.
Si cette injonction n'est pas suivie d'effet dans un délai fixé par décret en Conseil d'État, le président du tribunal peut également faire application à leur égard des dispositions du deuxième alinéa du I.
Le II est applicable, dans les mêmes conditions, à tout entrepreneur individuel à responsabilité limitée qui ne procède pas au dépôt des comptes annuels ou documents mentionnés au premier alinéa de l'article L526-14, lorsque l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine est affecté est commerciale ou artisanale.'»
Et l'article L611-2-1 du même code dispose':
«'Les dispositions du I de l'article L611-2 sont applicables, dans les mêmes conditions, aux personnes morales de droit privé et aux personnes physiques exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. Pour l'application du présent article, le tribunal judiciaire est compétent et son président exerce les mêmes pouvoirs que ceux conférés au président du tribunal de commerce.
Par exception, lorsque la personne physique ou morale concernée exerce la profession d'avocat, d'administrateur judiciaire, de mandataire judiciaire ou d'officier public ou ministériel, le président du tribunal judiciaire ne procède qu'à l'information de l'ordre professionnel ou de l'autorité compétente dont elle relève, sur les difficultés portées à sa connaissance relativement à la situation économique, sociale, financière et patrimoniale du professionnel.'»
Il résulte des dispositions de l'article L611-2 II du code de commerce que lorsque les dirigeants d'une société commerciale ne procèdent pas au dépôt des comptes annuels dans les délais prévus par les textes applicables, le président du tribunal peut, le cas échéant, sur demande du président d'un des observatoires mentionnés à l'article L910-1 A, leur adresser une injonction de le faire à bref délai sous astreinte.
Seul le dirigeant social peut être destinataire de cette injonction.
Il s'agit d'une simple faculté pour le président du tribunal (mixte) de commerce du lieu de siège du débiteur.
Si l'injonction n'est pas respectée, le président du tribunal constate le non-dépôt des comptes par un procès-verbal (article R611-15 du code de commerce) et il lui appartient de statuer sur la liquidation de l'astreinte en vertu de l'article R611-16 aux termes duquel':
«'En cas d'inexécution de l'injonction de faire qu'il a délivrée, le président du tribunal statue sur la liquidation de l'astreinte.
Il statue en dernier ressort lorsque le montant de l'astreinte n'excède pas le taux de compétence en dernier ressort du tribunal de commerce.
Le montant de la condamnation prononcée est versé au Trésor public et recouvré comme en matière de créances étrangères à l'impôt.
La décision est communiquée au Trésor public et signifiée à la diligence du greffier au représentant légal de la personne morale ou à l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée. L'appel est formé, instruit et jugé selon les règles applicables à la procédure sans représentation obligatoire. Les voies de recours sont ouvertes au ministère public.'»
La décision qui constate le défaut d'exécution et liquide l'astreinte emporte condamnation du représentant légal de la personne morale à titre personnel et non ès qualités. La décision est signifiée au représentant légal de la personne morale par le greffier.
Le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de la décision (article R661-3 du code de commerce).
Toutes les sociétés commerciales doivent obligatoirement procéder au dépôt de leurs comptes, chaque année. Cette obligation vise notamment :
-Toutes les sociétés par actions : sociétés anonymes (SA), sociétés européennes (SE), sociétés par actions simplifiées (SAS) y compris celles à associé unique (SASU), sociétés en commandite par actions (SCA) ;
-Les sociétés à responsabilité limitée à plusieurs associés (SARL) et également les SARL unipersonnelles (plus connues sous l'appellation EURL) ;
-Les sociétés en nom collectif (SNC) dont les associés sont des sociétés tenues de déposer leurs comptes (sociétés par actions ou sociétés à responsabilité limitée).
L'obligation de dépôt des comptes annuels concerne également certaines formes de sociétés assimilées à des sociétés commerciales. C'est notamment le cas des sociétés d'exercice libéral (SEL). Voici la liste des SEL tenues de déposer leurs comptes au greffe chaque année :
-Les sociétés d'exercice libéral à forme anonyme (SELAFA),
-Les sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) y compris unipersonnelles (SELURL),
-Et les sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées (SELAS) y compris unipersonnelles (SELASU).
En effet, aux termes de |'article 1er de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales il peut être constitué pour l'exercice d'une profession libérale des sociétés à responsabilité limitée, des sociétés anonymes ou des sociétés en commandite par actions régies par la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales': les sociétés d'exercice libéral sont donc soumises à toutes les dispositions de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales auxquelles il n'a pas été expressément dérogé par la loi de 1990. Or, aucune disposition de cette dernière loi ne déroge à l'obligation de dépôt des documents comptables.
Enfin, les entreprises individuelles, y compris celles qui optent pour le régime micro ne sont pas concernées par l'obligation. En revanche, les entreprises individuelles à responsabilité limitée (EIRL) doivent procéder au dépôt dans les 6 mois de la clôture de leur exercice comptable.
Il s'en déduit que c'est à tort que M. [V] soutient que les SELARL n'ont pas obligation de déposer leurs comptes annuels au greffe de commerce.
D'autre part,
Aux termes de l'article L131-4 du code des procédures civiles d'exécution':
«'Le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.
Le taux de l'astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation.
L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère.'»
En l'espèce, s'agissant de la prétendue ambiguïté, la cour ne peut que rejeter cet argument, au demeurant non fondé en droit, M. [V] n'indiquant ni dans ses conclusions ni dans le dispositif de ces conclusions le fondement juridique de sa demande. En effet, le courrier de notification de l'ordonnance se contente de rappeler les différents documents à déposer au greffe, «'outre les comptes annuels'», conformément aux dispositions de l'article L232-23 I du code de commerce aux termes duquel':
« Toute société par actions est tenue de déposer au greffe du tribunal, pour être annexés au registre du commerce et des sociétés, dans le mois suivant l'approbation des comptes annuels par l'assemblée générale des actionnaires ou dans les deux mois suivant cette approbation lorsque ce dépôt est effectué par voie électronique :
1° Les comptes annuels, le rapport de gestion, le rapport des commissaires aux comptes sur les comptes annuels, le cas échéant, éventuellement complété de leurs observations sur les modifications apportées par l'assemblée aux comptes annuels qui ont été soumis à cette dernière ainsi que, le cas échéant, les comptes consolidés, le rapport sur la gestion du groupe, le rapport des commissaires aux comptes sur les comptes consolidés et le rapport du conseil de surveillance ;
2° La proposition d'affectation du résultat soumise à l'assemblée et la résolution d'affectation votée.'»
En l'espèce, M. [V] a déposé les comptes annuels des exercices 2018 à 2020 comme demandé par le président du tribunal, certes hors délais, étant observé que le courriel de son comptable produit au dossier date du mois de décembre 2021, soit bien après les exercices non déposés.
Néanmoins, alors que M. [V] avait jusqu'au 7 novembre 2021 pour déposer ses comptes, la décision entreprise date du 8 novembre 2021, soit du lendemain.
Dès lors, l'ordonnance déférée sera infirmée en ce qu'elle a liquidé l'astreinte à la somme de 14.900 euros et en ce qu'elle a condamné M. [V] au paiement de cette somme. L'astreinte pour la période du 7 au 8 novembre 2021 sera liquidée à la somme de 450 euros.
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'appelant sera condamné aux dépens en cause d'appel.
M. [V] sera débouté de sa demande dirigée contre l'AJE, mis hors de cause.
Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;
MET hors de cause l'agent judiciaire de l'état';
INFIRME l'ordonnance rendue le 8 novembre 2021 par le président du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre de la Réunion mais seulement en ce qu'elle a':
-liquidé l'astreinte due par M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L] au Trésor Public à la somme de 14.850 euros';
-condamné en tant que de besoin M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L] à payer la somme de 14.900 euros au Trésor Public sur avis de ce dernier qui recouvra comme en matière de créance étrangères à l'impôt';
CONFIRME l'ordonnance pour le surplus';
Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
LIQUIDE l'astreinte due par M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L] au Trésor Public à la somme de 450 euros';
CONDAMNE en tant que de besoin M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L] à payer la somme de 450 euros au Trésor Public sur avis de ce dernier qui recouvra comme en matière de créance étrangères à l'impôt';
Y ajoutant,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [L] [F] [V], représentant légal de la SELARL Dr [V] [L] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT