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27/06/2024 | FRANCE | N°23/02110

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 27 juin 2024, 23/02110


N° RG 23/02110 - N° Portalis DBVM-V-B7H-L3BB



C4



Minute :









































































Copie exécutoire

délivrée le :







la SELARL ALPAZUR AVOCATS



la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'

APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE COMMERCIALE



ARRÊT DU JEUDI 27 JUIN 2024





Appel d'une décision (N° RG 2021J68)

rendue par le Tribunal de Commerce de GAP

en date du 21 avril 2023

suivant déclaration d'appel du 01 juin 2023



APPELANTS :



M. [B] [M]

né le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Mme [D]...

N° RG 23/02110 - N° Portalis DBVM-V-B7H-L3BB

C4

Minute :

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL ALPAZUR AVOCATS

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 27 JUIN 2024

Appel d'une décision (N° RG 2021J68)

rendue par le Tribunal de Commerce de GAP

en date du 21 avril 2023

suivant déclaration d'appel du 01 juin 2023

APPELANTS :

M. [B] [M]

né le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Mme [D] [M] née [P]

née le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentés par Me Nicolas WIERZBINSKI de la SELARL ALPAZUR AVOCATS, avocat au barreau des HAUTES-ALPES, postulant et par Me COLJE, avocat au barreau des ALPES DE HAUTE PROVENCE

INTIMÉE :

S.A. SOCIETE GENERALE au capital de 1 062 354 722,50 euros, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 552 120 222, représentée par ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité, venant aux droits et obligations de la SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT, Société anonyme à directoire et conseil de surveillance au capital de EUR. 24.471.936., identifiée sous le numéro unique 054 806 542 RCS Marseille, en suite de la fusion-absorption intervenue en date du 01/01/2023

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et par Me Séverine TARTANSON, avocat au barreau de DIGNE LES BAINS, substitué par Me HELL, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente de Chambre,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 Avril 2024, M. BRUNO, Conseiller, qui a fait rapport assisté de Alice RICHET, Greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile. Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour, après prorogation du délibéré.

Faits et procédure :

1. Suivant acte sous seing privé du 12 mai 2014, la société Eldorado 2 a acquis de la société Eldorado les éléments du fonds de commerce de chaussures et accessoires, articles de sport à l'enseigne Eldorado, sis à [Localité 5], pour un prix de 80.000 euros.

2. La Société Marseillaise de Crédit a consenti à la société Eldorado 2 un prêt destiné à financer cette acquisition pour un montant de 120.000 euros, remboursable en 84 mensualités.

3. [B] [M], président de la Sas Eldorado 2, et [D] [P] épouse [M], son épouse, se sont chacun portés caution personnelle et solidaire à hauteur de 50% de l'encours du prêt en principal, dans la limite de 39.000 euros.

4. Par jugement du 25 février 2016, le tribunal de commerce de Nice a prononcé le redressement judiciaire de la Sas Eldorado 2, converti en liquidation judiciaire le 21 septembre 2016. La Société Marseillaise de Crédit a déclaré sa créance à la procédure collective à hauteur de 92.686,07 euros lui restant due au titre de ce prêt.

5. Par lettre recommandée du 24 mai 2019, la Société Marseillaise de Crédit a mis en demeure [B] [M] et [D] [M] de régler les sommes dues en exécution de leur engagement de caution. Par exploit de commissaire de justice du 12 août 2021, la Société Marseillaise de Crédit a fait assigner devant le tribunal de commerce de Gap [B] [M] et [D] [M] à l'effet de voir, notamment, condamner ces personnes à lui payer, chacune, la somme de 39.000 euros en exécution de leur engagement de caution, outre intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2019.

6. Par jugement du 21 avril 2023, le tribunal de commerce de Gap a :

- déclaré recevable et partiellement fondée la Société Marseillaise de Crédit en ses demandes ;

- dit que la Société Marseillaise de Crédit n'est pas prescrite en son action;

- prononcé la déchéance des intérêts et pénalités dus sur le prêt de 120.000 euros ayant donné lieu à l'acte de cautionnement des époux [M];

- ordonné à la Société Marseillaise de Crédit de procéder à un nouveau calcul des sommes restant dues ;

- condamné [B] [M] et [D] [M] à payer chacun à la Société Marseillaise de Crédit 50% de sommes ainsi expurgées des intérêts et pénalités, sans que ce montant ne puisse dépasser pour chacun 39.000 euros ;

- dit que la créance devra être réglée en 24 mensualités égales à compter de la présentation par la banque d'un tableau expurgé des intérêts et pénalités et limités à 39.000 euros ;

- dit qu'en cas de défaillance dans le règlement d'une seule mensualité, le tout deviendra immédiatement exigible ;

- condamné [B] [M] et [D] [M] solidairement à payer à la Société Marseillaise de Crédit la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné solidairement [B] [M] et [D] [M] aux entiers dépens d'instance ;

- rejeté toutes les autres demandes ;

- rappelé que le présent jugement est exécutoire de plein droit.

7. [B] [M] et [D] [M] née [P] ont interjeté appel de cette décision le 1er juin 2023, en ce qu'elle a :

- déclaré recevable et partiellement fondée la Société Marseillaise de Crédit en ses demandes ;

- dit que la Société Marseillaise de Crédit n'est pas prescrite en son action ;

- condamné monsieur et madame [M] à payer chacun à la Société Marseillaise de Crédit, dans la limite de 39.000 euros chacun, 50 % des sommes restants dues après déchéance des intérêts et pénalités dus sur le prêt de 120.000 euros ayant donné lieu à leur acte de cautionnement, en vingt-quatre mensualités à compter de la présentation par la banque d'un nouveau tableau, sous peine d'exigibilité immédiate en cas de défaillance d'une seule mensualité ;

- condamné monsieur et madame [M] à payer à la Société Marseillaise de Crédit la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné monsieur et madame [M] aux entiers dépens de l'instance ;

- rejeté les demandes de monsieur et madame [M].

8. L'instruction de cette procédure a été clôturée le 21 mars 2024. Cependant, les appelants ont saisi le magistrat chargé de la mise en état de conclusions aux fins de révocation de l'ordonnance de clôture le 26 mars 2024, auxquelles il a été répondu négativement le 28 mars suivant.

9. Les appelants ont déposés de nouvelles conclusions n°3 remises par voie électronique le 27 mars 2024, par lesquelles ils demandent à la cour, pour le cas où la révocation de la clôture n'aurait pas été ordonnée avant l'ouverture de l'audience de plaidoirie, de révoquer l'ordonnance de clôture du 21 mars 2024 et de fixer la clôture au jour de l'audience de plaidoirie, ce pour que le principe du contradictoire et de la loyauté des débats soit respecté, et à défaut, de rejeter les conclusions et pièce n°16 communiquées par la Société Générale le 19 mars 2024 soit à une date trop proche de la clôture pour permettre d'assurer le respect du principe du contradictoire. Ces conclusions contiennent également une réponse aux conclusions de l'intimée remises le 19 mars 2024.

10. La cour constate que les conclusions de la Société Générale ont été remises le 19 mars 2024 à 12h09, alors que l'ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2024 à 10h07. La comparaison minutieuse de ces dernières conclusions avec celles déposées le 28 novembre 2023 permet de constater qu'elles n'ont pas évolué. La pièce n°16 est un courrier adressé au tribunal de commerce le 14 février 2023 concernant la notification des conclusions alors produites devant lui, concernant cette fusion. Il ne résulte pas de ces éléments que les appelants ont été dans l'incapacité de répondre à ces dernières conclusions avant le prononcé de la clôture de l'instruction, à supposer qu'ils aient eu à intérêt à y répondre. En conséquence, la cour rejettera la demande de révocation de l'ordonnance de clôture.

11. En outre, les conclusions n°3 des appelants ayant été remises postérieurement à l'ordonnance de clôture, elles sont d'office irrecevables.

Prétentions et moyens de [B] [M] et de [D] [M] née [P] :

12. Selon leurs conclusions n°2 remises par voie électronique le 7 décembre 2023, les appelants demandent, au visa des articles 900 et suivants du code de procédure civile et notamment les articles 909, 910-4 et 954 de ce code, des articles 2288 à 2320, 2224, 2293 du code civil dans sa version applicable à l'espèce, des articles 2292, 2294, 1128 et suivants, 1181 et 1186 alinéa 1, 1305-5, 1231, 1844-5, 1690 du code civil, des articles L643-1, L622-25-1 du code de commerce :

- d'annuler le jugement rendu le 21 mars 2023 par le tribunal de commerce de Gap parce qu'il a été rendu en faveur d'une société radiée privée de ce fait de toute personnalité morale et juridique et dépourvue de capacité à agir, et en ce qu'il a condamné les concluants à payer une somme d'argent à cette société inexistante en exécution de leurs engagements de cautions ;

- de juger irrecevable pour défaut de qualité à agir toute demande que la Société Générale formule à l'encontre des concluants parce que rien dans les pièces communiquées par la Société Générale ne permet d'affirmer que la fusion-absorption dont elle se prévaut pour se présenter comme venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit a été réalisée, ni qu'elle aurait bénéficié de la transmission universelle du patrimoine de la Société Marseillaise de Crédit qui aurait transité par le patrimoine de la société Crédit du Nord, ni, par conséquent, que la Société Générale vient effectivement aux droits de la Société Marseillaise de Crédit.

13. Les appelants demandent, à titre subsidiaire, pour le cas où la fusion-absorption dont se prévaut la Société Générale serait effective et opposable aux concluants :

- de juger irrecevable l'appel incident de la Société Générale formé par conclusions en date du 28 novembre 2023; en tout état de cause, le rejeter ;

- de juger, par conséquent, irrecevables les demandes de la Société Générale adressées à la cour d'appel tendant à infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Gap et statuant à nouveau, tendant à rejeter l'ensemble des demandes et contestations présentées par les concluants comme étant irrecevables, mal fondées et totalement injustifiées; tendant à condamner les concluants à payer chacun à la Société Générale, venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, la somme de 39.000 euros en exécution de leur engagement de caution, outre intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2019, date de la mise en demeure, et la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ; en tout état de cause, de les rejeter ;

- de juger que la Société Générale n'ayant pas conclu sur l'appel principal interjeté par les concluants, la cour d'appel n'est saisie d'aucune prétention de l'intimée quant aux chefs du jugement dont les appelants demandent l'infirmation et que l'intimée doit être regardée comme sollicitant implicitement la confirmation du jugement attaqué, son appel incident étant par ailleurs irrecevable ;

- de juger que les créances, nées postérieurement à la réalisation de la fusion-absorption, n'engagent pas les concluants parce qu'ils refusent expressément que la garantie qu'ils avaient accepté de consentir à la Société Marseillaise de Crédit bénéficie à la Société Générale pour les dettes postérieures à la fusion-absorption si celle-ci a eu lieu ;

- d'infirmer le jugement dont appel a été interjeté en ce qu'il a dit que la Société Marseillaise de Crédit n'est pas prescrite en son action ;

- statuant à nouveau, de juger que l'action engagée par la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle se présente la Société Générale est prescrite parce qu'elle a été engagée le 12 août 2021 soit plus de cinq ans après le 12 février 2016, jour où la banque a eu connaissance de la défaillance de la débitrice principale l'autorisant à agir contre les cautions et même plus de cinq ans après le 31 mars 2016, date de la déclaration de sa créance par la banque au passif de la procédure collective de la débitrice principale ;

- de juger, pour le cas où l'action de la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle se présente la Société Générale n'était pas déclarée prescrite, que la banque a, par son attitude dilatoire dans le recouvrement de sa créance tant dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire qu'auprès des cautions, causé aux dites cautions un préjudice et, par

conséquent, de juger qu'en réparation du préjudice qui leur a été ainsi causé par la banque, les concluants sont déchargés intégralement de leurs obligations de cautions ;

- d'infirmer le jugement dont appel a été interjeté en ce qu'il a dit recevable et fondée partiellement la Société Marseillaise de Crédit en ses demandes;

- d'infirmer le jugement dont appel a été interjeté en ce qu'il a condamné les concluants à payer chacun à la Société Marseillaise de Crédit 50% de la somme due dans la limite de 39.000 euros pour chacun ;

- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Gap dont il a été interjeté appel en ce qu'il a rejeté toutes les autres demandes en ce compris la demande des concluants de voir le tribunal juger que le contrat principal de prêt et les engagements de caution des concluants sont nuls pour vice du consentement pour cause d'erreur et dol et débouter la Société Marseillaise de Crédit de ses demandes ;

- statuant à nouveau, de juger que les engagements de cautions des concluants sont nuls parce que leurs consentements à ces engagements en tant que cautions au profit de la Société Marseillaise de Crédit ont été viciés par une erreur causée par la banque et un dol commis par la banque ;

- par conséquent, de débouter la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale de toutes ses demandes à l'encontre des concluants ;

- statuant à nouveau, de juger aussi que le contrat de prêt est, à l'égard des cautions, nul pour vice du consentement de la débitrice principale, la Sas Eldorado 2, par l'erreur causée par la banque et le dol commis par la banque et que, par conséquent, les engagements de caution des concluants s'en trouvent, par voie accessoire, annulés eux-aussi ;

- par conséquent, de débouter la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale de toutes ses demandes à l'encontre des concluants ;

- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Gap dont il a été interjeté appel en ce qu'il a déclaré recevable et en partie fondée la Société Marseillaise de Crédit en ses demandes et en ce qu'il a, par conséquent, rejeté les demandes des concluants de voir juger que la créance de la Société Marseillaise de Crédit est incertaine en son montant et inexigible et de voir la Société Marseillaise de Crédit être déboutée de ses demandes ;

- statuant à nouveau, de juger que la créance de la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale n'est ni certaine, ni liquide, ni exigible parce que la banque ne justifie pas de l'admission de sa créance au passif de la procédure collective de la débitrice principale, parce que la banque ne justifie pas des paiements qu'elle a pu recevoir dans le cadre de la liquidation judiciaire de la débitrice principale, parce que la déchéance du terme de l'obligation principale est inopposable à la caution et parce que la déchéance du terme n'est pas intervenue vis-à-vis de la caution ;

- par conséquent, de débouter la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale de ses demandes ;

- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce dont appel a été interjeté en ce qu'il a rejeté toutes les autres demandes en ce compris la demande des concluants de voir juger que la Société Marseillaise de Crédit a manqué à son obligation d'information et de mise en garde à leur égard et leur a causé un préjudice de perte de chance de ne pas contracter et en ce qu'il a rejeté la demande des concluants de voir condamner, par conséquent, la Société Marseillaise de Crédit à verser à chacun d'eux, la somme de 39.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de perte de chance ;

- statuant à nouveau, de juger que la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale a manqué à son obligation d'information, de conseil et de mise en garde envers les concluants comme envers la débitrice principale, la Sas Eldorado 2, parce que la banque a sciemment dissimulé des informations primordiales aux concluants au sujet de la situation économique du commerce dont la débitrice principale allait acquérir les éléments, parce que la banque n'a pas du tout mis en garde les concluants sur la disproportion des engagements qu'ils s'apprêtaient à prendre, disproportion découlant de celle existant entre les prix de cession et droit d'entrée et la juste valeur des éléments du fonds de commerce dont la débitrice principale allait faire l'acquisition, parce que la banque n'a pas donné aux concluants une information correcte, transparente et sincère au sujet de la garantie BPI France Financement et parce que la banque a accordé abusivement un crédit à la débitrice principale et exigé des concluants qu'ils s'engagent comme cautions ;

- de juger que par la violation de son obligation de conseil, information et mise en garde, la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale, a causé aux concluants un préjudice de perte de chance de ne pas contracter ;

- de condamner la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale à réparer le préjudice de perte de chance qu'elle a causé aux concluants en versant à chacun d'eux la somme de 39.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- d'infirmer le jugement dont appel a été interjeté en ce qu'il a condamné les concluants à verser à la Société Marseillaise de Crédit une somme de 1.500 euros au titre de ses frais de défense non compris dans les dépens, ainsi qu'aux dépens d'instance et en ce qu'il a rejeté les demandes que les concluants lui avaient présentées au titre des frais et dépens ;

- statuant à nouveau, de débouter la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale des demandes qu'elle a formulées au titre des frais et dépens de première instance et condamner la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale à verser aux concluants la somme de 3.500 euros au titre de leurs frais de défense de première instance et aux dépens de première instance ;

- à titre très subsidiaire, pour le cas où la cour d'appel ne ferait pas droit aux demandes des concluants, de confirmer les dispositions du jugement non critiqués par eux devant la cour d'appel par lesquelles le tribunal de commerce de Gap a prononcé la déchéance des intérêts et pénalités dus sur le prêt de 120.000 euros ayant donné lieu à l'acte de cautionnement, ordonné à la Société Marseillaise de Crédit de procéder à un nouveau calcul des sommes restant dues, limité la condamnation à paiement prononcée contre les concluants à la moitié de la somme ainsi expurgée des intérêts et pénalités, dit que la créance pourra être réglée en vingt-quatre mensualités à compter de la présentation du nouveau décompte de créance expurgé des intérêts et pénalités et limité à 39.000 euros et rejeté les autres demandes de la Société Marseillaise de Crédit ;

- en tout état de cause, de débouter la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale de toutes ses demandes ;

- en tout état de cause, de condamner la Société Marseillaise de Crédit aux droits de laquelle viendrait la Société Générale à verser aux concluants la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel et la condamner aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Les appelants exposent :

14. - concernant le défaut de qualité à agir de la Société Générale et l'annulation du jugement déféré, que si lors de l'instance en cours devant le tribunal de commerce, des conclusions ont été notifiées par la Société Générale présentée comme venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, suite à une fusion-absorption du 1er janvier 2023, le jugement a été cependant rendu entre les concluants et la Société Marseillaise de Crédit, mais a été signifié aux concluants par la Société Générale, expliquant que les concluants aient dirigé leur appel contre cette dernière;

15. - que néanmoins, le tribunal a rendu un jugement au profit d'une société inexistante, puisque la Société Marseillaise de Crédit a été radiée du registre du commerce le 9 mars 2023, alors que le jugement a été rendu le 21 avril 2023 ;

16. - que si la Société Générale invoque une erreur matérielle du tribunal, et sollicite la rectification du jugement déféré, au motif qu'elle est intervenue volontairement à la procédure par conclusions du 15 février 2023, rien ne permet de constater que ces conclusions aient été déposées auprès du tribunal alors que le jugement n'en fait pas mention ;

17. - que la fusion-absorption dont se prévaut la Société Générale n'est pas opposable aux concluants, puisqu'il ne résulte pas des pièces produites par cette intimée que cette fusion a été effectivement réalisée et qu'elle a bénéficié de la transmission universelle du patrimoine de la Société Marseillaise de Crédit, puisque le traité de fusion-absorption produit concerne la Société Générale en qualité de société absorbante et le Crédit du Nord en qualité de société absorbée, et non la Société Marseillaise de Crédit; qu'il prévoit également, à titre de condition suspensive, l'approbation par l'assemblée générale extraordinaire de la société absorbée du traité de fusion et de la dissolution sans liquidation de la société avec la transmission universelle de son patrimoine, sous réserve de la constatation de la réalisation définitive de plusieurs banques dont la Société Marseillaise de Crédit ; que si la Société Marseillaise de Crédit et le Crédit du Nord ont été radiés du registre du commerce les 9 mars et 27 mars 2023, cela ne permet pas d'affirmer que la fusion-absorption a été réalisée au bénéfice de la Société Générale ;

18. - en tout état de cause, que le cautionnement doit être exprès et ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ; qu'en cas de dissolution de la personne morale débitrice ou créancière par l'effet d'une fusion, si la caution reste tenue des opérations nées avant que l'opération ne soit devenue opposable aux tiers, elle ne garantit celles nées postérieurement que si elle a consenti à cette opération ; qu'en l'espèce, les concluants refusent que leur garantie accordée à la Société Marseillaise de Crédit bénéficie à la Société Générale pour les dettes postérieures à la fusion-absorption si celle-ci a bien eu lieu ; qu'ils ne sont ainsi pas tenus des créances nées postérieurement ;

19. - concernant l'irrecevabilité de l'appel incident de la Société Générale, formé dans ses conclusions du 28 novembre 2023, que l'intimée n'indique pas expressément les chefs du jugement dont elle demande l'infirmation et ne motive pas son appel incident ni en fait, ni en droit ; que les demandes figurant au dispositif de ses conclusions sont en contradiction avec les moyens qu'elle a développé dans les motifs de ses écritures, puisque si elle a demandé, dans le dispositif de ses conclusions, d'infirmer le jugement déféré, et statuant à nouveau, de rejeter l'ensemble des demandes des concluants comme étant irrecevables et mal fondées, elle demande la confirmation du jugement dans la motivation de ses conclusions ; qu'il en résulte que les concluants ne sont pas mis en mesure de répliquer sur cet appel incident ; que cette irrégularité résultant de la violation de l'article 910-4 est définitive et est insusceptible d'être régularisée, le délai imparti par l'article 909 du code de procédure civile étant expiré pour former appel incident; qu'il s'agit d'une fin de non-recevoir relevant de l'appel, et non de la procédure, et ainsi de la compétence de la cour ;

20. - que la Société Générale ne formule aucune demande sur l'appel principal des concluants, puisque ce n'est qu'en conséquence à sa demande d'infirmation du jugement qu'elle demande à la cour de statuer à nouveau pour rejeter les demandes des concluants ; qu'il en résulte que la Société Générale doit être regardée comme sollicitant implicitement la confirmation du jugement déféré ;

21. - concernant la prescription de l'action de la Société Marseillaise de Crédit, que le tribunal a jugé que le délai de prescription de cinq ans dans lequel est enfermée l'action du créancier n'était pas expiré à la date de l'assignation, en raison de sa déclaration de créance au passif de la société Eldorado 2 le 31 mars 2016 ; que cependant, le premier incident de remboursement du prêt date du mois de février 2016 ; que si la banque a déclaré sa créance en mars 2016, elle n'a assigné les concluants qu'en août 2021, soit ainsi plus de cinq ans après avoir eu connaissance de la défaillance de l'emprunteur ; que cette action est ainsi prescrite ;

22. - que si l'effet interruptif de la déclaration de créance doit être déclaré opposable aux cautions, plus de sept ans ont séparé la défaillance de l'emprunteur de l'assignation des concluants, de sorte que cette passivité de la banque leur est préjudiciable et est contraire à la loyauté contractuelle ; que cette attitude risque de faire perdre aux cautions toute possibilité de recours contre le débiteur principal, notamment au cas où la liquidation judiciaire viendrait à être clôturée ; que cette attitude doit ainsi entraîner la décharge totale des cautions ;

23. - concernant la nullité des engagements pour vices du consentement, que si le tribunal s'est fondé sur un jugement du tribunal de commerce de Nice et un arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence des 8 juillet 2016 et 28 mars 2019 concernant une demande de résolution pour vice caché, il s'est agi du litige opposant les concluants et la société Eldorado 2 à monsieur [H], à la société Eldorado et à la société Libertés Commerces; que la Société Marseillaise de Crédit n'a pas été partie à cette procédure dont l'objet n'a pas inclu la nullité du contrat de prêt et l'engagement des cautions ;

24. - qu'en l'espèce, une erreur a été commise par la société Eldorado 2 et les concluants, outre un dol commis par la Société Marseillaise de Crédit par la dissimulation intentionnelle d'informations dont elle connaissait le caractère déterminant pour les cautions ;

25. - ainsi, que l'acte de prêt a laissé penser qu'il servait à financer l'acquisition d'un fonds de commerce, et non de certains éléments seulement ; que la Société Marseillaise de Crédit a occulté ce fait, alors qu'elle ne pouvait l'ignorer puisqu'elle était la banque du cédant, la société Eldorado prise en la personne de monsieur [H], et travaillant de concert avec maître [T], notaire, qui a été reconnu coupable d'un manquement à son devoir de conseil ; que la banque ne pouvait ainsi ignorer que les résultats de la société Eldorado étaient mauvais et que le commerce était moribond faute de clientèle, puisque fin 2013, le cédant avait annoncé publiquement une liquidation totale avant fermeture définitive; que la banque ne pouvait ainsi ignorer que le prix de cession et du droit d'entrée pour lesquels le crédit avait été sollicité étaient surévalués, ce qui s'est répercuté sur le montant du prêt, l'engagement du cessionnaire et des cautions ; que la banque n'ignorait pas que les revenus tirés de l'exploitation du fonds cédé ne permettraient pas au cessionnaire et aux cautions de faire face à leurs engagements ;

26. - que si l'intimée soutient que cette demande est prescrite, en fixant le point de départ du délai de prescription à une date antérieure au 19 octobre 2015, date à laquelle les concluants et la société Eldorado 2 ont agi en résolution de la cession du fonds de commerce pour vice du consentement et défaut caché, cependant, à cette époque, les concluants n'avaient pu réaliser et ainsi avoir connaissance du rôle de la Société Marseillaise de Crédit, d'autant que jusqu'en mai 2019, ils n'ont pas été inquiétés ;

27. - que si l'intimée soutient que les concluants ne peuvent se prévaloir de la nullité de l'acte de prêt, laquelle ne peut être formée que par l'emprunteur, le caractère accessoire du cautionnement permet à la caution d'opposer toutes les exceptions tirées de son rapport avec le débiteur, dont la nullité de l'obligation cautionnée ;

28. - que la créance n'est pas certaine, liquide et exigible, puisque la Société Marseillaise de Crédit n'a pas justifié de l'admission de sa déclaration de créance au passif de la société Eldorado 2 ; que la banque ne rapporte pas la preuve qu'elle n'a reçu aucun paiement même partiel, alors que la société Eldorado 2 n'avait pas d'autre dette que celle relative au prêt, et disposait d'un stock de marchandises pour 57.008 euros HT dont la vente n'a pu profiter qu'à la banque ;

29. - en outre, que la déchéance du terme est inopposable aux cautions, par application de l'article 1305-5 du code civil en vigueur depuis le 1er octobre 2018 et l'article L643-1 du code de commerce, puisque le contrat de prêt n'a pas été respecté concernant les conditions dans lesquelles la banque s'était engagée à prononcer ou à faire valoir la déchéance du terme vis-à-vis de l'emprunteur et des cautions, nécessitant l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception prononçant l'exigibilité anticipée du prêt; que le contrat de prêt n'a pas ainsi été résilié avant l'ouverture de la procédure collective, de sorte que l'exigibilité résultant de la liquidation judiciaire n'est pas opposable aux concluants ;

30. - concernant la responsabilité de la Société Marseillaise de Crédit pour manquement à son obligation d'information et de mise en garde des cautions, qu'elle résulte de la dissimulation d'informations essentielles pour les concluants concernant la situation économique du commerce cédé ;

31. - qu'elle résulte également de l'absence d'une information correcte concernant la garantie OSEO, prenant en charge 50 % des sommes éventuellement dues par l'emprunteur, alors que cette garantie n'était que subsidiaire, après exercice du recours du prêteur contre les cautions ;

32. - que cette responsabilité résulte également d'un soutien abusif de la société Eldorado 2, puisque la Société Marseillaise de Crédit lui a accordé un prêt de 120.000 euros, alors qu'il s'agissait d'une société nouvellement créée et pour l'achat d'élément du fonds de commerce dépourvu de clientèle et dont les derniers résultats avaient été très faibles ;

33. - qu'il en est ainsi résulté pour les concluants une perte de chance de ne pas s'engager ;

34. - concernant la situation des concluants, qu'ils n'ont pas d'épargne, alors que monsieur [M] est chauffeur de taxi et madame [M] conductrice de VTC avec le statut de conjoint collaborateur, leurs revenus mensuels étant de 1.900 euros, avec un enfant à charge.

Prétentions et moyens de la Société Générale :

35. Selon ses conclusions n°2 remises par voie électronique le 19 mars 2024, elle demande à la cour, au visa des articles 2288 et suivants du code civil,

- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Gap ;

- statuant à nouveau, de rejeter l'ensemble des demandes et contestations présentées par [B] et [D] [M] comme irrecevables, mal fondées et totalement injustifiées ;

- de condamner [B] [M] et [D] [P] épouse [M] à payer chacun à la concluante, venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, la somme de 39.000 euros en exécution de leur engagement de caution, outre intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2019, date de la mise en demeure, et la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner [B] et [D] [M] solidairement à payer à la concluante, venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais irrépétibles engagés en appel ;

- de condamner solidairement [B] et [D] [M] aux entiers dépens d'instance.

La Société Générale soutient :

36. - que l'appel incident de la concluante est recevable, puisqu'il n'est pas obligatoire de reprendre, dans le dispositif des conclusions, les chefs du jugement dont il est demandé l'infirmation ;

37. - en outre, que les demandes figurant au dispositif des conclusions ne sont pas en contradiction avec les moyens développés, puisque la concluante y indique que les appelants ont expressément et manuscritement indiqué s'engager chacun comme cautions à hauteur de 39.000 euros ;

38. - concernant la qualité à agir de la concluante, que c'est par erreur que le tribunal a mentionné comme partie la Société Marseillaise de Crédit, alors que la concluante est intervenue volontairement par conclusions du 15 février 2023, suite à la fusion-absorption ; qu'il conviendra donc de rectifier la décision rendue afin qu'elle mentionne comme partie la concluante venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit ;

39. - que les appelants soutiennent vainement que ces conclusions d'intervention n'ont pas été communiquées au tribunal, puisque la concluante en justifie dans sa pièce n°16 ; qu'au surplus, la concluante intervient volontairement devant la cour ;

40. - que les conclusions déposées devant la cour en ce sens l'ont été dans le délai imparti par l'article 909 du code de procédure civile et sont ainsi recevables ;

41. - sur le fond, que les appelants contestent pour la première fois devant la cour l'opposabilité de la fusion-absorption ; que la concluante justifie de cette fusion, puisqu'elle a absorbé le Crédit du Nord et ses filiales, dont la Société Marseillaise de Crédit, cette fusion étant devenue définitive le 1er janvier 2023 ; que la Société Marseillaise de Crédit est ainsi devenue une filiale du Crédit du Nord le 15 juin 2022, alors que la concluante a absorbé le Crédit du Nord le 15 juin 2022, comme en justifient les traités de fusion et les publications faites au Bodacc et le procès-verbal de la décision du directeur général déclarant la fusion définitive, déposé au registre du commerce de Paris ;

42. - que si les appelants soutiennent que le cautionnement doit être exprès et qu'ils refusent de s'engager à l'égard de la concluante, cependant, en cas de fusion-absorption, l'article L236-3 du code de commerce prévoit la transmission universelle du patrimoine de la société absorbée vers la société absorbante ; que l'engagement de caution reste ainsi valable pour la garantie des dettes antérieures à la fusion ;

43. - s'agissant de la prescription de l'action en paiement de la concluante, que le délai de prescription applicable au créancier dans l'action engagée à l'égard de la caution est interrompu pendant la durée de la procédure collective du débiteur principal et jusqu'à sa clôture, par l'effet de l'article L622-25-1 du code de commerce ; ainsi, que la déclaration de la créance au passif du débiteur interrompt la prescription à l'égard de la caution jusqu'à la clôture de la procédure ; qu'en l'espèce, la Société Marseillaise de Crédit a déclaré la créance le 31 mars 2016, et a ainsi interrompu la prescription, interruption toujours en cours puisque la procédure n'est pas clôturée ;

44. - concernant la nullité du contrat de prêt, et en conséquence des cautionnements pour vices du consentement, que l'action en nullité pour vice du consentement doit être intentée dans un délai de cinq ans courant à compter de la découverte du vice ; qu'en la cause, les appelants et la société Eldorado 2 ont engagé une action en résolution pour vice caché devant le tribunal de commerce de Nice le 19 octobre 2015, de sorte que la découverte du vice allégué a nécessairement été antérieure à cette date ; que la demande de nullité présentée le 21 janvier 2022 est ainsi prescrite ;

45. - en outre, que la demande est irrecevable, puisqu'elle ne pouvait être formée que par l'emprunteur, qui n'est pas dans la cause ; que les dispositions issues de l'ordonnance du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés ne sont pas applicables en raison d'un cautionnement souscrit en 2014 ;

46. - en tout état de cause, que cette demande est mal fondée, aucun élément ne permettant de justifier les allégations des appelants, qui ont été déboutés de leur demande d'annulation pour dol par le tribunal de commerce de Nice, alors que la cour d'appel d'Aix en Provence a radié l'affaire du rôle pour défaut d'appel en cause du liquidateur de la société Eldorado 2 et que l'instance est désormais périmée ;

47. - concernant la responsabilité de la banque, que les appelants ne produisent aucun élément en ce sens , alors que cette demande est prescrite ; qu'elle est également injustifiée puisque les cautions ne produisent aucune preuve d'une faute ; que si le tribunal de grande instance de Grasse a retenu la faute du notaire rédacteur de l'acte de cession du fonds de commerce, pour avoir utilisé le terme de fonds et non d'éléments de fonds, il a écarté le préjudice économique invoqué comme étant injustifié ;

48. - s'agissant de la garantie OSEO, que l'information la concernant a été clairement contenue dans le contrat de cession, qui a précisé qu'elle ne bénéficie qu'à la banque, et ne peut être invoquée par un tiers, dont l'emprunteur et ses garants ;

49. - s'agissant de la certitude et de l'exigibilité de la créance, que la concluante justifie de sa déclaration au passif, et ainsi de la possibilité d'engager la présente procédure contre les cautions ; que le liquidateur judiciaire a établi un certificat d'irrecouvrabilité le 18 janvier 2019 ; que la créance a été ainsi admise à titre privilégié ; qu'un décompte expurgé des intérêts et pénalités comme prescrit par le tribunal a été établi ;

50. - qu'aucun nouveau calcul de la créance n'est à opérer, puisque la Société Marseillaise de Crédit a informé les cautions en 2015, de sorte que les intérêts au taux légal seront seulement prévus pour les années suivantes ; que la créance est de 86.142,55 euros de sorte que les époux [M] restent tenus chacun pour 39.000 euros ;

51. - que les époux [M] devront s'acquitter de leur dette conformément à la décision rendue par le tribunal.

*****

52. Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

1) Sur l'annulation du jugement déféré :

53. Si les appelants fondent leur demande d'annulation du jugement sur le fait que la Société Marseillaise de Crédit a été radiée du registre du commerce le 9 mars 2023 alors que le jugement a été prononcé le 21 avril suivant, il résulte du jugement déféré que la cause a été entendue lors de l'audience du 17 février 2023, à l'issue de laquelle ce jugement a été rendu. Il en résulte qu'à la date de la clôture des débats, la Société Marseillaise de Crédit était toujours immatriculée au registre du commerce. La perte de qualité d'une partie n'est pas une cause de nullité du jugement, mais seulement une cause d'interruption de l'instance au regard des articles 369 et suivants du code de procédure civile.

54. Si la radiation de la Société Marseillaise de Crédit pouvait constituer une cause d'interruption de l'instance, il résulte de l'article 371 du code de procédure civile que même en cas de recouvrement ou de perte par une partie de la capacité d'ester en justice, en aucun cas l'instance n'est interrompue si l'événement survient ou est notifié après l'ouverture des débats. Il n'existe ainsi aucune cause pouvant entraîner la nullité du jugement entrepris.

2) Concernant la recevabilité de l'appel incident de la Société Générale :

55. Si les appelants reprochent à la Société Générale de ne pas avoir, dans ses premières conclusions d'intimée du 28 novembre 2023, indiqué expressément les chefs du jugement dont elle demande l'infirmation, la cour constate que seul l'article 901 du code de procédure civile impose à l'appelant de détailler dans sa déclaration d'appel les chefs du jugement expressément critiqués, auxquels l'appel est limité sauf s'il tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. L'article 909 relatif au délai imparti à l'intimé pour remettre ses conclusions, et former, le cas échéant, appel incident, ne reprend pas cette obligation.

56. En l'espèce, dans ses conclusions remises le 28 novembre 2023, la Société Générale a sollicité l'infirmation du jugement sans limitation, ce qui indique que cela concerne l'intégralité des dispositions prises par le tribunal de commerce, ce qui se justifie par le fait que le jugement a été rendu au profit d'une société ayant été prétendument absorbée. En outre, s'agissant d'un appel total, les appelants ont été ainsi en mesure de pouvoir répliquer, ce qu'ils ont fait abondamment dans leurs conclusions. La Société Générale a ensuite formé les mêmes demandes que celles reprises dans ses dernières conclusions, dont le détail a été développé plus haut, à savoir le rejet de l'ensemble des demandes et contestations des appelants, et leur condamnation à exécuter leur engagement de cautions. Il en résulte que la cour est ainsi saisi de demandes, et que la Société Générale ne sollicite pas la confirmation du jugement entrepris.

57. En conséquence, la cour déboutera les appelants de cette demande et recevra l'appel incident de la Société Générale.

3) Sur la qualité à agir de la Société Générale et son intervention devant le tribunal de commerce en raison de la fusion-absorption de la Société Marseillaise de Crédit :

58. Concernant la fusion-absorption de la Société Marseillaise de Crédit par la Société Générale, la cour constate qu'un premier traité de fusion est intervenu entre la Société Marseillaise de Crédit et le Crédit du Nord le 15 juin 2022, la première banque étant absorbée par la seconde. Le même jour, un traité est intervenu entre la Société Générale et le Crédit du Nord, ce dernier étant à son tour absorbé. Il a été précisé que la fusion sera réalisée à la suite de la fusion-absorption de plusieurs filiales détenues à 100 % par le Crédit du Nord, ainsi que de la Banque Rhône Alpes, dans laquelle le Crédit du Nord détient 99,99 % du capital et des droits de vote. La fusion a été suspendue notamment à la constatation de la réalisation définitive de la fusion de la Société Marseillaise de Crédit avec le Crédit du Nord, au plus tard le 1er janvier 2023 sauf prorogation d'un commun accord des parties.

59. Ces deux projets ont été publiés au Bodacc du 30 juin 2022, et le directeur général du Crédit du Nord a constaté, par procès-verbal du 1er janvier 2023, l'accomplissement des conditions suspensives. Le directeur général de la Société Générale a procédé au même constat le même jour. Par un acte commun également du 1er janvier 2023, les deux directeurs généraux ont établi une déclaration de régularité et de conformité des actes et formalités préalables à la fusion.

60. Il est constant que la Société Marseillaise de Crédit et le Crédit du Nord ont été radiés du registre du commerce, ce qui confirme que les opérations de fusion-absorption ont été menées à leur terme, la Société Générale acquérant ainsi l'universalité des droits et obligations de la Société Marseillaise de Crédit. En conséquence, la cour ne peut que rejeter la demande des appelants tendant à voir déclarer la Société Générale irrecevable à agir à leur encontre. La cour ne peut que constater que la Société Générale vient effectivement aux droits de la Société Marseillaise de Crédit.

61. Concernant l'intervention de la Société Générale devant le tribunal de commerce, il résulte du dossier du tribunal transmis à la cour que la Société Générale a déposé des conclusions récapitulatives par lesquelles elle vient aux droits de la Société Marseillaise de Crédit et dans lesquelles elle lui demande de condamner les cautions à lui payer la somme de 39.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2019, date de la mise en demeure. Si ces conclusions ne comportent aucune date, n'ont pas été visées par le greffier du tribunal de commerce, alors que le jugement entrepris n'y fait pas référence, puisque l'énoncé des prétentions des parties ne visent que la Société Marseillaise de Crédit, la Société Générale justifie cependant avoir adressé ses conclusions récapitulatives en vue de l'audience du 17 février 2023 par courrier adressé au tribunal de commerce le 14 février 2023. En outre, les appelants ont été destinataires de ces conclusions, qu'ils produisent devant la cour.

62. Il en résulte que le tribunal de commerce n'a pas pris en compte l'intervention de la Société Générale venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, puisque le jugement déféré indique que la cause a été entendue par la formation collégiale, et que la Société Marseillaise de Crédit a été représentée par son avocat, sans contenir aucune mention relative à l'intervention de la Société Générale venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit. Il s'ensuit que ce jugement ne peut ainsi qu'être infirmé en ses dispositions mentionnant la Société Marseillaise de Crédit, puisqu'il n'a pas pris en compte cette intervention et a prononcé une condamnation au profit d'une société absorbée.

4) Concernant la recevabilité de l'action en paiement de la Société Générale au regard de la prescription :

63. L'engagement des époux [M] a été constaté par l'acte sous-seing privé de cession des éléments du fonds de commerce avec contrat de prêt du 12 mai 2014. Leur engagement manuscrit précise que leur garantie est donnée pour une durée de 108 mois, soit une durée de neuf, expirant ainsi le 12 mai 2023. Il en résulte, en tout état de cause, que l'assignation des cautions par la Société Marseillaise de Crédit, aux droits de laquelle succède la Société Générale, a été délivrée avant l'expiration de la garantie, puisque signifiée le 12 août 2021.

64. En outre, la déclaration de créance interrompt la prescription jusqu'à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire, y compris à l'encontre des cautions, selon l'article L622-25-1 du code de commerce. En la cause, cette déclaration a été effectuée par la Société Marseillaise de Crédit le 31 mars 2016. Il n'est justifié d'aucune contestation de la créance, et le liquidateur judiciaire a délivré un certificat d'irrecouvrabilité le 18 janvier 2019, ce qui confirme son admission au passif. La liquidation judiciaire de la société garantie est toujours en cours, de sorte que l'action engagée contre les cautions suivant assignation du 12 août 2021 n'est pas prescrite.

65. En conséquence, l'action engagée initialement par la Société Marseillaise de Crédit était recevable, de sorte que la cour ne pourra que recevoir l'action de la Société Générale venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit.

66. S'agissant de la demande subsidiaire des appelants tendant à obtenir la décharge de leur engagement en raison d'une attitude dilatoire de la Société Générale, la cour retient qu'aucun élément ne permet de constater une telle attitude de la banque, alors que les cautions ne rapportent pas la preuve d'un préjudice qui en résulterait. Cette demande ne peut prospérer.

5) Sur la transmission du cautionnement à la Société Générale :

67. La cour rappelle en premier lieu que si la Société Générale invoque le cautionnement donné par les époux [M], c'est en raison d'une transmission universelle du patrimoine de la Société Marseillaise de Crédit, incluant tous les droits et actions de cette banque.

68. En outre, il ne résulte pas de l'engagement des appelants qu'ils l'aient conditionné à la personne du prêteur des deniers nécessaires à l'acquisition d'éléments du fonds de commerce. Cette garantie n'a été donnée qu'au profit de la société Eldorado 2.

69. Enfin, la créance invoquée par l'intimée n'est pas née suite à l'opération de fusion-absorption, mais est née d'abord dans le patrimoine de la Société Marseillaise de Crédit en raison de la défaillance de l'emprunteur, puis a seulement été transmise à la Société Générale suite à la fusion-absorption.

70. Il en résulte que les appelants sont mal fondés à demander de juger que les créances, nées postérieurement à la réalisation de la fusion-absorption, ne les engagent pas parce qu'ils refusent expressément que la garantie bénéfice à la Société Générale.

6) Concernant la recevabilité de la demande des époux [M] fondée sur des vices du consentement au regard de la prescription :

71. Concernant le moyen de l'intimée tiré de la prescription quinquennale, les époux [M] se sont portés cautions du remboursement du prêt accordé par la Société Marseillaise de Crédit à l'occasion de l'acquisition des éléments du fonds de commerce par la société Eldorado 2 le 12 mai 2014.

72. Il résulte du jugement du tribunal judiciaire de Grasse du 5 décembre 2017 que les époux [M] et la société Eldorado 2 ont assigné maître [T], rédacteur de l'acte de cession, selon exploit du 19 octobre 2015, en responsabilité pour manquement à son devoir de conseil et de mise en garde, pour avoir établi un acte de vente du fonds de commerce, alors qu'il ne s'agissait que de la cession de certains de ses éléments. Selon les motifs de cette décision, les époux [M] et la société Eldorado 2 ont suggéré que les difficultés financières sont apparues après la vente, en raison du fait que seuls certains éléments du fonds ont été acquis, et non le fonds en son entier.

73. La cour en retire ainsi qu'au courant de l'année 2015 au plus tard, les époux [M] se sont aperçus de l'erreur qu'ils invoquent. Cependant, il ne résulte pas de ce jugement que concernant la Société Marseillaise de Crédit, les époux [M] ont eu connaissance du rôle qu'ils imputent au prêteur à cette époque, alors que ce n'est qu'en mai 2019 qu'ils ont été appelés en paiement.

74. Il en résulte que les appelants sont recevables à invoquer l'erreur et le dol opposés à la Société Générale au regard de la prescription.

7) Concernant la validité des cautionnements au regard de l'erreur et du dol subis par les appelants :

75. Concernant en premier lieu la recevabilité de ce moyen, la cour constate que les époux [M] opposent un vice du consentement dont ils ont été personnellement victimes, tenant aux conditions de l'achat des éléments du fonds de commerce par la société Eldorado 2, alors qu'ils ont garanti le remboursement du prêt consenti à cette occasion. Ils ne peuvent qu'être recevables à invoquer un vice du consentement qu'ils ont personnellement subi.

76. Sur le fond, le tribunal de commerce a énoncé qu'il ressort des éléments du dossier, et notamment du rappel des faits de l'arrêt de la cour d'Aix-en-Provence, que [B] [M] et [D] [M] et la société Eldorado 2 ont engagé une action en résolution pour vice caché devant le tribunal de Nice puis devant la cour d'appel d'Aix en Provence. Par jugement du 8 juillet 2016, le tribunal de commerce de Nice a débouté les consorts [M] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions et par arrêt du 28 mars 2019, la cour d'appel a conclu par la radiation du rôle de l'affaire, les appelants n'ayant pas procédé à la mise en cause du liquidateur de la société Eldorado 2. Il en a retiré que si l'affaire peut toujours être rétablie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, la demande a déjà été tranchée par une juridiction du premier degré, et que d'après l'adage «Non Bis In Idem », le tribunal ne peut juger une deuxième fois les mêmes faits. Par conséquent, le tribunal a jugé que la demande de nullité présentée par les époux [M] est irrecevable conformément au principe d'autorité de la chose jugée.

77. La cour rappelle que selon l'article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

78. En l'espèce, il résulte de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 14 juin 2018, faisant suite au jugement du tribunal de commerce de Nice du 8 juillet 2016, qu'un litige a opposé les époux [M] et la société Eldorado 2 à monsieur [H], la société Eldorado et la Sarlu Libertés Commerces, dans lequel les époux [M] ont notamment demandé de constater que leur consentement a été vicié, que la société Eldorado est tenue de la garantie des vices cachés résultant de l'absence de clientèle. Ils ont en conséquence demandé la condamnation de monsieur [H] et de la société Eldorado, solidairement, à leur payer la somme versée au titre de l'achat des éléments du fonds de commerce, du droit d'entrée en contrepartie de la propriété commerciale conférée par le bailleur, le paiement des intérêts du prêt souscrit auprès de la Société Marseillaise de Crédit, les loyers et charges réglés. Ils ont également demandé la condamnation de la société Libertés Commerces pour manquement à son devoir d'information et de conseil.

79. La cour ne peut que relever que cette instance n'a pas concerné le prêt souscrit auprès de la Société Marseillaise de Crédit, laquelle n'a pas été partie à l'instance. En conséquence, le jugement déféré n'a pu retenir que la demande de nullité des époux [M] est irrecevable au regard de l'autorité de la chose jugée.

80. Il est cependant constant que le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nice est devenu définitif, puisque l'appel des époux [M] a fait l'objet d'une décision de radiation par arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 28 mars 2019. L'instance en appel est désormais périmée. Il en résulte que ce jugement est un fait opposable aux appelants. Or, il résulte de l'arrêt du 14 juin 2018 que le tribunal de commerce de Nice a débouté les époux [M] et la société Eldorado 2 de l'intégralité de leurs demandes visant notamment un vice du consentement imputable aux cédants des éléments du fond de commerce. Si les époux [M] sont ainsi recevables à invoquer un vice du consentement survenu lors de l'acquisition d'éléments du fond de commerce appartenant à la société Eldorado, ils sont néanmoins mal fondés sur ce point, la réalité de ce vice ayant été définitivement rejetée.

81. En outre, les appelants ne rapportent aucun élément de preuve concernant une erreur imputable à la Société Marseillaise de Crédit, pas plus que de man'uvres dolosives dont elle se serait rendue coupable. La banque n'est intervenue qu'en qualité de prêteur à l'acte constatant la cession d'éléments du fonds de commerce, et aucune pièce ne vient établir qu'elle connaissait l'absence de valeur réelle du fonds, d'autant que si les appelants ont engagé une action contre le notaire rédacteur de l'acte afin que sa responsabilité soit retenue au titre d'un manquement à son obligation de mise en garde et de conseil, aboutissant au jugement du tribunal judiciaire de Grasse du 5 décembre 2017 retenant la faute de ce notaire, et le condamnant au paiement d'une indemnité de 3.000 euros en réparation du préjudice moral subi par les époux [M] et la société Eldorado 2, les appelants n'ont cependant engagé aucune action contre la Société Marseillaise de Crédit en responsabilité. Ils n'en ont pas plus engagée contre la Société Marseillaise de Crédit à l'occasion de leur demande principale dirigée contre monsieur [H], la société Eldorado et la Sarlu Libertés Commerces.

8) Concernant la validité des cautionnements au regard de l'erreur et du dol subi par la société Eldorado 2 :

82. Concernant en premier lieu de la recevabilité de cette prétention, la cour note que si l'ancien article 2289 du code civil stipule que le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable, on peut néanmoins cautionner une obligation, encore qu'elle pût être annulée par une exception purement personnelle à l'obligé, par exemple dans le cas de minorité. Par arrêt du 8 juin 2007, la chambre mixte de la Cour de cassation en a retiré que la caution ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur, dont le dol affectant le consentement du débiteur principal.

83. Il en résulte, comme soutenu par la Société Générale, que les appelants ne sont pas recevables à opposer l'erreur et le dol subi par la société Eldorado 2, alors que les nouvelles dispositions issus de la réforme du droit des sûretés en 2021 ne sont pas applicables aux contrats antérieurs.

84. En outre, la cour ne peut que constater, comme précédemment, que ce point a également été jugé définitivement par le tribunal de commerce de Nice, dans l'instance dans laquelle les époux [M] ont été parties, et il n'est justifié d'aucune erreur ou dol émanant de la Société Marseillaise de Crédit lors de l'octroi du prêt au profit de la société Eldorado 2 en 2014.

9) Sur le caractère certain, liquide et exigible de la créance de la Société Générale :

85. Le tribunal de commerce a retenu que la Société Marseillaise de Crédit justifie de sa déclaration de créance au passif de la procédure collective de la société Eldorado 2 ; que si les consorts [M] font valoir que si la créance a bien été déclarée au passif de la procédure le 31 mars 2016 pour un montant de 92.686,07 euros, mais que la banque ne justifie pas que la créance a bien été admise par le juge-commissaire, les cautions ont cependant donné leur engagement en renonçant au bénéfice de la discussion, de sorte que la banque peut engager la procédure à l'encontre des cautions à la suite de la liquidation judiciaire. Le tribunal a précisé que le décompte de la créance est parfaitement clair et mentionne les sommes dues en principal et intérêts et qu'elle est bien devenue exigible.

86. La cour ne peut que confirmer ces motifs, en ajoutant que désormais, un certificat d'irrecouvrabilité a été établi par le liquidateur judiciaire, justifiant ainsi de l'admission de la créance, puisqu'en cas de rejet, ce certificat n'aurait pas été délivré.

87. Concernant les paiements que la banque aurait dû percevoir dans le cadre de la liquidation judiciaire, la cour indique qu'il appartient au débiteur, et en l'occurrence aux cautions, de rapporter la preuve du fait justifiant de l'extinction partielle ou totale de leur obligation, au sens de l'article 1353 du code civil. En outre, le certificat d'irrecouvrabilité émis par le liquidateur judiciaire confirme qu'aucun dividende n'a été servi à la banque. Si les appelants invoquent l'existence d'un stock qui aurait été vendu dans le cadre de la liquidation, ils ne produisent aucune pièce en ce sens.

88. Concernant la déchéance du terme, cette déchéance résultant de la liquidation judiciaire du débiteur principal n'a d'effet qu'à l'égard de celui-ci, et il n'est pas allégué qu'en l'espèce, les contrats de cautionnnement aient contenu une clause contraire. Cependant, le contrat de prêt conclu le 12 mai 2014 devant être remboursé en 84 mensualités, et ainsi sur sept ans. Ce prêt devait ainsi être soldé en mai 2021. Il en résulte qu'à la date de l'assignation des cautions le 12 août 2021, le solde de cet emprunt était exigible.

89. En outre, concernant une mise en demeure préalable de la société Eldorado 2, la cour note que la déclaration de créance vaut demande en justice, et constitue ainsi une mise en demeure suffisante. S'agissant de la mise en demeure des cautions, la Société Marseillaise de Crédit justifie de l'envoi d'une lettre recommandée à cette fin le 24 mai 2019. Ce moyen est ainsi mal fondé.

10) Sur le manquement à l'obligation d'information et de conseil et le soutien abusif de la société Eldorado 2 :

90. S'agissant en premier lieu de la dissimulation d'informations dont la Société Marseillaise de Crédit aurait disposé et qu'elle aurait occultées aux appelants et à la société Eldorado 2, la cour ne peut que retenir, comme plus haut au titre de vices du consentement, qu'aucune pièce ne permet de constater que le prêteur aurait disposé d'informations particulières, pas plus qu'il aurait dissimulées. Ce moyen ne peut qu'être rejeté. Il en est de même concernant une disproportion entre les prix de cession et de droit d'entrée et la juste valeur des éléments du fonds de commerce.

91. S'agissant ensuite de la garantie OSEO devenue BPI France, l'acte du 12 mai 2014, auquel les époux [M] ont été parties, a précisé clairement que cette garantie ne bénéficie qu'à la banque et qu'elle ne peut être invoquée notamment par l'emprunteur et ses garants. Cette information a ainsi été connue des époux [M]. En outre, dans le paragraphe concernant plus particulièrement les appelants, il a été indiqué que la banque pourra les poursuivre sans qu'elle ait préalablement l'obligation de poursuivre l'emprunteur ou d'exercer des poursuites contre d'autres cautions. Leur engagement a été stipulé solidaire avec l'emprunteur, avec renonciation aux bénéfices de discussion et de division.

92. La cour en retire que la Société Marseillaise de Crédit n'avait pas d'obligation de mise en garde à leur délivrer à ce sujet, en raison des termes très clairs de ces clauses. Il n'est en conséquence pas justifié d'une perte de chance de contracter et la demande de dommages et intérêts, d'un montant égal à la garantie souscrite par les cautions, est mal fondée.

93. Concernant enfin un soutien abusif de la société Eldorado 2 par la Société Marseillaise de Crédit, la cour ne peut que constater qu'aucun élément n'est produit permettant de caractériser un tel fait. Ce moyen est également mal fondé et ne permet pas plus de caractériser une perte de chance de ne pas contracter.

11) Concernant la déchéance du droit aux intérêts :

94. Le tribunal de commerce a indiqué qu'il résulte des dispositions des articles 2302 du code civil et L.313-22 du code monétaire et financier que le créancier doit délivrer, avant le 31 mars de chaque année, les informations à la caution sur le montant du principal et intérêts, frais et accessoires, commissions restant à courir au 31 décembre de l'année précédente, et cela jusqu'au remboursement du principal, le non-respect de cette formalité étant sanctionné par la déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information jusqu'à celle de la communication de la nouvelle information. Il a énoncé que la Société Marseillaise de Crédit n'apporte pas la preuve de cette information annuelle aux cautions, et cela depuis le début.

95. La cour ne peut que confirmer ces motifs, d'autant que la déchéance prononcée n'est pas contestée par l'intimée. La Société Générale produit ainsi devant la cour le décompte de sa créance, expurgée des intérêts, arrêté au 26 avril 2023, faisant ressortir un solde de 86.142,55 euros. L'engagement des cautions étant limité à 39.000 euros par caution, il en résulte que les appelants ne peuvent qu'être condamnés au paiement de cette somme, laquelle portera intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation valant mise en demeure. Aucun nouveau décompte n'est nécessaire.

96. Le principe de délais de paiement n'est pas contesté par la Société Générale. Il sera en conséquence fait droit à la demande des appelants, selon les modalités spécifiées au dispositif du présent arrêt, la situation des époux [M], telle qu'appréciée par le tribunal, n'étant pas remise en cause.

*****

97. Le tribunal de commerce a fait une juste appréciation des dispositions de l'article 700 et des dépens. En conséquence, la cour condamnera les appelants à payer à la Société Générale, venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, la somme de 1.500 euros outre les dépens de première instance.

98. Succombant en leur appel, monsieur et madame [M] seront condamnés à payer à la Société Générale la somme complémentaire de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles 901 et 909 du code de procédure civile ; les articles 1109 et suivants (anciens), les articles 2288 et suivants (anciens) du code civil, l'article 1353 du code civil, les articles L622-28, L643-1, L622-25-1 du code de commerce :

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture de monsieur et madame [M] ;

Déclare irrecevables les conclusions n°3 remises par monsieur et madame [M] le 27 mars 2024 ;

Déboute [B] [M] et [D] [P] épouse [M] de leur demande d'annulation du jugement déféré ;

Déboute [B] [M] et [D] [P] épouse [M] de leur demande tendant à voir déclarer la Société Générale irrecevable à agir à leur encontre et reçoit l'action de la Société Générale venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit ;

Déboute [B] [M] et [D] [P] épouse [M] de leur demande tendant à voir déclarer l'appel incident de la Société Générale irrecevable, et reçoit cet appel incident ;

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, à l'exception de celles ayant :

- prononcé la déchéance des intérêts et pénalités dus sur le prêt de 120.000 euros ayant donné lieu à l'acte de cautionnement des époux [M] ;

- condamné solidairement [B] [M] et [D] [M] aux entiers dépens d'instance ;

statuant à nouveau :

Déclare [B] [M] et [D] [P] épouse [M] irrecevable en leur demande résultant d'une erreur ou d'un dol subi par la société Eldorado 2 ;

Déboute [B] et [D] [P] épouse [M] de l'ensemble de leurs autres demandes, à l'exception de celle concernant la déchéance du droit aux intérêts contractuels, et de celle concernant l'octroi de délais de paiement ;

Condamne en conséquence [B] [M] et [D] [P] épouse [M] à payer chacun à la Société Générale, venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, la somme de 39.000 euros en exécution de leur engagement de caution, outre intérêts au taux légal à compter du 12 août 2021 ;

Dit que cette créance devra être réglée en 23 mensualités égales à compter du premier jour du mois civil suivant la signification du présent arrêt, puis par une dernière mensualité correspondant au paiement du solde du capital et des intérêts ;

Dit qu'en cas de défaillance dans le règlement d'une seule mensualité, le tout deviendra immédiatement exigible et que [B] [M] et [D] [P] épouse [M] pourront être poursuivis selon toute voie d'exécution sans qu'il soit nécessaire de statuer à nouveau ;

Condamne solidairement [B] [M] et [D] [P] épouse [M] à payer à la Société Générale venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance ;

Condamne [B] et [D] [P] épouse [M] solidairement à payer à la Société Générale, venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais irrépétibles engagés en appel ;

Condamne solidairement [B] et [D] [P] épouse [M] aux dépens d'appel ;

Signé par Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente et par Mme Alice RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 23/02110
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;23.02110 ?
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