La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/05/2024 | FRANCE | N°21/04838

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 28 mai 2024, 21/04838


N° RG 21/04838 - N° Portalis DBVM-V-B7F-LDX7



C1





N° Minute :

























































































Copie exécutoire délivrée



le :

à :



la SCP RICARD



Me [M] [O]

AU NOM DU PEUPLE

FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 28 MAI 2024





Appel d'un jugement (N° RG 19/04532)

rendu par le Tribunal Judiciaire de Grenoble

en date du 13 septembre 2021

suivant déclaration d'appel du 18 novembre 2021





APPELANTE :



Mme [H] [N]

née le 21 août 1991 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]



représentée et p...

N° RG 21/04838 - N° Portalis DBVM-V-B7F-LDX7

C1

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SCP RICARD

Me [M] [O]

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 28 MAI 2024

Appel d'un jugement (N° RG 19/04532)

rendu par le Tribunal Judiciaire de Grenoble

en date du 13 septembre 2021

suivant déclaration d'appel du 18 novembre 2021

APPELANTE :

Mme [H] [N]

née le 21 août 1991 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée et plaidant par Me Cécile RICARD de la SCP RICARD, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIME :

M. [W] [D]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté et plaidant par Me Hassan KAIS, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Catherine Clerc, président de chambre,

Mme Joëlle BLATRY, conseiller

Mme Véronique LAMOINE, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 mars 2024, Mme LAMOINE, Conseiller chargé du rapport, assistée de Anne Burel, greffier, a entendu seule les avocats en leurs observations, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile.

Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 5 décembre 2016, M. [W] [D] et Mme [H] [N], tous deux infirmiers diplômés d'État, ont signé une convention intitulée "Contrat de remplacement" aux termes de laquelle Mme [N] avait pour mission de remplacer M. [D] lors de la cessation temporaire de son activité professionnelle habituelle, pour une durée de 12 mois renouvelable par tacite reconduction à compter de son expiration d'année en année.

Il était encore stipulé dans ce contrat, notamment :

* que, pour les besoins du remplacement, Mme [N] aurait l'usage des locaux professionnels, installations et appareils situés [Adresse 1] (38),

* que le contrat de remplacement pourrait cesser d'être mis en application à la suite d'un préavis d'un mois par lettre recommandée avec avis de réception.

*que Mme [N] se verrait, à titre de rémunération, rétrocéder 90 % des honoraires perçus pendant le remplacement.

Etait enfin stipulée une clause de non-concurrence interdisant à Mme [N], à l'expiration du contrat, d'exercer la profession d'infirmière libérale soit directement soit indirectement pendant une durée de trois ans dans un rayon de 3 km.

Par courrier du 24 mai 2018, la CPAM de l'Isère a notifié à Mme [N], à sa demande, son inscription en qualité d'infirmière libérale conventionnée compter du 1er mars 2018.

A partir d'avril 2019, Mme [N] a commencé à facturer directement ses patients sans rétrocession d'honoraires à M. [D], sans que, pour autant, il ait été mis fin expressément au "contrat de remplacement".

A partir du 19 septembre 2019, la relation s'est dégradée entre M. [D] et Mme [N] relativement au planning d'exercice de chacun d'entre eux et, par courrier recommandé du 26 septembre 2019, M. [D] a mis fin au contrat du 5 décembre 2016, à effet un mois à compter de la date d'envoi de cette lettre.

Par acte du 28 octobre 2019, Mme [N] a assigné M. [D] devant le tribunal de grande instance de Grenoble pour voir :

- requalifier le contrat de remplacement en contrat de société,

- dire et juger que la rupture unilatérale de ce contrat par M. [D] n'est ni fondée, ni justifiée et particulièrement abusive,

- condamner M. [D] à lui payer, outre une indemnité de procédure, la somme de 30 000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice matériel et financier ainsi que celle de 10'000 € en réparation de son préjudice moral.

M. [D] a conclu au débouté de Mme [N], tout en admettant que le contrat puisse être requalifié en contrat de collaboration.

Il a néanmoins demandé reconventionnellement la condamnation de Mme [N] à lui payer la somme de 2 286,89 € au titre de la rétrocession sur rémunérations perçues d'avril à septembre 2019.

Par jugement du 13 septembre 2013, le tribunal a :

* débouté Mme [N] de l'ensemble de ses demandes,

* débouté M. [D] de sa demande en paiement de la somme de 2 286,89 €,

* condamné Mme [N] aux dépens et à payer à M. [D] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration au Greffe en date du 18 novembre 2021, Mme [N] a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions, en demandant, par voie de conclusions, que le contrat de remplacement soit annulé comme conclu en fraude du statut d'ordre public des infirmiers, qu'il soit dit que les parties étaient liées par un contrat écrit de collaboration, et l'indemnisation de ses préjudices ainsi que diverses sommes perçues à tort par l'effet de l'annulation du contrat.

Par un arrêt avant dire droit en date du 17 octobre 2023, cette cour a :

* prononcé la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture,

* invité les parties à s'expliquer et formuler toutes observations et demandes qui en découlent sur la circonstance qu'elles aient pu tacitement convenir de mettre fin au contrat initial, et d'établir entre elles les règles d'une collaboration au lieu d'un remplacement, et si oui, à partir de quelle date.

Par dernières conclusions n° 3 notifiées le 29 novembre 2023, Mme [N] demande l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et :

* l'annulation du contrat de remplacement,

* qu'il soit dit et jugé que les parties étaient liées par un contrat écrit de collaboration,

* qu'il soit jugé que M. [D] a engagé sa responsabilité contractuelle,

* la condamnation de M. [D] à l'indemniser des entiers préjudices résultant de la relation contractuelle irrégulière et des conditions de la rupture et, par conséquent, à lui payer les sommes suivantes outre intérêts de retard à compter de l'assignation et capitalisation des intérêts :

5 088 € au titre des rétrocessions d'honoraires perçues à tort par l'effet de l'annulation du contrat,

4 656,20 € au titre du matériel payé et non utilisé en raison de la cessation de l'activité d'infirmière libérale,

6 880 € au titre du préavis de trois mois non réglé,

14 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice personnel et moral.

Elle demande enfin condamnation de M. [D] aux dépens et à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir :

* sur la question soulevée par la cour dans l'arrêt avant dire droit du 17 octobre 2023 :

que, dès l'origine, les parties au contrat ont fonctionné en mode de 'collaboration', c'est-à-dire un statut permettant de pallier des absences temporaires sans qu'il soit nécessaire d'embaucher une tierce personne,

que c'est la raison pour laquelle elle sollicite l'annulation du contrat de remplacement pour défaut d'objet, et comme conclu en fraude du statut d'ordre public des infirmiers, en application de l'article 1178 du code civil,

* que le tribunal, qui a reconnu dans ses motifs que le contrat devait être requalifié en contrat de 'collaboration', ne pouvait dans le même temps appliquer les clauses prévues au "contrat de remplacement" qu'il reconnaissait ainsi qualifié à tort,

* que, dans ces circonstances, les conditions de la rupture ont été très brutales, M. [D] ayant voulu, de manière abusive vu le contexte de collaboration entre eux, modifier unilatéralement le planning en lui imposant de travailler davantage les week-ends et moins en semaine,

* que, dès lors, les rétrocessions d'honoraires déjà opérées n'ont plus aucun fondement,

* qu'il est exact qu'elle n'a pas supporté les charges du cabinet en contrepartie de son exercice, mais que M. [D] ne les lui a pas réclamées, qu'il s'agissait en toute hypothèse de frais mineurs, l'adresse du cabinet étant en réalité une domiciliation puisqu'ils exerçaient tous deux essentiellement au domicile des patients,

* que, par conséquent, la clause de non-concurrence prévue au contrat ne saurait s'appliquer et elle lui cause un préjudice,

* qu'elle a dû aussi supporter les frais d'investissements engagés pour son installation en libéral qu'elle n'a pu mener à bien.

M. [D], par uniques conclusions notifiées le 16 mai 2022 avant le prononcé de l'arrêt avant dire droit, demande la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [N] de ses demandes, mais forme appel incident sur le surplus et demande à cette cour, statuant de nouveau, de condamner Mme [N] à lui payer la somme de 2 286,89 € au titre de l'accord contractuel souscrit le 5 décembre 2016.

Il demande encore condamnation de Mme [N] à lui payer la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir :

* qu'il n'est pas opposé à ce que la juridiction saisie requalifie le contrat de remplacement en contrat de collaboration,

* qu'en effet, ce contrat avait été conclu afin d'assurer la continuité des soins en cas de surcroît de travail,

* que Mme [N] était garantie dans l'exercice de son art en toute indépendance, mais devait lui rétrocéder 10 % de ses honoraires en sa qualité de "propriétaire du fonds' (sic),

* que c'est ainsi qu'à compter du 1er mars 2018, Mme [N] a pu bénéficier du statut d'infirmière libérale conventionnée et facturer directement à ses patients les actes et prestations accomplies sans pour autant justifier auprès de lui de l'ensemble des honoraires et rémunérations de son activité, alors qu'elle avait l'usage de ses locaux et de son matériel professionnels sans contrepartie,

* qu'il a eu à souffrir un comportement dénigrant de la part de Mme [N], ce qui a justifié la cessation de la collaboration,

* que Mme [N] ne justifie d'aucun préjudice, mais qu'elle lui est redevable de la somme de

2 286,89 € au titre des rétrocessions d'honoraires d'avril à septembre 2019.

L'instruction a été clôturée par une ordonnance rendue le 21 juillet 2023.

MOTIFS

Sur la demande de Mme [N] aux fins de voir annuler le 'contrat de remplacement'

Aux termes de l'article 1178 du code civil dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable compte-tenu de la date de conclusion du 'Contrat de remplacement' : 'un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul' ; l'article 1179 du même code précise que la nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l'intérêt général, et qu'elle est relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d'un intérêt privé.

En l'espèce, Mme [N] prétend le contrat nul, au seul motif qu'il aurait été conclu 'en fraude du statut d'ordre public des infirmiers'. Or, elle n'explique pas quelles règles particulières auraient été violées en l'espèce par les termes du contrat de remplacement du 5 décembre 2016.

Si le tribunal a considéré, dans les motifs du jugement déféré, que l'article R. 4312-84 du code de la santé publique aurait été méconnu en l'espèce par les parties dès lors que l'exercice de Mme [N] n'aurait pas été limité aux arrêts maladies ou congés de M. [D], il doit être relevé que ce texte n'impose pas que l'activité de l'infirmier remplaçant se limite aux périodes de congés du titulaire ou d'arrêt pour maladie, mais seulement que ce dernier '(s'abstienne) de toute activité professionnelle infirmière durant la période de remplacement'. Or, en l'espèce, rien ne permet d'affirmer que M. [D] aurait exercé pendant les jours où Mme [N] assurait son remplacement, l'article R. 4312-85 du code déjà cité disposant que 'au-delà d'une durée de 24 heures ou en cas de remplacement d'une durée inférieure à 24 heures mais répétée, un contrat de remplacement doit être établi par écrit entre les deux parties et être communiqué au conseil départemental de l'ordre'. Or les parties ont bien respecté ce texte puisqu'elles ont établi et signé le 5 décembre 2016 un contrat régissant les conditions du remplacement.

Par ailleurs dès lors que les parties ont, à l'origine et d'un commun accord, appliqué les clauses du contrat concernant notamment les rétrocessions d'honoraires à l'infirmier titulaire et l'absence de participation de Mme [N] en qualité de remplaçante aux charges du cabinet, il ne saurait être considéré que le contrat était dépourvu d'objet. Il n'est donc pas justifié, en l'état des éléments du dossier, d'aucun motif permettant de prononcer la nullité du contrat de remplacement comme sollicité par Mme[N].

En revanche, les éléments du dossier révèlent que la relation contractuelle a pu, au fil du temps, évoluer pour s'orienter vers un contrat de collaboration, ce que reconnaît d'ailleurs M. [D] dans ses écritures, en ce que :

- à partir du 1er mars 2018, Mme [N] a été inscrite auprès de la CPAM de l'Isère en qualité d'infirmière libérale conventionnée, son attestation d'exercice en date du 28 mai 2018 (sa pièce n° 4) mentionnant 'bénéficie déjà des avantages sociaux car était remplaçante', sa situation en qualité d'infirmier dans le répertoire 'ADELI' au 24 avril 2018 mentionnant 'mode d'exercice : libéral en cabinet ou société', et comme fonction 'collaborateur',

- au moins à partir d'avril 2019, Mme [N] a commencé à facturer directement les patients auprès desquels elle intervenait sans que, pour autant, M. [D] lui réclame, jusqu'à l'introduction de l'instance devant les premiers juges, la rétrocession d'honoraires de 10 % prévue au contrat initial, la dernière facture de rétrocession d'honoraires produite aux débats (pièce n° 11 de l'appelante), correspondant aux honoraires perçus en mars 2019,

- il ressort de captures d'écran de textos échangés entre les parties en décembre 2018 (pièce n° 22 de Mme [N]) qu'au moins à partir de cette date, M. [D] et Mme [N] avaient convenu que cette dernière serait mentionnée dans le bail des locaux professionnels, M. [D] renvoyant Mme [N] à contacter, sur ce point, les kinésithérapeutes auprès desquels il louait ses locaux, ce que cette dernière a fait à plusieurs reprises, notamment en février puis septembre 2019 au vu des captures d'écran de textos produites, en sollicitant ces derniers à cette fin.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les parties au contrat de remplacement initial ont, tacitement, entendu faire évoluer celui-ci vers un véritable contrat de collaboration, ce à partir du 1er mars 2018, date d'inscription de Mme [N] en qualité d'infirmière libérale.

Il en résulte que les clauses du 'contrat de remplacement' du 5 décembre 2016 n'avaient plus vocation à s'appliquer entre les parties à compter de cette date, ce qui implique, en particulier :

- que M. [D] ne pouvait pas mettre fin à la relation contractuelle par simple lettre recommandée avec avis de réception en respectant un préavis d'un mois selon les termes de l'article 2 du contrat initial,

- que Mme [N] n'était plus tenue par la clause de non concurrence prévue à l'article 8 du contrat de remplacement,

- qu'elle n'avait plus à procéder à la rétrocession d'honoraires de 10 % prévue au contrat.

Par conséquent, Mme [N] est fondée à se voir allouer les sommes suivantes au titre de rétrocession d'honoraires indues, au vu de ses déclarations de revenus non salariés versés aux débats :

- pour l'année 2018 : 24 044 € (bénéfice annuel) /12 x 10 pour les mois de mars à décembre 2018 inclus = 20 036,66 € x 10 % = 2 003,66 €,

- pour les mois de janvier à mars 2019 : 17 181 € (bénéfice annuel) /10 mois x 3= 5 154,30€ x 10 % = 515,43€,

soit un total à ce titre de 2 519,09 €.

Ainsi qu'il a été développé plus haut, la rupture du contrat par M. [D] avec un seul préavis d'un mois, conditions initiales devenues inapplicables en raison de l'évolution du contrat, a présenté un caractère abusif entraînant un préjudice pour Mme [N] tant moral que matériel, en la privant soudainement des revenus qu'elle aurait pu percevoir si la rupture n'avait pas été aussi rapide, alors que des charges professionnelles personnelles continuaient de lui incomber.

Pour autant, elle n'établit pas avoir été dans l'obligation d'abandonner son installation en libéral à cause des conditions de cette rupture comme elle le laisse entendre, et ne saurait donc se voir allouer, à titre de dommages-intérêts, la totalité des frais restant à courir sur des dépenses d'investissement engagées en vue de cette installation.

Par ailleurs, elle ne justifie pas de sa situation professionnelle et financière au-delà de la fin de l'année 2019.

Au vu de l'ensemble de ces éléments et des pièces produites, il sera alloué à Mme [N], en réparation de ses préjudices résultant de la rupture brutale des relations contractuelles :

- les revenus manquants de 2019 sur les deux mois de fin de l'année, sur la base des revenus déclarés ramenés à 10 mois, soit 1 718,10 € x 2 = 3 436,20 €, rémunération qu'elle aurait perçue si M. [D] avait respecté, pour mettre fin au contrat, un préavis de trois mois, conforme aux recommandations du modèle de contrat de collaboration libérale entre infirmiers émanant de l'ordre national de cette profession et versé aux débats par l'appelante,

- des dommages-intérêts à hauteur de 6 000 € en réparation de son trouble moral et des perturbations dans son exercice professionnel, avec nécessité de procéder à des recherches en urgence pour une possible réinstallation dans un autre cadre.

Aucun élément du dossier ne conduit à fixer le point de départ des intérêts sur les sommes allouées à une date antérieure au présent arrêt, en application des dispositions de l'article 1231-7 du code civil.

La demande de capitalisation des intérêts, dès lors qu'elle est formée pour les intérêts dus au moins pour une année entière conformément à l'article 1343-2 du code civil, s'impose au juge et il y a donc lieu d'y faire droit.

Sur la demande reconventionnelle de M. [D]

Ainsi qu'il a été développé plus haut, la relation contractuelle entre les parties a, tacitement mais d'un commun accord, évolué à partir du 1er mars 2018, date à partir de laquelle Mme [N] a été inscrite auprès de la CPAM de l'Isère en qualité d'infirmière libérale conventionnée, vers un contrat de collaboration et non plus de remplacement.

Dès lors, M. [D] n'est pas fondé à réclamer à Mme [N] la rétrocession d'honoraires de 10 % convenue dans le contrat de remplacement, étant souligné qu'à partir du mois d'avril 2019 il ne lui a, de fait, plus facturé cette rétrocession, et que ce n'est que dans le cadre de l'instance engagée par Mme [N] devant le premier juge qu'il a, pour la première fois, formulé cette demande à titre reconventionnel.

C'est donc à bon droit, pour ces motifs substitués, que le tribunal a rejeté cette demande, et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes accessoires

M. [D], qui succombe, devra supporter les dépens de première instance et d'appel conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile. Pour les mêmes motifs, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en sa faveur.

Il est équitable de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme [N].

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré seulement en ce qu'il a débouté M. [D] de sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 2 286,89 €.

L'infirme pour le surplus et, statuant de nouveau et y ajoutant :

Déboute Mme [N] de sa demande tendant à voir annuler le contrat de remplacement conclu entre les parties en date du 5 décembre 2016.

Dit que les parties ont mis fin tacitement, à compter du 1er mars 2018, au contrat de remplacement conclu entre elles, et ont poursuivi, à partir de cette date, leurs relations contractuelles sur le mode d'une collaboration.

Dit que par conséquent, à compter de cette date, les clauses du contrat initial n'avaient plus vocation à s'appliquer.

Condamne M. [D] à payer à Mme [N] la somme de 2 519,09 € au titre de rétrocessions d'honoraires indues de mars 2018 à mars 2019 inclus.

Condamne M. [D] à payer à Mme [N], en réparation du préjudice causé par les conditions irrégulières et abusives de la rupture du contrat, les sommes de :

- 3 436,20 € au titre des revenus qu'elle aurait perçus si un préavis de trois mois avait été respecté,

- 6 000 € en réparation de son préjudice moral et troubles dans les conditions d'exercice de la profession.

Rejette la demande tendant à voir fixer le point de départ des intérêts à la date de l'assignatino.

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Condamne encore M. [D] à payer à Mme [N] la somme de 3 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette toutes les autres demandes.

Condamne M. [D] aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame Clerc , président, et par Madame Burel, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 21/04838
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;21.04838 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award