N° RG 22/03960 - N° Portalis DBVM-V-B7G-LSIR
C8
Minute :
Copie exécutoire
délivrée le :
la SELARL CABINET EZINGEARD MAGNAN
la SELARL CDMF AVOCATS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 14 MARS 2024
Appel d'une décision (N° RG 2021J36)
rendue par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE
en date du 21 septembre 2022
suivant déclaration d'appel du 04 novembre 2022
APPELANTS :
M. [C] [H]
né le 22 Août 1955 à [Localité 5] (Belgique)
de nationalité Belge
[Adresse 2]
[Adresse 2] (Belgique)
Mme [U] [K] épouse [H]
née le 13 Février 1958 à [Localité 4] (Belgique)
de nationalité Belge
[Adresse 2]
[Adresse 2] (Belgique)
représentés par Me Gaëlle MAGNAN de la SELARL CABINET EZINGEARD MAGNAN, avocat au barreau de VALENCE, postulant et plaidant par Me FAVRE, avocat au barreau de MARSEILLE,
INTIMÉES :
S.A.R.L. LA FERME CHAPOUTON immatriculée au RCS de Romans-sur-Isère sous le numéro 803 897 099, prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant es-qualité audit siège.
[Adresse 1]
[Adresse 1]
La compagnie GAN ASSURANCES, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 542 063 797, prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant es-qualité audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentées et plaidant par Me Romain JAY de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente de Chambre,
M. Lionel BRUNO, Conseiller,
Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,
DÉBATS :
A l'audience publique du 12 janvier 2024, Mme FIGUET, Présidente, qui a fait rapport assisté de Alice RICHET, Greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
Faits et procédure
La société La Ferme Chapouton exploite un établissement d'hôtellerie - restauration situé au [Adresse 1].
Le 25 septembre 2020, Monsieur [C] [H] et Madame [U] [K], épouse [H], ont déjeuné au sein de cet établissement après avoir stationné leur véhicule sur le parking dudit établissement,.
Le même jour, les époux [H] ont déposé plainte auprès de la compagnie de gendarmerie départementale de [Localité 6]. Ils ont déclaré qu'à leur retour du restaurant, ils ont constaté que la vitre arrière droite de leur véhicule avait été brisée et qu'il leur avait été volé trois sacs contenant des appareils photographiques, un boîtier dispositif auriculaire, des documents d'identité et moyens de paiement.
Par courrier en date du 9 octobre 2020, le conseil des époux [H] a sollicité de la société La Ferme Chapouton l'indemnisation de leur préjudice.
Par courrier électronique du 19 octobre 2020, l'assureur de la société La Ferme Chapouton a refusé toute indemnisation, estimant l'action des époux [H] infondée, ce qu'a contesté le conseil de ces derniers par courrier en date du 6 novembre 2020.
Par acte du 12 janvier 2021, les époux [H] ont assigné la société La Ferme Chapouton et la société Gan Assurances devant le tribunal de commerce de Romans Sur Isère.
Par jugement en date du 21 septembre 2022, le tribunal de commerce de Romans Sur Isère a :
dit Monsieur et Madame [H] recevables mais mal fondés en leurs demandes ;
débouté Monsieur [C] [H] et Madame [U] [H] née [K] de leurs demandes, fins et conclusions tant sur les dispositions des articles 1952 et suivants du code civil, 1927 et suivants et 1240 et suivants du même code ;
débouté Monsieur et Madame [H] de leurs demandes de tous dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral et pour résistance abusive ;
condamné Monsieur et Madame [H] à payer à La Ferme Chapouton la somme de 100 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires ;
liquidé les dépens visés à l'article 701 du code de procédure civile à la somme de 91,45 euros HT, de 109,74 euros TVA, soit la somme totale de 18,29 euros pour être mis à la charge de Monsieur et Madame [H].
Monsieur [C] [H] et Madame [U] [K], épouse [H], ont interjeté appel de l'ensemble des chefs de ce jugement par déclaration en date du 4 novembre 2022 et en ont sollicité la réformation, sauf en ce qu'il a rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires et liquidé les dépens visés à l'article 701 du code de procédure civile à la somme de 91,45 euros HT, de 10 euros,74 € TVA, soit la somme totale de 18,29 euros.
Prétentions et moyens de Monsieur [C] [H] et Madame [U] [K], épouse [H]
Aux termes de leurs dernières écritures, notifiées par voie électronique le 12 décembre 2023, les appelants demandent à la cour de :
déclarer Monsieur et Madame [H] [K] recevables en leur appel ;
juger recevables et bien fondées les présentes conclusions d'appelants ;
rejeter toutes demandes adverses comme infondées ou irrecevables
infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Romans Sur Isère le 21 septembre 2022 en ce qu'il a débouté Monsieur et Madame [H] [K] de l'intégralité de leurs demandes et les a condamnés aux entiers dépens et à la somme de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Et, statuant à nouveau :
retenir l'existence d'un lien causal entre les préjudices invoqués par les époux [H] [K] et les fautes de l'établissement La Ferme Chapouton ;
condamner in solidum La Ferme Chapouton et son assureur la compagnie Gan Assurances à payer aux demandeurs les sommes suivantes :
8 730 euros au titre du préjudice matériel,
1 500 euros au titre du préjudice moral,
condamner in solidum La Ferme Chapouton et son assureur la compagnie Gan Assurances au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Au soutien de leur prétention tendant à condamner in solidum les sociétés intimées en indemnisation de leur préjudice, les appelants font valoir que :
- la société La Ferme Chapouton a commis une faute constituée par un défaut de surveillance et de sécurisation du parking et une absence d'alerte des clients quant au risque de vol puisque ledit parking ne disposait d'aucun système de sécurité ou de vidéo-surveillance et ne comportait aucun panneau alertant les clients sur un risque de vol alors que la société La Ferme Chapouton avait pourtant connaissance dudit risque puisqu'elle soutient que les époux [H] auraient été imprudents,
ils n'ont commis aucune faute d'imprudence en stationnant leur véhicule verrouillé dans une propriété privée, à l'endroit où l'établissement invite les clients à se garer,
ils n'ont commis aucune faute d'imprudence en ne vidant pas le véhicule de l'intégralité de leurs bagages et affaires personnelles car ils ne faisaient que déjeuner et n'étaient pas informés du risque encouru,
contrairement aux dires des intimées, le vol est bien intervenu sur le parking de La Ferme Chapouton puisqu'il ressort du dépôt de plainte que c'est le chef d'établissement de La Ferme Chapouton qui a lui-même averti les services de police après avoir constaté le vol,
la profession de Monsieur [H] n'est pas de nature à l'amener à être plus précautionneux qu'un autre client,
ce sont les fautes de la société La Ferme Chapouton qui ont permis l'introduction sans encombre du ou des voleurs, ainsi que la réalisation de l'infraction, et ont donc été les causes génératrices du préjudice,
leur préjudice matériel est évalué à la somme de 8.370 euros et ils ont subi un préjudice moral estimé à 1.500 euros compte tenu des démarches qu'ils ont dû faire pour remplacer leurs biens, étant précisé que leur assureur a refusé de prendre en charge ces préjudices.
Prétentions et moyens des sociétés La Ferme Chapouton et Gan Assurances
Aux termes de ses dernières écritures, notifiées par voie électronique le 12 décembre 2023, les sociétés La Ferme Chapouton et Gan Assurances demandent à la cour de :
confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
débouter Monsieur et Madame [H] de toutes leurs demandes ;
condamner Monsieur et Madame [H] aux entiers dépens d'appel et à verser la somme de 3.000 euros au bénéfice de la société La Ferme Chapouton et de la compagnie Gan Assurances sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de leur prétention, les sociétés intimées font valoir que :
la Ferme Chapouton n'a commis aucune faute en ne sécurisant pas son parking avec une clôture et un système de vidéo-surveillance ou en n'informant pas ses clients sur les risques de vol, il n'a jamais été transféré à La Ferme Chapouton la garde du véhicule des appelants et il n'a jamais été indiqué que ledit parking faisait l'objet d'une surveillance,
au regard de la profession de Monsieur [H], avocat spécialisé en droit des assurances, il ne pouvait pas ignorer les risques qu'il encourrait en laissant dans son véhicule des objets de valeur et des documents importants, les appelants ont fait preuve d'imprudence en laissant ces objets à la vue de toute personne passant à proximité,
il ne résulte pas des pièces versées aux débats que le vol s'est produit sur ledit parking,
la liste des objets dérobés est différente de celle qui était indiquée dans le procès-verbal de plainte,
s'agissant du préjudice, les époux [H] qui produisent des factures d'achat de remplacement ne rapportent pas la preuve de la présence des biens déclarés volés dans leur véhicule, par ailleurs il est sollicité le remboursement d'appareils auditifs de plus de huit ans qui ne sont plus sous garantie depuis trois ans,.
en l'absence de faute pouvant être reprochée à La Ferme Chapouton, aucun lien de causalité ne peut exister.
Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
La procédure a été clôturée le 13 décembre 2023.
Motifs de la décision :
1°) Sur la responsabilité extracontractuelle de la société La Ferme Chapouton
Les époux [H] fondent leur demande sur les dispositions de l'article 1240 du code civil qui pose le principe de la responsabilité extracontractuelle selon laquelle tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Pour être retenue, cette responsabilité suppose que la victime qui s'en prévaut établisse une faute, un dommage et un lien de causalité entre les deux.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le parking de La Ferme Chapouton ne dispose pas de clôtures ou de vidéo-surveillance et qu'il n'y a pas de panneau informant les clients d'un risque de vol.
Toutefois, il n'existe pas d'obligation inhérente à tout propriétaire de parking de le sécuriser, à défaut pour lui de s'y engager expressément ce qui n'est pas le cas ici.
En conséquence, la société La Ferme Chapouton n'a pas commis de faute en ne sécurisant pas son parking avec une clôture ou un système de vidéo-surveillance.
De même, il ne pèse pas sur la société La Ferme Chapouton l'obligation d'informer ses clients sur le risque de vol alors même qu'il n'est pas justifié de l'existence d'un risque spécifique concernant le lieu du vol autre que celui inhérent à tout parking que les époux [H] connaissaient nécessairement.
En tout état de cause, et bien que la profession de Monsieur [H] soit indifférente, les appelants ont été imprudents en laissant des objets de valeur dans leur véhicule, comme notamment leurs documents d'identité, leurs moyens de paiement, leurs appareils photographiques alors même que contrairement à ce qu'ils soutiennent, ils pouvaient les emporter avec eux sans avoir à décharger l'ensemble de leurs bagages.
Au surplus, il ne ressort que des déclarations des appelants et non pas des pièces soumises à la cour que le vol s'est produit sur le parking de la société La Ferme Chapouton.
Il résulte donc de ce qui précède que les appelants échouent à rapporter la preuve de la faute de la société La Ferme Chapouton.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [C] [H] et Madame [U] [K], épouse [H], de leur demande d'indemnisation sans qu'il y ait lieu à apprécier les moyens développés sur le préjudice et le lien de causalité.
2°) Sur les demandes accessoires
Monsieur [C] [H] et Madame [U] [K], épouse [H], seront condamnés au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils seront aussi condamnés aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Romans sur Isère du 21 septembre 2022 en toutes ses dispositions soumises à la cour.
Ajoutant,
Condamne Monsieur [C] [H] et Madame [U] [K], épouse [H], à payer la somme de 2.500 euros aux sociétés La Ferme Chapouton et Gan Assurances en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.
Condamne Monsieur [C] [H] et Madame [U] [K], épouse [H], aux dépens d'appel.
SIGNÉ par Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente et par Mme Alice RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente