N° RG 21/02779 - N° Portalis DBVM-V-B7F-K5YQ
C2
N° Minute :
Copie exécutoire
délivrée le :
la SELARL BALESTAS-GRANDGONNET-MURIDI & ASSOCIES
la SCP LACHAT MOURONVALLE
la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU LUNDI 03 JUILLET 2023
Appel d'une décision (N° RG 19/00088)
rendue par le Tribunal judiciaire de GRENOBLE
en date du 06 mai 2021
suivant déclaration d'appel du 22 juin 2021
APPELANTE :
Mme [I] [V]
née le 29 mars 1969 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 7]
représentée par Me Audrey GRANDGONNET de la SELARL BALESTAS-GRANDGONNET-MURIDI & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEES :
LA SASU SURMESURE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
S.A. ALLIANZ IARD prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentées par Me Christophe LACHAT de la SCP LACHAT MOURONVALLE, avocat au barreau de GRENOBLE postulant et plaidant par Me Guillaume DESMURE, avocat au barreau de MARSEILLE
E.U.R.L. 'IMMOBILIERE CHANGEUR' prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Me Géraldine CAVAILLES de la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, président de chambre,
Mme Joëlle Blatry, conseiller,
Mme Véronique Lamoine, conseiller
DÉBATS :
A l'audience publique du 30 mai 2023,Mme Blatry, conseiller chargé du rapport en présence de Mme Clerc, président de chambre, assistées de Madame Anne Burel, greffier, ont entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.
Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
******
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Suivant acte authentique du 15 novembre 2016, Mme [I] [V] a acquis un appartement sur [Localité 7] par l'entremise de la SARL Immobilière Changeur, la société Surmesure ayant effectué le diagnostic de performance énergétique.
Alléguant une surconsommation énergétique et un diagnostic erroné, Mme [V] a poursuivi la société Immobilière Changeur et la société Surmesure avec son assureur la société Allianz en réparation de ses préjudices.
Par jugement du 6 mai 2021, le tribunal judiciaire de Grenoble a débouté Mme [V] de l'ensemble de ses prétentions, a dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure ni à exécution provisoire et l'a condamnée aux dépens de l'instance.
Suivant déclaration du 22 juin 2021, Mme [V] a relevé appel de cette décision.
Par ordonnance juridictionnelle du 8 mars 2022, Mme [V] a été déboutée de sa demande en expertise judiciaire au motif que la mission sollicitée n'avait aucun lien avec les manquements qu'elle pourrait reprocher à la société Surmesure.
Au dernier état de ses écritures du 22 septembre 2021, Mme [V] demande à la cour de réformer le jugement déféré et de :
1) avant dire droit, ordonner une mesure d'expertise sur les désordres allégués et les dommages en résultant et fournir à la cour tous éléments techniques et de fait de nature à déterminer les responsabilités encourues,
2) au fond sur les responsabilités, condamner in solidum les co-défenderesses à lui payer la somme de 30.250€ au titre de sa perte de chance et la somme de 3.000€ au titre de son obligation à agir en justice,
3) en tout état de cause, condamner les mêmes in solidum à lui payer une indemnité de procédure de 2.500€.
Elle fait valoir que :
afin de permettre à la cour d'avoir les éléments nécessaires pour statuer sur ses demandes, une mesure d'expertise est indispensable,
le document établi par la société Surmesure fait apparaître une date de construction de l'atelier en 1948 alors qu'il a été transformé après 2013 en appartement,
la date retenue est erronée,
l'agence immobilière ne s'est pas informée sur la validité du diagnostic de performance énergétique et, de ce fait, ne l'a pas suffisamment informée lors de l'achat du bien,
la société Surmesure ne s'est pas posée la question de la date de la construction du bien laquelle conditionne la méthode de calcul de la performance énergétique,
la société Surmesure a choisi de façon arbitraire la méthode de calcul,
la société Surmesure a commis une faute qui est à l'origine de son préjudice caractérisé par la nécessité de mise en 'uvre de travaux d'isolation,
elle a ainsi perdu la chance de négocier un prix inférieur à celui fixé à hauteur de 169.500€.
Par uniques conclusions du 6 décembre 2021, la société Immobilière Changeur demande à la cour de confirmer le jugement déféré sauf sur le rejet de sa demande en indemnité de procédure et de condamner Mme [V] à lui payer une indemnité de procédure de 3.000€ en première instance, de 4.000€ en cause d'appel et de supporter les entiers dépens de la procédure.
Elle expose que:
une mesure d'expertise n'a pas vocation à pallier la carence d'une partie à rapporter la preuve des faits qu'elle allègue,
Mme [V] a renoncé à mettre en cause sa venderesse qui a pourtant effectué le changement de destination de l'immeuble,
elle a accompli de façon incontestable les obligations mises à sa charge découlant de son mandat de vente non exclusif,
son rôle de mandataire en matière de vente ne saurait faire d'elle une véritable professionnelle de la construction,
il ne peut lui être fait grief de ne pas s'être assurée de ce que les travaux d'isolation avaient été correctement réalisés,
rien ne permettait de suspecter une quelconque difficulté,
elle a bien recueilli les informations et éléments utiles à la commercialisation du logement,
Mme [V] était parfaitement informée de la transformation de l'atelier en appartement.
Par uniques écritures du 21 décembre 2021, la société Surmesure et la société Allianz demandent à la cour de confirmer le jugement déféré sauf sur le rejet de leur demande en indemnité de procédure et de:
1) à titre principal, débouter Mme [V] de l'ensemble de ses prétentions,
2) subsidiairement, dire que la société Allianz est bien fondée à opposer à Mme [V] une franchise de 1.500€ sur l'ensemble des condamnations qui seraient hypothétiquement prononcées,
3) en tout état de cause, condamner Mme [V] à leur payer une indemnité de procédure de 5.000€, outre les entiers dépens de l'instance.
Elles expliquent que :
une mesure d'expertise n'a pas vocation à pallier la carence d'une partie à rapporter la preuve des faits qu'elle allègue,
l'éventuelle transformation du bien, qui n'a jamais été portée à la connaissance du diagnostiqueur, est sans lien avec son intervention,
le règlement thermique 2012 (RT 2012) est applicable à tous les permis de construire déposés depuis le 28 octobre 2011 pour certains bâtiments neufs du secteur tertiaire et les bâtiments à usage d'habitation construits en zone ARRU et pour tous les autres bâtiments pour les permis de construire déposés depuis le 1er janvier 2013,
il s'agit d'une norme de construction qui n'est pas applicable aux diagnostics de performance énergétiques,
la norme applicable au 2 juin 2016, date de la réalisation du diagnostic, était la norme NFEN15217,
Mme [V] est dans l'incapacité de démontrer en quoi, la société Surmesure aurait failli à sa mission,
concernant la question du défaut d'isolation, la société Surmesure est totalement étrangère à ce débat,
il n'est démontré ni faute ni préjudice et encore moins de lien de causalité.
La clôture de la procédure est intervenue le 25 avril 2023.
MOTIFS
1/ sur la demande en expertise
Par ordonnance juridictionnelle du 8 mars 2022, Mme [V] a été déboutée de sa demande en expertise judiciaire au motif que la mission sollicitée n'avait aucun lien avec les manquements qu'elle pourrait reprocher à la société Surmesure.
Au fond, Mme [V] reformule sa demande d'expertise avec exactement la même mission sur d'éventuels désordres et les responsabilités encourues à ce titre alors que le présent litige concerne une éventuelle responsabilité de l'agence immobilière sur le défaut de vérification du contenu du diagnostic et une éventuelle responsabilité du diagnostiqueur sur l'application de la mauvaise norme au regard du choix erroné de la date de construction de l'immeuble acquis.
Ainsi que l'a justement retenu le conseiller de la mise en état, Mme [V] ne démontre aucun intérêt légitime à la mise en 'uvre d'une telle expertise dont il convient de rappeler qu'elle n'a pas vocation à pallier la carence d'une partie à rapporter la preuve des faits qu'elle allègue.
Dès lors, il convient de rejeter la demande en expertise de Mme [V].
2/ sur la responsabilité de l'agence Immobilière Changeur
Mme [V] reproche à l'agence immobilière de ne s'être pas informée sur la validité du diagnostic de performance énergétique et, de ce fait, de ne l'a pas l'avoir suffisamment informée lors de l'achat du bien.
La société Immobilière Changeur, professionnelle de la vente et n'ayant aucune compétence en matière de construction, n'est aucunement tenue de vérifier la régularité du dit diagnostic.
L'agence immobilière démontre avoir satisfait à ses obligations de recueil des éléments nécessaires à la commercialisation du bien.
Elle a bien transmis le diagnostic de performance et a informé Mme [V] des éléments concernant le bien en sa possession.
Ainsi, Mme [V], ne démontrant aucune faute à l'encontre de la société Immobilière Changeur, a été à bon droit déboutée de ses demandes relatives à l'agence immobilière.
3/ sur la responsabilité de la société Surmesure
Mme [V] reproche au diagnostiqueur d'avoir choisi de façon arbitraire la méthode de calcul en retenant une mauvaise année de construction de l'immeuble vendu.
Néanmoins, ainsi que l'a justement retenu le tribunal, Mme [V] ne produit que le seul rapport d'expertise amiable CET non contradictoire et non corroboré par aucun autre élément, ce qui est insuffisant à démontrer une faute de la société Surmesure, laquelle conteste de façon argumentée l'analyse de l'appelante sans que celle-ci n'y réponde.
Dès lors, le jugement déféré, qui déboute Mme [V] de l'ensemble de ses prétentions, sera confirmé en toutes ses dispositions.
4/ sur les mesures accessoires
L'équité justifie de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au seul bénéfice des intimées.
Enfin, les dépens de la procédure d'appel seront supportés par Mme [V].
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute Mme [I] [V] de sa demande en expertise,
Condamne Mme [I] [V] à payer, d'une part, à la société Immobilière Changeur et, d'autre part, aux sociétés Surmesure et Allianz, celles-ci unies d'intérêts, la somme de 2.000€, soit 4.000€ au total, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [I] [V] aux dépens de la procédure d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT