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03/07/2023 | FRANCE | N°18/04996

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 03 juillet 2023, 18/04996


N° RG 18/04996 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JZE2

C2

N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée



le :

à :



la SELARL IDEOJ AVOCATS



Me Sofia SELMANE



la SELARL CABINET ERICK ZENOU AVOCATS ET ASSOCIE

S,



Me [J] [N]







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU LUNDI 03 JUILLET 2023







Appel d'un Jugement (N° R.G. 13/00900)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de VIENNE

en date du 25 octobre 2018

suivant déclaration d'appel du 06 décembre 2018



APPELANTS :



M. [G] [P] [V]

né le 30 avril 1972 à ...

N° RG 18/04996 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JZE2

C2

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELARL IDEOJ AVOCATS

Me Sofia SELMANE

la SELARL CABINET ERICK ZENOU AVOCATS ET ASSOCIES,

Me [J] [N]

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU LUNDI 03 JUILLET 2023

Appel d'un Jugement (N° R.G. 13/00900)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de VIENNE

en date du 25 octobre 2018

suivant déclaration d'appel du 06 décembre 2018

APPELANTS :

M. [G] [P] [V]

né le 30 avril 1972 à [Localité 25]

de nationalité Française

[Adresse 16]

[Localité 18]

Mme [J] [E] [S] épouse [V]

née le 19 août 1970 à [Localité 22]

de nationalité Française

[Adresse 16]

[Localité 18]

représentés par Me Sophie DELON de la SELARL IDEOJ AVOCATS, avocat au barreau de VIENNE

INTIMÉS :

M. [A] [M]

né le 12 décembre 1966 à [Localité 24]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 21]

Mme [Z] [U] épouse [M]

née le 28 décembre 1967 à [Localité 22]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 21]

représentés par Me Sofia SELMANE, avocat au barreau de GRENOBLE

M. [X] [I]

né le 14 septembre 1936 à [Localité 20]

de nationalité Française

[Adresse 17]

[Localité 5]

représenté par Me Erick ZENOU de la SELARL CABINET ERICK ZENOU AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de VIENNE postulant et par Me Marie MAZARS de la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI, avocat au barreau de NIMES

SCI CORDIMO prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 19]

[Localité 21]

représentée par Me Magalie RIBEIRO, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ   :

Mme Catherine Clerc, présidente,

Mme Joëlle Blatry, conseiller,

Mme Véronique Lamoine, conseiller,

Assistées lors des débats de Anne Burel, greffier

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 juin 2023, madame [D] a été entendue en son rapport.

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

*****

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

En 2008, M. [X] [I] a procédé à la division de son tènement immobilier situé sur la commune de [Localité 21] (38), lieudit Muitron, en 4 lots A-B-C-D.

Aux termes d'un acte authentique du 4 avril 2008, les époux [J] [S]/[G] [V] ont acquis le lot A composé des parcelles AN [Cadastre 2]-[Cadastre 3]-[Cadastre 10]-[Cadastre 11]-[Cadastre 12] et [Cadastre 14] bénéficiant d'une servitude de passage conventionnelle en surface et en tréfonds grevant les parcelles AN [Cadastre 6]-[Cadastre 8] incluse dans le lot C et AN [Cadastre 9] incluse dans le lot B.

Par courrier du 15 novembre 2010, M. [I] a informé les époux [V] que suite à la régularisation d'un compromis de vente du lot C, fonds servant de la servitude de passage, leur propriété serait désormais desservie par une autre servitude grevant le lot B sur les parcelles AN [Cadastre 7]-[Cadastre 9]-[Cadastre 13] et [Cadastre 15].

Le 3 février 2011, la vente du lot C a été régularisée au profit de la SCI Cordimo, l'acte notarié ne mentionnant qu'une servitude en tréfonds.

Suivant acte authentique du 18 février 2011, M. [I] a vendu aux époux [Z] [U]/[A] [M] le lot B avec rappel de la servitude conventionnelle consentie aux époux [V] dans l'acte du 4 avril 2008, le vendeur spécifiant, en outre, qu'un chemin desservant la propriété [V] était implanté en limite ouest des parcelles vendues.

Suite au litige survenu sur l'assiette de la servitude de passage déservant leurs fonds, les époux [V] ont fait citer les époux [M], suivant exploit d'huissier du 21 juin 2013, sur la reconnaissance de leur servitude de passage conventionnelle.

Par acte d'huissier du 19 mars 2014, les époux [M] ont appelé en intervention forcée M. [I].

Par jugement du 25 octobre 2018, le tribunal de grande instance de Vienne a, notamment :

déclaré recevable l'appel en intervention forcée de M. [I],

constaté que la servitude conventionnelle de passage et de tréfonds créée par l'acte du 4 avril 2008 au bénéfice du fonds [V] s'exerce exclusivement sur les parcelles AN [Cadastre 6], [Cadastre 8] et [Cadastre 9],

dit que la parcelle AN [Cadastre 7] n'est grevée d'aucune servitude de passage conventionnelle au profit du fonds [V],

débouté les époux [V] de leurs demandes tendant à voir reconnaître une erreur matérielle du numéro de parcelle du fonds servant, au titre d'une enclave et de leur demandes subséquentes,

fait interdiction aux époux [V], sous astreinte de 50€ par infraction constatée à l'expiration d'un délai de 3 mois d'utilisation du chemin matérialisé sur la parcelle AN [Cadastre 7],

dit qu'à l'expiration de ce délai, les époux [M] seront libre d'interdire par tous moyens l'utilisation du portail implanté sur la parcelle cadastrée AN [Cadastre 7],

rejeté les demandes de M. [I],

condamné les époux [V] à payer aux époux [M] une indemnité de procédure de 2.500€ et à supporter les dépens.

Suivant déclaration du 23 décembre 2018, les époux [V] ont relevé appel de cette décision, puis, par assignation du 2 mai 2019, ont appelé à la cause la SCI Cordimo, acquéreur du lot C.

Le 26 novembre 2019, la jonction des procédures a été ordonnée.

Par arrêt mixte du 19 janvier 2021, la première chambre civile de la cour d'appel de Grenoble, confirmant le jugement déféré en toutes ses dispositions, a avant dire droit :

ordonné une mesure d'expertise aux fins de déterminer:

la nature et l'étendue des travaux d'aménagement de l'assiette de la servitude de passage grevant les parcelles AN [Cadastre 6] et [Cadastre 8] appartenant à la SCI Cordimo au profit de la propriété [Adresse 23],

évaluer le coût des travaux d'aménagement et la perte de valeur de la propriété compte tenu de l'emprise de la servitude,

mis à la charge de la SCI Cordimo la consignation des frais d'expertise d'un montant de 4.000€,

condamné M. [I] a payer à la SCI Cordimo une provision de 10.000€ à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices,

condamné les époux [V] à payer aux époux [M] une indemnité de procédure de 1.500€,

condamné M. [I] à payer aux époux [V] une indemnité de procédure de 4.000€ et à la SCI Cordimo la somme de 2.500€ à ce titre,

condamné M. [I] aux entiers dépens.

L'expert, M. [Y] [T], a déposé son rapport d'expertise le 16 novembre 2022.

Au dernier état de leurs écritures en date du 5 mai 2023, les époux [V] demandent à la cour de statuer ce que de droit sur les demandes de la SCI Cordimo.

Ils font valoir qu'ils ont poursuivi M. [I] en responsabilité et qu'une instance distincte est actuellement pendante devant le tribunal judiciaire de Vienne.

Par conclusions récapitulatives du 10 mai 2023, la SCI Cordimo demande à la cour de condamner M. [I] à lui payer les sommes de :

30.000€ en réparation de la dépréciation de sa parcelle,

4.920€ en réparation de l'obligation de dépôt d'un nouveau dossier de permis de construire,

8.000€ d'indemnité de procédure, outre les entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

Il expose que :

la charge de la réparation du préjudice subi par elle a déjà été imputée à M. [I],

elle est donc bien fondée à en demander la liquidation,

la servitude dommageable est conventionnelle et non légale,

elle subit un préjudice en raison de l'assiette de la servitude grevant son fonds,

le principe de la responsabilité de M. [I] est tellement évident que la cour a déjà mis à sa charge une provision,

le principe du préjudice est acquis nonobstant la réalisation effective des travaux et ce indépendamment de la procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Vienne introduite par les époux [V] à l'encontre de M. [I] sur la prise en charge du coût des travaux d'aménagement de la servitude de passage,

la servitude de passage ne lui permet pas de disposer comme bon lui semble de la partie grevée,

l'expert a retenu l'aménagement de deux murs de soutènement avec une assiette de 5 mètres qui empiète sur le dispositif d'assainissement implanté sur la parcelle [Cadastre 8] nécessitant la reconstruction des dits ouvrages à une distance de 3 mètres,

de ce fait, son terrain est déprécié,

l'expert retient au titre de la perte de valeur la somme de 30.000€,

elle subit également un préjudice tenant au dépôt d'un second permis de construire.

Suivant écritures récapitulatives du 7 mai 2023, M. [I] demande à la cour de débouter la SCI Cordimo de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer une indemnité de procédure de 5.000€, outre aux dépens de l'instance.

Il explique que :

de bonne foi, il n'a pas indiqué l'existence de la servitude de passage puisqu'il était convaincu que l'usage de celle-ci s'exerçait sur la parcelle AN [Cadastre 7],

la servitude a, par effet de l'erreur rédactionnelle du notaire, été publiée et est donc opposable à la SCI Cordimo,

dès lors, les dispositions de l'article 1638 du code civil ne sauraient recevoir application,

de plus par application de l'article 682 du code civil, la SCI Cordimo ne saurait recevoir qu'une indemnité proportionnée aux dommages que ladite servitude peut occasionner,

les travaux ne sont pas réalisés et sont subordonnés à une instance pendante devant le tribunal judiciaire de Vienne introduite par les époux [V],

dès lors, la demande de la SCI Cordimo ne saurait être fondée puisque directement liée à l'aménagement de la servitude.

La clôture de la procédure est intervenue le 23 mai 2023.

MOTIFS

La cour observe que les époux [V] ne demandent pas de fixer la nature des travaux nécessaires pour l'aménagement de la servitude

1/ sur les demandes de la SCI Cordimo

Aux termes de l'article 1638 du code civil, si l'héritage vendu se trouve grevé, sans qu'il en ait été fait déclaration, de servitudes non apparentes et qu'elles soient de telle importance qu'il y a lieu de présumer que l'acquéreur n'aurait pas acheté s'il en avait été instruit, il peut demander la résiliation du contrat, si mieux il n'aime se contenter d'une indemnité.

L'acte de vente du 4 avril 2008 au profit des époux [V] porte constitution d'une servitude de passage sur une bande d'une largeur de 5 mètres, son emprise étant figurée en teinte verte au plan annexé et le passage partant de la [Adresse 23] pour aboutir à la propriété vendue.

Fonds dominant section AN [Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 14],

Fonds servant section AN [Cadastre 6], [Cadastre 8] et [Cadastre 9].

Il en résulte que la servitude conventionnelle grève le fonds acquis par la SCI Cordimo sans que le vendeur, M. [I] n'en ait informé l'acquéreur et, ayant uniquement envoyé aux époux [V] une simple lettre sur la modification de leur droit de passage, n'ait procédé à aucune régularisation.

La servitude grève la propriété de la SCI Cordimo sur une assiette de 5 mètres de largeur et sur une longueur de 96 m et va nécessiter d'importants travaux ainsi que le déplacement que du dispositif d'assainissement composé d'une fosse toutes eaux et d'un puits perdu.

Ainsi, la cour a pu relever que M. [I] avait fait preuve d'une incontestable légèreté en considérant qu'un simple courrier pouvait modifier la servitude constituée suivant acte authentique et en tentant d'échapper à ses responsabilités par l'imputation d'une prétendue faute au notaire instrumentaire de l'acte du 4 avril 2008 sans pour autant l'appeler à la cause.

Les manquements fautifs de M. [I] sont en lien de causalité direct et certain avec les préjudices subis par la SCI Cordimo.

Relativement à la dépréciation de la propriété de la SCI Cordimo, étant relevé que s'agissant d'une servitude conventionnelle et non légale, les dispositions de l'article 682 du code civil n'ont pas vocation à s'appliquer, l'expert a chiffré à 30.000€ la moins value du fonds de la SCI Cordimo.

Par voie de conséquence, il convient de condamner M. [I] au paiement de cette somme.

Par ailleurs, la SCI Cordimo est bien fondée en sa demande de condamnation de M. [I] à lui payer la somme de 4.920€ en réparation de l'obligation de dépôt d'un nouveau dossier de permis de construire, ce dont elle justifie en pièce 6.

2/ sur les mesures accessoires

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au seul bénéfice de la SCI Cordimo.

Enfin, M. [I] supportera les dépens de la procédure d'appel qui comprennent les frais d'expertise.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Vu l'arrêt avant dire droit du 19 janvier 2021,

Y ajoutant,

Condamne M. [X] [I] à payer à la SCI Cordimo en deniers ou quittances les sommes de :

30.000€ en réparation de la dépréciation de sa parcelle,

4.920€ en réparation de l'obligation de dépôt d'un nouveau dossier de permis de construire,

Condamne M. [X] [I] à payer à la SCI Cordimo la somme de 4.000€ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [X] [I] aux dépens de la procédure d'appel qui comprennent les frais d'expertise.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 18/04996
Date de la décision : 03/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-03;18.04996 ?
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