N° RG 22/02303 - N° Portalis DBVM-V-B7G-LNA6
C3
N° Minute :
Copie exécutoire
délivrée le :
la SCP MBC AVOCATS
Me Cendrine SANDOLI
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 17 JANVIER 2023
Appel d'une décision (N° RG 21/01920)
rendue par le Tribunal judiciaire de Grenoble
en date du 25 mai 2022
suivant déclaration d'appel du 13 juin 2022
APPELANTS :
M. [E] [M]
né le 30 Juin 1946 à [Localité 20]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 6]
Mme [Z] [M]
née le 07 Janvier 1970 à [Localité 20]
de nationalité Française
[Adresse 21]
[Adresse 21]
Mme [T] [M]
née le 30 Novembre 2003 à [Localité 22]
de nationalité Française
[Adresse 15]
[Adresse 15]
Mme [P] [M]
née le 29 Janvier 1995 à [Localité 22]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 6]
représentés et plaidant par Me Isabelle KESTENES-PSILA de la SCP MBC AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIME :
M. [V] [H]
né le 07 Septembre 1939 à [Localité 20]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 6]
représenté et plaidant par Me Cendrine SANDOLI, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, président de chambre,
Mme Joëlle Blatry, conseiller,
M. Laurent Desgouis, vice- président placé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 28 novembre 2022 Mme Clerc président de chambre chargé du rapport en présence de Mme Blatry, conseiller, assistées de Mme Anne Burel, greffier, ont entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.
Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
*****
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [V] [H] est propriétaire des parcelles cadastrées [Cadastre 16] et [Cadastre 4] sur la commune de [Localité 19].
M. [E] [M], Mme [Z] [M] , leur fille [T] [M] née le 30 novembre 2003, ainsi que Mme [P] [M] sont propriétaires indivis des parcelles [Cadastre 7], [Cadastre 18] et [Cadastre 5] situées également à [Localité 19]'; ces parcelles ont été divisées pour devenir les parcelles [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13] et [Cadastre 14].
La parcelle [Cadastre 17] de M. [H] est contigüe aux parcelles [Cadastre 7] ([Cadastre 11]) et [Cadastre 5] ([Cadastre 8]) de l'indivision [M].
Selon acte notarié du 16 octobre 2008, M. [E] [M] et M. [H] se sont consentis des servitudes de passage réciproques sans indemnité.
Il était notamment prévu la constitution par M. [E] [M] sur sa parcelle [Cadastre 7] (devenue [Cadastre 11]) d'une servitude de passage pour tous véhicules de 3 mètres de largeur au profit de la parcelle [Cadastre 4] appartenant à M. [H].
Courant juin 2013, M. [H] a débuté la construction sur sa parcelle [Cadastre 4] d'une maison d'habitation et a installé ses canalisations en tréfonds de la parcelle [Cadastre 11] de l'indivision [M].
Il a par ailleurs démoli une partie d'un abri de jardin situé sur sa parcelle [Cadastre 4] afin de permettre l'accès de véhicules sur sa propriété en utilisant la servitude de passage qui lui avait été consentie.
M. [E] [M] a ensuite construit un muret et planté des plots en limite de propriété de la parcelle [Cadastre 4], à la place de la partie démolie de l'abri de jardin, sur l'assiette de la servitude de passage, bloquant ainsi l'accès à cette parcelle.
Par jugement du 6 août 2018, le tribunal de grande instance de Grenoble a notamment débouté l'indivision [M] de ses demandes en remise en état de l'assiette de la servitude grevant son fonds 551 (reconstruction du mur , remise en place de l'éclairage, de la barrière et du repère de bornage, enlèvement des canalisations en tréfonds), a dit que les consorts [M] avaient eu un comportement abusif en construisant un muret en limite de parcelle faisant obstacle à la servitude profitant au fonds dominant 242 de M. [H].
Par arrêt du 9 février 2021, la cour d'appel de céans a infirmé partiellement ce jugement en condamnant sous astreinte M. [H] à remettre en état l'assiette de la servitude de passage en enlevant les canalisations en tréfonds et en faisant déplacer les coffrets EDF-GDF.
Les consorts [M] et M. [H] ont formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt.
Selon acte extrajudiciaire des 12 et 13 octobre 2021, M. [H] a assigné les consorts [M] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Grenoble pour voir, en substance, l'indivision [M] condamnée à détruire à ses frais et sous astreinte, les ouvrages qu'elle a construit sur l'assiette de la servitude conventionnelle qu'elle lui doit , et à lui payer une indemnité de 5.000€ par constatation de la violation de l'accès à la servitude de passage outre des dommages et intérêts, sans préjudice des frais irrépétibles et des dépens.
Par ordonnance de référé rendue contradictoirement le 25 mai 2022, la présidente du tribunal judiciaire de Grenoble a':
déclaré M. [H] recevable en ses demandes et rejeté les exceptions de prescription et de connexité soulevées par les parties adverses,
déclaré solidairement M. [E] [M], Mme [Z] [M] , en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de [T] [M] , leur fille mineure, ainsi que Mme [P] [M] , à détruire, à leurs frais, la totalité de ouvrages, notamment le muret et les plots, construits sur l'assiette de la servitude de passage établie au profit de la parcelle [Cadastre 4] appartenant à M. [H] et ce, sous astreinte de 100€ par jour de retard passé le délai de 15 jours suivant la signification de la présente décision,
condamné solidairement M. [E] [M], Mme [Z] [M] , en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de [T] [M] , leur fille mineure, ainsi que Mme [P] [M] à payer à M. [H] une somme provisionnelle de 2.000€, par constatation réalisée par voie d'huissier, de la violation de l'accès à la servitude de passage au détriment de M. [H] , notamment par le fait de stationner des véhicules devant le portail permettant l'accès à la servitude de passage, ou à tout autre endroit de ladite servitude,
condamné solidairement M. [E] [M], Mme [Z] [M] , en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de [T] [M] , leur fille mineure, ainsi que Mme [P] [M] à verser à M. [H] la somme provisionnelle de 800 € à valoir sur la réparation des préjudices subis du fait de la présence d'obstacles l'empêchant de jouir de la servitude de passage dont sa propriété bénéficie,
débouté M. [E] [M], Mme [Z] [M] , en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de [T] [M] , leur fille mineure, ainsi que Mme [P] [M] de l'intégralité de leurs demandes ;
condamné solidairement M. [E] [M], Mme [Z] [M] , en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de [T] [M] , leur fille mineure, ainsi que Mme [P] [M] à verser à M. [H] la somme de 1.500€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné solidairement M. [E] [M], Mme [Z] [M] , en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de [T] [M] , leur fille mineure, ainsi que Mme [P] [M] aux dépens,
rappelé que cette décision est exécutoire de plein droit.
Par déclaration du 13 juin 2022, les consorts [M] ont relevé appel.
L'affaire a été fixée à bref délai conformément aux dispositions de l'article 905 du code de procédure civile à l'audience du 28 novembre 2022 à 14h, la clôture étant prévue au 15 novembre 2022.
Dans leurs dernières conclusions déposées le 14 novembre 2022 sur le fondement des articles 701, 702, 684 et 2224 du code civil, 101 et 835 du code de procédure civile, les consorts [M] demandent à la cour de':
sur leur appel principal , le disant recevable et bien fondé de réformer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
in limine litis,
constater que la reconstruction du muret litigieux a fait l'objet d'une autorisation administrative dont l'affichage a été effectué le 9 octobre 2015,
constater que les aménagements réalisés par M. [M] et plus particulièrement la reconstruction du muret mitoyen ont été réalisés le 9 novembre 2015,
constater qu'il s'agit d'une nouvelle demande,
juger irrecevable la demande formée par M. [H] car prescrite,
en tout état de cause
au principal
constater que l'avocat près de la Cour de cassation de M. [H] conclut dans son mémoire en défense que : « la modification ou la suppression d'un mur privatif relève des pouvoirs de son propriétaire »,
constater qu'ils sont copropriétaires de ce mur et qu'ils n'ont pas donné leur accord,
juger qu'il existe un lien de connexité entre les demandes formées par M. [H] dans le cadre de la présente procédure et la procédure pendante devant la Cour de cassation,
subsidiairement,
surseoir à statuer dans l'attente de l'issue du pourvoi qu'ils ont formé devant la Cour de cassation,
en conséquence,
débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,
subsidiairement,
juger M. [H] irrecevable en ses demandes dans la mesure où l'appréciation du trouble manifestement illicite suppose de trancher le fond du droit, et qu'il s'agit notamment de l'objet du pourvoi en cassation qu'ils ont formé,
débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,
très subsidiairement,
juger que l'indivision [M] n'a commis aucun abus de droit constitutif d'un trouble manifestement illicite,
juger que si les travaux ne sont toujours pas réalisés, cela résulte de l'absence de diligences de la part de M. [H],
en conséquence,
juger que M. [H] devra réaliser les travaux moyennant une astreinte de 150€ par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,
les autoriser à remettre les ouvrages qu'ils avaient installés afin de marquer les limites de l'assiette de la servitude, c'est-à-dire le muret au droit du mur mitoyen et le plot à l'extérieur de la servitude,
juger que la procédure engagée par M. [H] est parfaitement dilatoire et abusive,
condamner M'.[H] à leur payer une somme provisionnelle de 15.000 € de dommages et intérêts,
sur l'appel incident de M. [H]
débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions formées dans le cadre de son appel incident,
subsidiairement,
juger M. [H] mal fondé en sa demande, visant à solliciter leur condamnation à lui payer une somme provisionnelle de 5.000€ en réparation de son préjudice en raison de la violation d'accès à la servitude de passage, du fait de la présence d'obstacles non fixes,
très subsidiairement, si la cour devait confirmer l'ordonnance de référé et faire droit aux demandes de M. [H],
ramener le quantum des condamnations à de plus justes proportions,
juger M. [H] mal fondé en sa demande visant à solliciter la condamnation «'sollicite la réformation de l'ordonnance concernant la somme provisionnelle de 15.000 € qui lui ont été allouée en réparation de son préjudice résultant de la présence d'obstacles l'empêchant de jouir de la servitude de passage dont sa propriété est bénéficiaire, »
très subsidiairement
confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a alloué à M. [H] une somme de 800€,
débouter M. [H] de sa demande visant à les voir condamnés à lui payer une somme de 10.000€ de dommages et intérêts pour appel dilatoire et abusif,
en tout état de cause,
débouter M'.[H] de sa demande visant à voir prononcer une amende civile de 10.000 €,
débouter M'.[H] du surplus de ses demandes fins et conclusions,
condamner M. [H] à payer à l'indivision [M] une somme de 4.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner le même aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP MBC AVOCATS sur son affirmation de droit.
Dans ses dernières écritures déposées le 8 novembre 2022 au visa des articles 701, 835 du code de procédure civile, 637 et 2227 du code civil, mais également des décisions rendues sur le fond par le tribunal de grande instance de Grenoble le 6 août 2018 et par la cour d'appel de Grenoble du 9 février 2021 retenant l'abus de droit commis par l'indivision [M] concernant l'assiette de la servitude conventionnelle de passage dont bénéficie le fonds lui appartenant, la décision rendue le 25 mai 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Grenoble, la décision rendue par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Grenoble le 18 octobre 2022 et son jugement rectificatif d'erreur matérielle du même jour, déboutant l'indivision [M] de la totalité de ses demandes,
M'.[H] demande à la cour de':
sur la demande de rectification de l'erreur matérielle contenue dans la décision déférée :
constater que Mme [T] [M] est en réalité majeure depuis le 30 novembre 2021.
rectifier l'erreur matérielle contenue dans la décision déférée, en ce qu'elle a condamné des personnes majeures en qualité de représentants légaux, alors que Mme [T] [M] était majeure au jour du rendu de sa décision,
sur l'appel adverse
rejeter purement et simplement l'appel adverse comme étant totalement non fondé, et ce dans toutes ses dispositions,
débouter par conséquent les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
confirmer purement et simplement la décision rendue par le premier juge, en ce qu'elle :
l'a déclaré recevable en ses demandes et rejeté les exceptions de prescription et de connexité soulevées par la partie adverse,
a condamné solidairement Mr [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M], majeure, ainsi que Mme [P] [M], à détruire, à leurs frais, la totalité des ouvrages, notamment le muret et les plots, construits sur l'assiette de la servitude de passage établie au profit de la parcelle [Cadastre 4] lui appartenant , et ce, sous astreinte de 100€ par jour de retard, passé le délai de 15 jours suivant la signification de la décision,
sur le principe, condamné, solidairement Mr [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M], majeure, ainsi que Mme [P] [M] , à lui payer une somme provisionnelle par constatation réalisée par voie d'huissier, de la violation de l'accès à la servitude de passage, à son détriment, notamment par le fait de stationner des véhicules devant le portail permettant l'accès à la servitude de passage, ou à tout autre endroit de ladite servitude,
sur le principe, condamné solidairement Mr [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M], majeure, ainsi que Mme [P] [M], à lui verser une somme provisionnelle à valoir sur la réparation des préjudices subis du fait de la présence d'obstacles l'empêchant de jouir de la servitude de passage dont sa propriété bénéficie,
débouté solidairement Mr [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M], majeure, ainsi que Mme [P] [M] de l'intégralité de leurs demandes,
condamné solidairement Mr [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M], majeure, ainsi que Mme [P] [M], à lui verser la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné solidairement les mêmes aux dépens,
y ajoutant, en appel, dire recevables et bien fondés ses appels incidents,
sur l'appel incident au sujet du quantum retenu par le juge concernant les obstacles non fixes qui seraient mis sur l'assiette de la servitude de passage :
infirmer le quantum retenu par le juge des référés,
condamner solidairement Mr [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M], majeure, ainsi que Mme [P] [M], à lui payer une somme provisionnelle de 5.000€ par constatation réalisée par voie d'huissier, de la violation de l'accès à la servitude de passage, à son détriment , notamment par le fait de stationner des véhicules devant le portail permettant l'accès à la servitude de passage, ou à tout autre endroit de ladite servitude,
sur l'appel incident au sujet du quantum de l'indemnisation de ses préjudices par le premier juge :
infirmer le quantum retenu par le juge des référés,
condamner solidairement Mr [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M], majeure, ainsi que Mme [P] [M] , à lui verser une somme provisionnelle de 15.000 € à valoir sur la réparation des préjudices subis du fait de la présence d'obstacles l'empêchant de jouir de la servitude de passage dont sa propriété bénéficie,
sur les dommages intérêts pour appel dilatoire et abusif :
condamner solidairement Mr [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M], majeure, ainsi que Mme [P] [M] à lui verser une somme provisionnelle de 5.000€ au titre de l'indemnisation des préjudices subis par cet appel dilatoire et abusif ne reposant sur rien,
sur l'article 700 et sur les dépens :
confirmer la décision du juge des référés ayant condamné solidairement l'indivision [M] à lui verser la somme de 1.500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner solidairement l'indivision [M] à lui verser la somme de 4.000€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel
confirmer la décision du juge des référés ayant condamné solidairement l'indivision [M] à supporter les entiers dépens de la procédure de première instance,
condamner solidairement l'indivision [M] à lui verser les entiers dépens de l'appel, dont distraction au profit de son conseil,
autoriser Me Cendrine Sandoli à recouvrer les dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile';
L'ordonnance de clôture a été reportée au 22 novembre 2022.
MOTIFS
Il est rappelé que ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes de «'constater que'» et que la cour n'est donc pas tenue d'y répondre.
Sur les demandes soulevées in limine litis
Sur la recevabilité de la demande de M. [H]
Les consorts [M] réitérent à hauteur d'appel leur prétention tendant à voir juger irrececevable comme prescrite la demande de M. [H] présentée suivant assignation des 12 et 13 octobre 2021 aux fins de démolition du muret qu'ils ont reconstruit en novembre 2015, comme étant formulée plus de cinq ans après.
Toutefois, cette prétention ne peut être accueillie, le juge des référés ayant exactement rappelé que n'étaient pas applicables à la cause les dispositions de l'article 2224 du code civil dès lors que l'action de M. [H] vise à faire valoir un droit réel attaché au fonds dominant (servitude de passage qui a un caractère réel et perpétuel).
L'ordonnance déférée est en conséquence confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception de prescription.
Sur l'exception de connexité et la demande de sursis à statuer
Les consorts [M] sont mal fondés à soutenir l'incompétence du juge des référés incompétent pour connaître des demandes de M.[H] du fait du pourvoi qu'ils ont formé , en raison du lien de connexité existant entre ce pourvoi en cassation et la procédure de référé.
En effet, l'objet du pourvoi en cassation étant nécessairement distinct des demandes présentées devant le juge des référé, l'exception de connexité ne peut en aucun cas s'appliquer à l'égard d'une procédure devant la Cour de cassation, le premier juge ayant à bon droit rappelé que cette dernière est le juge du droit et n'a pas à réexaminer les faits à l'origine du litige.
L'ordonnance déférée est en conséquence confirmée sur le rejet de l'exception de connexité.
Ensuite, à considérer recevable l'exception de procédure que constitue la demande de sursis à statuer quand bien même elle n'a pas été formée avant tout débat au fond devant le premier juge ni conformément à l'article 907 du code de procédure civile devant le conseiller de la mise en état tant que celui-ci était saisi de l'affaire, il y a lieu de débouter les consorts [M] de ce chef de prétention, étant rappelé que l'existence d'une contestation sérieuse sur le fond du droit n'interdit pas au juge des référés de prendre les mesures prévues à l'article 835 du code de procédure civile dès lors qu'il dispose d'éléments suffisants pour retenir l'existence d'un trouble manifestement illicite.
Dès lors, le débat instauré devant la Cour de cassation sur l'abus de droit qui leur est reproché n'est pas de nature à justifier un sursis à statuer.
Sur l'appel principal
Il est rappelé que la cour n'est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes.
Tel est le cas en l'espèce où les parties développent avec moults détails les multiples difficultés et griefs qu'elles s'opposent mutuellement, tout en faisant l'historique de leur conflit.
Le présent litige s'inscrit dans une procédure de référé fondée sur l'article 835 du code de procédure civile et la recherche de l'existence d'un trouble manifestement illicite.
Les consorts [M] ne peuvent pas utilement conclure à l'irrecevabilité des demandes de M. [H] au motif que l'examen du trouble manifestement illicite qui leur est reproché suppose au préalable de statuer sur l'abus de droit qui leur a été imputé par l'arrêt précité du 9 février 2021 lequel ayant été frappé d'un pourvoi, n'a donc pas autorité de chose jugée sur ce point, cette problématique d'abus de droit étant désormais soumise à l'examen de la Cour de cassation.
En effet, il est rappelé que l'existence d'une contestation sérieuse ne fait pas interdiction au juge des référés de prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dès lors, la contestation élevée entre les parties sur l'abus de droit reproché aux consorts [M] qu'il s'agisse du muret (préexistant ou pas, mitoyen ou non) ou de l'implantation des plots, touche au fond du droit et est donc sans incidence quant à l'appréciation du trouble manifestement illicite dont excipe M. [H].
De même, le débat instauré par les consorts [M] sur l'état d'enclavement de M. [H] résultant de la division de ses parcelles, sur le défaut d'exécution par celui-ci des condamnations mises à sa charge par l'arrêt du 9 février 2021(enlèvement des canalisations en tréfonds, des compteurs EDF et GDF ') , voire même la suppression par jugement du juge de l'exécution du 18 octobre 2022 (dont ils indiquent avoir relevé appel) de l'astreinte prononcée à son encontre par ledit arrêt n'est pas de nature à remettre en cause le bien fondé de l'action initiée par celui-ci sur le fondement de l'article 835 précité, en tant que touchant également au fond du droit.
Ce trouble manifestement illicite est indiscutablement établi dès lors qu'il a été matérialement constaté la présence d'un muret édifié par les consorts [M] et de plots installés par ceux-ci en limite de parcelle, sur l'assiette de la servitude de passage conventionnelle notariée instituée au profit du fonds 242 de M.[H], ces installations faisant obstacle au libre exercice du passage dans la largeur de 3 mètres.
Si aucun élément de preuve objectif tel qu'un constat d'huissier ne permet d'établir que portail d'accès à la servitude de passage était fréquemment obstrué par le stationnement de véhicules automobiles appartenant précisément aux consorts [M], les clichés photographiques communiqués par M.[H] n'en faisant pas la preuve, il n'en demeure pas moins que les consorts [M] reconnaissent le stationnement d'une moto sur l'assiette de la servitude. Dès lors, restent d'actualité et doivent être confirmées les dispositions de l'ordonnance entreprise ayant condamné les consorts [M] au paiement d'une somme provisionnelle par constatation réalisée par voie d'huissier, de la violation de l'accès à la servitude de passage au détriment de M. [H] , notamment par le fait de stationner des véhicules sur la servitude de passage voire à l'entrée de celle-ci, l'adverbe «'notamment'» n'excluant aucun cas de figure, peu important le caractère fixe ou pas des obstacles sur cette servitude de passage.
Ensuite, les consorts [M] ne sont pas davantage fondés en appel à réitérer leur demande tendant à voir condamner M. [H] à réaliser les travaux de suppression des canalisations en tréfonds et de remise en état de l'assiette de la servitude de passage, quand bien même ces canalisations ont été installées sans autorisation alors même que les ouvrages implantés par leurs soins sur cette servitude compromettent l'exécution par M. [H] de l'obligation ainsi mise à sa charge par l'arrêt précité, le procès-verbal de constat d'huissier réalisé le 18 octobre 2021 tel que communiqué par ce dernier attestant qu'à cette date, subsistaient toujours des obstacles implantés en limite séparative de la parcelle [Cadastre 11] de M. [M], à savoir un muret en moellons et dans le même alignement , un second poteau métallique rond, qui rendaient impossible l'entrée de tous véhicules sur la propriété de M.[H] depuis le chemin de 3 mètres de large, assiette de la servitude de passage.
Au surplus, il doit être relevé que la cour n'est pas saisie de la demande de M.[H] disant irrecevable comme nouvelle en appel la prétention des consorts [M] tendant à le voir condamner «'à réaliser les travaux sous astreinte de 150€ par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir'», celle-ci n'ayant pas été reproduite dans le dispositif de ses dernières conclusions.
Dès lors, sans plus ample discussion, il y a lieu de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné les consorts [M] sous astreinte à détruire à leurs frais la totalité de ouvrages, notamment le muret et les plots, construits sur l'assiette de la servitude de passage établie au profit de la parcelle [Cadastre 4] appartenant à M. [H] et à verser une somme provisionnelle par constatation réalisée par voie d'huissier de la violation de l'accès à cette servitude de passage.
Sur l'appel incident
M.[H] doit être débouté de ses prétentions tendant à voir porter à 5.000€ la somme provisionnelle à payer par les consorts [M] au titre de chaque constatation réalisée par voie d'huissier de la violation de l'accès à la servitude de passage et à 15.000€ la provision au paiement de laquelle ils ont été condamnés à valoir sur la réparation de ses préjudices du fait de la présence d'obstacles l'empêchant de jouir de la servitude de passage dont sa propriété bénéficie, les sommes allouées par le premier juge de ce chef (soit respectivement 2.000€ et 800€) devant être jugées satisfactoires en l'état des éléments d'appréciation soumis à la cour, et par suite confirmées, la demande des consorts [M] tendant à voir «'ramener le quantum des condamnations à de plus justes proportions'» n'ayant pas lieu d'être davantage accueillie en l'absence de motifs de fait ou de droit pouvant en justifier le bien fondé.
Sur la demande de rectification d'erreur matérielle
Mme [T] [M] étant née le 30 novembre 2003, elle était encore mineure au jour de l'assignation en référé des 12 et 13 octobre 2021 mais était devenue majeure au jour du prononcé de l'ordonnance déférée.
Il y a donc lieu de rectifier la première page et le dispositif de cette ordonnance qui par l'effet d'une erreur matérielle, désignent Mme [T] [M] comme étant mineure , représentée par ses représentants légaux, M. [E] [M] et Mme [Z] [M].
Sur les demandes de dommages et intérêts
Les consorts [M] qui succombent dans l'essentiel de leurs prétentions ne sont pas fondés à réclamer à l'encontre de M.[H] des dommages et intérêts pour procédure abusive, y compris en appel'; l'ordonnance déférée est donc confirmée sur le rejet de cette prétention.
Par ailleurs, la demande de dommages-intérêts formée par M.[H] au titre d'un «'appel dilatoire et abusif'» doit être rejetée, dès lors que l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits ne constitue pas en soi une faute caractérisant un'abus'du droit d'agir'en justice, l'intimé ne démontrant pas au surplus en avoir subi un préjudice spécifique.
Il est relevé en tant que de besoin que dans ses dernières conclusions, M. [H] ne réclame pas «'l'amende civile de 10.000€'» à laquelle s'opposent les consorts [M]'; il n'y a donc pas lieu de statuer sur ce point.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les dépens d'appel sont à la charge des consorts [M] qui sont déboutés de leur réclamation de frais irrépétibles y compris en appel'; ils sont condamnés solidairement à payer une indemnité de procédure complémentaire pour l'instance d'appel à M. [H]';
L'ordonnance déférée est confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Rejetant la demande de sursis à statuer de M. [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M] et Mme [P] [M],
Rectifiant l'erreur matérielle affectant l'ordonnance entreprise,
à la page 1 en ce qu'il est mentionné':'«'Monsieur [E] [M], Madame [Z] [M], Madame [T] [M] , mineure représentée par ses représentants légaux, Monsieur [E] [M] et Madame [Z] [M], Madame [P] [M]'»,
en pages 6 et 7 en ce qu'il est mentionné': «'condamne solidairement Monsieur [E] [M], Madame [Z] [M], en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de Madame [T] [M], leur fille mineure ainsi que Madame [P] [M] à verser à Monsieur [H] (')'»
y substitue les mentions exactes, à savoir':
en page 1': «'Monsieur [E] [M], Madame [Z] [M] , Madame [T] [M], Madame [P] [M]'»,
en pages 6 et 7': «'condamne solidairement Monsieur [E] [M], Madame [Z] [M] , Madame [T] [M] et Madame [P] [M] à verser à Monsieur [H] (...)'»
Dit que le présent arrêt sera, conformément à l'article 462 du code de procédure civile, mentionné sur la minute et les expéditions de l'ordonnance rectifiée et notifié comme celle-ci,
Confirme l'ordonnance déférée ainsi rectifiée,
Ajoutant,
Déboute M. [V] [H] de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif,
Condamne solidairement M. [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M] et Mme [P] [M] à payer à M. [V] [H] une indemnité de procédure de 2.000€ pour l'instance d'appel,
Déboute M. [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M] et Mme [P] [M] de leur demande présentée en appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne solidairement M. [E] [M], Mme [Z] [M], Mme [T] [M] et Mme [P] [M] aux dépens d'appel avec recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame CLERC, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT