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13/12/2022 | FRANCE | N°20/04205

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 13 décembre 2022, 20/04205


N° RG 20/04205 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KVQC

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Copie exécutoire délivrée



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la SELARL SABATIER



Me Faïçal LAMAMRA







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE GRENOBLE



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 13 DECEMBRE 2022







Appel d'un Jugement (N° R.G. 19/00685)

rendu par le Tribunal judiciaire de VALENCE

en date du 05 novembre 2020

suivant déclaration d'appel du 23 décembre 2020



APPELANTS :



M. [T] [V]

né le 7 avril 1950 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 5]



représenté pa...

N° RG 20/04205 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KVQC

C2

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELARL SABATIER

Me Faïçal LAMAMRA

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 13 DECEMBRE 2022

Appel d'un Jugement (N° R.G. 19/00685)

rendu par le Tribunal judiciaire de VALENCE

en date du 05 novembre 2020

suivant déclaration d'appel du 23 décembre 2020

APPELANTS :

M. [T] [V]

né le 7 avril 1950 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté par Me Jacques SABATIER de la SELARL SABATIER, avocat au barreau de VALENCE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2021/000276 du 21/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)

Mme [S] [P] épouse [V]

née le 11 juin 1949 à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Me Jacques SABATIER de la SELARL SABATIER, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉS :

M. [E] [I]

né le 12 juillet 1970 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 6]

Mme [C] [Y] épouse [I]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentés et plaidant par Me Faïçal LAMAMRA, avocat au barreau de VALENCE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ   :

Mme Catherine Clerc, Présidente,

Mme Joëlle Blatry, Conseiller,

M. Laurent Desgouis, vice-président placé,

Assistés lors des débats de Anne Burel, greffier

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 novembre 2022, Madame BLATRY a été entendue en son rapport.

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

******

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Les époux [C] [Y]/ [E] [I] sont propriétaires, sur la commune de [Localité 12] (26), des parcelles cadastrées section [Cadastre 9] et [Cadastre 3], voisines des parcelles [Cadastre 8] et [Cadastre 2] des époux [S] [P]/ [T] [V].

Le fonds des époux [I] à usage d'impasse est grevé d'une servitude de passage conventionnelle au profit du fonds des époux [V].

A l'issue de travaux de rénovation entrepris par les époux [V], les relations avec leurs voisins [I] se sont très largement détériorées allant jusqu'à des menaces de mort proférées par M. [V].

Une mesure de médiation pénale a abouti à la signature le 8 février 2016 d'un procès-verbal d'accord de médiation aux termes duquel les parties se sont engagées à ne plus s'insulter et à respecter les limites séparatives des fonds, M. [V] promettant, de surcroît, de supprimer la marche empiétant sur l'impasse, de laisser libre le passage sur celle-ci et de permettre la vérification du caractère factice de la caméra installée par les époux [V].

Reprochant aux époux [V] le non- respect de ces engagements, les époux [I] ont obtenu, suivant ordonnance de référé du 4 mai 2016, une mesure d'expertise à leur contradictoire.

L'expert, M. [J] [O], a déposé son rapport le 31 décembre 2017.

Selon exploit d'huissier du 27 février 2019, les époux [I] ont fait citer les époux [V], devant le tribunal de grande instance de Valence, en suppression de la porte et de la marche empiétant sur l'impasse des Passerelles, en interdiction de stationnement, en enlèvement des plaques de fibrociment, en équipement de leurs 3 chiens d'un dispositif anti-aboiements, en interdiction de laisser divaguer les dits chiens, en suppression de la caméra orientée vers leur propriété, le tout sous astreinte, ainsi qu'en condamnation à leur payer diverses sommes.

Par jugement du 5 novembre 2020, cette juridiction devenue tribunal judiciaire de Valence a, notamment :

ordonné aux époux [V] de supprimer le portail ainsi que la marche empiétant sur la parcelle [Cadastre 7] sous astreinte de 50€ par jour de retard, passé un délai de 3 mois suivant la signification du jugement,

ordonné aux époux [V] de respecter l'interdiction absolue de stationnement sur l'assiette du droit de passage sous astreinte de 500€ par infraction constatée,

condamné les époux [V] à murer définitivement la porte créée sur la façade nord de leur maison et donnant sur l'impasse appartenant aux époux [I] sous astreinte de 50€ par jour de retard passé le délai de 3 mois suivant la signification du jugement,

condamné les époux [V] à faire enlever l'intégralité des plaques de fibrociment amiantées situées sur leur propriété par une entreprise spécialisée, sous astreinte de 50€ par jour de retard passé le délai de 3 mois suivant la signification du jugement,

fait interdiction aux époux [V] de laisser divaguer leurs chiens sous astreinte de 500€ par infraction constatée,

condamné solidairement les époux [V] à payer aux époux [I] la somme de 1.000€ de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la décision, outre la somme de 3.500€ au titre de l'indemnité de procédure et à supporter les dépens de l'instance.

Par déclaration du 23 décembre 2020, M. et Mme [V] ont interjeté appel de cette décision.

Au dernier état de leurs écritures du 22 mars 2021, M. et Mme [V] demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter les époux [I] de l'ensemble de leurs prétentions et de les condamner à leur payer des dommages-intérêts de 5.000€ pour préjudice moral, outre une indemnité de procédure de 3.500€.

Ils expliquent que :

la propriété des époux [I] est leur résidence secondaire,

les époux [I] ont manifestement multiplié les procédures pour les inciter à partir,

les premiers juges, par le prononcé des diverses condamnations, ont fait fi du droit de passage dont leur fonds bénéficie,

leur usage de ce droit de passage est strictement limité au déchargement d'objets ou de produits lourds,

ils sont tous deux retraités et M. [V] est handicapé,

le jugement du tribunal est particulièrement partial puisqu'ils n'utilisent que quelques minutes le stationnement devant leur porte pour décharger les produits lourds,

les époux [I] avaient autorisé la marche et le portail, étant précisé qu'il existait un ancien portail,

la marche se situe dans le prolongement du trottoir existant le long de leur façade,

les époux [I] envisageaient la création d'une servitude mais n'ont jamais saisi leur notaire,

les époux [I] ne subissent aucun préjudice concernant la création de la porte pour laquelle ils ont obtenu toutes les autorisations,

l'unique objectif des époux [I] est de leur nuire et de les contraindre au départ,

les plaques de fibrociment ont été enlevées depuis longtemps et ce dans les 15 jours suivant la conciliation du 8 février 2016,

leurs chiens sont calmes et ne divaguent pas,

M. [I] se place volontairement en face des chiens pour les effrayer et les faire aboyer en réaction,

leurs chiens reçoivent en permanence des pierres et sont arrosés au jet d'eau par M. [I],

les époux [I] savent pertinemment que la caméra est factice,

il ne s'agit que d'un moyen de dissuasion qui protège l'impasse.

Par dernières conclusions du 20 juin 2022, M. et Mme [I] demandent à la cour de confirmer le jugement déféré sauf sur le quantum de l'indemnisation de leur préjudice moral qu'ils forment à hauteur de la somme de 10.000€, y ajoutant, de déclarer irrecevable la demande indemnitaire adverse, nouvelle en cause d'appel, et de condamner les époux [V] à leur payer une indemnité de procédure de 2.500€.

Ils font valoir que :

la servitude de passage consentie au bénéfice des époux [V] ne les autorise pas à empiéter sur leur fonds,

le PV établi dans le cadre de la médiation constitue une transaction qui permet à la victime d'agir en exécution forcée sur le fondement des articles 2044 et suivants du code civil,

l'expert a relevé clairement l'empiétement par le portail et la marche,

ils ont été mis en place sans leur autorisation et le jugement déféré doit être confirmé sur ce point,

les époux [V], qui peuvent se rendre dans leur propriété pour décharger leur véhicule, n'établissent aucunement la nécessité de stationner dans l'impasse,

l'acte consentant la servitude de passage exclut expressément la stationnement des véhicules,

les époux [V], qui disposent de trois accès à leur maison d'habitation, ont créé une ouverture supplémentaire portant atteinte à leur tranquillité,

la création de cette ouverture supplémentaire constitue un changement qui aggrave la condition de leur propriété, fonds servant,

M. [V] n'a pas respecté son engagement d'enlever les très nombreuses plaques de fibro-ciment puisqu'il n'en a supprimé seulement quelques unes,

le reliquat reste toujours dans leur jardin non bâché,

ils justifient de la divagation dans le quartier des trois chiens des époux [V],

ainsi que l'a retenu le tribunal, il n'a pas été possible de vérifier si la caméra adverse est factice,

les époux [V] n'en justifient aucunement,

la demande adverse en dommages-intérêts est nouvelle en cause d'appel et donc irrecevable.

La clôture de la procédure est intervenue le 4 octobre 2022.

MOTIFS

1/ sur les demandes de M. et Mme [I]

au titre des empiètements

Il est établi, et d'ailleurs non contesté, que le portail installé par les époux [V] ainsi que la marche située devant l'ouverture créée empiètent sur le fonds des époux [I].

Il est constant que le bénéfice de la servitude de passage n'autorise nullement les époux [V] à empiéter sur le fonds servant des époux [I].

Les époux [V] ne démontrent aucunement un accord de leurs voisins sur cet empiètement, ni davantage un empiètement de plus de trente ans d'un ancien portail.

Enfin, les époux [V] se sont engagés dans le cadre de l'accord de médiation pénale, qui vaut transaction dont l'exécution peut être exigée, à supprimer les dits empiètements, ce dont ils se sont, en réalité, abstenus.

Par voie de conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a condamné les époux [V] à supprimer sous astreinte les empiètements litigieux.

au titre des stationnements

Il ressort du titre constitutif de la servitude de passage au profit du fonds des époux [V] l'interdiction formelle de stationnement.

De façon surabondante, les époux [V], qui peuvent garer leur véhicule à l'intérieur de leur propriété, ne justifient aucunement de la nécessité de stationner sur l'impasse des Passerelles pour décharger leur automobile.

Enfin, les époux [V] se sont engagés dans le cadre de la médiation pénale à cesser tout stationnement.

Par voie de conséquence, le jugement déféré, qui sanctionne le non respect de l'interdiction absolue de stationner par une astreinte de 500€ par infraction constatée, sera confirmé.

sur la création d'une quatrième ouverture donnant sur le fonds servant

Par application de l'article 702 du code civil, celui qui a droit à servitude ne peut en user que suivant son titre, sans pouvoir faire, ni dans le fonds qui doit la servitude ni dans le fonds à qui elle est due, de changement qui aggrave la condition du premier.

Ainsi, c'est à juste titre que le tribunal a considéré que la création d'une quatrième ouverture donnant sur le fonds servant juste en face de la pièce principale des intimés, en multipliant les accès à partir du fonds servant et en troublant l'intimé des époux [I], a aggravé la condition de leur fonds servant.

Par voie de conséquence, le jugement déféré, qui condamne les époux [V] à la suppression sous astreinte de cette ouverture, sera confirmé.

sur l'enlèvement des plaques de fibrociment

Le PV de médiation prévoit l'enlèvement des plaques de fibrociment entreposées dans le jardin des appelants lesquelles constituent un risque pour la santé auquel les époux [V] exposent leurs voisins.

En l'absence de démonstration de l'enlèvement de l'intégralité de ces matériaux toxiques, c'est à bon droit que le tribunal a condamné sous astreinte les époux [V] audit nettoyage.

Par voie de conséquence, le jugement déféré sera également confirmé à ce titre.

sur les chiens des époux [V]

Les époux [I] démontrent que les chiens des époux [V] ont eu des comportements inadaptés en terme de divagations, morsure ou aboiements.

Les époux [V] soutiennent que leurs chiens sont parfaitement calmes et qu'en réalité ce sont les époux [I] qui les excitent ce qu'ils ne démontrent nullement.

Pour garantir la tranquillité et la sécurité des habitants de l'impasse et de leurs visiteurs, c'est à bon droit que le tribunal a condamné les époux [V] à paiement d'une astreinte par infraction constatée.

sur la caméra

Le PV de médiation prévoyait la vérification par les époux [I] du caractère factice de la caméra installée par leurs voisins [V].

Au regard du défaut de possibilité pour les époux [I] de vérification dudit caractère factice et en l'absence de démonstration de celui-ci, c'est à bon droit que le tribunal a condamné les époux [V] à l'enlèvement de ladite caméra, qui constitue une atteinte à l'intimé et un trouble anormal de voisinage, sous astreinte.

Le jugement déféré sera également confirmé sur ce point.

en dommages-intérêts

Enfin, c'est de façon pertinente que le tribunal a réparé le préjudice subi par les époux [I] du fait de l'atteinte répétée à leur droit de propriété en condamnant les époux [V] à leur payer des dommages-intérêts de 1.000€ qui doivent être jugés satisfactoires.

Par voie de conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

2/ sur la demande en dommages-intérêts des époux [V]

Par application des articles 565 et 566 du code de procédure civile, la demande de dommages-intérêts des époux [V] est recevable.

En revanche, au regard des considérations précédentes, elle est mal fondée, les époux [V], succombant en leurs prétentions, ne pouvant prétendre à l'existence d'un préjudice moral.

Ainsi, il convient de débouter les époux [V] de cette demande en dommages-intérêts.

3/ sur les mesures accessoires

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au seul bénéfice des époux [I].

Enfin, les époux [V] supporteront les dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Déclare recevable la demande de M. [T] [V] et Mme [S] [P] épouse [V] en dommages-intérêts,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute M. [T] [V] et Mme [S] [P] épouse [V] de leur demande en dommages-intérêts,

Condamne M. [T] [V] et Mme [S] [P] épouse [V] à payer à M. [E] [I] et Mme [C] [Y] épouse [I] la somme de 3.000€ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [T] [V] et Mme [S] [P] épouse [V] aux dépens de la procédure d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame CLERC, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 20/04205
Date de la décision : 13/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-13;20.04205 ?
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