N° RG 20/03404 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KTF4
C4
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SCP ALPAVOCAT
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 22 NOVEMBRE 2022
Appel d'un Jugement (N° R.G. 18/00885)
rendu par le Tribunal judiciaire de GAP
en date du 15 septembre 2020
suivant déclaration d'appel du 03 novembre 2020
APPELANTE :
Mme [E] [F] veuve [N]
de nationalité Française
née le 17 décembre 1947 à [Localité 12]
[Adresse 7]
[Localité 5]
représentée et plaidant par Me Fabien BOMPARD de la SCP ALPAVOCAT, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
INTIMÉS :
Mme [I] [T]
née le 8 janvier 1982 à [Localité 10] (Pays Bas)
de nationalité française
[Adresse 17]
[Localité 6]
Mme [W] [P] épouse [T]
née le 12 juillet 1956 à [Localité 8]
de nationalité française
[Adresse 9]
[Localité 4]
M. [K] [T]
né le 5 mai 1947 à [Localité 10] (Pays Bas)
de nationalité française
[Adresse 9]
[Localité 4]
représentés par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE postulant et plaidant par Me Justine DUVIEUBOURG, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, présidente,
Mme Joëlle Blatry, conseiller,
M. Laurent Desgouis, vice-président placé,
Assistés lors des débats de Mme Anne Burel, greffier
DÉBATS :
A l'audience publique du 03 octobre 2022, M. Desgouis a été entendu en son rapport.
Les avocats ont été entendus en leurs observations.
Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.
******
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Suivant courriers recommandés séparés du 16 novembre 2017, avec demandes d'avis de réception signées le 17 novembre 2017, Mme [E] [F] veuve [N] a demandé à M. [K] [T], Mme [W] [P], épouse [T], et Mme [I] [T] d'évacuer la parcelle cadastrée C [Cadastre 1] de tout équipement leur appartenant, outre le règlement d'une indemnité d'occupation.
Suivant exploits séparés, délivrés le 27 août 2018, Mme [E] [F] a fait assigner M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] devant le tribunal de grande instance de Gap, devenu tribunal judiciaire, aux fins de les voir condamner à lui payer une indemnité d'occupation illicite sur la parcelle de terre, située lieudit [Adresse 15]) et cadastrée section C, n°[Cadastre 1].
Par jugement contradictoire, rendu le 15 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Gap a :
Reçu la fin de non-recevoir soulevée par M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] ;
Déclaré Mme [F] irrecevable en ses demandes ;
Condamné Mme [F] à payer à M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] une indemnité de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Débouté Mme [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné Mme [F] aux dépens de la procédure ;
Ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Suivant déclaration du 3 novembre 2020, Mme [F] relevait appel du jugement rendu le 28 janvier 2021, intimant M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T].
Dans ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 26 juillet 2022, Mme [F] demande à voir :
Réformer la décision dont appel en ce qu'elle :
A reçu la fin de non-recevoir soulevée par M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] ;
L'a déclarée irrecevable en ses demandes ;
L'a condamnée à verser à M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] une indemnité de 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'a condamné aux dépens ;
A ordonné l'exécution provisoire du jugement ;
Statuant à nouveau :
Dire et juger recevables et fondées ses demandes ;
Condamner in solidum M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] à lui payer les sommes suivantes :
9.000€ à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice causé par l'occupation illégale ;
5.000€ en réparation de son préjudice moral ;
Condamner in solidum M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] à lui payer la somme de 3. 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Dans leurs dernières conclusions , notifiées par voie électronique le 18 août 2022, M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] (les consorts [M]) demandent à voir en réplique :
Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau, si d'aventure la présente cour déclarait les demandes de Mme [F] recevables :
A titre principal :
Déclarer que Mme [F] est défaillante quant à la charge de la preuve ;
Déclarer n'y avoir lieu à une quelconque indemnité d'occupation ;
La débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
Subsidiairement, débouter Mme [F] quant au quantum de la somme sollicitée ;
En tout état de cause, condamner Mme [F] aux entiers dépens ainsi qu'à la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 6 septembre 2022.
A l'audience du 3 octobre 2022, l'affaire a été mise en délibéré au 22 novembre 2022.
MOTIFS
En application des dispositions de l'article 467 du Code de procédure civile, la décision sera rendue contradictoirement.
Il est rappelé en tant que de besoin que la cour ne peut pas statuer sur l'exécution provisoire, observation devant être faite en tout état de cause qu'elle n'est pas saisie d'une quelconque prétention de ce chef dans le dispositif des dernières conclusions des parties.
Sur la recevabilité de l'action :
Vu les dispositions des articles 31, 32 et 122 du code de procédure civile ;
Vu les dispositions des article 1525 et 1526 du code civil ;
Pour déclarer irrecevable l'action entreprise par Mme [F], le tribunal judiciaire de Gap a considéré que cette dernière était dépourvue de qualité et d'intérêt à agir dans la mesure où les éléments qu'elle produisait ne démontraient pas de manière irrévocable sa qualité de propriétaire de la parcelle dont question.
A cet égard, le tribunal a considéré insuffisant le procès-verbal d'huissier, dressé le 30 août 2017, constatant la présence d'une yourte sur le terrain litigieux, faisant état de la qualité d'épouse universelle de la requérante et de l'attribution à son bénéfice des biens meubles et immeubles suite au décès de son époux, en ce que ces informations qui suivaient la phrase « laquelle m'a fait exposer par Madame [Z], sa fille ».
Par ailleurs, il a retenu que la production d'une attestation notariale du régime matrimonial et de la clause d'attribution intégrale en toute propriété de la communauté ainsi que d'un extrait cadastral sans indication du nom du propriétaire, ne démontrait pas de manière suffisante la qualité de propriétaire de Mme [F] sur la parcelle dont question.
Pour voir infirmer cette solution, Mme [F] soutient être propriétaire de la parcelle située lieudit [Adresse 15]) et cadastrée section C, n°[Cadastre 1], tel que cela résulte de l'acte notarié, dressé le 20 août 2020 par Me [S], notaire à [Localité 11].
Elle explique à ce titre avoir été mariée à M. [U] [N], décédé le 25 décembre 2016, sous le régime de la communauté universelle avec clause d'attribution intégrale au conjoint survivant, suivant acte reçu par Me [B], notaire à [Localité 14], le 3 décembre 2014.
Elle précise ainsi que la parcelle dont question appartenait à feu son époux et qu'elle est entrée en communauté par effet de l'acte du 3 décembre 2014.
Elle fait valoir que les consorts [T] ne sauraient valablement lui opposer le fait que la recevabilité s'apprécie à la date des demandes, d'une part, et qu'elle ne justifie pas ne pas avoir cédé le terrain depuis lors, d'autre part.
Elle explique ainsi être devenue propriétaire de la parcelle au jour du décès de son mari, soit antérieurement au jour de la délivrance de l'assignation, par l'effet des dispositions de l'article 1525 du code civil, visées dans l'acte du 20 août 2020.
Elle précise enfin que les intimés cherchent à voir renverser la charge de la preuve sans administrer eux mêmes celle qui leur échoit.
Pour voir confirmer la décision du premier juge, les consorts [T] réitèrent leur fin de non-recevoir tiré de l'absence de qualité à agir de l'appelante.
Ils soutiennent ainsi que l'acte de propriété du 20 août 2020, produit dans le cadre de la présente instance et postérieur à la délivrance de l'acte introductif d'instance, n'est pas de nature à altérer le raisonnement tenu par le premier juge, la recevabilité d'une demande s'appréciant au jour de sa formation.
Ils insistent en conséquence pour indiquer que Mme [F] ne justifie donc pas de sa qualité de propriétaire au jour de la délivrance de l'acte introductif d'instance, ni de manière plus contemporaine, dans la mesure où elle ne démontre pas ne pas avoir procédé à la cession de la parcelle dont question.
Partant, l'appelante a produit une attestation notariale du régime matrimonial et de la clause d'attribution intégrale en toute propriété de la communauté.
Elle produit dans le cadre de la présente instance l'acte notarié « apport à communauté et attestation de propriété », dressé le 20 août 2020 par Me [S], notaire à [Localité 11] visant expressément la parcelle litigieuse, cadastrée C [Cadastre 1], sise [Adresse 16], comme appartenant à la communauté (sa pièce n°17).
En application des dispositions de l'article 563 du code de procédure civile, la production de cette dernière pièce est de nature à caractériser sa qualité à agir.
Considérant le régime de communauté universelle et la clause d'attribution intégrale, Mme [F] est en effet devenue propriétaire de la parcelle dont question le 25 décembre 2016, jour du décès de son époux, sans autre formalité. L'acte notarié du 20 août 2020 ne constitue donc pas le fait générateur de la qualité de propriétaire et se limite à dresser l'état des biens dont Mme [F] a acquis la propriété au jour du décès de son époux.
Elle disposait donc bien de la qualité de propriétaire bien avant que l'instance ne soit introduite devant le premier juge par l'effet des exploits délivrés le 27 août 2018.
De la même manière, il ne saurait valablement lui être opposé le fait qu'elle ne justifie pas ne pas avoir procédé à la cession de la parcelle dont question puisque l'acte notarié de constat de propriété a été dressé le 20 août 2020, soit postérieurement à la période sur laquelle est dénoncée l'occupation illégale.
A la lumière de l'ensemble de ces éléments, il convient de déclarer recevable l'action entreprise par Mme [F].
Le jugement rendu le 15 septembre 2020 sera en conséquence infirmé.
Sur le fond :
Sur l'occupation illicite de la parcelle cadastrée C [Cadastre 1] :
Vu les dispositions de l'article 1134 du code civil ;
En l'espèce, les parties s'accordent sur l'inexistence d'une convention écrite, liant M. [U] [N] et les intimés, et tendant à l'occupation par ces derniers de la parcelle litigieuse à titre gracieux.
Partant, les consorts [T] font valoir qu'il existait depuis de nombreuses années un accord oral leurs permettant d'occuper la parcelle C [Cadastre 1].
Ils font ainsi, et dans un premier temps, valoir la qualité de leurs relations, prospérant depuis plusieurs décennies, scellée par les cessions opérées en 1988 et 2001 par M. [N] au bénéfice de M. et Mme [T] de plusieurs parcelles proches de la parcelle litigieuse.
Ils prétendent dans un deuxième temps que M. [N] nourrissait le projet de leur vendre la parcelle cadastrée C [Cadastre 1], telle que cela résulte de l'attestation établie par M. [A] [H] [G] (pièce n°10 intimés).
Ils précisent également que l'installation saisonnière d'une yourte leur appartenant sur la parcelle cadastrée C [Cadastre 1] était réalisée aux yeux et connue de tous.
Ils soutiennent enfin que la teneur des échanges intervenus entre Mme [I] [T] et Mme [L] [Z], fille de l'appelante, est de nature à caractériser la parfaite connaissance par M. [N] de l'occupation contestée, ainsi que la réalité de l'accord oral dont question.
En réplique, Mme [F] réfute l'ensemble de ces arguments, niant la légitimité de l'occupation des intimés.
Partant, ni l'ancienneté, ni la qualité des rapports ayant pu exister entre M. et Mme [T] et M. [N] ne sont contestées.
Pour autant, M. [G] témoigne le 14 novembre 2018 d'un épisode survenu au cours de l'été 2007 ou 2008, au cours duquel M. [N] aurait cherché à obtenir les coordonnées de M. et Mme [T], sans pour autant précisé l'objet de cette démarche.
De cette manière, l'intention prêtée à M. [N] de vendre la parcelle litigieuse à M. et Mme [T] n'est pas caractérisée.
N'est pas davantage caractérisée l'existence de l'accord oral dont se prévalent les intimés par l'affirmation « M. [N] n'avait jamais commenté ni critiqué l'emplacement du yourte ». L'attestation de M. [G] ne mentionne pas à ce titre sa période d'occupation de l'immeuble désigné « Pain de Sucre », situé sur la parcelle voisine de celle appartenant à M. [N], ni même la parfaite connaissance part ce dernier de l'usage réservé à l'installation.
De la même manière, le courriel adressé par le service de l'urbanisme de la commune de [Localité 13] à Mme [L] [Z] le 22 décembre 2017, aux termes duquel « (') nous pensions que les yourtes utilisées dans le cadre de l'exploitation du gîte « Pain de Sucre », étaient installées sur la parcelle des propriétaires, M. [T] et Mme [P] [W] » (pièce n°11 appelante), n'est pas de nature à révéler l'existence de l'accord oral dont se prévalent les intimés. Il sera relevé à ce titre que la commune indique n'avoir jamais délivré d'autorisation pour cette installation.
Enfin, il ressort des échanges de courriels intervenus entre Mme [I] [T] et Mme [L] [Z] entre le 16 septembre 2016 et le 27 février 2017, que cette dernière n'a pas donné suite à l'offre d'achat faite par la première.
Mme [Z] a toutefois rappelé la possibilité d'une location de la parcelle pour « (') activité commerciale inhérente à votre gîte » ; Mme [I] [T] ayant sur ce point répondu « la location en période estivale est gérée par mes parents. En ce qui les concerne, ils ne souhaitent pas développer leur activité commerciale » (pièce n°12 appelante).
En dépit de la tonalité de ces échanges, Mme [I] [T] ne fait aucune référence à l'installation préalable de la yourte et motive sa demande par l'installation d'une aire de jeux, d'un potager ou d'animaux sur la parcelle.
Interrogée par SMS sur les motivations réelles de cette demande d'achat, Mme [I] [T] renverra Mme [Z] aux échanges courriels sans autre explication (pièce n°11 intimés).
L'absence de référence à l'accord verbal donné plusieurs années auparavant par M. [N] au cours des différents échanges intervenus sur cette période n'est pas de nature à caractériser la réalité de celui-ci.
A la lumière de l'ensemble de ces éléments, les intimés échouent à administrer la preuve de l'existence d'un accord verbal, donné par M. [N], leur autorisant l'installation d'une yourte sur la parcelle cadastrée C [Cadastre 1].
Ils ne sauraient dès lors et à titre surabondant se prévaloir des dispositions des articles 1888 et 1889 du code civil pour opposer à l'appelante l'absence d'un délai de préavis raisonnable pour quitter les lieux, résultant de la mise en demeure du 16 novembre 2017.
Il convient en conséquence de déclarer illégale l'occupation réalisée par les intimés sur la parcelle cadastrée C [Cadastre 1].
Sur l'octroi de dommages-intérêts :
Vu les dispositions de l'article 1240 du code civil ;
En l'espèce, Mme [F] se prévaut d'un préjudice matériel dont la source directe et immédiate doit être trouvée dans la faute des intimées, caractérisée par l'occupation illégale de la parcelle C [Cadastre 1], par ailleurs source de revenus pour ces derniers sur une période d'au mois 5 années précédent la mise en demeure de quitter les lieux.
Pour contester cette demande, les intimés font, dans un premier temps, valoir que la yourte était installée de manière saisonnière et non tout au long de l'année pour être occupée à des fins privées et non commerciales.
Ils soutient, dans un second temps, que dès lors que M. [R] [J] utilisait également la parcelle litigieuse pour les besoins de son élevage, Mme [F] ne pourrait pas se prévaloir d'un quelconque préjudice, dont elle chiffre d'ailleurs pas de manière sérieuse le montant.
Partant, M. [J] atteste louer les parcelles cadastrées C [Cadastre 2] et C [Cadastre 3] pour les besoins de son activités d'exploitant agricole, sans faire référence à une extension de celle-ci sur la parcelle litigieuse (pièce n°2 appelante).
L'attestation délivrée par M. [G], aux termes de laquelle « je signale également que M. [J] essayais chaque année de déplacer la clôture un peu plus loin et que j'avait demandé plusieurs fois de ne pas placer sa clôture trop loin vers le terrain de Mme et M. [T] » (pièce n°10 intimés) reste trop peu circonstanciée pour caractériser l'absence de préjudice invoquée du fait de l'utilisation par l'agriculteur de la parcelle litigieuse.
En outre, la publicité commerciale, issue de la page Facebook dédiée à l'activité commerciale du gîte « Pain de Sucre » poursuivie par les intimés, met en avant des photos de la yourte, accompagnées des tarifs pratiqués pour la location de celle-ci (pièce n°16 appelante).
Faute de contradiction étayée sur ce point, les intimés ne sauraient dès lors valablement prétendre que l'occupation de la yourte n'était proposée qu'à des fins privatives et gracieuses. Ils notent d'ailleurs dans leur courrier du 29 novembre 2017, en réponse à la mise en demeure de quitter les lieux adressée par l'appelante quelques jours plus tôt « Pour éviter tout malentendu nous avons également supprimé de notre site web, toute référence à la yourte de notre fille sur cet emplacement » (pièce n°7 appelante).
De la même manière, et alors que l'installation illégale de la yourte sur la parcelle C [Cadastre 1] procède des éléments discutés ci-avant, les intimés peinent à administrer la preuve suffisante du caractère saisonnier de l'installation dont question. Ils ne contestent en outre pas l'existence d'une installation depuis moins de 5 années.
A la lumière de l'ensemble des ces éléments, il convient de dire que c'est à bon droit que Mme [F] se prévaut d'un préjudice matériel, directement et immédiatement lié à l'occupation illégale et commerciale de la parcelle cadastrée C [Cadastre 1].
Partant, le montant sollicité à titre de dommages-intérêts de 150€ par mois d'occupation pendant 96 mois n'apparaît pas disproportionné au préjudice subi, compte tenu du coût de la location (450€/semaine et 350 €/week-end) apparaissant sur la publicité commerciale du gîte « le Pain de Sucre » mettant en avant les planches photographiques de la yourte.
En réparation du préjudice matériel subi, les consorts [T] seront condamnés solidairement à payer à Mme [F] la somme de 9. 000€.
Mme [F] se prévaut également d'un préjudice moral trouvant sa source dans l'administration, pour les besoins de la présente procédure, de documents relatifs à l'état de santé dégradé de son défunt mari.
Cette circonstance n'est pas en soi susceptible de caractériser l'existence d'un préjudice moral indemnisable et Mme [F] sera déboutée de ce chef de demande.
Sur les frais irrépétibles :
En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, l'équité commande de condamner solidairement les consorts [T] à payer à Mme [F] la somme de 2.000€ au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés dans l'instance; ils sont déboutés de leur réclamation du même chef, tant en première instance qu'en appel .
Sur les dépens :
En application des dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile, les consorts [T], qui succombent en leurs prétentions, seront solidairement condamnés aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
INFIRME le jugement rendu le 20 septembre 2015 par le tribunal judiciaire de Gap,
STATUANT DE NOUVEAU et ajoutant:
REJETTE la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité à agir de Mme [E] [F] veuve [N], soulevée par M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] ;
DECLARE Mme [E] [F] veuve [N] recevable en ses demandes ;
DIT que M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] ont occupé de manière illégale la parcelle cadastrée C [Cadastre 1], appartenant à Mme [E] [F] veuve [N], située [Adresse 15]) au cours des 5 années précédant la mise en demeure adressée le 16 novembre 2017 ;
CONDAMNE solidairement M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] à payer à Mme [E] [F] veuve [N] la somme de 9.000€ à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel ;
DEBOUTE Mme [E] [F] veuve [N] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
CONDAMNE solidairement M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] à payer à Mme [E] [F] veuve [N] la somme de 2. 000 € au fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel,
CONDAMNE solidairement M. [K] [T], Mme [W] [T] et Mme [I] [T] aux dépens de première instance et d'appel ;
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame CLERC, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT