N° RG 21/01456 - N° Portalis DBVM-V-B7F-KZUB
C4
Minute :
Copie exécutoire
délivrée le :
la SCP LSC AVOCATS
la SCP POLI-CABANES DEVIGNY MARTIN
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 22 SEPTEMBRE 2022
Appel d'une décision (N° RG 2019J318)
rendue par le Tribunal de Commerce de Grenoble
en date du 29 janvier 2021
suivant déclaration d'appel du 25 mars 2021
APPELANTE :
SAS SEDIMAT au capital de 220 000 €, immatriculée au RCS de Grenoble, sous le n° 071 501 902, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès-qualités audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Cédric LENUZZA de la SCP LSC AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué par Me CAPDEVILLE, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉE :
S.A.S.U. KELLY SERVICES INTERIM au capital de 11 192 400 euros, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 311 305 650, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Adresse 5]
représentée par Me MARTIN de la SCP POLI-CABANES DEVIGNY MARTIN, avocat au barreau de GRENOBLE
INTERVENANTS VOLONTAIRES :
S.E.L.A.R.L. AJUP, en la personne de Me [Z] [L] es qualité d'administrateur judiciaire de la Société SEDIMAT selon jugement du tribunal de commerce de GRENOBLE du 12 janvier 2022
[Adresse 4]
[Localité 3]
S.E.L.A.R.L. BERTHELOT, en la personne de [F] [W], ès qualité de mandataire judiciaire de la Société SEDIMAT selon jugement du tribunal de commerce de GRENOBLE du 12 janvier 2022
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentées par Me Cédric LENUZZA de la SCP LSC AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre. FIGUET, Présidente de Chambre,
Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère,
M. Lionel BRUNO, Conseiller,
DÉBATS :
A l'audience publique du 01 juin 2022, M. Lionel BRUNO Conseiller, qui a fait rapport et, Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseiller, assistés de Mme Alice RICHET, Greffière, ont entendu les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile.
Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
Faits et procédure :
1.Le 10 juillet 2017, la société Kelly Services Intérim a conclu avec la Société de Distribution de Matériels dite Sedimat, un contrat pour la recherche et la sélection de candidats en vue du recrutement de salariés, pour des postes situés à [Localité 8], [Localité 9] et [Localité 6].
2.Le 6 novembre 2017, monsieur [C] a été embauché pour le site de [Localité 8], et le 14 novembre 2021, la société Kelly Services a adressé une facture pour ses honoraires de recrutement. Le contrat de travail de ce salarié a cependant été rompu mi-novembre.
3.Le 14 mai 2018, madame [T] a été embauchée pour le poste situé à [Localité 6], et monsieur [G] pour celui de [Localité 9]. Le 1er juin 2018, la société Kelly Services a adressé ses factures d'honoraires pour ces deux recrutements. Les contrats de travail de ces deux personnes ont cependant été rompus pendant la prolongation de leur période d'essai.
4.Le 28 novembre 2018, la société Kelly Services a mis en demeure la société Sedimat de lui régler 11.683,20 euros au titre de ses trois factures d'honoraires, avant de l'assigner en paiement le 8 août 2019 devant le tribunal de commerce de Grenoble.
5.Par jugement du 29 janvier 2021, le tribunal de commerce de Grenoble a':
- débouté la société Sedimat de sa demande tendant à écarter des débats les pièces n°10 et 11 de la société Kelly Services';
- condamné la société Sedimat à payer à la société Kelly Services Ia somme de 11.683,20 euros au titre du principal, outre trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 18 juillet 2018, date d'exigibilité de la dette en application de l'article L441-10 du code de commerce';
- condamné la société Sedimat à payer à Ia société Kelly Services la somme de 1.401,98 euros au titre de la clause pénale insérée au contrat';
- condamné la société Sedimat à payer à la société Kelly Services la somme de 120 euros au titre de l'indemnité légale de 40 euros par facture impayée à son échéance';
- ordonné la capitalisation des intérêts, par année entière, à chaque anniversaire du 28 novembre 2018';
- ordonné l'exécution provisoire nonobstant appel et sans caution ou constitution de sûreté';
- condamné la société Sedimat à payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
6.La société Sedimat a interjeté appel de cette décision le 25 mars 2021. Le 12 janvier 2022, la société Sedimat a été placée en redressement judiciaire. L'instruction de cette procédure a été clôturée le 5 mai 2022.
Prétentions et moyens de la société Sedimat, de la Selarl AJUP ès-qualités d'administrateur judiciaire et de la Selarl Berthelot ès-qualités de mandataire judiciaire :
7.Selon leurs conclusions n°2 remises le 25 mars 2022, elles demandent à la cour, au visa des articles 325 et suivants du code de procédure civile, de l'ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539, des articles 1110, 1171, 1217, 1219, 1231-1, 1231 -5, 1347 du code civil':
- de déclarer recevables et bien fondée les interventions volontaires de la Selarl AJUP ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société Sedimat et de la Selarl Berthelot ès-qualités de mandataire judiciaire de cette société';
- en conséquence, de réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions';
- d'écarter des débats les pièces n° 10 et 11 de la société Kelly Services';
- de juger non écrites les clauses du contrat de prestation de placement permanent prévoyant la facturation des honoraires à la date du début effectif du candidat au sein de l'entreprise et prévoyant la garantie que si la facture est réglée';
- de juger que la société Kelly Services n'a pas accompli les prestations commandées conformément à ses obligations résultant du contrat';
- de juger que le contrat est résilié depuis le 20 mars 2018';
- de débouter en conséquence la société Kelly Services de l'ensemble de ses prétentions';
- à défaut, de juger que les sommes mises à la charge de la société Sedimat ne pourront qu'être inscrites au passif';
- en tout état de cause, de juger que la société Kelly Services n'a pas satisfait à son obligation de moyen dans l'exécution du contrat conclu avec la société Sedimat ;
- de juger en conséquence que la société Kelly Services engage sa responsabilité contractuelle';
- de juger que l'indemnité de 12 % constitue une clause pénale dont le montant est manifestement excessif';
- de condamner la société Kelly Services à verser à la société Sedimat la somme de 11.803,20 euros au titre de dommages et intérêts';
- d'ordonner la réduction de l'indemnité prévue en cas de défaillance du débiteur à 0 % ;
- d'ordonner par suite la compensation des créances réciproques';
- de condamner la société Kelly Services au paiement de la somme de 5.000 euros à profit de la société Sedimat en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d'appel.
Les appelantes exposent':
8.- que suite au placement en redressement judiciaire de la société Sedimat le 12 janvier 2022, l'administrateur judiciaire et le mandataire interviennent volontairement en application des articles 325 et suivants du code de procédure civile';
9.- sur le fond, que le contrat a prévu que les honoraires liés à la prestation seront facturés le jour du début effectif du candidat au sein de l'entreprise'; qu'il a été stipulé qu'en cas de départ du candidat présenté pendant la période d'essai, à son initiative ou à celle de la cliente, la société Kelly Services s'engage à effectuer une nouvelle recherche sans percevoir de nouveaux honoraires'; que cette garantie est applicable trois fois, pour une période de six mois à compter du départ du salarié, et qu'elle ne prend effet que si toutes les factures ont bien été réglées';
10.- qu'ainsi, si cette garantie impose que le client ait réglé la première facture liée à l'embauche d'un candidat, encore faut-il que le profil de ce candidat corresponde à celui recherché, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce';
11.- que concernant monsieur [C], il s'est avéré dès le premier jour de son embauche qu'il n'avait pas les compétences requises pour le poste, alors que son CV s'est avéré faux concernant l'identité de son ancien employeur, lequel a indiqué que ce salarié n'avait jamais travaillé dans son entreprise': qu'ainsi, l'intimée n'a pas effectué de vérification élémentaire auprès des anciens employeurs mais a proposé le premier candidat venu, afin d'être réglée de ses honoraires'; que les deux autres personnes ne sont pas allées au terme de leur période d'essai'; que l'intimée n'a ensuite pas été en mesure de proposer d'autres candidats corrects, de sorte que la société Sedimat a résilié le contrat'; que concernant madame [T], cette dernière a été proposée après la résiliation du contrat, puisque celui-ci a été résilié le 20 mars 2018, alors que la date de prise de fonction de cette personne est le 14 mai 2018 selon la facture produite';
12.- concernant monsieur [C], que les pièces n°10 et 11 de l'intimée doivent être écartées, étant rédigées en anglais alors que l'ordonnance de Villers-Cotterêts impose que le français soit la langue utilisée devant une juridiction'; que le tribunal de commerce n'a pu retenir que cette obligation ne concerne que les actes de procédure';
13.- que toute entreprise de travail temporaire de recrutement est tenue à une obligation de prudence dans le recrutement du personnel qu'elle fournit'; que le contrat a prévu une analyse de la culture de la société Sedimat, de son organisation et de ses procédures spécifiques, de l'environnement du poste de travail, du poste, du profit de la personne recherchée'; que cependant, les candidats présentés ne correspondaient pas aux attentes de l'employeur';
14.- que l'intimée ne peut se prévaloir des dispositions du contrat pour solliciter un paiement, s'agissant d'un contrat d'adhésion qui n'a pas été négocié et dont les clauses ont été imposées par la société Kelly Services, en contravention avec l'article 1110 du code civil'; qu'ainsi, la clause prévoyant la facturation des honoraires à la date du début effectif du candidat au sein de l'entreprise, outre celle prévoyant la garantie si la facture est réglée, sont non écrites, créant un déséquilibre significatif, l'obligation de moyen étant très limitée au regard des sommes facturées, avec une garantie limitée à six mois et un nombre de présentation de candidats réduit à trois';
15.- que le tribunal a estimé à tort que la preuve de l'inexécution du contrat n'a pas été rapportée, alors que l'intimée n'a pas exécuté son obligation de moyen et a commis une faute dans l'exécution de sa prestation, en présentant des candidats ne correspondant pas aux attentes de sa cliente, puisque aucun des candidats n'est resté plus de six mois dans l'entreprise;
16.- concernant la clause pénale, qu'elle a été stipulée à hauteur de 12'% des sommes dues, ce qui est exorbitant.
Prétentions et moyens de la société Kelly Services Intérim':
17.Selon ses conclusions d'intimée remises le 9 août 2021, elle demande à la cour, au visa des articles 1103, 1231 et suivants du code civil, L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce':
- de juger mal fondé l'appel interjeté et de débouter la société Sedimat de l'ensemble de ses demandes;
- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
- y ajoutant, de condamner la société Sedimat à payer à la concluante la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la Scp Poli-Cabanes, Devigni Martin, avocats.
Elle soutient':
18.- concernant la recevabilité de ses pièces 10 et 11, que l'ordonnance de Villers-Cotterêts ne concerne que les actes de procédure, alors que les pièces en cause en langue étrangère sont recevables'; qu'il appartient au juge d'apprécier leur force probante dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation'; que ces pièces sont constituées par la lettre de motivation du candidat dont la société Sedimat avait exigé qu'il maîtrise la langue anglaise, et par deux diplômes, qui sont repris dans le CV du candidat écrit en français'; qu'un retrait de ces pièces est ainsi inutile';
19.- sur le fond, que la concluante a exécuté son obligation de moyens, puisque la société Sedimat a engagé les quatre candidats présentés, dont certains ont passé plusieurs mois au sein de cette entreprise';
20.- concernant monsieur [C], que la société Sedimat ne prouve pas qu'elle aurait appris que ce salarié n'aurait travaillé que quelques mois auprès de la société Dassault, son dernier employeur, et non sept ans'; que la concluante a effectué des vérifications auprès de cet employeur et de la société Aral, un employeur précédent'; qu'elle a obtenu le document concernant une certification en informatique mentionnée par ce salarié dans son CV'; que suite au départ de ce salarié, la concluante a mis en 'uvre la garantie contractuelle, en présentant quatre candidats, alors que la facture initiale n'était pas réglée';
21.- concernant madame [T], que celle-ci a intégré la société Sedimat le 14 mai 2018, et a effectué une période d'essai qui a été renouvelée'; que la garantie ne s'applique qu'au cours de la période d'essai initiale et qu'ainsi la concluante n'était pas tenue de présenter un autre candidat suite au départ de cette salariée'; que postérieurement à la date de la lettre de résiliation du 20 mars 2018, les parties ont convenu de maintenir des relations commerciales, ainsi qu'il résulte de courriels';
22.- concernant monsieur [G], qui a également intégré la société Sedimat le 14 mai 2018, que sa période d'essai a été reconduite au bout de trouis mois, avant qu'il ne soit congédié pour insuffisances après quatre mois passés au sein de cette société'; que comme pour madame [T], les conditions de la garantie contractuelle n'étaient pas remplies';
23.- que si la société Sedimat invoque l'existence d'un contrat cadre et un déséquilibre significatif, il n'existe pas un tel déséquilibre, d'autant que la concluante a mis en 'uvre sa garantie avant tout paiement'; qu'écarter ces clauses reviendrait à permettre au client de ne régler la facture de présentation que s'il décide de l'embauche du candidat, ce qui introduirait alors une condition purement potestative au profit de la société Sedimat';
24.- s'agissant de la clause pénale, que la société Sedimat a refusé de régler les factures malgré l'embauche de quatre candidats présentés'; qu'aucune raison ne permet de réduire le montant de cette clause';
25.- que la demande de dommages et intérêts de la société Sedimat n'est pas sérieuse en son principe ni justifiée dans son montant.
*****
26.Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION':
1) Concernant l'intervention volontaire des organes de la procédure collective de la société Sedimat':
27.Il est constant que la société Sedimat a été placée en redressement judiciaire, et que la Selarl AJUP a été désignée administrateur judiciaire de la société Sedimat et la Selarl Berthelot mandataire judiciaire de cette société. Il convient en conséquence de déclarer recevables les interventions volontaires de ces organes de la procédure collective de la société Sedimat.
2) Concernant la validité des clauses du contrat de prestation de placement permanent prévoyant la facturation des honoraires à la date du début effectif des fonctions du salarié et de la garantie due par la société Kelly Services':
28.Il résulte du contrat de prestation de placement permanent que la finalité de la société Kelly Services est d'identifier, d'évaluer, de gérer les talents de ses clients, en sa qualité d'expert en recrutement. Dans le cadre du développement de son activité, la société Sedimat a ouvert sept postes de technico-commerciaux, dont trois sur les sites de [Localité 9], [Localité 7] et [Localité 8], et la société Kelly Services s'est engagée à rechercher et à sélectionner les meilleurs candidats, à procéder à un entretien de recrutement personnalisé en fonction des attentes de la société Sedimat, à contrôler les documents professionnels, à présenter ceux identifiés comme présentant le meilleur profil, puis, une fois le recrutement effectué, à suivre et à faciliter l'intégration du salarié dans la société cliente durant la période d'essai.
29.Au titre de ces prestations, il a été prévu une rémunération forfaitaire de 800 euros HT par salarié recherché, outre un honoraire variant entre 14 et 18'% selon la qualification du candidat, calculé sur la base de son salaire annuel brut. Il est stipulé que les honoraires seront facturés le jour du début effectif du candidat au sein de l'entreprise cliente, et qu'en cas de départ du salarié présenté pendant la période d'essai initiale, à son initiative ou à celle du client, la société Kelly Services s'engage à effectuer une nouvelle recherche sans percevoir d'honoraires supplémentaires. Cette garantie est applicable trois fois, pour une durée de six mois à compter du départ du salarié, et ne prend effet que si toutes les factures ont bien été réglées par le client dans les conditions contractuellement définies.
30.Ces conditions ont été acceptées par la société Sedimat le 10 juillet 2017, et aucun élément ne permet de déterminer que ce contrat est un contrat d'adhésion, ne pouvant être négocié. Le fait que les obligations de la société Kelly Services soient limitées à trois présentations dans un délai de six mois à compter du départ du salarié présenté initialement ne crée pas un
déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties, contrairement à l'argumentation soutenue par les appelantes, au sens de l'article 1110 du code civil.
3) Sur l'exécution par la société Kelly Services de ses obligations':
31.Concernant en premier lieu les pièces n°10 et 11 produites par l'intimée, concernant des formations suivies par monsieur [C], il résulte de l'ordonnance du 25 août 1539 sur le fait de la justice, dite ordonnance de Villers-Cotterêts, que ce texte ne concerne que la rédaction des décisions de justice et des actes juridiques. Ainsi, l'article 111 de cette ordonnance dispose que «'pour ce que telles choses sont souvent advenues sur l'intelligence des mots latins contenus esdits arrests, nous voulons d'oresnavant que tous arrests, ensemble toutes autres procédures, soient de nos cours souveraines et autres subalternes et inférieures, soient de registres, enquestes, contrats, commissions, sentences testaments, et autres quelconques, actes et exploicts de justice, ou qui en dépendent, soient prononcés, enregistrés et délivrés aux parties en langage maternel françois et non autrement'». En l'espèce, les deux pièces concernées n'ont pas la qualité d'actes juridictionnels, mais sont seulement des attestations concernant des formations professionnelles. Le tribunal de commerce a exactement écarté la prétention de la société Sedimat sollicitant que ces pièces soient écartées des débats.
32.Il n'est pas contesté par les parties que la société Kelly Services n'est tenue qu'à une obligation de moyens concernant la sélection puis la présentation des salariés qu'elle propose à sa cliente, en fonction des spécificités de l'activité de cette dernière. A ce titre, la société Sedimat exerce, selon l'extrait Kbis la concernant, une activité d'étude, de réalisation, d'importation et d'exportation, de distribution de matériels de manutention, de formation, de conseil, de location longue et courte durée de matériels et de véhicules.
33.Concernant monsieur [C], engagé en qualité de technico-commercial avec prise de fonction le 6 novembre 2017, il résulte de son curriculum vitae que ses compétences concernent ce domaine d'activité, et qu'il a exercé des fonctions commerciales depuis 1998 auprès de grands groupes. Il a produit deux documents attestant de la réalité de ses compétences. Aucun élément ne permet de retenir que la société Kelly Services aurait ainsi présenté un candidat ne disposant pas des compétences en adéquation avec le profit de poste recherché par la société Sedimat et aucune pièce ne permet de constater que monsieur [C] aurait mentionné de fausses informations sur son curriculum vitae. Suite à la rupture du contrat de travail de ce salarié, l'intimée justifie de la présentation de candidats disposant de compétences également en adéquation avec des fonctions technico-commerciales.
34.Concernant monsieur [G], engagé en qualité de technico-commercial avec prise de fonction le 14 mai 2018, et madame [T], engagée en qualité de technico-commerciale avec prise de fonction le 14 mai 2018, il n'est pas contesté par l'intimée qu'une lettre de résiliation du contrat de prestation de placement permanent a été adressée par la société Sedimat le 20 mars 2018, bien que cette lettre ne soit pas versée aux débats. Cependant, l'intimée justifie bien de la poursuite des relations contractuelles postérieurement à cette date. Ainsi, par mail du 18 avril 2018, la société Sedimat a adressé à la société Kelly Services la promesse d'embauche de madame [T], et jusqu'au 30 avril 2018, elle a rendu compte à l'intimée du résultat des entretiens d'embauche réalisés avec d'autres postulants présentés par la société Kelly Services.
35.Il en résulte que la société Kelly Services rapporte la preuve de la bonne exécution de ses obligations, alors que la société Sedimat ne justifie pas que l'intimée ait manqué à son obligation de moyens de lui présenter des candidats en adéquation avec son activité. En outre concernant les deux derniers salariés, il est établi que leur contrat de travail a été rompu après prolongation de la période d'essai. L'intimée ne devait en conséquence plus aucune garantie.
4) Sur les sommes dues par la société Sedimat et la réduction de la clause pénale':
36.Selon les trois factures éditées par la société Kelly Services au titre de la présentation des messieurs [C] et [G] et de madame [T], l'intimée a facturé à la société Sedimat un total de 11.683,20 euros. Au regard des motifs développés ci-dessus, le tribunal de commerce a exactement condamné la société Sedimat au paiement de cette somme, outre intérêts de retard et indemnités légales de 40 euros par facture. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
37.Concernant la somme de 1.401,98 euros, allouée à l'intimée à titre de clause pénale, le contrat de prestation de placement permanent a stipulé que le défaut de paiement après mise en demeure restée infructueuse pendant huit jours entraînera de plein droit une majoration de 12'% des sommes dues, à titre de clause pénale. La somme allouée par le tribunal à l'intimée correspond à ce pourcentage, et il n'est pas contesté que la société Sedimat n'a pas réglé les sommes dues par elle postérieurement à la mise en demeure du 28 novembre 2018. Ce pourcentage est cependant manifestement excessif, et le montant de cette pénalité sera ainsi ramené à la somme de 1.168,32 euros, représentant 10'% des sommes dues en principal par la société Sedimat. Le jugement déféré sera ainsi infirmé sur ce point.
38.En raison de placement de la société Sedimat en redressement judiciaire le 12 janvier 2022, le jugement déféré sera également infirmé en ce qu'il a prononcé des condamnations à l'encontre de cette société. Tenant compte de l'ouverture de cette procédure, la cour fixera ainsi les sommes dues par la société Sedimat à son passif.
5) Sur la demande reconventionnelle des appelantes':
39.Il résulte du sens du présent arrêt qu'en l'absence de faute établie à l'encontre de la société Kelly Services, la demande de dommages et intérêts des appelantes ne peut qu'être rejetée. Il en est de même concernant leur demande de compensation.
40.Succombant en son recours, la société Sedimat sera condamnée à payer à la société Kelly la somme complémentaire de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, qui seront employés en frais privilégiés du redressement judiciaire, par application de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu les articles 1103, 1231 et suivants du code civil, L441-10 et D 441-5 du code de commerce';
Déclare recevables les interventions volontaires de la Selarl AJUP ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société Sedimat et de la Selarl Berthelot ès-qualités de mandataire judiciaire de cette société ;
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a':
- condamné la société Sedimat à payer à la société Kelly Services Ia somme de 11.683,20 euros au titre du principal, outre trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 18 juillet 2018, date d'exigibilité de la dette en application de l'article L441-10 du code de commerce';
- condamné la société Sedimat à payer à Ia société Kelly Services la somme de 1.401,98 euros au titre de la clause pénale insérée au contrat';
- condamné la société Sedimat à payer à la société Kelly Services la somme de 120 euros au titre de l'indemnité légale de 40 euros par facture impayée à son échéance';
- condamné la société Sedimat à payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
Confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions déférées à la cour';
statuant à nouveau':
- fixe au passif de la société Sedimat la créance de la société Kelly Services pour un montant de 11.683,20 euros au titre du principal, outre trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 18 juillet 2018, date d'exigibilité de la dette en application de l'article L441-10 du code de commerce';
- fixe au passif de la société Sedimat la créance de Ia société Kelly Services pour un montant de 1.168,32 euros au titre de la clause pénale insérée au contrat';
- fixe au passif de la société Sedimat la créance de la société Kelly Services d'un montant de 120 euros au titre de l'indemnité légale de 40 euros par facture impayée à son échéance';
- fixe au passif de la société Sedimat la créance de la société Kelly Services pour un montant de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';
y ajoutant';
Condamne la société Sedimat à payer à la société Kelly la somme complémentaire de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile';
Condamne la société Sedimat aux dépens exposés tant en première instance qu'en cause d'appel, qui seront employés en frais privilégiés de la procédure de redressement judiciaire, avec distraction au profit de la Scp Poli-Cabanes, Devigni Martin, avocats';
SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La GreffièreLa Présidente