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05/05/2022 | FRANCE | N°18/03779

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 05 mai 2022, 18/03779


N° RG 18/03779 - N° Portalis DBVM-V-B7C-

JVI5



C8





Minute N°





































































Copie exécutoire

délivrée le :







la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY



la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC



Me Pascale MODELSKI



AU NOM

DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE COMMERCIALE



ARRÊT DU JEUDI 05 MAI 2022



Appel d'un Jugement (N° RG 2016J87)

rendu par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE

en date du 13 juin 2018

suivant déclaration d'appel du 03 Septembre 2018



APPELANTE :



SAS TROUILLET 85

immatriculée au RCS LA ROCHE SUR YON, sous le numéro 790 ...

N° RG 18/03779 - N° Portalis DBVM-V-B7C-

JVI5

C8

Minute N°

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

Me Pascale MODELSKI

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 05 MAI 2022

Appel d'un Jugement (N° RG 2016J87)

rendu par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE

en date du 13 juin 2018

suivant déclaration d'appel du 03 Septembre 2018

APPELANTE :

SAS TROUILLET 85

immatriculée au RCS LA ROCHE SUR YON, sous le numéro 790 650 683agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,

Rue du Pont Noget - Zone Industrielle Route de Niort

85200 FONTENAY LE COMTE

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et par Me Julien DURAND-ZORZI de la SELAS SEIGLE. SOUILAH. DURAND-ZORZI, avocat au barreau de LYON, plaidant

INTIMÉS :

La SELARL [D] ET ASSOCIES MANDATAIRES JUDICIAIRES,

Société d'exercice libéral à responsabilité limitée, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LA ROCHE SUR YON, sous le numéro 830 671 053,

Venant aux lieu et place de Maître [N] [D] suivant ordonnance du 30 août 2017,es qualité de Liquidateur Judiciaire de la société SEG SAMRO suivant jugement du Tribunal de Commerce de LA ROCHE SUR YON en date du 23 octobre 2012, SAS ayant son siège sis Route de Niort, ZI à 85200 FONTENAY LE COMTE, immatriculée au RCS de LA ROCHE SUR YON sous le n° 305 836 280, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège,

52-56 rue Molière

85000 LA ROCHE SUR YON

représenté par Me Josette DAUPHIN de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et par Me Stéphane MIGNE de la SAS BDO AVOCATS ATLANTIQUE, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON, plaidant

SAS TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER

(anciennement dénommée société ECHINARD

ET FAURE) SAS immatriculée au RCS de ROMANS sous le n° 435 780 143, dont le siège social est situé à SAINT VALLIER (26240) 31 avenue du Québec, représentée par son dirigeant en exercice domicilié en cette qualité audit siège

31 Avenue du Québec

26240 SAINT VALLIER

SAS XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE

société par actions simplifiée au capital de 50.000.000 €, immatriculée au RCS de ROMANS sous le n°386 220 123, représentée par son dirigeant en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

1208 Route des Pierrelles

26240 BEAUSEMBLANT

SNC XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE

SNC immatriculée au RCS de ROMANS sous le n° 329 414 858, dont le siège social est situé à BEAUSEMBLANT (26240) 1208 route des Pierrelles, représentée par son dirigeant en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

1208 Route des Pierrelles

26240 BEAUSEMBLANT

représentées par Me Pascale MODELSKI de la SELARL EYDOUX MODELSKI, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et par Me Stéphane CHOUVELLON de la SAS IMPLID AVOCATS ET EXPERTS COMPTABLES, avocat au barreau de LYON, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Pierre FIGUET, Président,

Mme Marie-Pascale BLANCHARD, Conseiller,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Frédéric STICKER, Greffier.

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 Février 2022

Mme FIGUET, Présidente, a été entendue en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour, après prorogation du délibéré.

EXPOSE DU LITIGE

La société ND LOCATION achetait des camions neufs à la société SEG SAMRO et lui revendait des véhicules d'occasion par l'intermédiaire de la société ECHINARD ET FAURE.

Par jugement du 23 octobre 2012, le tribunal de commerce de la Roche sur Yon a prononcé la résolution du plan de redressement de la société SEG arrêté le 1er décembre 2010, ouvert une procédure de liquidation judiciaire et désigné Me [N] [D] en qualité de liquidateur.

La poursuite d'activité a été autorisée jusqu'au 23 janvier 2013 et la SELARL AJIRE a été désignée en qualité d'administrateur judiciaire.

Par jugement du 4 janvier 2013, le tribunal de commerce de la Roche sur Yon a arrêté le plan de cession de la société SEG au profit de la société TROUILLET 85, la cession portant sur les actifs corporels et incorporels, les stocks non gagés et les encours avec prise de jouissance au 5 janvier 2013.

Par jugement en interprétation du 30 octobre 2013, le tribunal de commerce de la Roche sur Yon a dit :

- que sur la notion d'encours repris, il faut entendre ' les fabrications non terminées à la date de la cession (avant la date d'entrée en jouissance fixée au 5 janvier 2013 à 00 heure) qui ont nécessité une prestation postérieure à la cession par le cessionnaire (comprenant ainsi achat matières premières main d'oeuvre, convoyage, sous-traitance),

- que seule la facturation des véhicules à la date de la cession (avant la date d'entrée en jouissance fixée au 5 janvier 2013 à 00 heure) affectés à un client et dont la livraison n'a engendré aucune prestation de la part du cessionnaire reste acquise à la procédure.

Il a également désigné Monsieur [S] en qualité d'expert avec pour mission de valoriser les encours, les stocks et les engagements fournisseurs afin d'en faciliter la répartition et leurs charges devant revenir à la procédure et au cessionnaire.

L'expert a déposé son rapport en l'état le 27 août 2014.

Par lettre recommandée du 10 janvier 2013, le liquidateur de la société SEG a mis en demeure la société ECHINARD et FAURE de lui régler la somme de 199.050,72 € correspondant à 8 factures du 30 novembre 2012 et une facture du 20 décembre 2012.

Par courrier du 4 février 2013, la société ECHINARD et FAURE a indiqué à Me [D] avoir réglé la facture du 20 décembre 2012 et avoir obtenu des avoirs le 31 décembre 2012 ayant annulé les factures du 30 novembre 2012.

Par courrier du 22 novembre 2017, l'administrateur judiciaire a indiqué au liquidateur judiciaire ne pas avoir émis d'avoirs.

Le 10 février 2016, la société TROUILLET a obtenu du juge du tribunal de commerce de Romans sur Isère une ordonnance enjoignant à la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE de payer la somme de 198.918,72 € représentant huit factures n° T85/136 à T85/143 en date du 31 janvier 2013 émises à l'encontre de la société ND LOCATION.

Sur l'opposition formée le 3 mars 2016 par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTION et la mise en cause forcée les 9 et 14 novembre 2016 par la société XPO HOLDING SOLUTION EUROPE de la société ECHINARD ET FAURE et de Maître [D], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SEG SAMRO, le tribunal de commerce de ROMANS SUR ISÈRE a, par jugement contradictoire en date du 13 juin 2018:

- accueilli l'opposition de la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE comme bien fondée,

- infirmé l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016,

- condamné la société ECHINARD ET FAURE à payer à la société SEG SAMRO, représentée par Maître [D], la somme de 199.050,72 euros outre intérêts au taux contractuel de 1,5 fois le taux d'intérêt légal à compter du 30 novembre 2012 correspondant aux factures n° 112400 à 112407 en date du 30 novembre 2012,

- dit qu'il n'y a pas lieu d'appliquer l'article 1154 du code civil,

- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ni à exécution provisoire,

- rejeté toutes autres demandes,

- condamné la SAS TROUILLET 85 aux dépens.

Aux termes de sa motivation, le tribunal a considéré que les encours repris par la société TROUILLET 85 portaient sur les fabrications non terminées à la date de la cession; que les véhicules, objets des factures, n'entraient pas dans la catégorie des encours cédés à la société TROUILLET 85 et qu'ils restaient donc acquis à la procédure. Sur la demande reconventionnelle de Me [D] à l'encontre de la société ECHINARD ET FAURE, le tribunal a retenu que les avoirs, au demeurant non produits par cette société, ne pouvaient avoir aucun effet dès lors qu'à la date de leur émission, seul l'administrateur judiciaire avait le pouvoir de les émettre et que celui-ci réfute une telle émission.

Par déclaration reçue au greffe le 3 septembre 2018, la SAS TROUILLET 85 a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté l'exécution provisoire en intimant

- Maître [D], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SEG SAMRO

- la société ECHINARD ET FAURE

- les sociétés XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE et SNC XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE.

Suivant ordonnance juridictionnelle du 23 mai 2019, la présidente chargée de la mise en état a déclaré la société TROUILLET 85 recevable en son appel notamment en ce qu'il est dirigé contre Me [D], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SEG.

Par ordonnance du 23 octobre 2020, il a été mis fin à la mission de médiation organisée avec l'accord des parties par ordonnance du 4 octobre 2019.

Par ordonnance juridictionnelle du 30 septembre 2021, la présidente chargée de la mise en état a débouté la société TROUILLET 85 de sa demande de sursis à statuer dans l'attente d'une décision irrévocable quant à la procédure engagée par la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE contre la société TROUILLET 85 devant le tribunal de commerce de La Roche sur Yon en restitution du montant payé par elle.

Prétentions et moyens de la société TROUILLET 85

Dans ses dernières conclusions déposées le 27 janvier 2022, la société TROUILLET 85 demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de ROMANS SUR ISERE en ce qu'il a :

*accueilli « l'opposition de la Société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE» (sic) comme bien fondée,

*infirmé l'injonction de payer rendue par le président du tribunal de commerce en date du 10 février 2016 sous le numéro 2016 IP 208,

* dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 1154 du code civil,

* dit qu'il n'y pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

* rejeté toutes autres demandes,

* liquidé les dépens visés à l'article 701 du code de procédure civile à la somme de 64,23 € H.T. et de 12,85 € de T.V.A., soit la somme de 77,08 € T.T.C. pour être mis à la charge de la société TROUILLET 85, en sus des frais de la procédure d'injonction de payer ;

Statuant à nouveau,

A titre principal :

- prononcer l'irrecevabilité de l'action engagée par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE, comme n'ayant pas qualité ni intérêt à former opposition de l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016, ayant condamné la seule société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE,

A titre subsidiaire :

- dire et juger non fondée l'opposition formée à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer rendue par le président du tribunal de

commerce de ROMANS SUR ISERE en date du 10 février 2016 sous le numéro 2016 IP 2018,

- confirmer l'ordonnance d'injonction de payer rendue par le président du tribunal de commerce de ROMANS SUR ISERE en date du 10 février 2016 sous le n°2016 IP 208,

- condamner la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE à payer à la société TROUILLET 85 la somme de 198.918,72 € outre intérêts au taux légal depuis la signification de l'ordonnance d'injonction de payer soit le 29 février 2016 en deniers ou quittance,

- condamner les sociétés XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE, XPO HOLDING TRANSPORTS SOLUTIONS EUROPE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER, également toute autre partie succombant, à payer solidairement à la société TROUILLET 85 la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- condamner les sociétés XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE, XPO HOLDING TRANSPORTS SOLUTIONS EUROPE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER, également toute autre partie succombant, à payer solidairement à la société TROUILLET 85 la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter les sociétés XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE, XPO HOLDING TRANSPORTS SOLUTIONS EUROPE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER et Maître [D], es qualités, de l'intégralité de leurs demandes,

- condamner les sociétés XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE, XPO HOLDING TRANSPORTS SOLUTIONS EUROPE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER, également toute autre partie succombant solidairement aux dépens de l'instance comprenant les frais de la procédure d'injonction de payer, les dépens d'appel étant distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Elle expose :

- que la société ND Location est devenue la société XPO Transport Location France tandis que la société NDT est devenue la société XPO Holding Transport Solution Europe,

- que l'ordonnance d'injonction de payer a été rendue à l'encontre de la XPO Transport Location France,

- que c'est la société XPO Holding Transport Solution Europe qui a fait opposition à l'ordonnance d'injonction de payer alors qu'elle n'avait pas qualité, ni intérêt à le faire,

- qu'elle a soutenu à plusieurs reprises et de façon erronée qu'elle venait aux droits de la société ND LOCATION,

- qu'au demeurant, c'est bien la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE qui a payé spontanément le 27 décembre 2019 à la société TROUILLET 85 les factures établies à son encontre,

- que la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE n'a jamais fait opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016 qui se trouve donc définitive à son encontre,

- que la procédure a été ainsi suivie sur une opposition faite par une personne morale qui n'avait pas qualité, ni intérêt à agir, car non concernée par l'ordonnance d'injonction de payer,

- qu'il semble que la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE n'a jamais participé aux débats, le tribunal de commerce de Romans sur Isère ne l'ayant apparemment mentionnée en entête du jugement du 13 juin 2018 uniquement car elle était la société condamnée au titre de l'injonction de payer,

- que l'opposition formée par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016 est irrecevable.

Subsidiairement sur le fond, la société TROUILLET 85 fait valoir :

- qu'aux termes du jugement du 4 janvier 2013, la société TROUILLET 85 a repris les engagements de la société SEG SAMRO pris à l'égard des clients antérieurement à la date d'entrée en jouissance donc les ventes conclues pour des véhicules non fabriqués, non finalisés et non livrés - les encours - des véhicules commandés et vendus à finaliser pour livraison,

- qu'elle a donc repris les commandes de véhicules que la société ND LOCATION avait passées auprès la société ECHINARD ET FAURE qui, elle-même les avait commandés à la société SEG SAMRO; qu'il s'agit des 8 véhicules facturés en avance par la société SEG, objets des factures T85/000136 à T85/000143 demeurées impayées,

- que les véhicules facturées par la société TROUILLET 85 ont été terminés par elle et livrés par elle en mars 2013 à la société ND LOCATION, étant précisé que la société ECHINARD ET FAURE n'était plus distributeur depuis le plan de cession,

- que la société ND LOCATION a accepté la livraison sans réserve,

- qu'il existait donc bien un contrat de vente verbal transféré par la cession des encours que la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE n'a jamais remis en question et qui vient s'ajouter au fait que la société TROUILLET 85 a repris les engagements de la société SEG SAMRO,

- que la réalité de la relation contractuelle avec la société ND LOCATION est prouvée et a été visée par l'expert judiciaire; que la société TROUILLET a d'ailleurs été payée,

- que sur la qualification d'encours, la preuve des prestations postérieures à la reprise est rapportée de façon précise par le tableau établi par l'expert judiciaire; qu'en outre, les fiches de suivi et d'analyse des temps font apparaître que la société TROUILLET est intervenue sur les véhicules postérieurement au 5 janvier 2013,

- que ces interventions postérieures à l'entrée en jouissance font entrer les véhicules dans la catégorie des encours qui reviennent exclusivement au cessionnaire, la société TROUILLET, et non pas à Me [D], es qualité,

- que la société SEG n'avait plus aucun droit quant à la facturation établie par elle au mois de novembre 2012 sur les 8 véhicules en raison du jugement de cession du 4 janvier 2013 et du jugement interprétatif du 30 octobre 2013 ayant caractérisé les encours, les droits sur les véhicules/remorques en cours de fabrication ayant été cédés à la société TROUILLET 85 par jugement de cession,

Sur la demande formée par Me [D], elle fait remarquer :

- que celui-ci n'explique pas pourquoi il n'a jamais réclamé la somme de 198.918,72 € après le paiement partiel de 132 € ensuite de sa mise en demeure du 10 janvier 2013 qui portait sur la somme de 199.050,72 €,

- qu'il ne rapporte pas la preuve de la livraison des véhicules par la société SEG,

- que les sociétés XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE, SNC XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER (anciennement société ECHINARD ET FAURE) n'ont pu utiliser les véhicules au mois de novembre 2012 et décembre 2012 puisque leur réalisation n'était pas achevée et leur livraison non effectuée à cette date,

- que le liquidateur n'a pas contesté le jugement du 30 octobre 2013 ayant défini la notion d'encours et ne justifie pas avoir réclamé le paiement des véhicules postérieurement au jugement du 30 octobre 2013,

- qu'il a seulement profité de l'opposition de la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTION EUROPE et de l'appel en cause des 9 et 14 novembre 2016 pour obtenir la condamnation de la société ECHINARD ET FAURE au paiement des factures,

- que les factures ne sont pas causées, étant précisé que l'établissement d'une facture ne prouve pas son bien fondé, ni sa justification,

- que Me [D] ne peut pas sérieusement contester les pièces retenues par l'expert dans son rapport, la validité des pièces anciennes de la société TROUILLET 85 qui n'ont donc pas pu être établies pour les besoins de la cause, la réalité des cartes grises versées aux débats par la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE.

Par ailleurs, elle relève que l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 23 mai 2019a déclaré recevable son appel à l'encontre de Me [D] qui n'a pas déféré cette décision devant la cour; que cette décision a autorité de la chose jugée au principal de sorte que Maître [D] est irrecevable à contester devant la cour la recevabilité de l'appel.

Sur sa demande de dommages et intérêts, elle indique que les sociétés intimées tentent de complexifier à outrance une situation qui est pourtant d'une simplicité déconcertante; que la société TROUILLET 85 souffre du préjudice découlant de la résistance abusive des sociétés XPO à reconnaître son droit à paiement et de la demande abusive et non fondée de Maître [D].

Prétentions et moyens de la SELARL [D] es qualité de liquidateur judiciaire de la société SEG SAMRO

Dans ses dernières conclusions déposées le 18 janvier 2022, la SELARL [D] es qualité de liquidateur judiciaire de la société SEG SAMRO demande à la cour de :

- dire et juger l'appel de la société TROUILLET 85 mal fondé,

- débouter la société TROUILLET 85 de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris en l'ensemble de ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts,

- réformer le jugement de ce chef et statuant à nouveau,

- ordonner la capitalisation des intérêts échus par application des dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner tout succombant à payer à la SELARL [D] ET ASSOCIES MANDATAIRES JUDICIAIRES représentée par Maître [X] [D] es qualité une somme de 10.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner tout succombant aux entiers dépens d'instance et d'appel dont distraction au profit de la SELARL DAUPHIN MIHAJOLVIC, représentée par Maître Dejan MIHAJOLVIC, pour ceux dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La SELARL [D] es qualité fait remarquer :

- qu'elle n'a formé aucune demande contre la société TROUILLET 85 et que celle-ci est donc mal fondée à conclure au débouté de la SELARL [D] de ses demandes,

- que les développements de la société TROUILLET 85 sur l'irrecevabilité de l'opposition à injonction de payer régularisée par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTION EUROPE sont sans incidence sur les demandes que la SELARL [D] forme, étant relevé qu'elle a été assignée devant le tribunal de commerce de ROMANS SUR ISERE par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTION par acte du 9 décembre 2016, la société ECHINARD ET FAURE contre laquelle elle a formulé ses demandes ayant été assignée par acte du même jour,

- que sa créance n'est pas prescrite, le délai de 5 ans courant à compter de l'émission des factures de la société SEG en date du 30 novembre 2012 ayant été interrompu par des conclusions adressées le 15 mai 2017, des conclusions adressées le 12 octobre 2017 et des conclusions adressées le 30 novembre 2017,

- que la société ECHINARD et FAURE ne peut s'opposer au paiement des factures au motif de prétendus avoirs émis par la société SEG, celle-ci étant incapable juridiquement d'émettre de tels avoirs, seuls le liquidateur ou l'administrateur judiciaires en ayant le pouvoir,

- que les organes de la procédure n'ont pas émis de tels avoirs,

- que les avoirs produits par les sociétés XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE, SNC XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER sont curieusement libellés à l'ordre de la société TROUILLET et ne correspondent pas à ceux évoqués par la société ECHINARD ET FAURE dans son courrier du 4 février 2012,

- que la société TROUILLET 85 n'était pas fondée à émettre des avoirs au profit de la société ECHINARD ET FAURE et à facturer par la suite la société ND LOCATION, les commandes des remorques ayant été passées par la société ECHINARD ET FAURE et non pas par la société ND LOCATION,

- que l'émission d'avoirs et de factures par la société TROUILLET 85 n'est donc pas causée ; que celle-ci émet plusieurs factures pour les mêmes numéros d'affaires,

- que seule la société ECHINARD ET FAURE est redevable envers la société SEG représentée par son liquidateur de la somme de 199.050,72 €,

- qu'au demeurant, la société ECHINARD ET FAURE en ayant sollicité la compensation reconnaît la réalité de sa créance,,

- que les sociétés XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE, SNC XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER utilisent le matériel depuis novembre 2012 sans bourse délier.

Sur les sommes réclamées par la société TROUILLET 85, la SELARL [D], es qualité, fait observer :

- que curieusement, les éléments versées dans la présente procédure pour justifier des interventions de la société TROUILLET 85 avaient été vainement sollicités par l'expert judiciaire qui a dû déposer son rapport en l'état; que ces documents internes sont parfaitement invérifiables ; que l'expert s'est interrogé sur la véracité des interventions invoquées par la société TROUILLET 85; que certaines interventions identifiées par l'expert ne font pas partie des fiches d'interventions versées aux débats ;

- que la société TROUILLET 85 a facturé la société ND LOCATION le 31 janvier 2013 alors que les livraisons ont eu lieu le 11 mars 2013.

Elle conclut par ailleurs à l'infirmation de la décision s'agissant de la capitalisation des intérêts, ceux-ci ayant couru depuis plus d'un an.

Prétentions et moyens des sociétés XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE, SNC XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER

Dans leurs dernières conclusions déposées le 3 janvier 2022, elles demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré fondée l'opposition formée par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTION EUROPE à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer rendue par le président du tribunal de commerce de ROMANS SUR ISERE le 10 février 2016,

- débouter la société TROUILLET de sa demande en paiement,

- subsidiairement, dire et juger que les intérêts qui seraient appliqués ne pourraient être comptabilisés qu'à compter de la date du jugement entrepris,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts présentée par Maître [D], ès qualité,

- le réformant pour le surplus, débouter Me [D], ès qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la société SEG, de l'intégralité de ses demandes,

En toutes hypothèse,

- condamner in sodidum la société TROUILLET 85 ainsi que Maître [D] es qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la société SEG à payer à la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE, la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTION EUROPE ainsi qu'à la société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER (anciennement dénommée société ECHINARD ET FAURE) la somme de 5.000 € chacune au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in sodidum la société TROUILLET 85 ainsi que Maître [D] es qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la société SEG aux entiers dépens de première instance et d'appel.

S'agissant de l'irrecevabilité de l'opposition soulevée par la société TROUILLET 85, elles soulignent :

- qu'en application de l'article 910-4 du code de procédure civile, les parties doivent présenter dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910 l'ensemble de leurs prétentions sur le fond à peine d'irrecevabilité relevée d'office,

- que la société TROUILLET invoque après 5 jeux d'écritures une irrecevabilité tenant à un évènement antérieur à l'introduction de la procédure de première instance,

- que ce moyen doit être déclaré irrecevable,

- qu'en tout état de cause, c'est par l'effet d'une erreur purement matérielle que l'opposition formée à l'ordonnance d'injonction de payer a été régularisée sur un document à en-tête de la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTION EUROPE et non de la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE,

- qu'il n'existe toutefois pas d'ambiguïté dès lors qu'il est fait expressément référence à l'ordonnance d'injonction de payer rendue par le président du tribunal de commerce de ROMANS-SUR-ISERE le 29 février 2016 et que la mention de la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE figure dans les références de cette lettre.

Sur le fond, elles relèvent :

- que si le protocole signé entre le groupe SAMRO et le groupe NORBERT DENTRESSANGLE le 26 janvier 2012 constitue un accord cadre comportant les conditions générales de commercialisation de véhicules neufs, il ne vaut pas commande des véhicules,

- que l'acceptation sans réserve de la livraison des véhicules ne saurait en aucun cas s'interpréter en une reconnaissance par la société XPO TRANSPORT, d'une quelconque dette à l'égard de la société TROUILLET,

- que les véhicules dont la livraison n'a engendré aucune prestation de la part de la société TROUILLET restent acquis à la procédure ce qui implique que le prix desdits véhicules revienne à la liquidation judiciaire,

- que la société XPO TRANSPORT, et, avant elle, la société ND LOCATION, n'a jamais prétendu échapper à tout paiement,

- que toutefois, elle n'entend pas régler deux fois une seule et même prestation, ensuite de la promptitude de la société TROUILLET 85, d'une part, et de Maître [D], ès qualité, d'autre part, à tenter d'exploiter les imprécisions du jugement de cession et l'incomplétude du rapport d'expertise judiciaire prématurément déposé en raison d'un défaut de consignation de la part de la société TROUILLET 85,

- qu'à ce jour, aucune réponse n'a pu être apportée sur l'identité du créancier des sommes faisant l'objet des factures l'expert désigné à cet effet n'ayant pu accomplir sa mission en l'absence de versement de la provision,

- que c'est par erreur que la société XPO TRANSPORT a adressé un paiement litigieux à la société TROUILLET 85 alors même que c'est la société ECHINARD ET FAURE qui avait été condamnée à procéder au paiement des factures entre les mains de Maître [D],

- que la société TROUILLET 85 ne pourra qu'être déboutée de sa demande de paiement,

- que la demande présentée par la SELARL [D] à l'encontre de la société ECHINARD ET FAURE (désormais TRUCK SOLUTIONS SAINT VALLIER) est prescrite,

- que la société ECHINARD ET FAURE n'est pas juge de la validité des avoirs lui ayant été adressés,

- qu'aucun devis ou bon de commande de la société SAMRO n'a jamais été accepté par la société ECHINARD ET FAURE pour les matériels objets des factures ayant donné lieu à l'émission desdits avoirs,

- que ces factures ont été émises dans la plus grande précipitation, par la société SAMRO, entre l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire et le jugement de liquidation, sans accord sur un quelconque bon de commande ou signature d'un bon de livraison,

- que la société ECHINARD ET FAURE n'a d'ailleurs découvert l'existence de ces factures (dont 4 d'entre elles comportent des erreurs de numéro d'identification des matériels), qu'à réception de la mise en demeure de Maître [D], le 11 janvier 2013,

- qu'il ne peut être fait droit à la demande de Me [D],

- qu'en tout hypothèse, la société ECHINARD ET FAURE (désormais société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER) est a minima fondée à solliciter la compensation des sommes qui lui sont réclamées par Maître [D] es qualité avec celles qui lui sont dues dans le cadre de la revendication qu'elle a effectuée de la propriété de camions qui avaient été cédés à la société SEG avant l'ouverture de la procédure collective, sans faire l'objet du moindre paiement,

- que cette demande subsidiaire ne constitue aucunement une reconnaissance de dette.

Pour le surplus des demandes et des moyens développés, il convient de se reporter aux dernières écritures des parties en application de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction est intervenue le 3 février 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

1) Sur la recevabilité de l'opposition formée à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016

Les sociétés XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE, SNC XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE et TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER soulèvent dans la partie 'discussion' de leurs conclusions l'irrecevabilité sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile de la demande tendant à voir prononcer l'irrecevabilité de l'action engagée par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE, comme n'ayant pas qualité ni intérêt à former opposition de l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016 ayant condamné la seule société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE.

Cette demande ne figure pas toutefois dans le dispositif de leurs conclusions. Or en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. La cour n'est donc pas saisie de cette prétention.

Par ailleurs, à considérer que la fin de non recevoir soulevée par la société TROUILLET constitue un moyen, comme allégué par les sociétés intimées, l'invocation de nouveaux moyens demeure autorisée dès lors que l'article 910-4 du code de procédure civile vise uniquement les prétentions sur le fond.

La cour doit donc apprécier la recevabilité de l'action de la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE et sa qualité et son intérêt à former opposition à l'ordonnance d'injonction de payer.

L'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016 a été rendue à l'encontre de la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE quartier des Pierrelles 26240 Beausemblant. Elle lui a été signifiée à sa personne par acte du 29 février 2016.

Le 3 mars 2016, la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE a formé opposition à cette ordonnance d'injonction de payer.

Les sociétés intimées ne peuvent sérieusement soutenir que c'est en raison d'une simple erreur matérielle tenant à l'utilisation d'un papier à entête au nom de la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE que l'opposition apparaît comme étant faite au nom de la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE.

En effet, dans ses conclusions devant le tribunal de commerce de Romans sur Isère, la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE s'est présentée comme étant demanderesse à l'opposition. Elle a indiqué venir aux droits de la société ND LOCATION. Elle a assigné en cette qualité Me [N] [D] et la société ECHINARD ET FAURE devant le tribunal de commerce de Romans sur Isère. Par ailleurs, les écritures échangées entre les parties le sont avec la seule société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE.

C'est donc volontairement que la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE a formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016.

Or seul le débiteur peut s'opposer à l'ordonnance portant injonction de payer.

Le débiteur étant la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE, la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE n'avait pas qualité, ni au demeurant intérêt à faire opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016.

La cour observe en outre que c'est bien la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE qui vient aux droits de ND LOCATION et non pas la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE.

Dès lors, c'est à tort que le tribunal de commerce de Romans sur Isère a accueilli l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016, étant relevé que contrairement à ce qu'a mentionné le tribunal, l'opposition a été effectuée par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE et non pas par la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE.

Cette opposition doit être déclarée irrecevable.

En l'absence d'opposition recevable, après apposition de la formule exécutoire, l'ordonnance produit tous les effets d'un jugement contradictoire. Il n'y a donc pas lieu à confirmation de l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016 ou au prononcé d'une condamnation à payer la somme de 198.918,72 €.

Au demeurant, cette somme de 198.918,72 € a été réglée par la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE le 27 décembre 2019.

2) Sur la demande en paiement formée par la SELARL [D] ET ASSOCIES venant au lieu et place de Me [D] es qualité de liquidateur de la société SEG SAMRO à l'encontre de la société ECHINARD ET FAURE devenue la société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER

Sur la prescription soulevée par la société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER (anciennement dénommée ECHINARD ET FAURE) s'agissant de la demande en paiement de factures émises le 30 novembre 2012, la cour relève que le liquidateur a formé cette demande par conclusions adressées le 15 mai 2017 à la société ECHINARD ET FAURE. Dès lors, cette demande n'est pas prescrite.

Sur le fond, il résulte des dispositions de l'article 1315 (ancien du code civil) devenu 1353 du code civil qu'il appartient à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier du fait qui a produit l'extinction de son obligation. En la cause, il appartient ainsi à la SELARL [D] ET ASSOCIES es qualité de liquidateur de la société SEG SAMRO de prouver l'obligation de la société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER à lui payer la somme de 199.050,72 €.

La SELARL [D] ET ASSOCIES verse aux débats huit factures datées du 30 novembre 2012 d'un montant total de 198.918,72 € émises par la société SEG SAMRO à l'adresse de la société ECHINARD ET FAURE. Il n'est produit ni bons de commandes, ni bons de livraison ou de réception des matériels visés par la société ECHINARD ET FAURE.

Ces factures portent sur le même matériel que celui facturé à la société ND LOCATION par la société TROUILLET le 31 janvier 2013 pour les mêmes montants au moyen de 8 factures.

Par jugement en interprétation du 30 octobre 2013, le tribunal de commerce de la Roche sur Yon a dit :

- que sur la notion d'encours repris, il faut entendre ' les fabrications non terminées à la date de la cession (avant la date d'entrée en jouissance fixée au 5 janvier 2013 à 00 heure) qui ont nécessité une prestation postérieure à la cession par le cessionnaire (comprenant ainsi achat matières premières main d'oeuvre, convoyage, sous-traitance),

- que seule la facturation des véhicules à la date de la cession (avant la date d'entrée en jouissance fixée au 5 janvier 2013 à 00 heure) affectés à un client et dont la livraison n'a engendré aucune prestation de la part du cessionnaire reste acquise à la procédure.

Si l'expert missionné par le jugement du 30 octobre 2013 a déposé son rapport en l'état, il a néanmoins réalisé un tableau provisoire des encours avec ses commentaires sur de nombreuses factures dont les factures litigieuses dont il relève qu'elles ont fait l'objet d'une double facturation, une fois par la société SEG et une fois par la société TROUILLET.

S'agissant de la facture SEG n° 112400 correspondant à la facture TROUILLET T85/136, l'expert indique que le matériel a été livré le 11 mars 2013 et qu'une prestation relative à la carosserie est intervenue en janvier 2013. La fiche de suivi du véhicule remplie par la société TROUILLET mentionne que cette intervention a eu lieu le 30 janvier 2013.

S'agissant de la facture SEG n° 112401 correspondant à la facture TROUILLET T85/137, l'expert note que le véhicule a été livré le 11 mars 2013 et qu'une prestation relative au plancher a eu lieu le 14 janvier 2013. La fiche de suivi du véhicule fait apparaître des interventions sur le plancher, les équipements et l'électricité les 9, 10, 11 et 14 janvier 2013.

S'agissant de la facture SEG n° 112402 correspondant à la facture TROUILLET T85/138, l'expert précise que le véhicule a été livré le 7 mars 2013 après des finitions effectuées en janvier 2013. La fiche de suivi du véhicule note la date du 30 janvier 2013 au titre des finitions.

S'agissant de la facture SEG n° 112403 correspondant à la facture TROUILLET T85/139, l'expert fait état d'une livraison le 11 mars 2013 et d'une intervention sur l'hydraulique les 16 et 17 janvier 2014 (sic) qu'il convient de rectifier en 2013. La fiche de suivi du véhicule mentionne des prestations les 15 et 22 janvier 2013.

S'agissant de la facture SEG n° 112404 correspondant à la facture TROUILLET T85/140, l'expert mentionne une livraison le 11 mars 2013 après des finitions en janvier 2013. La fiche de suivi fait état de plusieurs interventions sur le véhicule relatives à la peinture le 22 janvier 2013, au plancher les 16 et 17 janvier 2013 et à l'équipement les 9 et 5 janvier 2013.

Concernant la facture SEG n° 112405 correspondant à la facture TROUILLET T85/141, l'expert fait état d'une livraison le 11 mars 2013 après la pose d'un plancher le 14 janvier 2014 (sic) qu'il convient de rectifier en 2013. La fiche de suivi du véhicule mentionne des prestations concernant l'hydraulique le 14 janvier 2013 et le plancher et l'électricité le 16 janvier 2013.

Concernant la facture SEG n° 112406 correspondant à la facture TROUILLET T85/142, l'expert indique une livraison le 11 mars 2013 après des finitions effectuées en janvier 2013. La fiche de suivi précise les dates d'interventions, à savoir les 14, 15, 16 et 17 janvier 2013 pour l'hydraulique et l'électricité et les 18 et 20 janvier 2013 pour le plancher.

Enfin concernant la facture SEG n° 112406 correspondant à la facture TROUILLET T85/142, l'expert mentionne une livraison le 11 mars 2013 après une prestation sur l'hydraulique survenue les 16 et 17 janvier 2013. La fiche de suivi mentionne des prestations de main d'oeuvre relatives à la peinture le 23 janvier 2013, à l'hydraulique les 16 et 17 janvier 2013, au plancher le 21 janvier 2013 et à l'électricité le 22 janvier 2013.

Rien ne permet de considérer que les fiches de suivi des véhicules ne sont pas probantes dès lors qu'elles sont particulièrement détaillées s'agissant des différentes interventions réalisées, du nom des intervenants et des temps de main d'oeuvre et se trouvent corroborées par les constatations de l'expert.

Il résulte de ces éléments que les factures dont la SELARL [D] ET ASSOCIES sollicite le règlement sont relatives à des livraisons de véhicule ayant engendré de la part du cessionnaire, à savoir la société TROUILLET 85, des prestations de main d'oeuvre postérieurement à la date de cession fixée au 5 janvier 2013.

Cette facturation n'est donc pas acquise à la procédure et constitue un encours repris par la société TROUILLET.

La SELARL [D] ET ASSOCIES fait remarquer que la facturation par la société TROUILLET 85 est intervenue le 31 janvier 2013 avant même la livraison. La cour relève que cette facturation a eu lieu après les prestations de main d'oeuvre effectuées sur les véhicules. La SELARL [D] ET ASSOCIES est au demeurant mal venue à faire état de cet élément alors même qu'elle réclame le paiement de factures éditées le 30 novembre 2012 pour des véhicules qui ont fait l'objet de prestations postérieurement au 5 janvier 2013 et d'une livraison plusieurs mois après l'émission des factures.

Par ailleurs, la SELARL [D] ET ASSOCIES ne peut considérer que la société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER (anciennement ECHINARD ET FAURE) reconnaît lui devoir une somme alors qu'elle conclut au débouté de sa demande et n'évoque que subsidiairement la possibilité d'une compensation.

Enfin, la SELARL [D] ET ASSOCIES est mal fondée à arguer que sa demande en paiement est la contrepartie de l'utilisation par la société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER des matériels livrés alors que le client était la société ND LOCATION, désormais XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE.

Les développements tant sur les avoirs que sur la compensation sont inopérants dès lors que la SELARL [D] ET ASSOCIES es qualité n'est pas fondée à réclamer le règlement de factures qui ont été cédées à la société TROUILLET 85.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société ECHINARD ET FAURE à payer la somme de 199.050, 72 € à Me [D] es qualité de liquidateur de la société SEG SAMRO.

La SELARL [D] ET ASSOCIES, es qualité, sera déboutée de l'intégralité de ses demandes.

3) Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

Compte tenu de la complexité des relations entre les parties, la société TROUILLET 85 ne caractérise pas une faute des sociétés intimées de nature à justifier l'allocation de dommages et intérêts. Elle sera déboutée de cette demande.

4) Sur les mesures accessoires

La société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE et la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE qui succombent seront condamnées aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE pour ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

Elles seront condamnées à payer la somme de 6.500 € à la société TROUILLET 85 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En équité, les autres demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement rendu le 13 juin 2018 en toutes ses dispositions critiquées.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare irrecevable l'opposition formée par la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016.

Dit qu'en l'absence d'opposition recevable, après apposition de la formule exécutoire, l'ordonnance d'injonction de payer du 10 février 2016 produit tous les effets d'un jugement contradictoire.

Déclare les demandes formées par la SELARL [D] ET ASSOCIES venant au lieu et place de Me [D] es qualité de liquidateur de la société SEG SAMRO à l'encontre de la société ECHINARD ET FAURE devenue la société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER non prescrites.

Mais sur le fond, déboute la SELARL [D] ET ASSOCIES venant au lieu et place de Me [D] es qualité de liquidateur de la société SEG SAMRO de ses demandes formées à l'encontre de la société ECHINARD ET FAURE devenue la société TRUCKS SOLUTIONS SAINT VALLIER.

Déboute la société TROUILLET 85 de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Condamne la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE et la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE pour ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

Condamne la société XPO HOLDING TRANSPORT SOLUTIONS EUROPE et la société XPO TRANSPORT LOCATION FRANCE à payer la somme de 6.500 € à la société TROUILLET 85 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les autres parties de leur demande formées au titre de de l'article 700 du code de procédure civile.

SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme DJABLI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18/03779
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;18.03779 ?
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