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08/12/2020 | FRANCE | N°18/03527

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 08 décembre 2020, 18/03527


N° RG 18/03527 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JURI


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N° Minute :


























































































































Copie exécutoire déliv

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la SELARL CABINET BALESTAS





Me Clémence GUERRY





SELARL DENIAU AVOCATS GRENOBLE











AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE GRENOBLE





1ERE CHAMBRE CIVILE





ARRÊT DU MARDI 08 DÉCEMBRE 2020











Appel d'un jugement (N° R.G. 14/03970)


rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE


en date du 05 juillet 2018


suivant déclaration d'appel du 03 Août 2018





APPELANTS :

...

N° RG 18/03527 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JURI

VL

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELARL CABINET BALESTAS

Me Clémence GUERRY

SELARL DENIAU AVOCATS GRENOBLE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 08 DÉCEMBRE 2020

Appel d'un jugement (N° R.G. 14/03970)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE

en date du 05 juillet 2018

suivant déclaration d'appel du 03 Août 2018

APPELANTS :

Monsieur X... E...

né le [...] à LA TRONCHE

de nationalité Française

chez Mme N..., [...]

[...]

LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES '[...] ' représenté par son syndic bénévole, Monsieur E... X...,

chez Mme N..., [...]

[...]

représentés par Me Yves BALESTAS de la SELARL CABINET BALESTAS, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉES :

LA SOCIÉTÉ RDVM inscrite au RCS de GRENOBLE sous le n° D 445384 217, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...]

[...]

représentée et plaidant par Me Clémence GUERRY, avocat au barreau de GRENOBLE, substituée par Me BERTHER, avocat au barreau de GRENOBLE

LA SOCIÉTÉ GENERALI IARD immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 552 062 663, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège [...]

[...]

représentée par Me LOCATELLI de la SELARL DENIAU AVOCATS GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE

LA SOCIÉTÉ F... prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...]

[...]

Défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Hélène COMBES, Président de chambre,

Madame Véronique LAMOINE, Conseiller,

Monsieur Frédéric DUMAS, Vice-président placé suivant ordonnance de délégation de la première présidente de la Cour d'appel de Grenoble en date du 17 juillet 2020

Assistés lors des débats de Mme Alice RICHET, Greffier

DÉBATS :

A l'audience publique du 26 octobre 2020, Madame LAMOINE, conseiller, a été entendue en son rapport.

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

* * * * * *

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

En avril 2003, la SCI RDVM a acquis un immeuble de deux étages plus combles situé [...] ) dont elle a entrepris, sans l'intervention d'un maître d'oeuvre, la rénovation consistant dans un re-conditionnement des appartements par abattage de toutes les cloisons existantes, ainsi qu'un aménagement des combles en habitation pour création d'un appartement en duplex niveaux 2 et 3.

La société [...] a réalisé les menuiseries extérieures.

Les appartements après rénovation (un au rez-de-chaussée, un au premier étage, un en duplex niveaux 2 et 3) ont été vendus par la SCI RDVM courant 2004 et 2005.

En avril 2008, M. E... et Melle O..., qui avaient acquis le 16 novembre 2005 l'appartement en duplex niveaux 2 et 3, ont fait une déclaration de sinistre à leur assureur de protection juridique en raison de désordres d'affaissement des planchers de leur logement.

Une réunion d'expertise amiable contradictoire a été diligentée sur place le 9 octobre 2008, l'expert constatant notamment un fléchissement important des sols des 2ème et 3ème étage.

Les propriétaires des trois appartements ainsi que le syndicat des copropriétaires ont obtenu en référé, le 13 août 2009, au contradictoire de la SCI RDVM et du propriétaire de l'immeuble contigu, la désignation d'un expert en la personne de M. V... qui a déposé son rapport définitif le 24 janvier 2013.

Par actes des 13 et 14 août 2014, ils ont assigné la SCI RDVM, ainsi que la SARL [...] et son assureur la société GENERALI devant le tribunal de grande instance de Grenoble pour voir obtenir leur condamnation solidaire à réparer les désordres et vices affectant l'immeuble.

Par jugement du 5 juillet 2018, le tribunal :

- a déclaré les demandeurs irrecevables en leurs actions dirigées tant contre la SCI RDVM que contre la SARL [...] et la SA GENERALI IARD,

- les a condamnés in solidum aux dépens comprenant les frais de référé et d'expertise et à payer à la SCI RDVM et la SA GENERALI IARD chacune la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration au Greffe en date du 3 août 2018, M. E... et le syndicat des copropriétaires de l'[...] ont, seuls, interjeté appel de ce jugement.

Par uniques conclusions notifiées le 26 octobre 2018, ils demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :

- déclarer leur action recevable sur le fondement de la garantie décennale,

- voir dire que la SCI RDVM et la SARL [...] avec son assureur la SA GENERALI IARD sont solidairement débiteurs de cette garantie de droit et les condamner à indemniser leurs préjudices de la manière suivante :

' pour le syndicat des copropriétaires :

- la somme de 124 068,95 € au titre des travaux réparatoires avec indexation selon l'indice BT 01,

- 4 000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

' pour M. E... :

- 7 140 € au titre des travaux et meubles,

- 10 000 € à parfaire ou à diminuer au titre du préjudice financier,

- 10 000 € au titre du préjudice de jouissance

- 2 000 € au titre du préjudice moral,

- 4 000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Ils réclament encore condamnation solidaire des intimés à leur payer la somme de 5 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Ils font valoir :

- que les vices de l'immeuble n'étaient pas apparents à la réception mais se sont révélés ultérieurement, par une déformation progressive du plancher de l'appartement E...,

- qu'il aurait fallu, pour les déceler lors de la livraison des appartements, monter sur le toit ce qui ne peut être demandé à un acheteur non professionnel,

- que l'expert n'a constaté l'assemblage défectueux de la charpente que par découpe du faux plafond,

- que le caractère apparent d'un défaut ne peut être opposé à un acheteur néophyte que si le défaut est évident et perceptible dans toute son ampleur,

- que la SCI RDVM est tenue de la responsabilité décennale comme venderesse d'un immeuble après transformation,

- que la société [...] a procédé à une modification de la structure de la charpente et est tenue de la même garantie décennale,

- que les désordres sont importants et rendent l'ouvrage impropre à sa destination puisqu'ils entraînent sa déformation et, à terme, un risque d'effondrement, ainsi qu'une absence d'étanchéité de la couverture et l'existence de ponts thermiques.

La SCI RDVM, par uniques conclusions notifiées le 25 janvier 2019, demande la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions.

A titre subsidiaire, elle demande l'instauration d'une contre-expertise, et un sursis à statuer dans l'attente.

À titre encore plus subsidiaire, elle conclut au rejet des demandes comme étant mal fondées.

Elle demande condamnation des appelants à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle invoque, au principal, l'irrecevabilité des demandes en raison du caractère apparent à la réception des désordres invoqués.

Subsidiairement, elle les prétend mal fondées au motif qu'ils ne rendraient pas l'ouvrage impropre à sa destination, et que les préjudices ne seraient pas établis.

La SA GENERALI IARD, par uniques conclusions notifiées le 31 décembre 2018, demande au principal la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré prescrite l'action dirigée contre elle en raison de la réception tacite des travaux intervenue le 21 novembre 2003.

Elle fait valoir, sur ce point, que l'expertise ordonnée en référé n'a pas interrompu cette prescription puisqu'elle-même n'a pas été assignée ni appelée à participer aux opérations d'expertise.

Subsidiairement, elle conclut au rejet des demandes, en faisant valoir que la police souscrite auprès d'elle par la société [...] n'a pris effet que le 1er janvier 2005 alors que les travaux en l'espèce ont commencé en 2003.

A titre infiniment subsidiaire, elle fait valoir, pour conclure encore au rejet des demandes, que les travaux de menuiseries extérieures réalisées par son assurée sont totalement étrangers aux désordres allégués tant par le syndicat des copropriétaires que par M. E....

En toute hypothèse, elle demande qu'il soit dit qu'elle ne saurait être tenue au-delà des limites de sa police, plafonds et franchises.

Elle demande encore condamnation du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] et de M. E... ou qui mieux le devra, à lui verser un somme de 3 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL [...], qui n'a pas constitué avocat, a été régulièrement citée à comparaître devant la cour le 12 novembre 2018 par acte remis à la personne de son gérant. Le présent arrêt sera réputé contradictoire en application des dispositions de l'article 474 du Code de Procédure Civile.

L'instruction a été clôturée par une ordonnance rendue le 15 septembre 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes dirigées contre la SARL [...] et la SA GENERALI IARD

Les appelants fondent leur demande sur la responsabilité décennale des constructeurs.

L'action qui en résulte doit être intentée dans les 10 ans à compter de la réception des travaux en application des dispositions de l'article 1792-4-3 du code civil.

En l'espèce, le tribunal a considéré à bon droit, au vu des éléments du dossier, que les travaux de réhabilitation entrepris par la SCI RDVM avaient fait l'objet d'une réception tacite le 21 novembre 2003, celle-ci s'étant manifestée par la prise de possession lors de laquelle la SCI RDVM n'a exprimé aucune contestation sur la qualité des travaux, et à la suite de laquelle elle a fait établir un diagnostic technique d'immeuble bâti puis commencé la commercialisation des appartements, l'ensemble de ces actes témoignant de sa volonté non équivoque de recevoir l'ouvrage.

C'est bien la date de réception des travaux qui doit être prise en compte pour apprécier si l'action des demandeurs, acquéreurs des appartements rénovés, dirigée contre la SARL [...] et son assureur GENERALI en leur qualité de constructeur, a été introduite dans le délai légal.

En l'espèce, l'assignation au fond contre la SARL [...] et son assureur a été délivrée le 13 août 2014 soit plus de dix ans après la réception intervenue tacitement le 21 novembre 2003.

L'assignation en référé délivrée le 25 juin 2009 n'a pas pu interrompre la prescription à l'égard de la SARL [...] ou de la SA GENERALI IARD, puisqu'elle n'était pas dirigée contre ces dernières mais contre la seule SCI RDVM et contre M. H..., propriétaire de l'immeuble contigu et dont les propres travaux de rénovation étaient suspectés d'avoir provoqué ou aggravé les désordres.

Dès lors, c'est à bon droit que le tribunal a déclaré irrecevables les demandes dirigées contre la SARL [...] et la SA GENERALI IARD, et le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.

Sur les demandes dirigées contre la SCI RDVM

En cause d'appel, les demandeurs ne fondent plus leur demande sur les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil à savoir la responsabilité du vendeur, mais uniquement sur celles des articles 1792 et suivants du même code à savoir la responsabilité décennale des constructeurs.

La SCI RDVM, qui a procédé, en l'espèce, à une rénovation lourde du bâtiment en vue de la revente puisque celle-ci a consisté, notamment, à abattre l'ensemble des cloisons et à rendre habitable le niveau "combles" qui ne l'était pas jusqu'alors, tout en assurant elle-même la maîtrise d'oeuvre, l'importance des travaux réalisés en employant des techniques de travaux du bâtiment permettant de les assimiler à la réalisation d'un ouvrage, est tenue de la responsabilité décennale des constructeurs en application des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil.

Le délai pour agir contre elle a commencé à courir du jour de la réception des travaux en application des dispositions de l'article 1792-4-3 du code civil, réception intervenue tacitement le 21 novembre 2003 ainsi qu'il a été développé au paragraphe précédent.

Contrairement à ce que soutient la SCI RDVM, l'assignation en référé aux fins d'expertise qui lui a été délivrée le 25 juin 2009 a bien interrompu la prescription en application des dispositions de l'article 2241 du code civil, dès lors que cette action avait un objet identique à celui de l'instance au fond introduite devant le tribunal à savoir obtenir l'indemnisation des préjudices résultant des vices et désordres affectant l'immeuble, peu important que le fondement invoqué alors ait été différent de celui aujourd'hui soutenu.

Il convient donc de vérifier si les conditions de la responsabilité décennale sont réunies s'agissant des différents désordres invoqués par les appelants.

La SCI RDVM, qui réclame l'instauration d'une contre-expertise, ne justifie pas suffisamment ses contestations techniques et sa demande à ce titre par la seule production aux débats d'une part d'un "Rapport de structure" établi par la société Soraetec accompagné de notes de calcul, ce rapport concernant, selon ses mentions, un immeuble situé "[...] " qui n'est pas celui concerné par le litige, d'autre part de documents techniques établis par M. G..., ingénieur ECL, transmis à l'expert sous forme de dires et auxquels celui-ci a répondu techniquement de façon circonstanciée et documentée, au besoin en réduisant les postes de certains devis de travaux de réfection.

La demande ainsi formée sera donc rejetée.

- charpente/couverture sur combles et complexe isolation/plafond en rampant

L'expert judiciaire a constaté la suppression, lors des travaux de rénovation, d'une contrefiche amont de l'arbalétrier Ouest, supprimée par sciage et remplacée par le même élément raccourci, placé plus haut et assemblé différemment.

Il en conclut que la nouvelle contrefiche ne reprend pas le point d'effort de compression significatif, que la demi-ferme Ouest a été modifiée et affaiblie, que ce défaut a modifié son fonctionnement en affaiblissant sa résistance, sa rigidité et sa stabilité, ce qui a entraîné un défaut de planéité notable de la moitié Ouest de la toiture.

Il ajoute que les faux plafonds mis en oeuvre ont créé une surcharge de nature à accentuer la flèche constatée.

Il précise encore qu'une panne de la travée Ouest présente une insuffisance de résistance et de rigidité résultant de la charge complémentaire du faux plafond isolant, qui dépasse le coefficient de sécurité vis-à-vis de la déformation prévu par les règles de construction, et nécessite un confortement.

L'expert note que le défaut de planéité de la toiture n'est apparent que si l'on monte inspecter la toiture, par au-dessus et ne pouvait être observé de l'intérieur compte-tenu de la présence du doublage isolant en sous-face.

Pour procéder à certaines des constatations ci-dessus, il a dû faire procéder à un sondage en plancher des combles et en plafond niveau 2 au droit de la ferme.

Dès lors, s'il indique que le défaut affectant la contrefiche était apparent dès la fin des travaux, il doit être considéré qu'il ne l'était pas dans toutes ses conséquences dommageables résultant de l'association avec la surcharge des faux plafonds.

S'agissant de la couverture, l'expert judiciaire a constaté son absence de garantie d'étanchéité et d'imperméabilité à la pluie par absence de mise en conformité lors de la rénovation, la pente du toit pour des tuiles de terre cuite à emboîtement posées sans écran pare-pluie n'étant pas conforme au DTU 40-21, en soulignant que ce défaut n'était pas apparent et n'avait été révélé que par les investigations d'expertise, la SCI RDVM n'en rapportant pas la preuve contraire.

Enfin, il a constaté une discontinuité de l'isolation notamment au droit des pannes, générant des ponts thermiques et favorisant des phénomènes de condensation en toiture néfastes à la bonne conservation des matériaux et à l'origine d'auréoles en plafond rampant dans la salle de bains et la chambre de l'appartement E....

Il note que ce défaut n'était pas apparent et n'a été visualisé que lors des investigations d'expertise en toiture du 21 mars 2011, la SCI RDVM n'en rapportant pas la preuve contraire.

Dès lors, l'action est recevable.

Il ressort des constatations de l'expert ainsi rappelées que l'ensemble de ces désordres rend l'ouvrage impropre à sa destination, l'expert ayant noté, s'agissant de la charpente et de la panne, une insuffisance de résistance et de rigidité dépassant le coefficient de sécurité vis-à-vis de la déformation prévu par les règles de construction, la couverture devant remplir son office d'imperméabilité à la pluie, et l'existence de ponts thermiques générant des condensations ne permettant pas, par la présence anormale d'humidité, un usage normal du bien destiné à l'habitation.

Dès lors, la SCI RDVM sera condamnée à en réparer l'ensemble des conséquences dommageables.

- planchers des niveaux 2 et 3 de l'appartement en duplex

Il s'agit de l'appartement de M. E... aujourd'hui séparé de Melle O....

L'expert judiciaire a constaté un fléchissement excessif des planchers, dépassant parfois 5cm au centre des pièces, largement au-delà des normes admissibles, entraînant des désordres importants de gêne à l'utilisation ainsi que des frottements de porte au sol ou contre les cadres, et constituant même un risque pour la sécurité par un large dépassement des contraintes conventionnelles d'élasticité.

Il conclut que ce désordre résulte de l'aggravation notable de la situation des poutres lors des travaux de réhabilitation par d'une part l'aménagement des combles en habitation augmentant significativement la charge d'exploitation, d'autre part la suppression des cloisons existantes en briques au droit des poutres dans les étages inférieurs qui, compte-tenu de leur résistance et de leur rigidité, étaient certainement devenues porteuses d'une partie des charges, sans vérification préalable des conséquences par un bureau d'études spécialisé et sans précaution particulière suffisante.

Il précise que ces désordres n'étaient pas apparents à la réception, et ne sont survenus que progressivement en s'aggravant.

Il en résulte que ces désordres, qui rendent l'appartement de M. E... impropre à sa destination par l'inconfort important, le défaut de fermeture des portes et le risque pour la sécurité, doivent être réparés par la SCI RDVM tenue de la responsabilité décennale des constructeurs pour les motifs développés plus haut.

L'expert a chiffré le coût total des réparations affectant les parties communes, sur base des devis qu'il a sollicités et après ajustage de certains postes pour tenir compte des remarques des parties présentées sous forme de dires, à la somme totale de 119 124 € HT, outre 10 % pour honoraires de maîtrise d'oeuvre soit la somme totale de 140 208,95 € TTC.

Il y a donc lieu d'allouer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] la somme qu'il réclame à ce titre soit 124 068,95 € TTC avec indexation, la juridiction saisie ne pouvant statuer ultra petita.

L'expert a chiffré le coût des travaux de reprise privatifs chez M. E... à la somme totale de 7 140 €, soit 2 120 € au titre du remplacement des parquets, 2 620 € au titre des lots techniques courants forts, faibles et eaux usées, et 2 400 € au titre du déménagement et réaménagement des meubles. Cette somme sera donc allouée à M. E... en réparation de son préjudice à ce titre.

M. E... a indéniablement subi un trouble de jouissance par la grande incommodité d'occupation de son logement suite à la flèche importante des planchers.

Il précise que ce trouble a duré plus de deux années jusqu'à ce qu'il quitte l'appartement en 2010 pour aller vivre chez sa mère.

Ce préjudice sera, au vu de ces éléments, réparé par l'allocation d'une somme de 4000€.

Il y a lieu aussi de réparer son préjudice moral résultant des perturbations et désagréments engendrés par les désordres, les démarches à accomplir et l'incertitude consécutive, par l'allocation d'une somme de 1 000 €.

En revanche, il ne justifie pas la réalité ni le montant du préjudice financier qu'il invoque, les mensualités de remboursement d'emprunt étant inhérentes à son acquisition et les indemnisations aujourd'hui obtenues étant de nature à lui permettre de jouir normalement de son bien, tandis que l'absence de prise en charge de sa part des remboursements par Melle O... est, ainsi qu'il le précise, consécutive à la séparation du couple et donc étrangère au présent litige.

Sur les demandes accessoires

La SCI RDVM, qui succombe en sa défense, devra supporter les dépens de première instance et d'appel comprenant de droit les frais d'expertise, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Il est équitable de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. E... et du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] .

En revanche, il n'est démontré aucune résistance abusive ayant généré un préjudice non réparé par les sommes déjà allouées et les intérêts moratoires, et la demande ainsi formée sera par conséquent rejetée.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la SA GENERALI IARD la totalité de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,

Statuant dans les limites de l'appel :

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré M. E... et le syndicat des copropriétaires de l'[...] irrecevables en leur action dirigée contre la SARL [...] et la SA GENERALI IARD.

L'infirme pour le surplus et, statuant de nouveau et y ajoutant :

Déclare M. E... et le syndicat des copropriétaires de l'[...] recevables en leur action dirigée contre la SCI RDVM sur le fondement de la garantie décennale.

Condamne la SCI RDVM à payer :

au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] la somme de 124 068€ au titre des travaux de réparation, avec indexation en fonction du dernier indice BT01 connu à ce jour par rapport au dernier indice connu au 24 janvier 2013,

à M. E... les sommes de :

- 7 140 € au titre des travaux et déplacement de meubles,

- 4 000 € au titre du trouble de jouissance,

- 1 000 € en réparation de son préjudice moral,

au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] et à M. E... unis d'intérêts la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette toutes les autres demandes.

Condamne la SCI RDVM aux dépens de première instance et d'appel comprenant de droit les frais d'expertise judiciaire.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame COMBES, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 18/03527
Date de la décision : 08/12/2020

Références :

Cour d'appel de Grenoble 01, arrêt n°18/03527 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-12-08;18.03527 ?
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