N° RG 15/03892 - N° Portalis DBVM-V-B67-IERC
MFCT
Minute N°
Copie exécutoire
délivrée le :
la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC
la SELARL LGB-BOBANT
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 02 MAI 2019
Appel d'un jugement (N° RG 2014J430)
rendu par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE
en date du 09 septembre 2015
suivant déclaration d'appel du 18 Septembre 2015
APPELANTE :
SARL INTI ENERGIE
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me Julien ZOCCO de la SELAFA FIDAL, avocat au barreau de VALENCE, plaidant
INTIMEE :
Société [Adresse 3]CAISSE DE CREDIT MUTUEL ROMANS CENTRE
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Adresse 5]
Représentée par Me Jean-christophe BOBANT de la SELARL LGB-BOBANT, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me Jean-Laurent REBOTIER, avocat au barreau de LYON, plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Président de chambre,
Madame Fabienne PAGES, Conseiller,
Madame Marie Pascale BLANCHARD, Conseiller,
Assistées lors des débats de Monsieur Frédéric STICKER, Greffier.
DÉBATS :
A l'audience publique du 07 Mars 2019
Madame CLOZEL-TRUCHE, Président, a été entendue en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Suivant accord de la banque adressé le 3 septembre 2009 et acte notarié reçu le 15 décembre 2009 , la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE ROMANS CENTRE (le CRÉDIT MUTUEL) a consenti deux prêts d'un montant respectif de 379.000 euros et de 1.516.000 euros à L'EURL INTI ENERGIE, qui avait été créée le 2 mars 2009 par [Q] [D], dans le cadre d'un projet d' installation d'une centrale photovoltaïque intégrée sur des bâtiments agricoles de production d'oeufs exploitée à EYMEUX par la société AVIDOR.
Le 1er avril 2011 est intervenu entre les parties un avenant qui a ramené le taux d'intérêt nominal du prêt de 1.516.000 euros de 4,70 % à 4,20 %.
Par exploit du 7 octobre 2014 L'EURL INTI ENERGIE a fait citer le CRÉDIT MUTUEL à comparaître à l'audience du 3 novembre 2014 du Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISÈRE pour voir prononcer, au visa des articles L313-1 du Code de la consommation et L313-4 du Code monétaire et financier, la nullité des stipulations conventionnelles d'intérêts prévues dans chacun des contrats de prêts consentis le 15 décembre 2009, ordonner la substitution de l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel et obtenir remboursement d'un trop versé de 249.646,44 euros arrêté en septembre 2014, à parfaire, et la communication de nouveaux tableaux d'amortissement.
Par conclusions du 26 mai 2015 en vue de l'audience du 3 juin 2015 la société INTI ENERGIE s'est ensuite désistée de ses demandes au titre du prêt de 379.000 euros et a limité ses demandes au prêt de 1.516.000 euros ayant fait l'objet d'un avenant le 1er avril 2015
Par jugement en date du 9 septembre 2015 le Tribunal a
- donné acte à la société INTI ENERGIE qu'elle se désiste de ses demandes relatives au prêt de 379.000 euros consenti par acte authentique du 15 décembre 2009
- rejeté les fins de non recevoir soulevées par le CRÉDIT MUTUEL tant au titre de la prescription légale que de la prescription conventionnelle
- constaté que le TEG exprimé pour le prêt de 1.516.000 euros dans l'acte authentique du 15 décembre 2009 est erroné
- ordonné la substitution du taux légal en vigueur au jour de la signature de l'acte authentique soit 3,79 % au taux de base conventionnel exprimé tant dans l'acte de prêt du 15 décembre 2009 que dans l'avenant du 1er avril 2011 se rapportant au même prêt
En conséquence
- enjoint au CRÉDIT MUTUEL de calculer le trop perçu au titre des intérêts payés pour le prêt de 1.516.000 euros à compter de son décaissement et jusqu'à la mise en place d'un nouveau tableau d'amortissement tenant compte du taux fixe de 3,79 % susvisé et à appliquer jusqu'au terme du prêt
- condamné en quittances et deniers le CRÉDIT MUTUEL à payer à la société INTI ENERGIE le montant de ce trop perçu
- dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile
- condamné le CRÉDIT MUTUEL aux dépens.
Aux termes de sa motivation le Tribunal, qui a examiné un rapport d'analyse [I] produit par le demandeur , a notamment considéré que le taux effectif global de 5,09 % mentionné dans l'acte de prêt s'obtenait en ajoutant au taux de base de 4,70 % le coût de l'assurance de 0,39 % et que n'avaient donc pas été pris en compte:
- les frais de notaire liés à la prise de garantie estimés à 940 euros dans l'acte de prêt de 1.516.000 euros et qui s'étaient élevés à 11.627,97 euros pour les deux prêts
- la garantie OSEO entraînant une participation de 0,58 %
et qu'il convenait donc de retenir pour ce prêt d'un montant de 1.516.000 euros hors frais de notaire à tout le moins un taux effectif global de 5,68 % au lieu de 5,09366 % comme mentionné dans l'acte.
Il a aussi observé que l'avenant du 1er avril 2011 avait pour seul objet de réduire de 4,70 % à 4,20 % le taux nominal du prêt de 1.516.000 euros et que le taux légal de 3,79 % en vigueur au 15 décembre 2009 était inférieur au taux de 4,20 % de sorte qu'INTI ENERGIE dont le dirigeant administrateur de la BANQUE POPULAIRE DES ALPES, avait nécessairement entrepris des démarches auprès d'autres banques pour déterminer la meilleure offre.
Par déclaration reçue au greffe le 18 septembre 2015 la société INTI ENERGIE a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions.
Le 25 janvier 2018 la cour a ordonné une médiation, mais cette mesure n'a pas permis aboutir à un accord.
Par conclusions récapitulatives N°3 notifiées le 11 octobre 2018 la société INTI ENERGIE demande à la cour de:
- déclarer son appel recevable et bien fondé et statuant à nouveau
- constater que le taux effectif global contenu dans le contrat de prêt d'un montant de 1.516.000 euros reçu le 15 décembre 2009 est erroné
- constater l'absence d'indication de taux effectif global et l'absence d'indication du taux de période dans l'avenant à ce prêt en date du 1er avril 2011
En conséquence
- prononcer la nullité des stipulations conventionnelles d'intérêts prévues dans le contrat du 15 décembre 2009 pour le prêt de 1.516.000 euros et dans l'avenant du 1er avril 2011
- ordonner la substitution du taux d'intérêt conventionnel du prêt du 15 décembre 2009 et de l'avenant du 1er avril 2011 , par le taux de l'intérêt légal en vigueur lors de la conclusion de ces actes, à savoir 3,79 % pour la période du 1er janvier 2010 au 31 mars 2011 et 0,38 % pour la période du 1er avril 2011 jusque l'échéance du prêt ou à défaut la substitution de l'intérêt conventionnel par l'intérêt légal obéissant aux variations auxquelles la loi le soumet
- pour les périodes déjà échues, enjoindre au CRÉDIT MUTUEL dans le délai de 15 jours suivant la décision à intervenir et sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de cette même date, de calculer le trop versé d'intérêt de la date de décaissement des fonds jusqu'à la date de la décision à intervenir
- condamner le CRÉDIT MUTUEL à lui payer le montant de ce trop perçu
- pour les périodes à échoir, condamner le CRÉDIT MUTUEL à établir un tableau d'amortissement du capital restant du prêt de 1.516.000 euros à la date de la décision à intervenir, indiquant le montant des intérêts dûs, calculés sur la base du taux de l'intérêt légal en vigueur en 2011, soit 0,38 % l'an, ou à défaut calculés sur la base de l'intérêt légal obéissant aux variations auxquelles la loi le soumet dans un délai de 15 jours suivant la décision à intervenir et sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de cette même date
- condamner le CRÉDIT MUTUEL à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'appelante précise qu'elle ne conteste que la sanction retenue concernant l'avenant du 1er avril 2011 et sollicite la confirmation pour le surplus du jugement entrepris.
Elle reproche aux premiers juges d'avoir décidé dans un souci d'équité économique de substituer au taux d'intérêt conventionnel dans l'avenant le taux légal applicable lors de la date de la signature du prêt initial, au lieu du taux d'intérêt en vigueur lors de la conclusion de l'avenant.
Répondant à l'appel incident du CRÉDIT MUTUEL la société INTI ENERGIE développe que
- le point de départ de la prescription légale invoquée par l'intimée ne peut être que la date de la signature du contrat qui est celle de la rencontre des volontés et non celle de l'envoi de la proposition de la banque (3 septembre 2009) ni celle de l'établissement de la fiche de renseignements par la caution (7 septembre 2009)
- il ne peut être question de se référer à une prescription prévue dans un contrat distinct alors que la clause invoquée par la banque vise les contestations portant sur la convention de compte .
Elle soutient aussi que
- le TEG affiché dans l'acte du 15 décembre 2009 est erroné car il n'a intégré ni les frais de dossier (1.000 euros soit 0,01 %), ni les frais d'actes et de garantie (9.302,37 euros devant être affectés à ce prêt soit 0,09 %) , ni les frais de commissions OSEO (0,58 %), l'ensemble de ces coûts représentant une différence de 0,68 % à ajouter au taux mentionné dans l'acte
- l'article L313-1 du Code de la consommation invoqué par la banque pour les frais de notaire et les charges liées aux garantie n'est pas applicable aux prêts contractés pour une activité professionnelle
- elle n'avait pas intérêt à souscrire une contre garantie OSEO
- l'avenant du 1er avril 2011 qui a réduit le taux nominal annuel de 4,70 % à 4,20 % ne mentionne ni le TEG ni le taux de période (article R313-1 du Code de la consommation) et il bénéficie des garanties qui conditionnaient l'octroi du prêt initial (assurance et contre-garantie OSEO)
- le taux effectif global qu'aurait du afficher cet avenant s'élève donc à 5,19 %
- de par l'application combinée des articles L413-4 du Code monétaire et financier et 1907 du Code civil, la sanction applicable est la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêt et la substitution du taux du taux légal en vigueur au moment de la conclusion de la stipulation annulée.
- l'absence d'indication du TEG conduit automatiquement au constat de l'absence de consentement de l'emprunteur
- .il y a lieu de distinguer l'action en nullité du contrat pour vice du consentement et l'action en annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêt du prêt
- les prêts de 1.516.000 euros et de 379.000 euros sont divisibles et distincts, l'avenant du 1er avril 2011 ne portant d'ailleurs que sur le premier prêt.
Par conclusions N°3 notifiées le 15 janvier 2019 le CRÉDIT MUTUEL demande à la cour de :
- réformer le jugement dont appel
- déclarer irrecevable et en toutes hypothèses non fondée la demande de la société INTI ENERGIE
- subsidiairement confirmer en tous ses points le jugement entrepris
- très subsidiairement dire et juger en toute hypothèse prescrite toute demande de répétition antérieure au 7 octobre 2013
- en toutes hypothèses condamner la société INTI ENERGIE à lui payer la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens distraits au profit de Maître BOBANT, avocat.
Le CRÉDIT MUTUEL soutient que les prétentions de la société INTI ENERGIE se heurtent à deux prescriptions :
- l'une légale, le point de départ de celle-ci devant être fixé à l'accord de prêt qu'il a adressé le 3 septembre 2009, donnant lieu dès le 7 septembre 2009 à l'établissement par Monsieur [D] de la fiche de renseignement caution, qui établit l'accord du dirigeant de la société INTI ENERGIE au prêt consenti à cette société
- l'autre conventionnelle d'une durée d'un an en vertu de la convention de compte courant signée le 25 novembre 2009 , au titre du compte support du
prêt qu'il lui a consenti, aucune réclamation ne pouvant prospérer au titre des échéances antérieures au 7 octobre 2013 dont le débit relève des opérations effectuées dans le cadre du compte courant.
Ensuite il fait valoir qu'aucune irrégularité n'affecte le TEG car les frais de dossiers sont indiqués (1.000 euros) et intégrés au TEG; que le montant des frais de notaire et les charges liées aux garanties ne pouvait être connu avec précision au moment de l'acte de sorte que les dispositions de l'article L313-1 sont applicables et ils n'impactent le TEG que de 0,09 % ; que la commission OSEO dont il ne connaissait pas le montant est un avantage pour l'emprunteur; que les deux prêts qu'il a consentis sont indivisibles de sorte qu'en renonçant à sa demande de nullité au titre du prêt de 379.000 euros, la société INTI ENERGIE a aussi renoncé à ses demandes au titre de la stipulation d'intérêts alors que les calculs des deux prêts sont communs.
Subsidiairement il invoque le principe du consensualisme , la commune intention des parties et la disproportion de la sanction de la nullité de la stipulation d'intérêts en l'absence de démonstration d'une perte de chance de souscrire un prêt à des conditions plus avantageuses.
Il considère aussi que la société INTI ENERGIE est irrecevable comme prescrite à invoquer pour la première fois le 11 octobre 2018 l'irrégularité de l'avenant du 1er avril 2011 pour absence de taux de période..
Il souligne que le 1er avril 2011 il accepté de réduire le taux du prêt de 4,7 % à 4,2 % sans frais ni modification, les frais antérieurs ne conditionnant pas le TEG au sens de l'article L313-1 du Code de la consommation ; que dans ce cas le taux nominal se confond avec le taux effectif global; que le défaut de communication du nouveau TEG ne peut donner lieu qu'à la réparation d'un préjudice occasionné par la faute de la banque ; qu'en l'espèce il n'y a pas de préjudice et il n'existe pas de vice du consentement alors qu'il a seulement accepté de diminuer substantiellement et sans contrepartie sa rémunération d'intérêt ; que la nullité de la stipulation d'intérêt de l'avenant priverait cet acte d'objet et de cause; que la nullité de l'avenant conduirait à revenir à l'acte de prêt d'origine.
Il affirme qu'il a reconstitué le tableau d'amortissement du capital avec un intérêt au taux légal de 3,79 %, avec des échéances de 11.054,80 euros qui conduit au 31 janvier 2015 à un total du de 625.730,33 euros alors qu'elle a seulement perçu 608.706,92 euros.
Une ordonnance en date du 17 janvier 2019 clôture la procédure.
SUR CE
Attendu, selon les pièces versées aux débats, que suivant accord de la banque en date du 3 septembre 2009 et acte notarié reçu le 15 décembre 2009 par Maître [H] notaire, le CRÉDIT MUTUEL a consenti à L'EURL INTI ENERGIE, qui avait été créée le 2 mars 2009 par [Q] [D], deux prêts d'un montant respectif de 379.000 euros et de 1.516.000 euros destinés à contribuer à financer une centrale photovoltaïque d'une surface de 9.000 m2 et d'un prix de 4.800.000 euros qui devait être réalisée sur la toiture de bâtiments sis à [Adresse 2], appartenant à la SCI [Personne physico-morale 1] dont le gérant est [Q] [D], bâtiments exploités dans le cadre de son exploitation avicole par l'EARL AVIDOR crée en 2003 et dont le gérant est aussi [Q] [D] ;
Que le 2 septembre 2009 le CRÉDIT MUTUEL a adressé à la délégation DROME ARDÈCHE OSEO le dossier de la société INTI ENERGIE en lui indiquant qu'il souhaitait une garantie de 40 % ;
Que le 7 septembre 2009 [Q] [D] a rempli un document intitulé 'renseignements sur les cautions' destiné au CRÉDIT MUTUEL ;
Que suivant la convention éditée par la banque le 13 octobre 2009 et qui a été signée le 25 novembre 2009 par L'EURL INTI ENERGIE, celle-ci a ouvert dans les livres du CRÉDIT MUTUEL un compte courant professionnel et reconnu avoir reçu les conditions générales de cette convention, qu'en sa qualité de gérant [Q] [D] a aussi paraphées ;
Que par courrier en date du 19 novembre 2009 le CREDIT MUTUEL a missionné l'office notarial pour rédiger l'acte authentique avec les caractéristiques figurant sur le projet de contrat de pret professionnel qu'elle lui a alors transmis ;
Que les fonds prêtés ont été débloqués le 22 décembre 2009 pour 11.400 euros et le 6 janvier 2010 pour 379.000 euros et 3.676.000 euros ;
Que le 1er avril 2011 est intervenu entre les parties un avenant qui a ramené le taux d'intérêt nominal du prêt de 1.516.000 euros de 4,70 % à 4,20 % et prévu un remboursement à compter du 1er avril 2011 et jusqu'au 31 août 2025 d'un capital restant du de 1.474.812,22 euros en 173 mensualités de 11.682,39 euros ;
Que par exploit du 7 octobre 2014 L'EURL INTI ENERGIE a fait citer le CRÉDIT MUTUEL devant le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISÈRE pour voir prononcer, au visa des articles L313-1 du Code de la consommation et L313-4 du Code monétaire et financier, la nullité des stipulations conventionnelles d'intérêts prévues dans chacun des deux prêts consentis le 15 décembre 2009, ordonner la substitution de l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel et obtenir remboursement d'un trop versé de 249.646,44 euros arrêté en septembre 2014, à parfaire, et la communication de nouveaux tableaux d'amortissement ;
Que par conclusions du 26 mai 2015 en vue de l'audience du 3 juin 2015 la société INTI ENERGIE s'est ensuite désistée de ses demandes au titre du prêt de 379.000 euros et a limité ses demandes devant le Tribunal au prêt de 1.516.000 euros ayant fait l'objet d'un avenant le 1er avril 2015 ;
Que par conclusions notifiées le 11 octobre 2018 L'EURL INTI ENERGIE a invoqué le moyen tiré de la nullité de la stipulation d'intérêt de l'avenant du 1er avril 2011 pour absence de mention du taux de période ;
Attendu que le jugement rendu le 9 septembre 2015 n'est pas critiqué en ce qu'il a donné acte à la société INTI ENERGIE du désistement de ses demandes relatives au prêt de 379.000 euros ;
Qu'aux motifs de ce désistement , de la formulation par l'emprunteur de griefs identiques à l'encontre des TEG de ceux-ci et de l'indivisibilité des deux prêts consentis par le même acte authentique, le CRÉDIT MUTUEL soutient que par son désistement L'EURL INTI ENERGIE a renoncé implicitement à sa demande de nullité portant sur le prêt de 1.516.000 euros;
Que toutefois la renonciation à un droit doit être non équivoque de sorte que le désistement de ses demandes relatives au prêt de 379.000 euros exprimé lors de l'audience de plaidoiries du 3 juin 2015 par L'EURL INTI ENERGIE qui a alors limité ses demandes au titre du prêt de 1.516.000 euros et de son avenant du 1er avril 2011 ne saurait valoir renonciation à se prévaloir d'irrégularités relatives au taux effectif global du prêt de 1.516.000 euros et de son avenant du 1er avril 2011 ;
Attendu que devant le Tribunal, comme en cause d'appel, le CRÉDIT MUTUEL, invoque la fin de non recevoir tirée de la prescription ;
Que les premiers juges ont à juste titre considéré que le point de départ de la prescription quinquennale de l'article 2224 du Code civil ne pouvait être fixé à la date de l'accord de la banque, du 3 septembre 2009 ni à celle de la signature de la fiche de renseignements caution par [Q] [D]; qu'aucun des documents versés aux débats ne permet de fixer un accord des parties antérieur à l'acte authentique reçu le 15 décembre 2009, étant au demeurant observé que la convention de compte courant a été signée le 25 novembre 2009 par le dirigeant de L'EURL INTI ENERGIE, que le courrier susvisé adressé par le CRÉDIT MUTUEL à l'huissier
instrumentaire pour rédiger l'acte authentique avec les caractéristiques figurant sur le projet de contrat de prêt professionnel qu'elle lui a alors transmis est seulement en date du 19 novembre 2009 ;
Qu'un avenant est intervenu entre les parties le 1er avril 2011, alors que l'exploit introductif d'instance du 7 octobre 2014 L'EURL INTI ENERGIE invitait le CRÉDIT MUTUEL à comparaître à l'audience du 3 novembre 2014 ;
Qu'est recevable en cause d'appel le moyen nouveau tiré de l'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts pour absence du taux de période dans l'avenant du 1er avril 2011 élevé par L'EURL INTI ENERGIE ;
Qu'ainsi la prescription légale n'est pas acquise ;
Attendu que s'agissant de la 'prescription -forclusion' conventionnelle figurant à l'article 21 des conditions générales de la convention de compte courant professionnel force est de constater que celle-ci concerne
-'les opérations effectuées dans le cadre du compte courant ou les contenus des relevés ' avec une durée d'un an à compter de la réception ou le cas échéant de la mise en disposition par voie électronique desdits documents
- 'les réclamations relatives aux opérations de paiement non autorisées ou mal exécutées' : avec une durée de deux mois ;
Qu'ainsi, et même si ce compte courant professionnel a été utilisé comme support du paiement des échéances du prêt de 1.516.000 euros, la demande de nullité de la stipulation d'intérêt du contrat de prêt distinct, est étrangère à toute stipulation d'intérêts conventionnels au titre du fonctionnement du compte courant ;
Que l'action en nullité de la stipulation d'intérêt du contrat de prêt ne saurait donc relever des dispositions de la convention de compte courant signée le 25 novembre 2009 par L'EURL INTI ENERGIE ;
Que de même le CRÉDIT MUTUEL ne saurait opposer en vertu de la clause de l'article 21 des conditions générales de la convention de compte courant professionnel une quelconque prescription à la demande de remboursement du trop versé d'intérêts échus avant le 7 octobre 2013 au motif de ceux-ci ont été prélevés sur le compte courant ; qu'en effet une telle action en restitution ne relève pas de la répétition de l'indu mais des règles de la nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel ;
Attendu que tant l'acte de prêt du 15 décembre 2009 que l'avenant du 1er avril 2011 ont été passés sous l'empire des textes antérieurs à la réforme des obligations (qui a demeurant a abandonné la notion de cause pourtant invoquée par l'intimée) tout comme celles de la loi 2018-727 du 10 août 2018 ; que ces dispositions qui ne peuvent dès lors être utilement invoquées par le CRÉDIT MUTUEL ;
Qu'en matière de prêt d'argent l'exigence d'un écrit mentionnant le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L313-2 du Code de la consommation est une condition de validité de la stipulation d'intérêt ;
Que L'EURL INTI ENERGIE a engagé une action en nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts contenue dans le contrat de prêt et l'avenant à ce contrat de prêt au visa des articles 1907 du Code civil et L 313-1 et L313-2 du Code de la consommation ;
Que fondée sur l'absence de consentement de l'emprunteur sur le coût global du prêt, la sanction de l'erreur ou de l'omission affectant le taux effectif global consistant en la substitution au taux d'intérêt conventionnel au taux de l'intérêt légal au moment de l'acte, ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits de la banque, préteur de deniers ; qu'à tout le moins en l'espèce la preuve de la disproportion de la sanction alléguée par la banque n'est pas rapportée ;
Attendu s'agissant du caractère erroné du TEG de 5,09366 % l'an du prêt de 1.516.000 euros consenti au taux annuel de 4,70 % par l'acte notarié du 15 décembre 2009, qui devait être remboursé en 180 mensualités successives de 11.752,86 euros à compter du 31 mai 2010 et jusqu'au
30 avril 2025, que c'est par une exacte analyse que la cour adopte que le Tribunal a considéré que ce TEG ne respectait pas les dispositions de l'article L313-4 du Code monétaire et financier et L313-1 et suivants du Code de la consommation faute d'intégrer :
- les frais de dossier mentionnés dans l'acte pour 1.000 euros
- les frais d'actes et de garanties( deux garanties hypothécaires notamment)
940 euros mentionnés dans l'acte, mais une facture de 11.627,97 euros insuffisamment détaillée étant produite, un prêt contracté comme en l'espèce pour financer une activité professionnelle étant exclu du champ des articles L312-4 à L 312-8 du Code de la consommation,
- les frais de commission OSEO (anciennement SOFARIS): commission de 0,56 %, la souscription de cette contre garantie ayant été imposée à l'emprunteur comme condition d'octroi du prêt, ainsi que l'établit le courrier susvisé de la banque du 2 septembre 2009 ;
Que c'est donc à juste titre qu'il a considéré que le TEG annuel de 5,093366 % avait été obtenu en ajoutant seulement le coût de l'assurance décès (0,39 %) au taux conventionnel 4,70 % et qu'avaient à tout le moins étaient omis les coûts des frais de dossier et de garantie OSEO représentant ensemble une erreur supérieure à la tolérance de 0,01 % prévue par l'article R 313-1 du Code de la Consommation ;
Qu'ainsi le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a constaté que le TEG exprimé pour le prêt de 1.516.000 euros dans l'acte authentique du 15 décembre 2009 est erroné et a ordonné la substitution du taux légal en vigueur au jour de la signature de l'acte authentique soit 3,79 % au taux de base conventionnel exprimé dans l'acte de prêt du 15 décembre 2009 ;
Attendu s'agissant de l'avenant du 1er avril 2011, qui précise qu'il ne constitue pas novation, et mentionne un capital restant du d'un montant de 1.474.812,22 euros , il a pour objet est de ramener d'intérêt nominal de 4,70 % à 4,20 % et de prévoir un remboursement à compter du 1er avril 2011 et jusqu'au 31 août 2025 en 173 mensualités de 11.682,39 euros ,
Que force est de constater que cet avenant ne donne aucune indication du TEG, ni du taux de période, alors que le tableau d'amortissement remis le même jour à l'emprunteur mentionne que chaque échéance de 11.682,39 euros comprend la somme de 303,20 euros au titre de la cotisation d'assurance ;
Qu'il ne peut être tiré aucune conséquence de ce que le CRÉDIT MUTUEL aurait le 1er avril 2011 entendu consentir sans contrepartie à L'EURL INTI ENERGIE une diminution substantielle de la rémunération d'intérêts prévue à son profit, et que le taux légal en vigueur au 15 décembre 2009 soit 3,79 % applicable en raison de la sanction de l'erreur commise sur le TEG dans l'acte de prêt est inférieur au taux nominal de 4,20 % renégocié en 2011, alors qu'il n'est aucunement établi que L'EURL INTI ENERGIE était en mesure de connaître le nouveau taux effectif global annuel du prêt qui restait garanti par une assurance décès, par OSEO qui a continué à percevoir des commissions, mais aussi par deux sûretés hypothécaires ;
Que la conséquence de la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts contenue dans un avenant n'est pas le retour au taux d'intérêt convenu dans l'acte de prêt initial mais la substitution du taux légal au taux conventionnel à compter de la signature de l'avenant ;
Qu'il convient donc d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a
- estimé devoir faire preuve de modération
- devoir substituer au taux conventionnel fixe au titre de l'avenant sous seing privés du 1er avril 2011 le taux d'intérêt légal en vigueur à la date de l'engagement souscrit le 15 décembre 2009 soit 3,79 %
- subséquemment ordonné à la [Adresse 3]CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL ROMANS CENTRE de calculer un trop perçu d'intérêts et la mise en place d'un nouveau tableau d'amortissement tenant compte d'un taux fixe de 3,79 %
- condamné la [Adresse 3]CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL ROMANS CENTRE à rembourser un trop perçu calculé sur cette base ;
Qu'il convient , statuant à nouveau
- d'ordonner la substitution du taux d'intérêt conventionnel du prêt du 15 décembre 2009 et de l'avenant du 1er avril 2011 , par le taux de l'intérêt légal en vigueur lors de la conclusion de ces actes, à savoir 3,79 % pour la période du 1er janvier 2010 au 31 mars 2011 et 0,38 % pour la période du 1er avril 2011 jusque l'échéance du prêt.
- d'enjoindre au CRÉDIT MUTUEL sous une astreinte comminatoire , de calculer le trop perçu au titre des intérêts pour le prêt de 1.516.000 euros tenant compte du taux 3,79 % pour la période du 1er janvier 2010 au 31 mars 2011 et 0,38 % pour la période du 1er avril 2011 jusqu'au jour du présent arrêt et d'établir un nouveau d'amortissement du capital ;
- de condamner en deniers et quittances, le CRÉDIT MUTUEL à payer à la société INTI ENERGIE le montant du trop perçu ;
Attendu qu'il convient de condamner aux dépens le CRÉDIT MUTUEL dont les prétentions ont été rejetées ;
Qu'aucune considération d'équité ne conduit à faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la société INTI ENERGIE ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant, publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement rendu le 9 septembre 2015 sauf en ce qu'il a
- ordonné la substitution du taux légal en vigueur au jour de la signature de l'acte authentique soit 3,79 % au taux de base conventionnel exprimé tant dans l'acte de prêt du 15 décembre 2009 que dans l'avenant du 1er avril 2011 se rapportant au même prêt
- en conséquence enjoint au à la [Adresse 3]CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL ROMANS CENTRE de calculer le trop perçu au titre des intérêts payés pour le prêt de 1.516.000 euros à compter de son décaissement et jusqu'à la mise en place d'un nouveau tableau d'amortissement tenant compte du taux fixe de 3,79 % susvisé et à appliquer jusqu'au terme du prêt ;
L'infirme en ce qu'il a estimé devoir faire preuve de modération et substituer au taux conventionnel fixe au titre de l'avenant sous seing privés du 1er avril 2011 le taux d'intérêt légal en vigueur à la date de l'engagement souscrit le 15 décembre 2009 soit 3,79 % et subséquemment ordonné à la [Adresse 3]CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL ROMANS CENTRE de calculer un trop perçu d'intérêts et la mise en place d'un nouveau tableau d'amortissement tenant compte d'un taux fixe de 3,79 % et condamné la [Adresse 3]CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL ROMANS CENTRE à rembourser un trop perçu calculé sur cette base ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Ordonne la substitution du taux d'intérêt conventionnel du prêt du 15 décembre 2009 et de l'avenant du 1er avril 2011 , par le taux de l'intérêt légal en vigueur lors de la conclusion de ces actes, à savoir 3,79 % pour la période du 1er janvier 2010 au 31 mars 2011 et 0,38 % pour la période du 1er avril 2011 jusque l'échéance du prêt ;
Enjoint à la [Adresse 3]CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL ROMANS CENTRE dans le délai de trois mois suivant la signification du présent arrêt, sous une astreinte comminatoire de 100 euros par jour de retard de calculer le trop perçu au titre des intérêts pour le prêt de 1.516.000 euros à compter de la date de
décaissement des fonds et jusqu'à la date du présent arrêt, tenant compte du taux de 3,79 % pour la période du 1er janvier 2010 au 31 mars 2011 et de 0,38 % pour la période du 1er avril 2011 jusque l'échéance du prêt ;
Condamne en deniers et quittances, le CRÉDIT MUTUEL à payer à la société INTI ENERGIE le montant du trop perçu à la date du présent arrêt ;
Enjoint à la [Adresse 3]CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL ROMANS CENTRE dans le délai de trois mois suivant la signification du présent arrêt, sous une astreinte comminatoire de 100 euros par jour de retard, d'établir un tableau d'amortissement de ce prêt à la date du présent arrêt ;
Rejette toute autre demande et dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la société INTI ENERGIE
Condamne la [Adresse 3]CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL ROMANS CENTRE aux dépens
SIGNE par Madame CLOZEL-TRUCHE, Président et par Monsieur STICKER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GreffierLe Président