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17/01/2019 | FRANCE | N°17/02278

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 17 janvier 2019, 17/02278


N° RG 17/02278 - N° Portalis DBVM-V-B7B-JAGL





MFCT



Minute N°





































































Copie exécutoire

délivrée le :







la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE



Me Marie-france RAMILLON



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBL

E



CHAMBRE COMMERCIALE



ARRÊT DU JEUDI 17 JANVIER 2019





Appel d'un jugement (N° RG 2011J377)

rendue par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 19 mai 2016, suivant déclaration d'appel du 26 Mai 2016 (de la SA ERDF qui est devenue ENEDIS)

après réinscription au rôle en date du 2 mai 2017 à la requête de la SARL A L'EAU SOLAIRE suite à l'ordo...

N° RG 17/02278 - N° Portalis DBVM-V-B7B-JAGL

MFCT

Minute N°

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE

Me Marie-france RAMILLON

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 17 JANVIER 2019

Appel d'un jugement (N° RG 2011J377)

rendue par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 19 mai 2016, suivant déclaration d'appel du 26 Mai 2016 (de la SA ERDF qui est devenue ENEDIS)

après réinscription au rôle en date du 2 mai 2017 à la requête de la SARL A L'EAU SOLAIRE suite à l'ordonnance de radiation du 26 janvier 2017 rendue par le conseiller de la mise en état de GRENOBLE

APPELANTE :

Société ENEDIS

(anciennement dénommée ERDF - ELECTRICITE RESEAU

DISTRIBUTION FRANCE), société anonyme à directoire et conseil de surveillance au capital de 270.037.000 €, immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° B 444 608 442, prise en la personne de son représentant légal dûment habilité,

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me Cyril DELCOMBEL de la SELAS ADAMAS, avocat au barreau de LYON, plaidant

INTIMEE :

SARL A L 'EAU SOLAIRE

société à responsabilité limitée au capital de 7.500 euros, immatriculée au registre du commerce des sociétés de Vienne sous le n°502 668 916, prise en la personne de son représentant légal,

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée Me Marie-France RAMILLON, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et par Me François FERRARI, avocat au barreau de BEZIERS, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Président de chambre,

Madame Fabienne PAGES, Conseiller,

Madame Marie Pascale BLANCHARD, Conseiller,

Assistées lors des débats de Monsieur Frédéric STICKER, Greffier.

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Novembre 2018

Madame CLOZEL-TRUCHE, a été entendue en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,

------0------

LES FAITS

Afin de favoriser le développement des énergies renouvelables en France, la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité a institué à la charge d'EDF, producteur d'électricité, l'obligation de conclure avec les producteurs qui en font la demande un contrat d'achat de l'électricité produite par les installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil, à un prix supérieur à celui du marché.

Le mécanisme d'obligation d'achat de l'électricité photovoltaïque prévoit que la différence entre le prix d'achat par EDF et le prix de revente aux consommateurs est compensé par une taxe, la Contribution au Service Public de l'Electricité .

La loi du 10 février 2000 a notamment donné lieu aux décrets d'application des 6 décembre 2000 et du 10 mai 2001, ainsi qu'aux arrêtés des 10 juillet 2006 et du 12 janvier 2010 qui ont fixé le prix d'achat de l'électricité.

Ce dernier arrêté , qui a réduit le prix d'achat fixé par le précédent arrêté du 10 juillet 2006, est venu fixer le prix d'achat de l'électricité à 31,40 cts, 42 cts et 50 cts le kWh , ce qui induit une aide à la différence entre le tarif réglementé de 12 cts dont le financement est supporté par les consommateurs.

Le raccordement de ces installations au réseau de distribution d'électricité est réalisé par la société Electricité Réseau de France (ERDF) filiale de la SA EDF; ERDF est devenue ENEDIS.

La délibération de la Commission de Régulation de l'Energie (CRE) du 11 juin 2009 a précisé les règles minimum d'élaboration des procédures de traitement de raccordement au réseau public de distribution d'électricité, ainsi que le suivi de leur mise en oeuvre, obligation à la charge de ERDF et qui a pour objet l'exploitation et l'entretien du réseau public de distribution d'électricité. L'annexe 1 de ce document précise que la proposition technique et financière (PTF) établie par ERDF présente les résultats de l'étude de raccordement et la solution technique envisagée pour répondre à la demande de raccordement et qu'elle doit être traitée par ERDF dans un délai ne devant pas excéder trois mois.

Le 29 juillet 2010 une mission d'information a préconisé une nouvelle baisse immédiate des tarifs.

Par un communiqué de presse en date du 23 août 2010 du ministère de l'écologie, l'ensemble des professionnels des énergies renouvelables a été informé de ce que la baisse de 12 % des tarifs de rachat de l'électricité produite par les professionnels et les grosses installations décidée en janvier 2010 s'inscrivait dans le cadre d'une évolution tarifaire et n'était que

la première étape d'une adaptation nécessaire du système de régulation des tarifs de rachat qui serait préparée à l'automne en concertation avec l'ensemble des acteurs de ce secteur.

Un arrêté a été pris le 31 août 2010.

A compter de novembre 2010 toute la filière photovoltaïque, notamment par les indications du 1er décembre 2010 du blog TECSOL, était informée de l'imminence d'un décret conforme à la loi du 10 février 2000 , ayant pour effet de mettre en place un moratoire.

Un décret 2010-1510 du 9 décembre 2010 a suspendu pour une durée de trois mois, à compter de son entrée en vigueur le 10 décembre 2010, l'obligation de conclure un contrat d'achat d'électricité produite par certaines installations photovoltaïques, aucune demande de contrat ne pouvant être déposée pendant la période de suspension et les demandes suspendues devant faire l'objet , à l'issue de la période de suspension , d'une nouvelle demande complète de raccordement au réseau. Cette suspension ne s'appliquait pas aux installations dont le producteur avait notifié au gestionnaire du réseau avant le 2 décembre 2010 , son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau en retournant à ERDF la PTF signée avec un chèque d'acompte.

A l'issue de ce moratoire, un décret et deux arrêtés du 4 mars 2011 ont fixé le prix d'achat de cette électricité à des tarifs inférieurs à ceux prévus par les arrêtés antérieurs (28,83 centimes au lieu de 42 ou 50 centimes) et aussi exclu du bénéfice de l'obligation d'achat les installations d'une puissance supérieure à 100kWh pour lesquelles une procédure d'appel d'offres était prévue.

La loi 2010-788 du 12 juillet 2010 dite loi GRENELLE II a validé dans son article 88 l'arrêté du 12 janvier 2010. Dans sa décision du 19 janvier 2011 le Conseil d'Etat a refusé de renvoyer au Conseil Constitutionnel la Question Prioritaire de Constitutionnalité sur l'article 88 de la loi 2010-788 du 12 juillet 2010.

Dans un arrêt du 12 avril 2012 le Conseil d'Etat a statué sur la légalité en droit interne de l'arrêté du 12 janvier 2010, ce qui l'a conduit à annuler pour l'avenir certaines dispositions dudit arrêté.

L'Autorité de la concurrence a été amenée les 14 et 17 décembre 2013 à s'intéresser à la question des pratiques D'ERDF et D'EDF dans le cadre du marché photovoltaïque.

Mais ces procédures n'ont pas donné lieu à sanctions à l'encontre d'ERDF.

L'arrêté tarifaire du 10 juillet 2006 n'a pas été notifié à la Commission européenne, dont les pouvoirs en matière de récupération d'aide d'Etat sont soumis à une prescription de dix ans.

L'arrêté du 12 janvier 2010 n'a pas non plus été notifié à la Commission européenne.

L'arrêté du 4 mars 2011 a été notifié le 22 décembre 2014 à la Commission européenne.

Dans un premier arrêt du 19 décembre 2013 la Cour de justice de l'Union européenne, statuant sur les dispositifs d'aide au développement en matière d'électricité d'origine éolienne a dit que ceux-ci constituaient une intervention au moyen de ressources d'Etat, en précisant dans ses motifs qu'il n'y avait dans l'affaire aucun élément de nature à justifier une dérogation au principe selon lequel les effets d'un arrêt d'interprétation remontent à la date d'entrée en vigueur de la règle interprétée.

Par arrêt du 20 septembre 2016 la cour d'appel de VERSAILLES, dans le cadre d'une affaire OMBRIERE LE BOSC/ENEDIS et AXA, a saisi la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suivante:

- 1 . L'article 107 paragraphe 1 du Traité de fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), doit-il être interprété en ce sens que le mécanisme d'obligation d'achat d'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité , tel que ce mécanisme résulte des arrêtés ministériels des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010, fixant les conditions d'achat de cette électricité, lus en combinaison avec la loi N°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, le décret 2000-1196 du 6 décembre 2000 et le décret N°2001 410 du 10 mai 2001, constitue une aide d'Etat '

- 2. Et, dans l'affirmative, l'article 108 , paragraphe 3, du TFUE doit-il être interprété en ce sens que le défaut de notification préalable à la Commission européenne de ce mécanisme affecte la validité des arrêtés susvisés comportant mise à exécution de la mesure d'aide litigieuse'

Par ordonnance du 15 mars 2017 la Cour de justice de l'Union européenne a répondu :

1. L'article 107 , paragraphe 1, TFUE, doit être interprété en ce sens qu'un mécanisme , tel que celui instauré par la réglementation nationale en cause au principal d'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité doit être considéré comme une intervention de l'Etat ou au moyen des ressources d'Etat.

2. L'article 108 , paragraphe 3 TFUE, doit être interprété en ce sens qu'en cas de défaut de notification préalable à la Commission européenne d'une mesure nationale constituant une aide d'Etat au sens de l'article 107, paragraphe 1, TUE il incombe aux juridictions nationales de tirer toutes les conséquences de cette illégalité, notamment en ce qui concerne la validité des actes d'exécution de cette mesure.

Sur la seconde question, l'ordonnance du 15 mars 2017 a précisé dans ses motifs qu'il appartenait à la juridiction de renvoi de déterminer préalablement si la mesure nationale en cause constitue une aide d'Etat, en vérifiant si les trois autres conditions visées à l'article 1 paragraphe 1 TFUE sont remplies dans l'affaire avant de répondre à la deuxième question, que sous cette réserve au regard des dispositions de l'article 108, paragraphe 3, TFUE, qui institue un contrôle préventif sur les projets d'aide nouvelle, lequel vise à ce que seules les aides compatibles soient mises à exécution, il en résultait :

* qu'une mesure d'aide au sens de l'article 107, paragraphe1, TFUE, mise à exécution en méconnaissance des obligations découlant de l'article 108, paragraphe 3, TFUE, est illégale

* que la mise en oeuvre du contrôle préventif instauré à l'article 108, paragraphe 3, TFUE, revient d'une part à la Commission chargée d'apprécier la compatibilité des mesures d'aide avec le marché intérieur et d'autre part aux juridictions nationales , chargées de veiller à la sauvegarde, jusqu'à la décision finale de la Commission, des droits des justiciables face à une méconnaissance éventuelle, par les autorités étatiques, de l'interdiction visée à l'article 108, paragraphe 3, TFUE

* qu'il incombe aux juridictions nationales de garantir aux justiciables que toutes les conséquences d'une violation de l'article 108, paragraphe 3, TFUE, seront tirées conformément à leur droit national, en ce qui concerne tant la validité des actes comportant mise à exécution des mesures d'aide que le recouvrement des soutiens financiers accordés au mépris de cette disposition ou d'éventuelles mesures provisoires

* que partant, en cas de défaut de notification préalable à la Commission d'une mesure nationale constituant une aide d'Etat, au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, il incombe aux juridictions nationales de tirer toutes les conséquences de cette illégalité, notamment en ce qui concerne la validité des actes d'exécution de cette mesure.

C'est dans ce contexte que différentes entités qui déploraient un défaut d'instruction par ERDF en 2010 dans le délai de trois mois de leur demande de raccordement en vue de la réalisation de centrales photovoltaïques, ont saisi les juridictions nationales afin de se voir indemniser de la perte de la possibilité de réaliser des gains.

LA PROCÉDURE, LES PRÉTENTIONS ET LES MOYENS DES PARTIES

La SARL A L'EAU SOLAIRE au capital de 7.500 euros qui a été immatriculée le 21 février 2008 au Registre du Commerce de VIENNE a pour activité la production d'électricité d'origine renouvelable.

Elle a ainsi adressé une demande en vue du raccordement d'une centrale photovoltaïque d'une puissance 13 kWh à construire sur un tènement situé à FRONTONAS à ERDF qui a déclaré complète cette demande le 22 juillet 2010.

LA SAS REDEN INVESTISSEMENTS, qui a pour nom commercial FONROCHE INVESTISSEMENTS, a adressé à ERDF quatre demandes PTF les 17 juin, 30 juin, 27 août et 31 août 2010 au titre de centrales photovoltaïques à réaliser sur des tènements situés à PONT L'EVEQUE, à VILLEMOIRIEU, à SALAISE et à CHARANTONNAY.

Par exploits en dates des 16 et 21 décembre 2011 la société 'FONROCHE INVESTISSEMENTS' et la SARL A L'EAU SOLAIRE ont fait citer devant le Tribunal de Commerce de VIENNE la SA ERDF à laquelle elles reprochaient d'avoir manqué à son obligation d'instruire leurs demandes de PTF dans le délai de trois mois, pour la voir condamner au titre d'un différentiel de chiffre d'affaires ou de la marge perdue sur une durée de 20 ans au paiement de la somme de 122.162 euros s'agissant de la SARL A L'EAU SOLAIRE et de la somme de 4.384.717 euros s'agissant de FONROCHE INVESTISSEMENTS;

La SARL A L'EAU SOLAIRE a expliqué que

- ERDF a déclaré complète le 22 juillet 2010 sa demande de raccordement d'une centrale d'une puissance inférieure à 36 kWh, qui n'était pas soumis à extension du réseau, et devait donc être traitée dans un délai de six semaines soit au plus tard le 2 septembre 2010

- selon devis en date du 5 novembre 2010 et facture du 2 décembre 2010 le coût de l'installation de la centrale photovoltaïque d'une puissance de 13 kWh et qui devait produire 169.563 kWh par an à construire sur un tènement situé avait été chiffré à 50.000 euros HT

- cette centrale devait être financée à 80 % par un emprunt bancaire amortissable sur 15 ans à un taux de 4,5 % dont les fonds étaient débloqués depuis le 30 novembre 2010 par La BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS

- la demande de permis de construire qu'elle avait déposée le 18 décembre 2009 avait été accordée tacitement suivant certificat du 10 août 2010.

- elle avait ensuite déposé le 26 juin 2011 une nouvelle demande de raccordement pour une puissance de 26 kWh et son installation avait été raccordée et mise en service le 19 septembre 2011 mais elle ne bénéficiait pas du tarif institué par le décret du 12 janvier 2010.

La société ERDF a contesté la compétence du juge judiciaire , tout comme son assureur AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, qu'elle a appelée en garantie le 1er juin 2012 dans le cadre du dossier FONROCHE.

Par un premier jugement en date du 18 avril 2013 le Tribunal de Commerce a

- ordonné la jonction de l'ensemble de ces instances

- rejeté l'exception d'incompétence et invité les parties à conclure au fond.

Statuant sur l'appel nullité dont elle a été saisie par la société AXA CORPORATE SOLUTIONS, la cour , par arrêt du 18 septembre 2014 a :

- dit n'y avoir lieu à annulation du jugement

- constaté que par ordonnance du 19 septembre 2013 il avait été donné acte à la société ERDF de son désistement d'appel

- confirmé le jugement déféré en ce que rejetant l'exception d'incompétence soulevée par la société AXA CORPORATE SOLUTIONS le Tribunal s'est déclaré matériellement compétent pour connaître du litige

- renvoyé les parties pour jugement sur le fond devant le Tribunal de Commerce de VIENNE.

Par deux exploits en dates des 1er avril et 5 août 2015, qui ont fait l'objet d'enrôlements distincts, la SAS SOLEA a aussi fait citer devant le Tribunal de Commerce de VIENNE la SA ERDF à laquelle elle reprochait d'avoir manqué à son obligation d'instruire sa demande de PTF dans le délai de trois mois, pour la voir condamner au titre de la marge perdue sur une durée de 20 ans au paiement de la somme de 308.070 euros.

Par un second jugement en date du 19 mai 2016 le Tribunal a :

- disjoint les cinq instances engagées devant lui et concernant les sociétés A L'EAU SOLAIRE, FONROCHE et SOLEA

- rejeté la demande de sursis à statuer formée par ERDF dans l'attente de l'examen de la question préjudicielle pendante devant la Cour de Justice de l'Union Européenne

- condamné la société ERDF à payer à la société A L'EAU SOLAIRE la somme de 56.000 euros (au titre d'une perte de chance , représentant 50 % de la marge attendue), outre intérêts légaux à compter de l'assignation du 16 décembre 2011 et une indemnité de procédure de 5.000 euros

- ordonné l'exécution provisoire avec fourniture d'une caution bancaire à concurrence de 56.000 euros

- rejeté tous autres moyens, fins et conclusions contraires des parties

- condamné la SA ERDF aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 26 mai 2016 la SA ERDF, qui est devenue ENEDIS, a interjeté appel de ce jugement dans toutes ses dispositions.

Saisi par conclusions sur incident du 12 décembre 2016 de la SA ENEDIS, le conseiller de la mise en état, par ordonnance en date du 26 janvier 2017 a ordonné:

- un sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt de la CJUE à intervenir sur la question préjudicielle dont la cour d'appel de VERSAILLES l'avait saisie

- la radiation de l'affaire qui sera rétablie sur demande de la partie la plus diligente et sur justification de la réalisation de la condition mettant fin au sursis à statuer.

Suite à l'ordonnance rendue par la CJUE le 15 mars 2017 l'affaire a ainsi été rétablie le 2 mai 2017 à la requête de la SARL A L'EAU SOLAIRE.

Par conclusions récapitulatives notifiées le 28 septembre 2018 la société ENEDIS demande à la cour :

Sur l'inexistence du préjudice allégué de dire et juger que la société A L'EAU SOLAIRE n'a subi aucun préjudice réel et démontré du fait de la société ENEDIS

Subsidiairement sur le défaut de lien de causalité de

- dire et juger que la société A L'EAU SOLAIRE ne démontre pas que, en l'absence de retard D'ENEDIS dans la transmission de la PTF, elle aurait nécessairement matérialisé son accord sur ce document avant le 2 décembre 2010

- dire et juger en conséquence, qu'il n'existe pas de lien de causalité entre le dépassement du délai de trois mois dans la transmission de la PTF et le préjudice allégué, qui résulte exclusivement de l'application du décret du 9 décembre 2010 au projet

Plus subsidiairement , sur le caractère non réparable du préjudice allégué de :

- dire et juger que l'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil à un prix supérieur à sa valeur du marché, dans les conditions définies par l'arrêté du 10 juillet 2006, a le caractère d'une aide d'Etat

- constater que cet arrêté n'a pas été notifié préalablement à la Commission européenne en violation de l'article 108 paragraphe 3 du TFUE

- dire et juger que cet arrêté est illégal et que son application doit, en tout état de cause être écartée

- rejeter en conséquence les demandes de la société A L'EAU SOLAIRE fondées sur une cause illicite

Encore plus subsidiairement, sur la perte de chance inexistante et l'assiette de préjudice, de:

- dire et juger que le seul préjudice dont pourrait se prévaloir la société A L'EAU SOLAIRE est la perte d'une chance d'avoir pu matérialiser son acceptation d'une PTF avant le 1er décembre 2010, à minuit; que cette perte de chance est infime tout comme la réparation qui pourrait en découler

- dire et juger que l'assiette de la perte de chance proposée par la société A L'EAU SOLAIRE et telle que retenue par le tribunal est manifestement erronée et ne pourrait servir de base pour y appliquer un coefficient de perte de chance infime

En conséquence

- d'infirmer le jugement entrepris et statuant de nouveau

- de débouter la société A L'EAU SOLAIRE de l'ensemble de ses demandes et de son appel incident

- de condamner la société A L'EAU SOLAIRE au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens dont ceux d'appel distraits au profit de Maître GRIMAUD.

Par conclusions notifiées le 11 septembre 2018 au visa notamment des articles 1240 anciennement 1382 du Code civil et 1190 anciennement 1162 du Code civil, la SARL A L'EAU SOLAIRE demande à la cour :

- jugeant que le propre de la responsabilité civile est de replacer la victime dans la situation qui aurait été la sienne si la faute n'avait pas été commise et, par voie de conséquence, en l'absence d'annulation des contrats en cours, qu'elle aurait obtenu un contrat d'achat insusceptible d'être remis en cause

- jugeant que par sa validation législative du 12 juillet 2010 l'arrêté du 12 janvier 2010 n'a plus le caractère réglementaire

- jugeant l'impossibilité pour le Tribunal de Commerce puis la cour de remettre en cause une disposition législative

- jugeant l'absence de démonstration de la réunion des trois critères de l'aide de l'Etat exclus par la CJUE au visa de l'article 9 du Code de procédure civile

- constatant que EDRF 'comme ses assureurs' n'invoquent pas que les contrats en cours soient annulables

- jugeant que même une illégalité de l'arrêté ne peut avoir pour effet de remettre les contrats conclus en cause et que le contrat d'achat aurait nécessairement été conclu en 2011 sans difficulté puisque l'arrêté du 12 janvier 2010 ne fait l'objet d'aucun recours et qu'il est définitif

- jugeant que même dans l'hypothèse d'une invalidation de l'arrêté du 12 janvier 2010, celle-ci ne peut être rétroactive au vu de la jurisprudence de la CJUE et du nombre de contrats impactés

- En tout état de cause, jugeant la conformité avec le droit européen de l'aide d'Etat apportée aux énergies renouvelables et au secteur photovoltaïque en particulier excluant que l'arrêté du 12 janvier 2010 puisse être invalidé , même s'il devait être considéré comme une aide d'Etat et avait organisé la CSPE

- jugeant que la notification d'un arrêté vise uniquement à permettre le contrôle de sa compatibilité avec le Droit communautaire mais que seule l'incompatibilité avec ce Droit est susceptible d'entraîner l'illiceité de la demande

- constatant que la demande ne consiste pas à obtenir un contrat d'achat en application de l'arrêté du 12 janvier 2010

- constatant que si l'arrêté du 12 janvier 2010 devait être écarté , l'arrêté du 10 juillet 2006 s'appliquerait avec un tarif de 60,176 cts /kWh en lieu et place des 42 ou 50 cts revendiqués

- jugeant la faute d'ERDF consistant en l'absence de transmission dans le délai réglementaire de trois mois d'une PTF et en la violation de l'obligation d'instruction des dossiers de manière non discriminatoire

- jugeant l'existence d'un lien de causalité aussi bien sur la causalité adéquate que sur l'équivalence des conditions

- constatant l'absence d'une quelconque pièce venant démontrer l'augmentation prétendue par la seule ERDF des demandes de raccordements durant la dernière semaine d'août 2010

- rappelant que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même et qu'il appartenait donc à ERDF de produire la file d'attente des dossiers de demande de raccordement

- jugeant qu'ERDF est soumise à une obligation de résultat par l'absence d'aléa sur la réalisation de sa prestation et que ceci entraîne l'existence du lien de causalité

- constatant qu'ERDF n'a même pas respecté une obligation de moyen en embauchant uniquement 18 intérimaires à l'automne 2010 alors que la période était prétendument critique

- constatant la parfaite connaissance par ERDF du problème des retards dans le traitement des demandes de raccordement, excluant toute imprévisibilité et toute extériorité et par conséquence toute force majeure

- constatant la baisse très importante des demandes de raccordement en soutirage et l'application de la même documentation technique aux demandes de raccordement en injection, excluant toute irrésistibilité, et par voie de conséquence toute force majeure

- constatant l'aveu D'ERDF devant l'Autorité de la concurrence de ne pas avoir traité les dossiers dans l'ordre chronologique , fait constitutif de discrimination

- jugeant qu'il est démontré qu'il était possible de se déplacer dans les locaux D'ERDF pour retourner sa PTF acceptée le mercredi 1er décembre 2010, et confirmant ainsi le lien de causalité,

- jugeant l'inapplicabilité du moratoire du fait de la faible puissance de la centrale

de

- rejeter toute conséquence du défaut de notification de l'arrêté du 12 janvier 2010

- rejeter l'argument tiré de l'illégitimité et de l'illicéité de la demande

- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la faute commise par ERDF et la responsabilité de celle-ci

- constatant la pérennité du tarif d'achat et la fiabilité de la technologie photovoltaïque

- constatant la fiabilité des prévisions de production d'énergie par la transmission de pièces afférentes à plusieurs dizaines de centrales en fonctionnement

- jugeant que la jurisprudence indemnise une telle hypothèse (contrat d'achat obligatoire à un tarif connu pour une durée déterminée) et la perte de marge sur le contrat perdu

- constatant que même l'application de la théorie de la perte de chance aboutit à l'indemnisation de près de 100 % de la perte de marge

- infirmer partiellement le jugement en ce qu'il a limité le quantum de l'indemnisation à une quote part du préjudice démontré

- par voie de conséquence, condamner ERDF devenue ENEDIS à lui payer une indemnité sur la base de la somme de 111.489 euros outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation

- jugeant qu'en tout état de cause, si l'arrêté du 12 janvier 2010 ne pouvait servir de base au calcul de l'indemnisation, la cour peut valablement l'évaluer à titre forfaitaire et non plus consécutivement au calcul lié à l'arrêté, à la somme de 111.489euros et condamner ENEDIS sur la base de ce montant

- condamner en outre ERDF devenue ENEDIS à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure et aux entiers dépens, distraits au profit de Maître RAMILLON.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions qu'elle vise expressément.

Une ordonnance en date du 18 octobre 2018 clôture la procédure.

Par message électronique du 15 novembre 2018 le conseil de la société A L'EAU SOLAIRE a adressé une note en délibéré avec un arrêt rendu le 25 octobre 2018 par le Conseil d'Etat, un arrêt. de la CJCE du 22 mars 1977 et un autre du 15 mars 1994.

Par courrier de son conseil notifié par voie électronique le 21 novembre 2018 la société ENEDIS a demandé à la cour d'écarter cette note en délibéré pour n'avoir pas été autorisée lors de l'audience de plaidoiries.

SUR CE

Attendu que l'article 445 du Code de procédure civile dispose qu'après la clôture des débats , les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444 ;

Qu'en l'espèce , alors que la cause n'a pas été communiquée au ministère public, les parties n'ont aucunement été invitées à fournir des explications de droit ou de fait ;

Qu'il convient donc de déclarer irrecevable la note en délibéré adressée par la société A L'EAU SOLAIRE qui n'a pas été autorisée à la produire ;

Attendu que le jugement entrepris n'est pas critiqué en ce qu'il a disjoint les cinq instances engagées devant lui ;

Que la demande de sursis à statuer formée devant le Tribunal par ERDF dans l'attente de l'examen la question préjudicielle pendante devant la Cour de Justice de l'Union Européenne est devenue sans objet ;

Attendu qu'il résulte du caractère contraignant de la délibération en date du 11 juin 2009 de la CRE , qui dispose d'un pouvoir réglementaire sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 février 2000, que le dépassement par ERDF du délai de six semaines dans lequel la proposition de raccordement (PDR) ou de trois mois dans lequel la PTF doit être transmise au demandeur et qui court à compter de la réception par le gestionnaire de réseau de la demande complétée, constitue un manquement fautif susceptible d'ouvrir droit à réparation ;

Qu'en l'espèce la société A L'EAU SOLAIRE justifie avoir adressé une demande de raccordement qui l'a déclarée complète le 20 juillet 2010 à ERDF qui ne l'a traitée ni dans le délai de six semaines ni même dans le délai de trois mois de la réception de la demande complète; que la société A L'EAU SOLAIRE a abandonné son projet initial et poursuivi son projet en 2011 avec une puissance supérieure mais aux nouvelles conditions d'achat de l'électricité prévues par l'arrêté du 4 mars 2011 ;

Qu'ainsi, et même si par ailleurs l'appelante n'a aucunement établi le caractère discriminatoire des modalités de traitement par ERDF des demandes de PTF ou de PDRqui lui ont été adressées en 2010, alors que notamment les procédures introduites devant l'Autorité de la Concurrence n'ont pas donné lieu à sanctions à l'encontre d'ERDF, les premiers juges ont a juste considéré que la SA ERDF a commis une faute en ne respectant pas le délai de réponse pour répondre à la demande de proposition de raccordement de la société A L'EAU SOLAIRE ;

Que d'ailleurs la société ENEDIS ne conteste plus le caractère fautif du dépassement du délai imparti pour l'instruction d'une demande de PTF ;

Attendu que dans le cadre de l'instance la société A L'EAU SOLAIRE demande la réparation du préjudice que lui a occasionné le retard d'ERDF dans la transmission de la proposition de raccordement et qui lui a interdit de lui notifier son acceptation à celle-ci avant le 2 décembre 2010, la privant ainsi du bénéfice du tarif d'achat de l'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil institué par l'arrêté du 12 janvier 2010 ;

Que la société A L'EAU SOLAIRE invoque ainsi comme fondement de son préjudice l'arrêté du 12 janvier 2010 dont ENEDIS demande à la cour de dire qu'il est illégal et que son application doit en tout état de cause être écartée car le tarif fixé par cet arrêté a le caractère d'une aide d'Etat qui n'a pas fait l'objet d'une notification préalable à la Commission européenne en violation de l'article 108 paragraphe 3 du TFUE ;

Qu'ainsi l'illégalité alléguée par l'intimée est de nature à paralyser les effets de cet arrêté et partant à interdire de fonder aucune demande, y compris sur le terrain délictuel ;

Attendu que, pour satisfaire au principe de primauté , les juridictions nationales ont l'obligation d'écarter le droit interne lorsqu'il est contraire au droit de l'Union européenne ;

Que le juge national chargé d'appliquer , dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit de l'Union, a l'obligation d'assurer le plein effet de ces normes en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu'il ait à demander ou à atteindre l'élimination préalable de celle-ci par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel (CJUE 22 juin 2010 [A] [V] et [V] [Y]) ;

Qu'ainsi sont inopérants les moyens tirés par la société A L'EAU SOLAIRE de la validation législative de l'arrêté du 12 janvier 2010 par la loi 2010-788 du 12 juillet 2010 dite loi GRENELLE II, et de ce que le19 janvier 2011 le Conseil d'Etat a refusé de déférer cette loi à la censure du Conseil Constitutionnel ;

Qu'est aussi inopérant le moyen tiré de l'existence ou du caractère annulable ou non de contrats d'achat en cours au profit d'autres producteurs d'électricité aux conditions prévues par les arrêtés tarifaires du 10 juillet 2006 et du 12 janvier 2010 ;

Attendu que le juge national ne peut se substituer à la Commission pour apprécier la compatibilité d'une disposition; qu'il lui incombe de veiller à la sauvegarde, jusqu'à la décision finale de la Commission, des droits des justiciables face à une méconnaissance éventuelle, par les autorités étatiques, de l'interdiction visée à l'article 108, paragraphe 3, TFUE et de rejeter une demande en indemnisation fondée sur l'absence de perception d'une aide d'Etat illégale au regard du droit de l'Union européenne ;

Que ni l'arrêté tarifaire du 10 juillet 2006, ni l'arrêté tarifaire du 12 janvier 2010 n'ont fait l'objet d'une notification préalable à la Commission européenne ainsi qu'il résulte de la réponse du ministre des affaires européennes publiée au Journal Officiel le 27 septembre 2016 ;

Que ces deux arrêtés prévoient au profit des producteurs d'énergie photovoltaïque une rémunération à un tarif supérieur à celui qu'ils auraient pu obtenir sur le marché de l'électricité, dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité ; que le mécanisme en cause, instauré par la réglementation nationale, d'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché doit être considéré comme une intervention de l'Etat ou au moyen des ressources d'Etat comme l'a dit la CJUE dans son ordonnance du 15 mars 2017 ;

Que cette aide s'adresse uniquement aux producteurs d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil et à aucun autre ; que les bénéficiaires concernés par ces arrêtés opèrent sur le marché de l'électricité libéralisé caractérisé par des échanges transfrontières de sorte que cet avantage est susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres, ce traitement avantageux faussant donc la concurrence ;

Qu'il convient d'en conclure que le mécanisme prévu par l'arrêté du 12 janvier 2010 tout comme celui prévu par l'arrêté du 10 juillet 2006 constituent des aides d'Etat au sens de l'article 107, paragraphe1, TFUE, mises à exécution en méconnaissance des obligations découlant de l'article 108, paragraphe 3, TFUE car ils devaient faire l'objet de notification préalable ; que d'ailleurs dans sa décision du 10 février 2017 intitulée 'aide sous la forme de tarifs d'achat pour le développement d'installations photovoltaïques' prise à la suite de la notification de l'arrêté tarifaire du 4 mars 2011, qui est venu remplacer l'arrêté du 12 janvier 2010 ,en prévoyant un tarif beaucoup moins attractif que les précédents pour les producteurs selon les écritures mêmes de la société A L'EAU SOLAIRE, la Commission européenne a considéré ce tarif d'achat constituait une aide d'Etat ; que le 10 février 2017 la Commission a ainsi autorisé trois régimes français d'aides aux producteurs d'énergie solaire et hydrolélectrique après avoir apprécié les trois régimes au regard des règles de L'Union Européenne en matière d'aides d'Etat, qui garantissent un recours limité au fonds publics et l'absence de surcompensation , en veillant à ce que soient limitées les distorsions de concurrence engendrées ;

Que dans sa décision du 10 février 2017, par laquelle la Commission s'est prononcée sur la compatibilité de l'arrêté du 4 mars 2011 modifié par les arrêtés des 26 juin et 30 octobre 2015 et le décret 2016-691 du 28 mai 2016, celle-ci n'a aucunement validé, comme le soutient à tort la société A L'EAU SOLAIRE, les arrêtés qui précédaient celui qui a été pris le 4 mars 2011; que cette décision n'a pas non plus considéré que de telles aides seraient exemptées de l'obligation de notification en vertu notamment du Règlement communautaire du 6 août 2008 ou encore de celui du 17 juin 2014 ou encore en vertu de la Directive du 23 avril 2009, 2009/28/CE lue en combinaison avec les articles 107 ,3° b, c et e et 109 du TFUE ;

Attendu qu'il importe peu s'agissant de l'arrêté du 10 juillet 2006 que les pouvoirs de la Commission en matière de récupération d'aide d'Etat soient soumis à une prescription de dix ans, alors qu'en l'espèce il n'est pas question de remboursements d'aide, ENEDIS opposant par voie d'exception l'illégalité de ce tarif dont la société A L'EAU SOLAIRE sollicite le bénéfice à titre subsidiaire ;

Que c'est vainement que la société A L'EAU SOLAIRE invoque les dispositions régissant les aides 'de minimis' à savoir des aides ne dépassant pas 200.000 euros par tranches de trois ans, accordées à une seule entreprise, et qui n'ont donc pas vocation à s'appliquer à une aide d'Etat octroyée à l'ensemble d'une filière, et pour une durée alléguée de vingt ans;

Attendu que si le propre de la responsabilité civile est de rétablir l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit, cette règle ne peut conduire à reconstituer un avantage illicite ;

Qu'en conséquence , en raison de l'illégalité du tarif institué par l'arrêté du 12 janvier 2010 pour n'avoir pas fait l'objet de notification préalable à la Commission européenne, la société A L'EAU SOLAIRE ne peut obtenir réparation d'un préjudice né de son impossibilité de bénéficier dudit tarif consécutif à un retard D'ERDF dans le traitement de sa demande de raccordement au réseau , calculé, même subsidiairement, uniquement par référence à un arrêté illégal au regard du droit communautaire ;

Qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a alloué des dommages et intérêts et une indemnité de procédure et, statuant à nouveau, de la débouter de toutes ses prétentions financières ;

Attendu que les dépens de première instance et d'appel seront donc mis à la charge de la société A L'EAU SOLAIRE dont les prétentions ont été rejetées ;

Qu'il serait inéquitable de laisser à la charge D'ENEDIS la totalité des frais irrépétibles qu'elle a exposés; qu'il convient de condamner la société A L'EAU SOLAIRE à lui payer une indemnité de procédure de 3.000 euros;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant, publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare irrecevable la note en délibéré adressée par la société A L'EAU SOLAIRE ;

Infirme le jugement rendu le 19 mai 2016 en ce qu'il a prononcé des condamnations à l'encontre de la société ERDF ;

Statuant à nouveau sur ce point et y ajoutant,

Dit que le préjudice invoqué par la société A L'EAU SOLAIRE n'est pas réparable ;

Déboute la société A L'EAU SOLAIREde toutes ses demandes ;

Condamne la société A L'EAU SOLAIRE à payer à ENEDIS la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la société A L'EAU SOLAIRE aux entiers dépens de première instance et d'appel, autorise pour ceux d'appel et au profit de Maître GRIMAUD, Avocat, le droit de recouvrement direct prévu par l'article 699 du Code de procédure civile.

SIGNE par Madame CLOZEL-TRUCHE, Président et par Monsieur STICKER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17/02278
Date de la décision : 17/01/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-17;17.02278 ?
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