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15/01/2019 | FRANCE | N°17/00694

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 15 janvier 2019, 17/00694


N° RG 17/00694 - N° Portalis DBVM-V-B7B-I4I4

DJ

N° Minute :













































































Copie exécutoire délivrée



le :

à :



Me Andrée J...



la X...







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE





1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 15 JANVIER 2019







Appel d'un Jugement (N° R.G. 13/05317)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE

en date du 08 décembre 2016

suivant déclaration d'appel du 08 Février 2017



APPELANTE :



Madame Nathalie Y...

née le [...] à LOUDEAC

de nationalité Française

[...]



représentée par Me Andrée J..., avocat au bar...

N° RG 17/00694 - N° Portalis DBVM-V-B7B-I4I4

DJ

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Andrée J...

la X...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 15 JANVIER 2019

Appel d'un Jugement (N° R.G. 13/05317)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE

en date du 08 décembre 2016

suivant déclaration d'appel du 08 Février 2017

APPELANTE :

Madame Nathalie Y...

née le [...] à LOUDEAC

de nationalité Française

[...]

représentée par Me Andrée J..., avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉE :

Le GROUPE JURIS pris en la personne de son représentant légal domicilié [...]

représenté par Me Catherine Z... de la X..., avocat au barreau de GRENOBLE postulant et plaidant par Me Maïté A..., avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Hélène COMBES, Président de chambre,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Madame Joëlle BLATRY, Conseiller,

Assistées lors des débats de Madame Anne BUREL, Greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 03 Décembre 2018, Madame B... été entendue en son rapport.

Maître Maïté A... a été entendue en ses observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE

La Sarl LST Finances, société holding à vocation de prise de participation dans la société LST Groupe, a été constituée le 7 juillet 1995 entre Nathalie Y..., Roger C..., Alain D..., Bernard D..., Philippe E..., Christophe F....

Parallèlement à la constitution de la société, les associés ont régularisé, le 7 juillet 1995, un protocole visant principalement à définir les conditions de départ des associés et la détermination du prix de cession des parts.

Les statuts de la société, le pacte d'associés ainsi que les actes de cession de parts intervenus ultérieurement au profit de Gilbert G..., le 24 juin 1998, et de Thierry H..., le 4 janvier 2002, ont été rédigés par Maître Olivier I..., avocat associé de la Selas Groupe Juris.

En janvier 2007, Alain et Bernard D... ont été licenciés de la société LST Groupe et se sont heurtés au refus du rachat de leurs parts par Nathalie Y... et Roger C....

Ils ont saisi le tribunal de commerce. Par arrêt du 11 février 2010, la cour d'appel de Lyon a confirmé l'obligation faite à Nathalie Y... et Roger C... d'acquérir les parts des consorts D....

Soutenant que Maître Olivier I..., décédé depuis, avait manqué d'une part à son devoir de conseil pour ne pas avoir invité les deux nouveaux associés à adhérer au protocole de 1995, et d'autre part à son obligation d'information pour ne pas l'avoir suffisamment informée sur la portée de la méthode d'évaluation du rachat des parts, Nathalie Y... a, par acte du 19 décembre 2013, assigné la Selas Groupe Juris devant le tribunal de grande instance de Grenoble en responsabilité et en paiement de dommages et intérêts.

Par jugement du 8 décembre 2016, le tribunal a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la Selas Groupe Juris,

- dit recevable l'action en responsabilité contractuelle formée par Nathalie Y... à l'encontre de la Selas Groupe Juris,

- rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par Nathalie Y... à l'encontre de la Selas Groupe Juris,

- rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts formulée par la Selas Groupe Juris,

- condamné Nathalie Y... à payer à la Selas Groupe Juris la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Nathalie Y... a relevé appel le 8 février 2017.

Dans ses dernières conclusions du 11 octobre 2018, elle demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit son action recevable et a rejeté les demandes reconventionnelles de la Selas Groupe Juris,

- l'infirmer pour le surplus,

- dire que la responsabilité contractuelle de la Selas Groupe Juris, au sein de laquelle Maître Olivier I... a exercé ses fonctions, est engagée,

- dire que la Selas Groupe Juris sera condamnée à l'indemniser de son entier préjudice,

- condamner la Selas Groupe Juris à lui payer les sommes de :

372.479,38 euros au titre de son préjudice financier,

50.000 euros en réparation de son préjudice moral,

outre intérêts tels que prévu par le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 3 mars 2009 confirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 11 février 2010,

- condamner la Selas Groupe Juris à lui verser la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Elle fait valoir, sur le moyen tiré de la prescription de son action, que ce n'est qu'à partir de la date de l'arrêt de la cour d'appel du 11 février 2010 qui l'a obligée à racheter les parts des consorts D..., que l'obligation de rachat et le mode de calcul de la valeur des parts sont devenus certains et que le délai de prescription a commencé à courir.

Sur le fond, elle expose que les nouveaux associés n'ont pas adhéré au pacte d'associés de sorte que, lors du rachat des parts des consorts D..., ils n'ont pas été inquiétés.

Elle reproche à Maître Olivier I... de ne pas avoir conseillé les associés d'origine sur la nécessité de faire signer le protocole d'associés aux nouveaux associés alors qu'il connaissait les conséquences de son non-respect, étant le rédacteur des actes et lui-même associé de la société LST Groupe.

Elle lui reproche également d'avoir commis une erreur grossière en prévoyant que la valorisation des parts de l'associé sortant serait effectuée au regard des capitaux propres de la société LST Finances et d'avoir manqué à son obligation d'information des associés sur la portée de cette clause.

Elle soutient que les différentes procédures qui l'ont opposée aux consorts D..., outre les autres rachats de parts qu'elle a dû faire pour les parts de Philippe E... et Gilbert G..., trouvent leur origine dans les fautes commises par Maître Olivier I... ;

que son préjudice financier correspond aux sommes réclamées en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 11 février 2010 ;

que les consorts D... ont en outre, par le refus de lever l'hypothèque, mis en échec la vente d'un bien immobilier et de sa résidence principale.

Dans ses dernières conclusions du 5 juillet 2017, la Selas Groupe Juris demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir relative à la prescription,

- dire l'action de Nathalie Y... prescrite,

- subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'absence de manquement au devoir de conseil et d'information de Maître Olivier I... et l'absence de préjudice en lien de causalité,

- constater l'attitude abusive de Nathalie Y...,

- condamner Nathalie Y... à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner Nathalie Y... à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Elle soutient que le grief le plus récent que fait Nathalie Y... à l'encontre de Maître Olivier I... date de 2007, lorsque les consorts D... l'ont assignée devant le tribunal de commerce pour qu'il soit fait application des dispositions du pacte d'associés ;

que l'action introduite plus de 6 ans plus tard est par conséquent prescrite.

Subsidiairement, elle réplique sur le fond que :

- Maître Olivier I... a exécuté sa mission de rédaction du protocole d'associés avec professionnalisme,

- la méthode d'évaluation des parts sociales tenant compte des capitaux propres est classique et reconnue,

- Nathalie Y..., signataire dès sa rédaction du pacte d'associés, connaissait la disposition prévoyant l'obligation pour tout nouvel associé d'adhérer au protocole,

- les prétendues fautes de Maître Olivier I... n'ont aucun lien de causalité avec le préjudice allégué,

- Nathalie Y... aurait dû acquérir les parts des associés du groupe 'B' qu'elle a abusivement licenciés,

- quoi qu'il en soit, l'acceptation de Nathalie Y... au rachat des parts a toujours été claire et non équivoque, comme l'ont constaté le tribunal de commerce puis la cour d'appel.

Elle soutient que la procédure engagée par Nathalie Y... est abusive et injustifiée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

Nathalie Y... agit à l'encontre de la Selas Groupe Juris sur le fondement de la responsabilité civile contractuelle.

En application de l'article 2224 du code civil, cette action se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

La prescription d'une action en responsabilité contractuelle ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

En l'occurrence, Nathalie Y... reproche à la Selas Groupe Juris des manquements à son devoir de conseil et à son obligation d'information l'ayant contrainte à racheter les parts sociales de deux associés dans des conditions non conformes aux statuts et au pacte d'associés.

Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la date à laquelle Nathalie Y... a eu connaissance des faits lui permettant d'exercer son action n'est pas l'arrêt de condamnation de la cour d'appel de Lyon, mais la demande de rachat des parts sociales formée par les associés, Alain et Bernard D....

En effet, c'est à partir de cette demande, formalisée par courriers recommandés des 27 et 28 février 2007 puis par assignation en référé devant le tribunal de commerce le 23 juillet 2007, que le dommage allégué s'est révélé.

Or Nathalie Y... a assigné la Selas Groupe Juris le 19 décembre 2013, soit plus de six ans plus tard, de sorte que son action est prescrite.

Le jugement sera donc infirmé et Nathalie Y... déclarée irrecevable en ses demandes.

En l'absence de démonstration d'un abus dans l'exercice de l'action en justice, la Selas Groupe Juris sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

L'équité commande que Nathalie Y... lui verse une indemnité de procédure pour les frais, non compris dans les dépens, exposés dans cette instance.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

- Infirme le jugement déféré,

- statuant à nouveau, déclare Nathalie Y... irrecevable en son action,

RG N° 17/00694 page 5

- Déboute la Selas Groupe Juris de sa demande dommages et intérêts,

- Condamne Nathalie Y... à payer à la Selas Groupe Juris la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne Nathalie Y... aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame COMBES, Président, et par Madame BUREL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 17/00694
Date de la décision : 15/01/2019

Références :

Cour d'appel de Grenoble 01, arrêt n°17/00694 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-15;17.00694 ?
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