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12/10/2017 | FRANCE | N°16/03244

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 12 octobre 2017, 16/03244


RG N° 16/03244

AME

N° Minute :



























































Copie exécutoire

délivrée le :







la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE





la SELARL CABINET ALEXANDRA WIEN





Me Chantal PILLET







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE

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CHAMBRE COMMERCIALE



ARRÊT DU JEUDI 12 OCTOBRE 2017







Appel d'une décision (N° RG 2016J39)

rendue par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 01 juin 2016

suivant déclaration d'appel du 30 juin 2016





APPELANTS :



Monsieur [B] [E]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]


...

RG N° 16/03244

AME

N° Minute :

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE

la SELARL CABINET ALEXANDRA WIEN

Me Chantal PILLET

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 12 OCTOBRE 2017

Appel d'une décision (N° RG 2016J39)

rendue par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 01 juin 2016

suivant déclaration d'appel du 30 juin 2016

APPELANTS :

Monsieur [B] [E]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Madame [F] [R] épouse [E]

née le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Madame [E] [E]

née le [Date naissance 3] 1932 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Delphine DUMOULIN de la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me HANNOUN et Me DORE du cabinet LANTOURNE, avocats au barreau de PARIS, plaidants

INTIMES :

Madame [A] [O] épouse [K]

née le [Date naissance 4] 1980 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Monsieur [M] [O]

né le [Date naissance 5] 1985 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Madame [K] [O]

née le [Date naissance 6] 1986 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Monsieur [D] [O]

né le [Date naissance 7] 1989 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Monsieur [S] [O]

né le [Date naissance 8] 1952 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Alexandra WIEN de la SELARL SELARL CABINET ALEXANDRA WIEN, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me Edouard BERTRAND, avocat au barreau de LYON, plaidant

SELARL ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES PARTENAIRES ' AJP es qualité de liquidateur judiciaire de la SOCIÉTÉ SAUMUROISE DE PARTICIPATION (SSP) et de la SOCIÉTÉ CIVILE DES TERRES FROIDES (SCTF)prise en la personne de Maître [V] [Q] domicilié audit siège

[Adresse 4],

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Chantal PILLET, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me Jean-Marie CHANON, avocat au barreau de LYON, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Hélène COMBES, Président de chambre,

Madame Fabienne PAGES, Conseiller,

Madame Anne-Marie ESPARBÈS, Conseiller,

Assistées lors des débats de Magalie COSNARD, Greffier.

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 septembre 2017

Madame ESPARBÈS, conseiller, a été entendue en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,

------0------

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS

La société [E] Industries, groupe français et familial créé en 1912, exerce une activité dans le domaine des textiles techniques (12 filiales également situées à l'étranger, près de 2.000 salariés).

Son capital social divisé en 45.609 actions est détenu à hauteur de':

- 63,47 % par la holding Saumuroise de Participations (SSP) (28.947 actions)

dont le capital est détenu à hauteur de 69,60 % par la sous-holding la société civile des Terres Froides (SCTF), laquelle détient aussi directement 3,82'% de la société [E] Industries (1.742 actions),

- 16,2 % par divers établissements financiers,

- 4.432 actions par la société LETRA ([Z] [E])

- 6,7 % par d'autres membres de la famille [E] notamment les héritiers de M. [X] [E] (dont fait partie Mme Veuve [E] [E] 3.016 actions) et les héritiers de [L] [E] épouse [O] leur fille (5 actions), [B] [E] détenant directement 4 actions et [F] [E] son épouse détenant 1 action.

Depuis de nombreuses années, un conflit grave oppose les membres de la famille [E] au sein des structures sociétales.

Concernant notamment la holding SSP, sont rappelées les décisions essentielles :

- le jugement du 12 mars 2009 du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu saisi par Monsieur [X] [E] fondateur, confirmé par arrêt du 31 mars 2011 dont pourvoi a été rejeté, a prononcé la dissolution de la société SCTF et de la société SSP,

- l'ordonnance du 30 juin 2011 du président du tribunal de commerce de Vienne saisi par les consorts [O] a désigné M. [U] [W] en qualité de liquidateur de la société SSP,

- l'ordonnance du 24 janvier 2012 a remplacé ce dernier par Maître [V] [Q] qui a obtenu le renouvellement de son mandat de liquidateur pour 3 ans par ordonnances successives des 5 juin 2014 (celle-ci confirmée par arrêt du 5 mars 2015) et du 20 juin 2017,

- le 16 décembre 2015, le Ministère de l'économie de l'industrie et du numérique a, au visa de l'article L.151-3 du code monétaire et financier relatif à l'application de la réglementation des investissements étrangers en France, autorisé la société FII Co à acquérir le contrôle de la société [E] Industries'; les appelants ont engagé une procédure de contestation administrative.

Maître [V] [Q] es-qualités a obtenu un accord de reprise pour 100 % du capital de la société [E] Industries qui a conduit à un contrat de cession d'actions conclu le 18 mai 2015 sous diverses conditions suspensives et résolutoires entre les sociétés SCTF, SSP et LETRA cédants et le cessionnaire nommé société FII Co détenue par le groupe Warwick. Le prix définitif est fixé à 50.100.460,83 euros soit 1.099,49 euros par action cédée.

Par un premier avenant signé à partir du 15 juin 2015, quatre actionnaires financiers (SI Participations, Siparex Développement, CITA et CLCI) ont adhéré à la cession (participation de 7,50%). Par un second avenant signé à partir du 24 juin 2015, la société Natixis a rejoint les cédants. Seule, la BNP (8,7%) y est restée étrangère.

Un jugement du 4 février 2016 du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu, rejetant les demandes de M. [B] [E] et Mme [E] [E], a autorisé La société AJ Partenaires représentée par Maître [V] [Q] (AJP) demandeur à l'instance es-qualités de liquidateur de SCTF à céder les 1.742 actions détenues directement par la société SCTF dans la société [E] Industries ainsi qu'à voter lors de l'assemblée générale à venir de la société SPP en faveur du projet de cession des 28.947 actions détenues dans la société [E] Industries par la société SSP dont la société SCTF est actionnaire.

Un arrêt du 7 juin 2016 de la première chambre civile de la cour, déféré à la cour de cassation, a confirmé le jugement.

Précédemment, par exploit à jour fixe du 10 mars 2016, la société AJ Partenaires es-qualités de liquidateur de SSP a fait assigner les personnes physiques et morales actionnaires de la société SSP devant le tribunal de commerce de Vienne qui, par jugement du 1er juin 2016 prononcé au visa des articles 47 du code de procédure civile ainsi que 1844-8 et 1168 du code civil a :

- rejeté comme non fondée la demande de dépaysement et de renvoi à une autre juridiction,

- rejeté la demande de sursis à statuer,

- rejeté les fins de non-recevoir,

- déclaré recevables, fondées et justifiées toutes les demandes formulées par la société AJ Partenaires,

- constaté que, dans le cadre du mandat de liquidateur qui lui a été confié par les présidents du tribunal de commerce de Vienne et du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu à la suite des jugements ayant autorité de chose jugée qui ont prononcé la dissolution de la société SSP et de la SCTF, le liquidateur a rempli sa mission en signant un contrat de cession avec la société FII Co Sarl (groupe WARWICK) qui, en prévoyant les conditions de rachat des titres de la société [E] Industries détenus tant par les sociétés holding dissoutes que par les actionnaires financiers de la société [E] Industries, permet de réaliser la liquidation des sociétés dissoutes, mais aussi crée des conditions favorables à la reprise du développement du «'groupe'»[E] Industries,

- constaté que le projet de cession a obtenu à ce jour l'accord des salariés et celui de la quasi-totalité des actionnaires financiers,

- constaté que, parmi les actionnaires familiaux, seuls les consorts [E] se déclarent à ce jour opposés au projet de cession,

- constaté plus particulièrement que les consorts [O], qui n'ont pas été associés au processus de sélection du cessionnaire, se manifestent aujourd'hui en faveur de projet de cession,

- dit juste et sérieux le projet de cession au profit de la société FII Co Sarl,

- débouté M. [B] [E], Mme [E] [E] et Mme [F] [E] de toutes leurs demandes tant à titre principal que subsidiaires, notamment leurs demandes reconventionnelles,

- jugé que les contrats de cession d'action signés le 18 mai 2015 et ses avenants représentent les droits des associés de la société SSP,

- jugé que la société AJ Partenaires es-qualités est autorisée à céder les actions de la société [E] Industries détenues par la société SSP à l'occasion de l'assemblée générale extra-ordinaire (AGE) de cette société qui sera appelée à délibérer sur le projet de cession en application de l'article L.273-8 du code de commerce,

- jugé que, sous réserve du vote favorable de l'AGE de la société SSP, la société AJ Partenaires es-qualités est autorisée à céder les 28.947 actions de la société [E] Industries détenues par la société SSP au profit de la société FII Co Sarl,

- dit que les frais de la présente instance seront compris dans les frais de liquidation,

- condamné solidairement M. [B] [E], Mme [F] [E] et Mme [E] [E] à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile'à la société AJ Partenaires es-qualités une indemnité de 30.000 euros et aux consorts [O] une indemnité de 20.000 euros ,

- prononcé l'exécution provisoire,

- rejeté tous autres moyens, fins et conclusions des parties,

- condamné solidairement M. [B] [E], Mme [F] [E] et Mme [E] [E] à tous les dépens de l'instance.

A la suite de ce jugement, la société [E] Industries a convoqué ses actionnaires dont la société SSP à une AGE fixée au 18 mai 2016.

La veille 17 mai 2016, M. [B] [E] a indiqué exercer son droit de préemption sur les actions vendues par la société SSP.

La demande d'ajournement de l'AGE sollicitée par M. [B] [E], Mme [F] [E] et Mme [E] [E] a été rejetée par ordonnance de

référé du 17 mai 2016. Un arrêt de cette cour (RG 16/2478), prononcé le même jour que le présent arrêt le 12 octobre 2017, a confirmé l'ordonnance.

Puis, la cession a été signée le 3 juin 2016 dès lors que les conditions suspensives étaient réalisées.

Appelants par acte du 30 juin 2016 et par conclusions du 4 juillet 2017, M. [B] [E], Mme [F] [E] et Mme [E] [E] ont sollicité par voie de réformation sur le fondement des articles 4, 5, 16, 17, 31, 117, 122 et suivants du code de procédure civile ainsi que les articles 1844-8, 1884-9 du code civil, le principe fraus omnia corrumpit, encore les articles L.237-8 et L.235-1 du code de commerce :

- à titre principal, d'annuler l'acte introductif d'instance, d'annuler le jugement déféré et d'inviter la partie la plus diligente à saisir une juridiction située dans un ressort autre que ceux des cours d'appel de Lyon et Grenoble,

- à titre subsidiaire, de déclarer irrecevables les demandes du liquidateur,

- à titre infiniment subsidiaire, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

- de débouter la société AJ Partenaires de toutes ses demandes,

- de déclarer nuls et de nul effet l'acte de cession d'actions du 18 mai 2015 et ses deux avenants, pour':

défaut de pouvoir du liquidateur en raison de la rétractation de l'ordonnance l'ayant défini,

défaut d'autorisation préalable des actionnaires de la société SSP,

fraude aux droits de la société [E] Industries, de la société SSP, de la société SCTF et de Mme [E] [E], Mme [F] [E] et M. [B] [E],

- de procéder au remplacement du liquidateur des sociétés SSP et SCTF et désigner tel autre liquidateur,

- en tout état de cause, de condamner AJP es-qualités à verser à chacun des appelants la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de la Scp Gallizia Dumoulin Alvinerie.

Par conclusions du 18 juillet 2017, au visa notamment des textes et de la jurisprudence en matière de liquidation, la société AJ Partenaires représentée par Maître [V] [Q] es-qualités de liquidateur de la société Saumuroise de Participations (SSP) a demandé à la cour :

- de juger valide l'acte introductif d'instance et par conséquent le jugement intervenu,

- de déclarer recevables et fondés les moyens, fins et conclusions qu'elle développe,

- de juger valide l'acte de cession du 18 mai 2015 et ses avenants,

- de rejeter comme non fondée la demande des appelants concernant le remplacement du liquidateur,

- de confirmer en conséquence le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- de juger abusif l'appel formé par les trois appelants et de condamner ces derniers solidairement ou in solidum à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, outre une indemnité complémentaire de 100.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- avec charge des entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions du 18 novembre 2016, Mme [A] [O] épouse [K], M. [M] [O], Mme [K] [O], M. [D] [O] ainsi que M.

[S] [O] en sa qualité de gérant de l'indivision successorale de Mme [L] [O], son épouse décédée le [Date décès 1] 2002 (les consorts [O]) demandent à la cour, par voie de confirmation et au visa des articles 47, 66, 325 et 329 du code de procédure civile ainsi que 1844-8 du code civil :

- de constater que la décision ayant prononcé la dissolution des sociétés SCTF et SSP a autorité de chose jugée et que la société AJ Partenaires a reçu un mandat des présidents du tribunal de commerce de Vienne et du tribunal de grande instance de de Bourgoin-Jallieu pour procéder à la dissolution de la société SSP et de la SCTF,

- de constater que la société AJ Partenaires a trouvé un acquéreur, le groupe Warwick, pour reprendre le capital de la société [E] Industries, a rempli sa mission de façon positive dans un contexte particulièrement difficile et conformément au droit applicable,

- de constater que le processus de cession est allé à son terme malgré le conflit de l'actionnariat familial, que le climat social a été protégé et que les salariés se sont manifestés en faveur du projet de cession soumis à l'appréciation du tribunal,

- de constater que les autres actionnaires dont les établissements financiers se sont manifestés en faveur du projet de cession,

- de constater que l'indivision [O] n'a pas été associée au processus de sélection du cessionnaire et qu'elle n'en découvre les conditions qu'à l'occasion de la présente instance, qu'elle donne son accord sur les termes et conditions du contrat de cession d'actions du 18 mai 2015 et de ses avenants,

- de constater que les conditions de dépaysement des procédures régies par l'article 47 du code de procédure civile ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce et de débouter les appelants de leur demande de dépaysement,

- de débouter également ces derniers de leur demande de nullité de l'assignation introductive d'instance,

- de juger que le jugement querellé n'est pas entaché de violation du principe du contradictoire,

- de juger que le contrat de cession d'actions du 18 mai 2015 et ses avenants au profit du groupe Warwick respectent les droits des associés de la société SSP dont l'indivision [L] [O] représente la moitié,

- de faire droit aux demandes de la société AJ Partenaires,

- de débouter les appelants de toutes leurs demandes formées tant à titre principal que subsidiaire,

- de condamner solidairement ces derniers au paiement aux enfants [O] de la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Nonobstant des conclusions d'incident aux fins de communication de pièces notifiées le 19 juillet 2017, l'ordonnance de clôture a été rendue le 20 juillet 2017 à la date prévue, dont les parties avaient été informées.

***

*

MOTIFS

I ' Sur la demande de communication de pièces

Les appelants demandent qu'il soit fait injonction à la société AJ Partenaires de communiquer aux débats l'intégralité des documents contractuels et avenants intervenus entre les parties au contrat de cession.

Ils dénoncent l'échec de leurs sommations de communiquer, l'opacité de la cession et le caractère choisi des éléments produits par la société AJ Partenaires, qui ne permettraient pas à la juridiction de se prononcer objectivement et impartialement.

Ils précisent qu'ils ont découvert, sur communication récente de la société AJ Partenaires que la convention de séquestre conclue le 3 juin 2016, qui devait concerner tous les cédants, n'a été conclue qu'avec les deux vendeurs la

société SSP et la société SCTF, laissant penser que les autres cédants auraient conclu d'autres accords, encore sous la condition qu'ils aient maintenu leur participation à la cession.

Ils invoquent une atteinte au principe du contradictoire et de loyauté des débats.

Ce à quoi il est répondu :

- qu'il est justifié par les intimés de l'effectivité de la cession par l'ensemble des cédants visés à l'acte du 18 mai 2015 et ses deux avenants,

- que le séquestre du prix ne constitue qu'une modalité de paiement de ce prix et que la cour, comme le premier juge, est saisie non pas d'un litige relatif au paiement, mais d'un litige concernant le principe même de la validité de la cession,

- qu'aucune déloyauté n'est démontrée à l'encontre de la société AJ Partenaires dont il n'est pas prouvé non plus qu'elle ait enfreint le principe de la contradiction.

Il n'y a pas lieu d'ordonner la production par la société AJ Partenaires de l'intégralité des documents contractuels sollicités par les appelants.

II - Sur les moyens de procédure

- Sur les moyens de nullité

A titre principal, les appelants soulèvent deux causes d'annulation du jugement déféré pour opérer renvoi de la cause devant les premiers juges.

1- La première tient, sur le fondement de la nullité de fond de l'article 117 du code de procédure civile, à un vice affectant prétendument l'acte introductif d'instance, en ce sens que selon les appelants la société AJ Partenaires qui a introduit l'instance en qualité de liquidateur de la société SSP aurait dû faire désigner un mandataire ad'hoc pour représenter la société SCTF en qualité de défenderesse et ainsi «'éviter une position procédurale schizophrénique intenable'».

Le défaut de capacité du mandataire judiciaire n'étant pas évoqué, c'est donc son défaut de pouvoir qui est visé, étant rappelé que le défaut de qualité n'est pas une cause de nullité mais serait une fin de non-recevoir (article 122 du code de procédure civile).

Il est constant que la société AJ Partenaires a été désigné liquidateur tant de la société SSP que de la société SCTF, qui sont deux personnes morales distinctes, par des décisions ayant non seulement autorité de chose jugée mais aussi force de chose jugée.

Dès lors la société AJ Partenaires détient seule le pouvoir de représenter l'une et l'autre des deux sociétés jusqu'à clôture de la liquidation.

Les appelants n'allèguent ni ne justifient en quoi les intérêts de celles-ci seraient divergents au point de rendre nécessaire la désignation d'un

mandataire ad'hoc pour représenter la société SCTF, qui est l'actionnaire majoritaire de la société SSP.

Le moyen sera écarté.

2 - La deuxième cause d'annulation indiquée par les appelants tient, sur le

fondement de l'article 16 du code de procédure civile, à la prétendue violation par le tribunal du principe du contradictoire, eu égard au fait qu'ils auraient appris par la lecture du jugement déféré que M. [W] [P], M. [I] [H] et M. [O] [A] (autres actionnaires) avaient adressé chacun un courrier au tribunal, respectivement aux dates des 21 mars, 22 mars et 15 avril 2016, courriers par lesquels ils ont soutenu les initiatives de la société AJ Partenaires.

En réponse, la société AJ Partenaires réplique à bon droit que ces courriers n'ont pas faussé le débat au fond dès lors que la juridiction de première instance ne les a pas évoqués dans sa motivation.

Il est ajouté que les appelants, seuls actionnaires familiaux opposant à la cession, ne démontrent pas la nouveauté de la position (accord sur la cession) exprimée par ces trois actionnaires, que les appelants n'ont d'ailleurs pas intimés en cause d'appel.

Le moyen manque de sérieux et sera écarté.

Les appelants sont ainsi déboutés de leurs moyens de nullité de l'acte introductif d'instance et du jugement.

- Sur le dépaysement

Au visa de l'article 47 du code de procédure civile, les appelants demandent à la cour d'inviter la partie la plus diligente à saisir une juridiction située dans un ressort autre que ceux des cours d'appel de Lyon et Grenoble au motif que Maître [V] [Q] est auxiliaire de justice désigné en qualité de seul représentant de la société SSP.

La demande est irrecevable comme tardive.

En effet, elle aurait dû être formée, comme l'indique le texte de l'article 47 in fine, dès connaissance de la cause de renvoi. Or, la qualité de Maître [V] [Q] est connue des appelants depuis sa désignation.

Elle est de surcroît infondée, étant rappelé que la société AJ Partenaires (Maître [V] [Q]) n'est pas mise en cause dans ce litige à titre personnel mais en qualité de représentant judiciairement désigné d'une personne morale.

Il est ajouté que la thèse des appelants conduirait à nier aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires, mandataires ad hoc (...) tout droit d'agir en justice devant le tribunal situé dans leur sphère de compétence territoriale, ce qui n'a aucun sens.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a écarté la demande de dépaysement.

- Sur le défaut de pouvoir du liquidateur

Les appelants prétendent qu'il n'entrait pas dans les pouvoirs du liquidateur de céder globalement les actifs de la société SSP et donc, qu'il ne pouvait saisir

la juridiction consulaire sur ce point.

Ils prennent prétexte que l'ordonnance du 30 juin 2011, qui a prescrit la mission au liquidateur initialement désigné à savoir M. [U] [W] plus tard remplacé sur sa demande par Maître [V] [Q] suivant ordonnance du 24 janvier 2012, n'a visé que l'article 1844-8 du code civil alors que la requête se fondait sur les «'articles 1844-8 et suivants'».

Cela conduirait selon eux par l'application de l'article 1844-9 du code civil ainsi que par l'application des dispositions relatives au droit commun du partage, à exiger du liquidateur qu'après paiement des dettes et remboursement du capital social, il partage l'actif entre les associés.

Autrement dit, les appelants préconisent un partage des actifs de la société SSP en nature.

Mais l'ordonnance sus-visée, prononcée au visa notamment «'des articles 1844-8 du code code civil'» s'est nécessairement fondée sur les articles suivants, qui lui sont évidemment liés.

De surcroît, les appelants savent que la liquidation de la société SSP, liée à celle de la sous-holding SCTF son associé majoritaire, est destinée, après échec d'une tentative de fusion-absorption, à conduire à la dissolution judiciairement ordonnée des deux sociétés pour éviter la mise en péril du groupe [E] Industries.

Ils savent tout autant que les difficultés majeures tenant à la mésentente profonde entre les associés ne peuvent conduire à un partage en nature, à défaut d'accord.

Les appelants n'apportent pas davantage la preuve de la possibilité du paiement des dettes et du remboursement du capital social de la société SSP qui permettrait ensuite un partage en nature des actifs restants entre associés, de sorte que la société AJ Partenaires est bien fondée à soutenir qu'elle dispose des pouvoirs les plus étendus pour réaliser l'actif, voire, en l'état de l'impossibilité d'un partage en nature, pour procéder à la cession des actifs, dans le respect de l'intérêt de la société SSP.

Le but initial de vente des actifs a été d'ailleurs expressément évoqué par M. [W] dans son compte-rendu de la réunion du 18 octobre 2011, comme seule solution au conflit persistant entre les associés, conflit menant à une évolution préoccupante du groupe.

Il est rappelé que, s'agissant d'une société commerciale en liquidation, opération devant aboutir à la réalisation de ses actifs restants, l'article L.237-24 du code de commerce dispose : «'Le liquidateur représente la société. Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour réaliser l'actif, même à l'amiable... Il est habilité à payer les créanciers et répartir le solde disponible'».

Le liquidateur dispose bien des pouvoirs les plus étendus pour vendre l'actif de la société, seule solution possible. La cession est donc inéluctable et les droits de chaque associé, y compris ceux des appelants, se reporteront sur le prix de cession à partager.

Le rejet de la fin de non-recevoir, déjà retenu par le premier juge, est confirmé.

- Sur l'autorité de chose jugée

Les appelants font valoir que la demande adressée au tribunal de commerce a le même objet que celle faite devant le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu, à savoir autoriser le liquidateur à voter favorablement lors

de l'assemblée générale de la société SSP.

Il est exact que la juridiction civile, par un arrêt confirmatif du 7 juin 2016 (RG 16/1006) statuant sur appel dirigé à l'encontre du jugement sus-visé prononcé le 4 février 2016, a autorisé la société AJ Partenaires es-qualité de liquidateur

de la société SCTF à céder les 1.742 actions détenues directement par celle-ci dans la société [E] Industries et à voter favorablement lors de l'assemblée générale de la société SSP au projet de cession des 28.947 euros détenues par la société SSP.

Cependant aucune autorité de chose jugée tirée de cette affaire civile n'est applicable dans le présent litige commercial, les parties concernées par l'une et l'autre affaire étant distinctes.

- Sur le défaut d'intérêt à agir

Sur le fondement des articles 122 et 31 du code de procédure civile, les appelants soutiennent que la société AJ Partenaires n'a pas intérêt à agir devant la juridiction commerciale dès lors qu'elle a déjà obtenu du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu l'autorisation de voter la cession des actions au nom de la société SCTF actionnaire de la société SSP et que la demande d'autorisation formée par le liquidateur est devenue sans objet dès lors que la cession a déjà été régularisée par le contrat du 18 mai 2015 et ses avenants.

Le premier juge a parfaitement répondu en relevant que le contrat est assorti d'une condition suspensive tenant notamment au prononcé d'une décision judiciaire. En effet, l'article 4.1.3 du contrat a imposé l'absence de toute décision de justice empêchant la cession ou limitant la possibilité pour l'acquéreur d'acquérir les actions cédées.

Le liquidateur a un intérêt évident à agir, puisqu'il y est même contraint par l'application de la condition suspensive.

Il résulte de ce qui précède que la société AJ Partenaires est recevable à agir.

III ' Le fond

1 - Sur la validité de la cession

Au soutien de leur demande d'infirmation du jugement déféré et de nullité de la cession, les appelants invoquent aux termes du dispositif de leurs écritures :

- le défaut de pouvoir du liquidateur en raison de la rétractation de l'ordonnance l'ayant défini,

- le défaut d'autorisation préalable des actionnaires de la société SSP,

- la fraude aux droits de la société [E] Industries, des sociétés SSP et SCTF et à leurs droits propres.

Ils précisent en fin de leurs écritures que la nullité absolue est encourue pour chacun de ces griefs, expliquant ainsi qu'il ne peut leur être opposé l'effet relatif du contrat de cession auquel ils ne sont pas parties.

Dans les motifs de leurs écritures, ils développent successivement des moyens relatifs au liquidateur, au cessionnaire et au contrat de cession. Ces moyens seront examinés tour à tour.

A) Le liquidateur

Sur ce premier point, les appelants évoquent les pouvoirs du liquidateur puis son manquement à ses obligations.

En premier lieu, les appelants sont mal fondés à soutenir que ce dernier a

outrepassé ses pouvoirs en signant le contrat de cession.

En effet, l'article L.237-8 du code de commerce dispose :

"La cession globale de l'actif de la société ou l'apport de l'actif à une autre société, notamment par voie de fusion, est autorisé (...) :

4°) dans les sociétés par actions, aux conditions de quorum et de majorité prévues pour les assemblées extraordinaires (')'».

Il est constant que la cession a été signée sans autorisation «'préalable'» de l'assemblée générale des actionnaires de la société SSP qui est une société anonyme

Mais le liquidateur a obtenu du premier juge non seulement la validation de la cession des actions de la société [E] Industries détenues par la société SSP, mais aussi l'autorisation d'émettre ensuite un vote favorable sur ce sujet lors de l'AGE de cette société appelée à délibérer sur la cession en application précisément de l'article L.273-8 du code de commerce, étant rappelé que l'article 4.1.8 du contrat de cession a érigé, au profit du cessionnaire, la remise du procès-verbal d'assemblée en une condition suspensive.

Aucun fondement et aucune pièce du dossier ne démontrent que le liquidateur aurait dû requérir de l'assemblée des actionnaires une autorisation «'préalable'».

Au contraire, l'article 4.3.1 de l'acte de cession a stipulé à titre de condition suspensive l'absence de décision de justice empêchant ou limitant la cession, de sorte que le liquidateur a parfaitement organisé ses actions en sollicitant par la présente instance l'autorisation judiciaire de la cession puis celle d'émettre un vote concordant lors de l'AGE exigée légalement, avant d'émettre un vote favorable effectif à la dite assemblée.

Les appelants ne sont pas plus fondés à évoquer un dépassement des pouvoirs confiés au liquidateur par application du droit de la liquidation en ce sens que rien selon eux ne faisait obstacle au partage des actifs en nature entre associés, dès lors que la cour a déjà évoqué ce point précédemment en rappelant la mésentente profonde entre associés.

Le liquidateur ne s'est pas plus placé en situation de conflit d'intérêts, pouvant parfaitement prendre part à un vote après obtention de l'autorisation de cession et de l'autorisation de voter, au sein d'une assemblée de la société SSP qu'il est aussi en droit de convoquer en qualité de seul représentant légal de cette dernière. Aucune désignation de mandataire ad'hoc n'était requise.

Par ailleurs, le moyen des appelants tiré de la rétractation par la cour le 29

septembre 2015 de l'ordonnance sur requête rendue par le président du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu le 12 juin 2014 qui définissait la mission du liquidateur de la société STCF, est inopérant.

Ces décisions, concernant la seule société SCTF associée de la société SSP, n'ont pas eu d'incidence sur les pouvoirs que la société AJ Partenaires es-qualités de représentant de la société SSP tire de l'ordonnance du 30 juin 2011, qui a prescrit sa mission au liquidateur initialement désigné à savoir M.

[U] [W], ensuite remplacé par elle suivant ordonnances successives des 24 janvier 2012, 5 juin 2014 et 20 juin 2017, au visa des articles 1844-8 et suivants du code civil.

Aucune nullité n'est encourue suivant le droit commun des contrats, fondement allégué par les appelants.

En second lieu, les appelants sont mal fondés à soutenir que le liquidateur aurait manqué à ses obligations tant en matière de blanchiment qu'au titre de ses obligations d'information et de loyauté.

- Lutte anti-blanchiment':

Les articles L.561-2 et suivants du code monétaire et financier ainsi que les articles réglementaires associés assujettissent les mandataires judiciaires et administrateurs judiciaires à une obligation de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme sous réserve que celles-ci soient compatibles avec leur mandat, en précisant que le client s'entend, dans le cas d'une offre, de la personne qui se porte acquéreur du bien offert à la vente ou qui dépose une offre de reprise partielle ou totale de l'entreprise, et que le bénéficiaire effectif s'entend de la personne physique qui contrôle, directement ou indirectement le client ou la personne pour laquelle une activité est réalisée au moyen de plus de 25 % des parts ou actions de l'OPC.

L'obligation d'identifier le bénéficiaire effectif de la relation d'affaires est cependant réputée satisfaite, comme l'indique l'article R.561-8 du même code, lorsque le risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme est faible et que le client de cette personne est "4° Un organisme de placements collectifs, une société de gestion ou une société de gestion de portefeuille le représentant, qui sont agréés par l'autorité compétente d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou d'un pays tiers imposant des obligations équivalentes en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et figurant sur la liste prévue au 2° du II de l'article L. 561-9, dès lors que la personne soumise à l'obligation d'identifier s'est assurée de l'existence de cet agrément."

En l'espèce, il appartenait à la société AJ Partenaires d'identifier le bénéficiaire effectif de l'opération.

Les appelants soutiennent en substance que le liquidateur, qui aurait dû mettre un terme à la relation d'affaire, n'a pas dès l'entrée pu identifier les personnes physiques bénéficiaires effectifs de l'opération à savoir, "compte tenu de l'étourdissant montage mis en place, les personnes physiques investisseurs dans les fonds logés aux [Localité 7]", et que les écrits communiqués par la société AJ Partenaires, le premier consistant en un mail du 6 novembre 2015 rédigé par [L] [D] et la lettre rédigée par M. [N] de Warwick Capital Partners le 6 novembre 2015 sont inopérants à vérifier la désignation du bénéficiaire effectif et la réalisation par le liquidateur de sa recherche préalable.

Ils précisent que la société AJ Partenaires devait procéder à un examen renforcé, du fait de ce montage complexe et qu'elle aurait dû recueillir les informations suivantes :

- le montant, l'origine des fonds et la destination des sommes et des personnes intéressées par l'opération en termes de rémunération,

- l'identité du donneur d'ordre ainsi que du ou des bénéficiaires effectifs de l'opération,

- l'objet de l'opération, ses caractéristiques et les modalités de son exécution,

- la cohérence des informations recueillies.

Ce qui sera rejeté.

Il résulte en effet du dossier que la société de droit luxembourgeois, FII Co, cessionnaire, est détenue :

- indirectement à hauteur de 66,51 % par la société de droit luxembourgeois

Commodore european investment Co I, elle-même intégralement détenue par la société de droit luxembourgeois Commodore european investment Co II, elle-même intégralement détenue par la société de droit [Localité 7] Warwick european opportunities fund (WEOF),

- et à hauteur de 33,49 % par la société de droit luxembourgeois Ensign european investement Co I, elle-même intégralement détenue par la société de droit luxembourgeois Ensign european investment Co II, elle-même intégralement détenue par la société de droit [Localité 7] Warwick european credit opportunities fund (WECOF),

- et que les sociétés WEOF et WECOF sont gérées par une société de gestion de portefeuilles de droit anglais, Warwick capital partners LLP, détenue par MM. [C] et [V], résidents au Royaume-Uni.

Les sociétés WEOF et WECOF sont des organismes de placement collectif dont les décisions d'investissement sont prises par une société de gestion de portefeuille, Warwick capital partners LLP, dont le siège social est à [Localité 8] et qui est agréée par l'autorité compétente (Financial Conduct Authority) du Royaume-Uni, Etat membre de l'Union européenne.

A ce titre, la pièce 51 des appelants ne démontre pas comme ils le soutiennent que WEOF - qui devrait être distinguée de WECOF - n'aurait pas de general partner et que la recherche des bénéficiaires effectifs ne pourrait se limiter à l'identification des gérants de WEOF.

Aussi, en l'absence de tout soupçon de blanchiment ou de financement du terrorisme, l'obligation d'identifier le bénéficiaire effectif de la relation d'affaires est présumée satisfaite.

Au demeurant, d'une part, le certificat du 6 novembre 2015 délivré par [L][D] GLOBAL FOUND services LLC détient une force probante, attestant que cette filiale de banque effectue le contrôle et procède aux vérifications anti-blanchiment sur l'identité et la provenance des fonds du general partners et des limited partners,

En outre, alors même que la société [E] Industries intervient dans le secteur de la défense nationale, le Ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, saisi en application de l'article L 151-3 du code monétaire et financier, a, selon décision du 16 décembre 2015, autorisé le projet de prise de contrôle de celle-ci par la FII Co.

Le grief tenant à une méconnaissance par le liquidateur de ses obligations relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux sera donc écarté.

- Obligations d'information et de loyauté du liquidateur

M. [B] [E] et [E] [E] soutiennent qu'ils ont été tenus totalement à l'écart du processus de cession qui les maintient comme actionnaires de la société [E] Industries ultra-minoritaires et détenteurs d'actions non liquides sans valeur, puisqu'ils n'ont connu le projet, datant

d'avant novembre 2012, que lors de l'AGE de SCTF du 28 avril 2014.

Leur ignorance antérieure ne constitue par pour autant une discrimination ou une rupture d'égalité, non plus une déloyauté de la part du liquidateur.

Si les appelants n'ont pas participé aux négociations avec le candidat à l'acquisition des titres de la société [E] Industries, suivant mandat donné par la société AJ Partenaires, suivie de LETRA et de 5 actionnaires financiers fin 2012, d'autres associés de la société SPP notamment actionnaires familiaux n'y ont pas davantage participé.

Le projet de cession a été exposé à l'ensemble des actionnaires familiaux et à

leurs conseils lors d'une réunion à l'étude du liquidateur, démontrée à la date du 27 avril 2015, ce qui a permis notamment aux consorts [O] après analyse de donner leur accord.

Il est noté en outre que l'autorisation judiciaire à laquelle l'article 4.1.5 du contrat du 18 mai 2015 subordonne la cession a permis aux contestants de faire valoir leur opinion.

Au demeurant, les pièces du dossier établissent que le processus de cession a été mené avec professionnalisme, suivant une méthode classique, permettant au final de retenir l'offre de WARWICK et alors que les appelants ne démontrent pas l'existence d'autre offrant en dépit de la publicité donnée au projet de cession de l'entreprise.

B) Le cessionnaire

Aux termes de longs développements, les appelants critiquent l'identité ainsi que les capacités de financement, les compétences et l'expérience du cessionnaire.

En substance, ils reprennent leurs arguments tirés de l'incroyable complexité du montage, hors de proportion avec les besoins d'une telle cession, dès lors que la société FII Co ne serait qu'une façade dissimulant des bénéficiaires impossibles à identifier';

Qu'en réalité, FII Co est au c'ur d'une structure «'Double Luxos'» (soit à double étage, ce qui est explicité en termes et en schéma) détenue par des fonds d'investissement [Localité 7] sans compter l'avantage fiscal de la localisation au Luxembourg'; qu'ainsi la société [E] Industries n'est pas cédée à WARWICK et que le liquidateur a produit des pièces contradictoires.

Sur les capacités de financement du repreneur, ils soulignent l'absence de garantie de prise en charge d'investissement après la clôture de la période d'investissement au 31 décembre 2016 et l'absence de possibilité d'investissement pérenne dans le groupe du fait de la cession des participations par le fonds jusqu'à 2019, ce qui signifie une limitation des investissements à court terme, ainsi que l'absence de capacités pour WEOF et WECOF de financer le rachat de la société [E] Industries. Ils invoquent également l'absence de détermination du payeur des titres et l'ignorance du paiement du prix.

Ils remarquent encore l'absence de compétences et expériences du cessionnaire dans le domaine industriel en qualité d'actionnaire majoritaire.

Ces moyens ne pourront pas être retenus.

En effet, les deux intimés précisent aux termes de leurs écritures que le cessionnaire est parfaitement identifié dans l'acte de cession comme étant FII Co dépendant du groupe WARWICK constituée classiquement d'une société de gestion de portefeuille agréée au Royaume Uni et des fonds qu'elle gère ou conseille, comme il a été dit précédemment ( voir le paragraphe sur la lutte anti-blanchiment).

Les documents produits par la société AJ Partenaires détaillent utilement la présentation du groupe, la structure d'investissement, les comptes outre le CV de deux associés fondateurs, rappellent que les dirigeants opérationnels sont M. [H] [U] et M. [J] [Z] disposant d'une solide expérience professionnelle et oeuvrant comme elle en justifie dans le cadre d'un projet d'investissement à long terme (cf réunion d'associés du 27 avril 2015), et elle prouve que la période d'investissement a été reportée jusqu'au 31 décembre 2019.

La société AJ Partenaires communique en outre une liste de l'ensemble des «'changements positifs significatifs'» survenus dans l'entreprise depuis l'acquisition de la majorité des actions de la société [E] Industries par FII Co, certifiant l'augmentation du chiffre des ventes, les acquisitions (Cordtech) et les projets d'acquisition, l'important montant des investissements réalisés et l'augmentation du nombre des salariés.

Les consorts [O] confirment cette évolution positive par la production d'articles de presse concordants, notamment en termes d'investissements effectifs et rappellent la donnée exacte relative à l'aspect social puisque les salariés ont approuvé la cession.

Au demeurant, aucun moyen des appelants ne démontre le manque de respect des intérêts des associés de la société SSP.

C) Le contenu du contrat de cession

Il est discuté par les appelants relativement d'une part aux objets des obligations principales': chose cédée et prix payé, d'autre part aux objets des obligations retenues dans le contrat, et enfin, relativement au montage qu'ils qualifient de frauduleux.

- La chose, le prix et les obligations'

L'absence de proposition aux appelants de participer à la cession ne peut être reprochée au liquidateur compte tenu de leur vive opposition manifestée de façon constante, et le transfert des actions de la société SCTF n'est pas le sujet de cette instance.

Quant au prix, sa justesse est confirmée par M. [W] , précédent liquidateur très informé sur le fonctionnement du groupe et sur ses difficultés de fonctionnement avant cession et en sa qualité de sachant, dans son avis du 28 avril 2015 communiqué par la société AJ Partenaires qui s'avère circonstancié et appuyé sur des informations financières et comptables, adaptées spécifiquement à la société [E] Industries.

Les appelants ne peuvent pas le critiquer alors qu'ils ne proposent aucune autre

évaluation probante et que l'obligation de vente influe nécessairement et négativement sur le prix, qui sera donc retenu pour sérieux.

En outre, dès lors que des actionnaires sont hors du périmètre de la cession, le pourcentage des actions revenant au cessionnaire, qui n'est certes pas de 100 % comme le dit l'acte du 18 mai 2015, est proportionnel aux actions effectivement cédées suivant l'avenant n°2, avec réduction du prix proportionnel, ce qui n'est pas sujet à critique.

La stipulation de séquestre, empêchant le paiement actuel du prix, est justifiée par la nécessité, du fait de l'obstruction de la part des appelants, de prévoir dans l'acte de cession des conditions suspensives liées notamment aux décisions judiciaires de première instance (permettant le transfert de propriété) et des conditions résolutoires sans effet rétroactif eu égard à la nature des titres cédés (titres d'un groupe industriel) , ce qui n'a rien d'illégal et n'est pas pervers comme le disent à tort les appelants.

L'argument relatif à l'absence de garantie de paiement du solde de prix eu égard à une prétendue non-signature de la lettre de confort, n'est pas plus opérant.

Quant aux OBSA (obligations avec bons de souscription d'actions), il s'agit d'un emprunt obligataire auquel s'est obligé le cessionnaire, afin, non seulement de

verser un dividende aux actionnaires, mais aussi d'assurer à la société [E] Industries des fonds propres lui permettant de renouer avec le développement, confirmant la volonté d'investissement du cessionnaire.

Cela écarte les griefs énoncés par les appelants (prise de pouvoir de la part du cessionnaire et dilution de la participation des autres actionnaires).

- La fraude

Si elle était établie, elle serait sanctionnée par la nullité absolue de l'acte.

Les appelants, comme déjà exposé relativement au pouvoir du liquidateur, ne peuvent exciper à son encontre d'un non-respect de la règle de l'article L.237-8 du code de commerce, de même qu'ils ne justifient pas de la fraude entachant prétendument la cession, dès lors que ses modalités dont celles relatives aux conditions résolutoires et à l'émission d'OBSA ne sont pas illégales, comme examiné précédemment.

Aucune preuve n'est non plus apportée par les appelants de la volonté de contourner de prétendues règles obligatoires dans le seul but d'opérer une fraude.

Au contraire, le projet initié par la société AJ Partenaires s'est révélé mûri, sans dissimulation, et a abouti, dans un contexte économique international difficile à un montage classique, certes adapté aux contraintes fiscales comme le précisent les consorts [O], mais régulier, préservant le climat social et respectueux des droits des autres associés dont les actionnaires familiaux.

Il est ainsi donné un terme à leur conflit, permettant une attribution effective en proportion de leurs droits, alors que les appelants ne peuvent invoquer une quelconque majorité de droit.

Il résulte de ce qui précède que la cession projetée des 28.947 actions de la société [E] Industries détenues par la société SSP ne porte pas atteinte aux intérêts de celle-ci ni à ceux de ses associés, de sorte qu'elle sera autorisée.

Le jugement est confirmé sur la validité de la cession.

2 - Sur le remplacement du liquidateur

Par des motifs pertinents que la cour adopte, tenant au fait que la société AJ Partenaires a correctement rempli sa mission, dans un contexte difficile au plan actionnarial, le premier juge a parfaitement motivé le caractère non fondé de la demande des appelants.

Son rejet est confirmé.

3- Sur les dommages-intérêts pour procédure abusive

La société AJ Partenaires sollicite le versement par les appelants d'une somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts, au motif qu'ils font obstruction depuis près de 10 ans aux opérations de liquidation, ce qui a eu des répercussions défavorables sur la bonne marche du groupe.

Elle fait valoir que c'est grâce à la compétence des nouveaux dirigeants et à l'importance des investissements réalisés, que le groupe a pu renouer avec le développement.

Elle ajoute que le versement du prix séquestré par le cessionnaire ne peut bénéficier aux cédants jusqu'à ce que les instances judiciaires aient été définitivement terminées.

Certes les écritures des appelants démontrent leur volonté tenace à s'opposer à la cession, mais une faute susceptible de générer un droit à dommages-intérêts pour la société AJ Partenaires n'est pas pour autant caractérisée.

La demande est en conséquence rejetée.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens'

Les dépens de première instance et d'appel sont imputés aux trois appelants qui supportent en outre une indemnité de procédure au profit des intimés.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Déboute M. [B] [E], Mme [F] [E] et Mme [E] [E] de leur demande de communication de pièces,

- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- Constate la réalisation à la date du 3 juin 2016 de la cession visée dans le contrat du 18 mai 2015 et de ses deux avenants des 15 et 24 juin 2015,

- Déboute la société AJ Partenaires représentée par Maître [V] [Q] es-qualités de liquidateur de la société Saumuroise de Participations (SSP) de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- Condamne in solidum M. [B] [E], Mme [F] [E] et Mme [E] [E] à verser une indemnité de procédure':

de 12.000 euros à la société AJ Partenaires,

de 10.000 euros à (ensemble) Mesdames [A] et [K] [O] ainsi que Messieurs [M] et [D] [O],

Dit que les dépens de première instance et d'appel sont à la charge in solidum des trois appelants.

SIGNE par Madame COMBES, Président et par Madame COSNARD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16/03244
Date de la décision : 12/10/2017

Références :

Cour d'appel de Grenoble 07, arrêt n°16/03244 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-10-12;16.03244 ?
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