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28/06/2012 | FRANCE | N°12/01170

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 28 juin 2012, 12/01170


RG N° 12/01170

JLB

N° Minute :













































































Notifié



le :





Copie exécutoire

délivrée le :













AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE COMME

RCIALE



ARRET DU JEUDI 28 JUIN 2012





Sur contredit formé le 07 mars 2012

à l'encontre d'une décision (N° RG 2011J8)

rendue par le tribunal de commerce de ROMANS

en date du 22 février 2012





ENTRE :



Société MARKEM-IMAJE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par Me Mickaël RIVOLLIER, a...

RG N° 12/01170

JLB

N° Minute :

Notifié

le :

Copie exécutoire

délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET DU JEUDI 28 JUIN 2012

Sur contredit formé le 07 mars 2012

à l'encontre d'une décision (N° RG 2011J8)

rendue par le tribunal de commerce de ROMANS

en date du 22 février 2012

ENTRE :

Société MARKEM-IMAJE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Mickaël RIVOLLIER, avocat au barreau de PARIS

ET :

SA MARQUINARIAS TECNIFAR poursuites et diligences de son représentant légal en exerci

ce domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par la SCP GRIMAUD, avocats postulants au barreau de GRENOBLE et Me DEWATRIGANT, avocat au barreau de PARIS, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Mme Dominique ROLIN, président de chambre,

Monsieur Jean-Louis BERNAUD, conseiller,

Mme Fabienne PAGES, conseiller,

Assistés lors des débats de Marie-Ange BARTHALAY, greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 03 mai 2012,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l'affaire a été mise en délibéré au jeudi 21 juin 2012 ledit délibéré ayant été prorogé à ce jour en raison d'un sous-effectif de greffe.

------ 0 ------

La société MARKEM-IMAJE , qui produit et commercialise des imprimantes sous sa marque, a confié la vente de ses produits sur le territoire du Venezuela à la société de droit vénézuélien MAQUINARIAS TECNIFAR .

La société MAQUINARIAS TECNIFAR se prévaut d'un contrat de distribution daté du 27 février 1989, dont l'opposabilité est contestée par la société MARKEM-IMAJE qui prétend ne pas l'avoir approuvé.

Une convention a été signée par les deux parties le 5 janvier 1996 pour mettre fin à un différend financier et formaliser un contrat de distribution exclusive d'une durée de deux années renouvelable.

Par lettre du 13 novembre 2009 la société MARKEM-IMAJE , invoquant une restructuration, a mis fin au contrat moyennant un préavis de 90 jours.

Par lettre de son conseil du 1er mars 2010 la société MAQUINARIAS TECNIFAR a fait valoir son droit à indemnité en se prévalant du statut d'agent commercial.

Par acte d'huissier du 22 décembre 2010 la société de droit vénézuélien MARKEM-IMAJE a fait assigner devant le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère la société MARKEM-IMAJE en paiement de diverses indemnités pour un montant global de 6 millions d'euros environ.

La société défenderesse a soulevé l'incompétence du tribunal sur le fondement de la clause compromissoire contenue dans la convention du 5 janvier 1996 et subsidiairement en application de l'article D. 442 '3 du code de commerce au profit du tribunal de commerce de Lyon.

Par jugement du 22 février 2012 le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Lyon et a ordonné la transmission du dossier à cette juridiction.

Par requête déposée au greffe du tribunal le 7 mars 2012 la SAS MARKEM-IMAJE a formé contredit à l'encontre de cette décision.

Vu le contredit de compétence et les observations ultérieures signifiées et déposées le 3 mai 2012 par la SAS MARKEM-IMAJE qui demande à la cour de dire et juger que le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère est incompétent pour connaître

du litige au profit d'un tribunal arbitral constitué conformément au règlement d'arbitrage de la chambre de commerce internationale et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir, subsidiairement de déclarer la société MAQUINARIAS TECNIFAR irrecevable en sa demande tendant à voir reconnaître la compétence du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère, plus subsidiairement encore de dire et juger que le tribunal de commerce de Lyon est compétent pour connaître du litige et en tout état de cause de condamner la société MAQUINARIAS TECNIFAR à lui payer une indemnité de 15'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile aux motifs :

que la seule convention signée des deux parties est celle du 5 janvier 1996, dont le préambule indique expressément qu'antérieurement à cette date aucun contrat formel n'a été signé,

que c'est donc en application de cette seule convention de 1996, contenant en son article 5 une clause compromissoire donnant compétence à un tribunal arbitral pour connaître de l'ensemble des litiges entre les parties, que la compétence juridictionnelle doit être déterminée,

que sauf nullité ou inapplicabilité manifeste de la convention d'arbitrage, qu'il appartient au juge étatique saisi d'apprécier, la juridiction arbitrale est exclusivement compétente pour se prononcer sur l'existence, la validité et l'étendue de la convention d'arbitrage en vertu du principe dit de « compétence ' compétence »,

que la convention du 5 janvier 1996, qui définit l'ensemble des conditions et modalités de la relation de distribution entre les parties, démontre une rencontre parfaite des volontés sur l'ensemble des éléments essentiels du contrat et ne saurait donc être qualifiée de simple promesse de contrat, laquelle vaudrait au demeurant contrat conformément à la règle posée par l'article 1589 du Code civil,

que selon l'article 5 de la convention les parties ont clairement entendu soumettre tout litige en lien avec leur relation d'affaires à la compétence d'un tribunal arbitral composé et agissant conformément aux règles de la chambre de commerce internationale,

qu'aucune nullité manifeste de la clause compromissoire ne peut être relevée, tandis que l'applicabilité de la clause au litige ne fait aucun doute compte tenu de son champ d'application,

que pour statuer sur une exception d'incompétence les juridictions peuvent trancher une question de fond, ainsi que le prévoit expressément l'article 77 du code de procédure civile, étant observé qu'il n'appartiendra qu'à la juridiction arbitrale de décider définitivement de l'application de la clause compromissoire,

que dans le dispositif de ses conclusions la société MAQUINARIAS TECNIFAR ne demande pas que la compétence du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère soit reconnue, ce qui implique que la cour n'aura pas à se prononcer sur ce point,

qu'en toute hypothèse, dès lors qu'il n'existe pas de procédure de contredit incident, la société MAQUINARIAS TECNIFAR est irrecevable à contester la compétence du

tribunal de commerce de Lyon au-delà du délai de 15 jours pour inscrire un contredit, étant observé que sur le fond une telle demande serait vouée à l'échec puisque l'action est notamment fondée sur les dispositions de l'article L. 442 '6 du code de commerce.

Vu les conclusions récapitulatives signifiées et déposées le 2 mai 2012 par la société de droit vénézuélien MAQUINARIAS TECNIFAR qui demande à la cour de rejeter le contredit, de déclarer le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère compétent, subsidiairement de confirmer le jugement en ce qu'il a renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Lyon et en tout état de cause de condamner la société MARKEM-IMAJE au paiement d'une indemnité de procédure de 7'000 € aux motifs :

que l'ensemble de ses demandes au fond reposent sur le contrat conclu en 1989, à l'exception de tout autre,

que pour statuer sur l'éventuelle compétence de la juridiction arbitrale la cour doit se prononcer sur l'application de la Convention de 1996, ce qui préjugerait du fond, ainsi que l'a justement retenu le tribunal,

que la convention de 1996 n'est pas applicable au litige dès lors qu'elle a pour objet principal le règlement d'un différend financier et qu'elle ne contient qu'une promesse de contrat de distribution, ce que la société MARKEM-IMAJE n'ignore pas, puisqu'elle lui a adressé ultérieurement un projet le contrat définitif précis, qui n'a finalement jamais été accepté par les parties,

que l'exception d'incompétence formée à titre subsidiaire au profit du tribunal de commerce de Lyon n'est pas davantage fondée alors que ses demandes indemnitaires reposent principalement sur l'existence d'un contrat d'agent commercial soumis au droit français ainsi que sur des fautes contractuelles ou délictuelles, l'article L. 442 '6 du code de commerce n'ayant pas été invoqué pour caractériser une pratique restrictive de concurrence.

MOTIFS DE L'ARRET

Il n'est nullement interdit au juge saisi du fond du litige , appelé à se prononcer «'in limine litis'» sur une exception d'incompétence, de trancher une question de fond dont dépend la compétence.

L'article 95 du code de procédure civile prévoit au contraire que dans une telle hypothèse la décision a autorité de chose jugée sur la question de fond, tandis que l'article 77 du même code fait obligation au juge de statuer sur la question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes.

Sans excéder ses pouvoirs, le tribunal devait par conséquent se prononcer prioritairement sur l'exception d'incompétence soulevée à titre principal au profit d'une juridiction arbitrale, indépendamment de son éventuelle incompétence matérielle au profit du tribunal de commerce de Lyon, puisque selon la société MARKEM-IMAJE le litige échappait à la compétence des juridictions étatiques Françaises, ce qui devait le conduire à déterminer la convention applicable entre les parties ( contrat

du 27 février 1989 donnant compétence aux tribunaux du siège de la société MARKEM-IMAJE ou contrat du 5 janvier 1996 contenant une clause compromissoire).

La seule convention qui est revêtue de la signature des deux parties est celle du 5 janvier 1996, qui a pour double objet de mettre fin à un différend financier par l'engagement de la société MAQUINARIAS TECNIFAR de régler la moitié de sa dette à l'égard de la société MARKEM-IMAJE selon un échéancier de paiement et de définir les conditions particulières d'une relation de distribution.

Dans son préambule cette convention rappelle que depuis quelques années la société MAQUINARIAS TECNIFAR vend les produits de la société MARKEM-IMAJE au Venezuela, mais qu'aucun contrat formel n'a été signé entre les parties.

En approuvant cette convention la société MAQUINARIAS TECNIFAR a donc expressément reconnu qu'aucun contrat écrit ne régissait antérieurement la relation contractuelle, ce qui est confirmé par le fait que la convention du 27 février 1989 qu'elle produit aux débats en photocopie n'est pas revêtue de la signature des deux parties.

En son article quatre, intitulé «' contrat de distribution'» l'acte du 5 janvier 1996 définit les conditions «'spécifiques'» d'une relation de distribution exclusive. C'est ainsi que sont notamment précisés la nature des produits vendus, la durée du contrat, le secteur concédé, les modalités de paiement et de crédit, les conséquences de la rupture du contrat , le droit applicable et la juridiction compétente en cas de litige.

Il est dès lors certain que, comme le rappelle son préambule, la convention du 5 janvier 1996 était destinée à donner un nouveau cadre formel à la relation contractuelle existant entre les parties, en sorte qu'elle constitue un engagement réciproque ferme et définitif sur les éléments essentiels du contrat, peu important que le fournisseur ait soumis ultérieurement pour approbation au distributeur un document définissant les obligations générales des parties.

En prévoyant que «''tout litige, contestation ou différend qui pourrait surgir entre MAQUINARIAS TECNIFAR et IMAJE en dehors ou dans le cadre de cette convention.... devra être résolu par un arbitrage selon les règles de conciliation et d'arbitrage de la chambre de commerce internationale par un ou plusieurs arbitres désignés selon les règles en vigueur'» la convention d'arbitrage stipulée à l'article 5 du contrat du 5 janvier 1996 définit avec une précision suffisante les modalités de constitution et de fonctionnement de la juridiction arbitrale par ce renvoi au règlement d'arbitrage de la chambre de commerce internationale, en sorte qu'elle répond aux exigences de l'article 1443 ancien du code de procédure civile.

Le litige relatif aux modalités et au bien-fondé de la rupture du contrat relève par ailleurs incontestablement du champ d'application de la clause compromissoire, qui est défini en des termes très généraux et qui est donc de nature à englober tout contentieux relatif à l'exécution et à la résiliation de la relation contractuelle.

Au sens de l'article 1448 nouveau du code de procédure civile, issu du décret N° 2011-48 du 13 janvier 2011 applicable sur ce point à compter du 1er mai 2011, la convention d'arbitrage litigieuse n'est donc ni manifestement nulle ni manifestement inapplicable.

Ainsi en vertu du principe dit de «' compétence-compétence'», en application duquel l'arbitre est exclusivement compétent pour se prononcer sur l'existence, la validité et l'étendue de la convention d'arbitrage, sauf nullité ou inapplicabilité manifeste décidée par le juge étatique saisi, le tribunal devait se déclarer incompétent et renvoyer les parties à mieux se pourvoir.

Faisant droit au contredit, la cour accueillera par conséquent l'exception d'incompétence soulevée à titre principal par la société MARKEM-IMAJE au profit de la juridiction arbitrale désignée par la convention de distribution liant les parties.

À ce stade de la procédure l'équité ne commande pas toutefois de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société contredisante.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Faisant droit au contredit de compétence formé par la SAS MARKEM-IMAJE :

Dit et juge que la relation contractuelle entre les parties est formellement régie par la convention du 5 janvier 1996,

Dit et juge que la clause d'arbitrage contenue dans cette convention n'est ni manifestement nulle ni manifestement inapplicable,

Dit et juge que la juridiction étatique saisie était incompétente pour connaître de l'action engagée par la société de droit vénézuélien MAQUINARIAS TECNIFAR,

Renvoie par conséquent cette dernière à mieux se pourvoir,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties,

Condamne la société de droit vénézuélien MAQUINARIAS TECNIFAR aux dépens du contredit.

SIGNE par Madame ROLIN, Président et par Madame HERVE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12/01170
Date de la décision : 28/06/2012

Références :

Cour d'appel de Grenoble 07, arrêt n°12/01170 : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-06-28;12.01170 ?
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