La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/04/2012 | FRANCE | N°09/04477

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 26 avril 2012, 09/04477


RG N° 09/04477

J.L. B.

N° Minute :

















































































Copie exécutoire

délivrée le :





S.C.P. GRIMAUD



Me RAMILLON



S.C.P. POUGNAND



S.E.LA.R.L. DAUPHIN

& MIHAJLOVIC






r>

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE COMMERCIALE



ARRET DU JEUDI 26 AVRIL 2012







Appel d'une décision (N° RG 05/01163)

rendue par le Tribunal de Grande Instance de VIENNE

en date du 03 septembre 2009

suivant déclaration d'appel du 30 Octobre 2009





APPELANTE :



S.A.S. AUTOMOBILES VIENNE SUD poursuites et diligences de son représentant légal en exerci...

RG N° 09/04477

J.L. B.

N° Minute :

Copie exécutoire

délivrée le :

S.C.P. GRIMAUD

Me RAMILLON

S.C.P. POUGNAND

S.E.LA.R.L. DAUPHIN

& MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET DU JEUDI 26 AVRIL 2012

Appel d'une décision (N° RG 05/01163)

rendue par le Tribunal de Grande Instance de VIENNE

en date du 03 septembre 2009

suivant déclaration d'appel du 30 Octobre 2009

APPELANTE :

S.A.S. AUTOMOBILES VIENNE SUD poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

38200 VIENNE

Représentée par la SCP GRIMAUD, en qualité d'avoués jusqu'au 31 décembre 2011 et d'avocats au barreau de GRENOBLE à compter du 1er janvier 2012, postulant

Assistée de Me Muriel LINARES, avocat au barreau de LYON, plaidant

INTIMEES :

SNC VAST poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

38200 VIENNE

Représentée par la SCP CALAS Jean et Charles, en qualité d'avoués au barreau de GRENOBLE jusqu'au 31 décembre 2011 Assistée par Me Joseph FERRARO, avocat au barreau de VIENNE constitué en lieu et place de la SCP CALAS

S.C.I. DE L'ISLE poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

Chez M. [H] [T]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par la SELARL DAUPHIN MIHAJLOVIC, en qualité d'avoués jusqu'au 31 décembre 2011 et d'avocats au barreau de GRENOBLE à compter du 1er janvier 2012, postulant

Assisté de Me Philippe ROMULUS, avocat au barreau de VIENNE, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Mme Dominique ROLIN, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller,

Mme Fabienne PAGES, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Myriam FOURNIER,.

DEBATS :

A l'audience publique du 07 Mars 2012, Monsieur BERNAUD, Conseiller, a été entendu(e) en son rapport

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu ce jour,

------0------

La SCI DE L'ISLE est propriétaire d'un ensemble immobilier à usage industriel et commercial situé sur les communes de Vienne et de Reventin Vaugris ( Isère) qui est composé de bâtiments à usage de magasin, entrepôt, garage, bureaux, aire de vente, aire de stationnement, station-service, aire de lavage, aire de stockage et de stationnement.

La société AUTOMOBILES VIENNE SUD y exploite un fonds de commerce de négoce de véhicules automobiles et de garage de réparation selon bail commercial renouvelé du 28 décembre 2000.

La société V.A.S.T , dont le dirigeant, M. [B], était à l'origine également actionnaire de la société AUTOMOBILES VIENNE SUD , est pour sa part locataire commerciale d'une partie du tènement immobilier appartenant à la SCI DE L'ISLE en vue de l'exploitation d'un fonds de commerce de station-service, lavage et vente de produits et accessoires pour automobiles selon bail du 6 août 1993.

La société V.A.S.T a donné son fonds de commerce en location-gérance à la SARL DO par acte sous-seing-privé du 29 juillet 1997.

La société V.A.S.T se plaint de divers troubles de jouissance causés par la société AUTOMOBILES VIENNE SUD , qui aurait pris en sous-location l'aire de lavage en violation des clauses du bail et qui auraient réalisé des modifications lui interdisant d'accéder à la station de lavage et au local machinerie et réduisant l'usage de la piste de sortie commune aux deux fonds.

Elle a fait assigner la SCI DE L'ISLE, par acte d'huissier du 9 juin 2005, devant le tribunal de grande instance de Vienne à l'effet d'obtenir la libération et la remise en état des lieux loués sous astreinte et le paiement de dommages et intérêts.

Par acte d'huissier du 19 janvier 2006 la SCI DE L'ISLE a appelé en garantie la société AUTOMOBILES VIENNE SUD .

Par jugement du 3 septembre 2009 le tribunal de grande instance de Vienne , considérant en substance que la société V.A.S.T était victime de troubles de jouissance causés par la société AUTOMOBILES VIENNE SUD , dont la SCI bailleresse devait répondre sur le fondement de l'article 1719 du Code civil, mais que la faute de l'exploitant voisin dans ses rapports avec le propriétaire n'était caractérisée qu'au titre du trouble afférent à l'accès à la station de lavage, a notamment':

condamné sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard la SCI DE L'ISLE à libérer l'aire de lavage et enlever le portail clôturant cette aire, à reconstruire à l'identique le local technique du portique de lavage et à le laisser libre de toute occupation et à libérer l'aire de distribution des carburants en déposant le portail d'entrée du garage installé sur le terrain loué par la société V.A.S.T ,

condamné la SCI DE L'ISLE à payer à la société V.A.S.T la somme de 20'781 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du 1er avril 2002 au 1er avril 2005, ainsi qu'une indemnité annuelle de 6'927 € à compter du 1er avril 2005 jusqu'à la libération et la remise en état complètes des lieux, outre indemnité de procédure de 1500 €,

condamné sous la même astreinte la société AUTOMOBILES VIENNE SUD à relever et garantir la SCI DE L'ISLE s'agissant de la libération de l'aire de lavage et de l'enlèvement du portail clôturant cette aire,

condamné la société AUTOMOBILES VIENNE SUD à relever et garantir la SCI DE L'ISLE à hauteur de la moitié des condamnations à dommages et intérêts prononcées au profit de la société V.A.S.T ,

ordonné l'exécution provisoire pour partie seulement des condamnations.

La société AUTOMOBILES VIENNE SUD a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 30 octobre 2009.

Appel a également été relevé par la SCI DE L'ISLE selon déclaration reçue le 6 novembre 2009'.

Les deux instances ont été jointes par ordonnance du 24 mars 2010.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 22 février 2012 par la SA AUTOMOBILES VIENNE SUD qui demande à la cour, par voie de réformation du jugement, de prononcer sa mise hors de cause pure et simple, subsidiairement de débouter la société V.A.S.T de ses demandes indemnitaires injustifiées et en tout état de cause de condamner la SCI DE L'ISLE et la société V.A.S.T à lui payer chacune une indemnité de procédure de 5'000 € aux motifs':

que le bail renouvelé qui lui a été consenti le 28 décembre 2000 par la SCI DE L'ISLE lui confère la jouissance de l'intégralité du tènement immobilier à l'exception d'une surface de bâtiment de 100 m² avec 60 % de l'usage des pistes d'accès, en sorte qu'elle fait une

occupation régulière de l'aire de lavage, du local technique du portique de lavage et du portail d'entrée du garage qui font partie intégrante des biens qui lui ont été loués,

qu'il ne peut donc lui être reproché d'avoir procédé à la destruction du local technique et au déplacement du portail d'accès à son atelier, puisque l'occupation de ces espaces est conforme à son propre contrat de bail, ce que la SCI n'avait pas contesté en première instance,

qu'il appartenait à la société V.A.S.T d'agir à l'encontre de son locataire gérant, la société DO, qui aurait sous-loué irrégulièrement l'aire de lavage,

qu'en outre l'ensemble des travaux et des installations aujourd'hui contestés ont été mis en 'uvre avec le plein accord du dirigeant de la société V.A.S.T , M. [B], qui était à l'époque l'un de ses actionnaires, étant observé qu'en raison de la configuration des lieux les aménagements litigieux n'ont pu être réalisés qu'en plein accord avec la société V.A.S.T et son locataire gérant,

que le tribunal ne pouvait pas la condamner à relever et garantir partiellement la SCI DE L'ISLE sans caractériser sa faute,

qu'en toute hypothèse la société V.A.S.T ne justifie pas du bien-fondé de ses réclamations financières alors qu'elle ne peut réclamer une indemnisation au titre de son éviction partielle pour une période antérieure à l'exercice de son action et que l'expertise non contradictoire et non probante du cabinet JURITEC lui est inopposable.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 7 février 2012 par la SCI DE L'ISLE qui demande à la cour, par voie de réformation du jugement, de débouter la société V.A.S.T de l'ensemble de ses demandes, subsidiairement de condamner la société AUTOMOBILES VIENNE SUD à la relever et garantir intégralement de toutes les condamnations éventuelles mises à sa charge et en tout état de cause de condamner toute partie succombante au paiement d'une indemnité de procédure de 5'000 € aux motifs':

que le fonds de commerce de station-service et de lavage d'automobiles était exploité à l'origine par la société AUTOMOBILES VIENNE SUD , qui a cédé cette branche d'activité à la société V.A.S.T à compter du 1er septembre 1993,

qu'à cette occasion un avenant au bail d'origine du 5 mars 1987, excluant les locaux loués à la société V.A.S.T ,a été régularisé avec la société AUTOMOBILES VIENNE SUD , tandis qu'un bail commercial distinct a été conclu avec la société V.A.S.T le 6 août 1993 à effet du 1er septembre 1993,

qu'il existait à l'époque des liens étroits entre les sociétés AUTOMOBILES VIENNE SUD et V.A.S.T qui ont eu pour dirigeant commun Monsieur [F] [B] entre le 7 mars 1996 et le 15 décembre 2000,

que le bail renouvelé consenti le 28 décembre 2000 à la société AUTOMOBILES VIENNE SUD exclut expressément de la chose louée l'ensemble des parties du tènement louées à la société V.A.S.T pour l'exploitation de la station-service, le preneur, qui a déclaré connaître les

lieux pour les occuper depuis de nombreuses années, ayant reconnu avoir reçu une copie de l'acte du 6 août 1993,

qu'elle ne peut être tenue pour responsable de l'empiètement de la porte d'accès du garage Citroën sur la piste de distribution de la station-service alors que les travaux ont été réalisés en accord avec les deux locataires, ainsi qu'il résulte du protocole régularisé le 28 décembre 2000 à un moment où les deux sociétés entretenaient des liens étroits par l'intermédiaire de Monsieur [B],

qu'elle n'encourt également aucune responsabilité au titre de la suppression de l'accès à l'aire de lavage et de la destruction du local technique dès lors que la société V.A.S.T a autorisé son locataire gérant à cesser l'activité de Lavage et à sous-louer l'emplacement correspondant, étant observé que la faute éventuelle commise par le locataire gérant est de nature à la libérer de son obligation d'assurer au preneur la jouissance paisible de la chose louée,

qu'en toute hypothèse la société AUTOMOBILES VIENNE SUD lui doit sa garantie alors que le préjudice invoqué par la société V.A.S.T résulte de son comportement fautif et de son abus de jouissance,

qu'en tout état de cause le préjudice allégué n'est pas justifié en présence d'un rapport d'expertise non contradictoire qui n'apporte pas la preuve d'un encombrement réel et constant de l'aire de distribution de carburant.

Vu les conclusions récapitulatives signifiées et déposées le 19 janvier 2012 par la SNC V.A.S.T qui sollicite la confirmation de la décision entreprise en toutes ses dispositions, sauf à fixer à la somme de 500 € par jour de retard à compter de la date de l'arrêt à intervenir l'astreinte définitive mise à la charge de la SCI DE L'ISLE , et la condamnation de cette dernière et de la société AUTOMOBILES VIENNE SUD à lui payer une nouvelle indemnité de procédure de 3000 € aux motifs':

que la société AUTOMOBILES VIENNE SUD , qui occupe irrégulièrement l'aire de lavage en vertu d'une sous-location interdite à la fois par le bail de location gérance consenti à la société DO et par le bail des murs du 6 août 1993, a supprimé l'accès à cette aire en dehors des heures ouvrables par la pose d'un portail fermé à clé et a démoli le local technique qui abritait la machinerie du robot de lavage,

qu'à l'occasion des travaux de rénovation de la concession Citroën, achevés le 1er avril 2002, la société AUTOMOBILES VIENNE SUD a par ailleurs déplacé vers la droite le portail d'accès principal à son atelier, empiétant ainsi sur la piste de sortie commune au garage et à la station-service et créant ainsi une gêne importante dans l'exploitation de l'activité de distribution de carburant,

qu'elle n'est pas intervenue au protocole régularisé le 28 décembre 2000 entre les sociétés DE L'ISLE et AUTOMOBILES VIENNE SUD , qui ne lui est donc nullement opposable,

qu'elle n'a à aucun moment autorisé la sous-location de l'aire de lavage, à laquelle elle s'est au contraire expressément opposée le 25 mars 2003,

que le portail posé par la société AUTOMOBILES VIENNE SUD prive la clientèle de la station-service d'un accès au poste de lavage les jours libres non ouvrés,

que la société AUTOMOBILES VIENNE SUD a par ailleurs démoli le local technique abritant la machinerie du poste de lavage et ne lui a pas remis la clé de la porte qui lui permettait d'accéder à cet équipement par l'extérieur,

que ce trouble de jouissance caractérisée justifie pleinement la condamnation de la société propriétaire qui doit répondre des agissements fautifs de ses autres locataires,

que le portail d'accès à l'atelier de la concession se situe aujourd'hui sur son terrain, la société AUTOMOBILES VIENNE SUD ayant toujours eu pour objectif de supprimer purement et simplement la station-service, ce qui engage là encore la responsabilité de la SCI bailleresse au titre de ses obligations de jouissance paisible et de garantie,

que l'éviction partielle dont elle est victime peut être estimée financièrement au prorata de la réduction des surfaces à la somme annuelle de 6'927 € hors taxes, ce qui représente une somme de 20'781 € pour la période comprise entre le 1er avril 2002 et le 1er avril 2005.

MOTIFS DE L'ARRET

Le poste de lavage et ses équipements

Le contrat de bail commercial conclu le 6 août 1993 entre la SCI DE L'ISLE et la SNC V.A.S.T ,pour l'exercice d'une activité de distribution de carburants, lavage et vente de produits et accessoires pour automobiles qui provenait du démembrement du fonds de commerce unique exploité initialement par la société AUTOMOBILES VIENNE SUD , désigne en ces termes les biens et droits donnés en location': «' dans un tènement immobilier d'une superficie totale au sol de 9664 m², situé sur la commune de [Localité 8], parcelle [Cadastre 6] de la section BR et sur la commune de [Localité 7] , parcelle [Cadastre 5] de la section AB, les seuls biens et droits ci-après énumérés':

une surface de 100 m² environ prise sur les locaux commerciaux du garage et aménagée en boutique, bureaux, réserve et toilettes,

60 % de l'usage des pistes d'accès à la station, a l'aire de distribution du GPL, ainsi qu'à l'aire de lavage,

100 % de l'usage des pistes de distribution,

50 % de l'usage de la piste de sortie commune au garage et à la station-service,

un îlot de distribution sous auvent'».

Le bail commercial de renouvellement consenti le 28 décembre 2000 par la SCI DE L'ISLE à la SA AUTOMOBILES VIENNE SUD , après avoir exposé en préambule qu'était exclue des lieux loués à compter du 1er septembre 1993 la partie des locaux affectés à l'activité de station-service et produits et accessoires pour automobiles, désigne les biens loués de la façon suivante':

«'un tènement immobilier d'une superficie totale au sol de 9664 m² sur lequel sont édifiées des constructions à usage de garage, ateliers, hall d'exposition de voitures neuves et d'occasion, bureaux, à l'exclusion d'une surface de bâtiment de 100 m² avec 60 % de l'usage des pistes d'accès, cette partie étant louée à la société V.A.S.T qui exploite une station-service avec distribution de carburants et d'accessoires automobiles, dans les termes d'un bail dont le preneur déclare avoir parfaite connaissance et avoir reçu copie, pour avoir lui-même cédé la partie de son droit au bail relatif à ces différents locaux et droits d'accès, après avoir obtenu l'accord du bailleur dans l'avenant du 6 août 1993, le preneur déclarant bien connaître les lieux pour les occuper depuis de nombreuses années, et dispenser en conséquence le rédacteur d'en faire une plus ample désignation'».

Bien que cette désignation ne reprenne pas intégralement l'énumération des biens et droits contenue dans l'acte du 6 août 1993 , il est certain que la société AUTOMOBILES VIENNE SUD n'a pas pu ignorer l'étendue exacte du droit de jouissance préalablement octroyé à la société V.A.S.T , alors d'une part qu'elle a expressément reconnu avoir une parfaite connaissance du bail consenti à sa colocataire et en avoir reçu copie, et d'autre part qu'au jour de la rédaction de son propre bail de renouvellement elle partageait les lieux depuis plus de 17 années avec la société V.A.S.T , à laquelle elle avait elle-même cédé la branche d'activité litigieuse qui dépendait initialement d'un fonds de commerce unique.

Il est donc prétendu à tort que la société AUTOMOBILES VIENNE SUD aurait régulièrement occupé la station de lavage et disposé de ses équipements conformément à son titre locatif.

Il résulte en revanche sans ambiguïté des courriers échangés entre les trois parties intéressées au cours des années 2002 et 2003 que c'est avec l'accord exprès de la société V.A.S.T que le poste de lavage a été sous-loué à la société AUTOMOBILES VIENNE SUD par le locataire gérant du fonds de station-service, la SARL DO.

Par courrier du 22 mars 2002 la société V.A.S.T a en effet demandé à la SCI DE L'ISLE l'autorisation de sous-louer l'emplacement de lavage à la société AUTOMOBILES VIENNE SUD, qui souhaitait supprimer cette activité.

Par courrier à la société V.A.S.T du 25 mars 2003 la SCI , sans s'opposer à cette sous-location, a exprimé son refus d'accepter la suppression de cette activité, dont elle a indiqué qu'elle constituait un complément important pour la station-service.

Par lettre du 2 mai 2003 la société AUTOMOBILES VIENNE SUD a rappelé à la société V.A.S.T l'existence du contrat de sous-location portant sur l'aire de lavage et le portique automatique, tout en se plaignant du mauvais état de cet équipement et en sollicitant l'accord de sa colocataire pour leur remplacement, à défaut duquel elle menaçait de restituer l'emplacement.

Enfin, en réponse à ce dernier courrier, la société V.A.S.T a expressément reconnu que la société AUTOMOBILES VIENNE SUD s'acquittait d'une redevance au profit de la SARL DO en

compensation de l'arrêt de l'activité de lavage d'automobiles et ce dans le but de lui permettre «' d'installer un portail pour clore la partie séparant la concession et le hall V.O'», précisant même qu'elle l'avait informée au moment de sa demande qu'elle devait se mettre directement d'accord avec le locataire gérant en attendant l'accord du propriétaire.

Dès lors qu'il résulte explicitement de ces courriers que c'est avec son accord que, malgré l'interdiction de sous-location contenue à la fois dans le bail de location gérance consenti à la société DO et dans le bail des murs du 6 août 1993, le poste de lavage a été repris contre le paiement d'un sous ' loyer, puis supprimé par le concessionnaire Citroën, la société V.A.S.T ne peut sérieusement se plaindre de la démolition du local technique abritant la machinerie du portique de lavage ni de la mise en place d'un portail interdisant l'accès à l'aire de lavage en dehors des heures ouvrables.

Ayant consenti à l'occupation et aux aménagements litigieux, elle n'est donc pas fondée à rechercher sur ce point la responsabilité du bailleur pour manquement à ses obligations de jouissance paisible et de garantie, ce qui conduit à l'infirmation du jugement de ce chef et au rejet des demandes de libération de l'aire de lavage, d'enlèvement du portail d'accès à cette aire et de reconstruction du local technique.

Le portail d'entrée du garage Citroën et l'accès à l'aire de distribution des carburants

Il est constant qu'à l'occasion des travaux de restructuration de sa concession automobile, réalisés au cours des années 2001 et 2002, la société AUTOMOBILES VIENNE SUD , qui ne le conteste pas, a déplacé de 5 m environ vers le sud la porte d'accès à ses ateliers, empiétant ainsi sur la partie de la piste de sortie de la station-service dont le bail du 6 août 1993 réservait la jouissance à la société V.A.S.T .

Comme précédemment il sera tout d'abord observé que la société appelante ne peut sérieusement soutenir que l'occupation de l'espace litigieux est conforme à son propre bail du 28 décembre 2000, qui réserve expressément les droits de la société V.A.S.T, sur la nature et étendue desquels il n'existait aucune ambiguïté puisque le bail du 6 août 1993 lui avait été remis et que la jouissance des lieux avait été partagée pendant 17 années.

S'il ne résulte d'aucune pièce du dossier qu'elle aurait expressément consenti au déplacement de l'accès (Il n'y est fait aucune allusion dans les courriers sus analysés, tandis que le protocole du 28 décembre 2000 non signé dont l'objet est de prévoir les conséquences d'un arrêt éventuel de l'exploitation de la station-service ne lui est pas opposable) , la société V.A.S.T ne peut toutefois sérieusement soutenir que les travaux auraient été réalisés à son insu.

M. [F] [B], son gérant jusqu'au 25 février 2002, a en effet assuré la présidence du conseil d'administration de la société AUTOMOBILES VIENNE SUD jusqu'au 15 décembre 2000, soit

jusqu'à une date très proche de la délivrance le 13 septembre 2001 du permis de construire, qui a nécessairement

été précédée d'une étude technique dont la durée peut être estimée à plusieurs mois compte tenu de l'importance des travaux de restructuration engagés.

Il est en outre, et surtout, demeuré salarié et associé au sein de la société AUTOMOBILES VIENNE SUD jusqu'au mois de février 2002, ainsi qu'il le reconnaît lui-même dans son courrier à la SCI du 22 mars 2002, en sorte qu'il n'a pas pu ignorer la nature et l'étendue des travaux entrepris dès la fin de l'année 2001, ni par voie de conséquence la réalité de l'empiètement litigieux'.

Enfin par ses courriers des 22 mars 2002 et 23 mai 2003 la société V.A.S.T démontre qu'elle avait une parfaite connaissance de la situation matérielle après réalisation des travaux de restructuration de la concession, qui ont nécessairement été réalisés au vu et au su de la société DO, sa locataire gérante, laquelle n'a émis aucune protestation ou réserve, ce qui laisse présumer qu'il existait un accord tacite entre toutes les parties intéressées.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société V.A.S.T ne peut là encore se plaindre d'une éviction partielle, ni par voie de conséquence rechercher la responsabilité de la SCI bailleresse , en sorte que le jugement sera également infirmé en ce qu'il a condamné la SCI DE L'ISLE sous astreinte à libérer l'aire de distribution des carburants et à enlever le portail d'entrée du garage empiétant sur la piste d'accès louée à la société V.A.S.T.

Le rejet de l'ensemble des demandes formées à l'encontre de la SCI DE L'ISLE rend sans objet le recours en garantie formé à l'encontre de la société AUTOMOBILES VIENNE SUD, qui sera purement et simplement mise hors de cause.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SCI DE L'ISLE .

En revanche la SA AUTOMOBILES VIENNE SUD conservera la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :

Déboute la SNC V.A.S.T de l'ensemble de ses demandes dirigées contre la SCI DE L'ISLE ,

Constate que le recours en garantie formé à l'encontre de la SA AUTOMOBILES VIENNE SUD est sans objet et met cette dernière purement et simplement hors de cause,

Condamne la SNC V.A.S.T à payer à la SCI DE L'ISLE une indemnité de 2000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SA AUTOMOBILES VIENNE SUD ,

Condamne la SNC V.A.S.T aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit des avocats de la cause qui en ont fait la demande.

SIGNE par Madame ROLIN, Président et par Madame LEICKNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09/04477
Date de la décision : 26/04/2012

Références :

Cour d'appel de Grenoble 07, arrêt n°09/04477 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-04-26;09.04477 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award