RG N° 08/04539
DM
N° Minute :
Copie exécutoire
délivrée le :
S.C.P. CALAS
S.C.P. GRIMAUD
Me RAMILLON
S.C.P. POUGNAND
S.E.LA.R.L. DAUPHIN
& MIHAJLOVIC
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRET DU JEUDI 17 FEVRIER 2011
Appel d'une décision (N° RG 2006J286)
rendue par le Tribunal de Commerce de ROMANS
en date du 17 septembre 2008
suivant déclaration d'appel du 29 Octobre 2008
APPELANTE :
S.C.A. LE BISTROT DES CLERCS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour
INTIMEE :
S.A BANQUE POPULAIRE DES ALPES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre,
Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller,
Mme Fabienne PAGES, Conseiller,
Assistés lors des débats de Mme Nadine LEICKNER, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 05 Janvier 2011, Monsieur MULLER, Président a été entendu en son rapport,
Les avoués ont été entendus en leurs conclusions,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu ce jour,
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La BANQUE POPULAIRE DES ALPES a fait assigner la société LE BISTROT DES CLERCS par devant le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère pour la voir condamner au paiement de la somme de 31 525,08 euros correspondant au solde du compte courant ouvert en ses livres par convention du 4 mai1999.
Par jugement du 17 septembre 2008, le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère a dit que la BANQUE POPULAIRE DES ALPES n'a commis aucune faute en différant l'encaissement du chèque de 32 000 € remis par la société LE BISTROT DES CLERCS et non provisionné à sa date de remise, a débouté la société LE BISTROT DES CLERCS de sa demande de dommages et intérêts, a constaté que la BANQUE POPULAIRE DES ALPES a régulièrement dénoncé les concours consentis à la société LE BISTROT DES CLERCS rendant exigible le solde débiteur du compte courant numéro 16021032786, a condamné la société LE BISTROT DES CLERCS à payer à la BANQUE POPULAIRE DES ALPES la somme de 31 525,08 euros représentant le solde débiteur du compte numéro 16021032786, outre intérêts légaux à compter du 17 novembre 2006, date d'assignation, et condamné la société LE BISTROT DES CLERCS à payer à la BANQUE POPULAIRE DES ALPES la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société LE BISTROT DES CLERCS a interjeté appel de ce jugement.
Vu les conclusions signifiées le 26 février 2009 par la société LE BISTROT DES CLERCS, laquelle demande à la cour de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que la banque n'avait pas commis de faute à son égard et, statuant à nouveau, de dire que la banque est bien fautive à son égard en ayant différé l'encaissement, de façon unilatérale, du chèque de 32 000 € émis par la société MC DEVELOPPEMENT, et en ne l'ayant pas informée au préalable des conséquences du défaut de provision du chèque, et en conséquence, de dire et juger qu'elle a subi un préjudice égal au montant des sommes réclamées par la banque soit la somme de 32 763,61 euros, de condamner la banque à réparer le montant de ce préjudice à son profit et de la condamner au paiement de la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions signifiées le 5 mai 2009 par la BANQUE POPULAIRE DES ALPES, laquelle demande à la cour de débouter la société LE BISTROT DES CLERCS de ses contestations,
lesquelles seront déclarées mal fondées, de condamner la société LE BISTROT DES CLERCS au paiement de la somme de 31 525,08 euros outre intérêts légaux à compter du 28 octobre 2006, d'ordonner la capitalisation annuelle des intérêts, de la condamner à 1000 € à titre de dommages et intérêts en raison du caractère manifestement abusif et dilatoire de la présente procédure et de la condamner à 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Le 3 mars 2006, M [F], gérant de la société LE BISTROT DES CLERCS, a remis à l'encaissement un chèque d'un montant de 32000 € tiré sur un compte ouvert auprès du CREDIT MUTUEL par la société MC DEVELOPPEMENT, société dont M [F] était également le gérant.
La BANQUE POPULAIRE DES ALPES a demandé au CREDIT MUTUEL par fax du 3 mars 2006 un « avis de sort » pour lui permettre de décaisser sur ce chèque et, le même jour, le CREDIT MUTUEL a répondu qu'il n'y avait « pas de provision suffisante à ce jour ».
La BANQUE POPULAIRE DES ALPES a remis ce chèque à l'encaissement sur un compte d'attente et, toujours le même jour, a rejeté deux chèques émis par la société LE BISTROT DES CLERCS dont le montant cumulé avec le découvert existant excédait l'autorisation de découvert consentie jusque là.
Ultérieurement, et après que ces différents chèques aient fait l'objet d'une régularisation (le chèque de 32.000 € a ainsi été porté au crédit du compte le 9 mars 2006) la banque a dénoncé ses concours par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 mars 2006 puis, alors que le découvert n'avait pas été résorbé selon les engagements pris par la société LE BISTROT DES CLERCS le 7 juin 2006, a procédé à la clôture du compte par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 octobre 2006.
La société LE BISTROT DES CLERCS, qui ne conteste pas le montant du solde débiteur de son compte courant, estime que la banque a commis une faute en ne mettant pas à l'encaissement, dès sa remise le 3 mars 2006 au matin, d'un chèque de 32 000 € émis par la société MC DEVELOPPEMENT, ce qui a généré le rejet de plusieurs chèques et une interdiction d'émettre des chèques, et en ne l'informant pas des conséquences du défaut de provision de ce chèque.
Il convient d'observer que ce n'était pas à la BANQUE POPULAIRE DES ALPES d'informer, dans le cadre des dispositions de l'article L131-73 du code monétaire et financier, la société LE BISTROT DES CLERCS de l'absence de provision du chèque de 32.000 €, mais à la banque tirée, à savoir le CREDIT MUTUEL.
Il apparaît cependant que la BANQUE POPULAIRE DES ALPES a commis une faute en n'inscrivant pas provisoirement ce chèque et, surtout, en n'enclenchant pas la procédure devant conduire au rejet du chèque.
Le CREDIT MUTUEL, même s'il était informé de l'existence de ce chèque par le fax de la BANQUE POPULAIRE DES ALPES, ne pouvait pas, alors qu'il n'était pas présenté au paiement, procéder à cette information et le gérant de la société LE BISTROT DES CLERCS, même s'il ne pouvait ignorer l'absence de provision alors qu'il était également gérant de la société MC DEVELOPPEMENT, n'a ainsi pas été mis en mesure d'approvisionner suffisamment le compte ouvert auprès du CREDIT MUTUEL, ce qui n'a été fait en définitive que le 9 mars 2006 permettant ainsi, sans que le chèque litigieux ait été formellement rejeté, d'en inscrire le montant au crédit du compte ouvert auprès de la BANQUE POPULAIRE DES ALPES.
Le préjudice éventuellement subi ne peut s'analyser qu'en une perte de chance d'échapper, par une régularisation rapide, aux pénalités, commissions et frais consécutifs au rejet du ou des chèques rejetés, étant observé que la société LE BISTROT DES CLERCS ne soutient pas que la dénonciation des concours par la banque effectuée par lettre du 24 mars 2006 soit en lien avec cet incident.
Il convient à cet égard de relever que les deux chèques rejetés le 3 mars 2006 par la BANQUE POPULAIRE DES ALPES, pour un montant cumulé de 31.681 €, ne pouvaient qu'être rejetés à cette date alors que l'autorisation de découvert était largement dépassée, ce qui n'est pas contesté, et que le chèque de 32.000 € ne pouvait en tout état de cause, faute de provision au 3 mars 2006, permettre le décaissement des sommes correspondant aux deux chèques rejetés.
Il s'en déduit que, même si la banque a commis une faute, les deux chèques rejetés le 3 mars 2006 ne pouvaient qu'être rejetés et entraîner ainsi pour la société LE BISTROT DES CLERCS l'imputation des pénalités et frais liés à ce rejet.
La société LE BISTROT DES CLERCS ne justifie ainsi pas du préjudice qu'elle invoque.
Il convient par voie de conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société LE BISTROT DES CLERCS de sa demande de dommages et intérêts et en ce qu'il a condamné la société LE BISTROT DES CLERCS à payer à la BANQUE POPULAIRE DES ALPES la somme de 31.525,08 € avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2006.
Il convient par ailleurs d'ordonner, par application des dispositions de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts à compter du 5 mai 2009, date de la première demande.
Il n'est pas démontré que la société LE BISTROT DES CLERCS ait agi abusivement et dans un but dilatoire, comme le soutient la BANQUE POPULAIRE DES ALPES, en interjetant appel aussi convient-il de débouter la BANQUE POPULAIRE DES ALPES de sa demande de dommages et intérêts formée à ce titre.
Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles ont pu exposer tant en première instance qu'en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société LE BISTROT DES CLERCS de sa demande de dommages et intérêts et en ce qu'il a condamné la société LE BISTROT DES CLERCS à payer à la BANQUE POPULAIRE DES ALPES la somme de 31.525,08 € avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2006,
Y ajoutant,
Ordonne la capitalisation des intérêts à compter du 5 mai 2009,
Déboute la BANQUE POPULAIRE DES ALPES de sa demande de dommages et intérêts,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société LE BISTROT DES CLERCS aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître RAMILLON, Avoué.
SIGNE par Monsieur MULLER, Président et par Madame LEICKNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président