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28/10/2010 | FRANCE | N°10/00861

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 28 octobre 2010, 10/00861


RG N° 10/00861

DM

N° Minute :







































































Grosse délivrée



le :



S.C.P. CALAS



S.C.P. GRIMAUD



Me RAMILLON



S.C.P. POUGNAND



S.E.LA.R.L. DAUPHIN

& MIHAJLOVIC









AU NOM DU PEUPLE F

RANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE COMMERCIALE



ARRET DU JEUDI 28 OCTOBRE 2010







Appel d'une décision (N° RG 2009J490)

rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE

en date du 15 janvier 2010

suivant déclaration d'appel du 17 Février 2010





APPELANTE :



S.A BNP PARIBAS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au...

RG N° 10/00861

DM

N° Minute :

Grosse délivrée

le :

S.C.P. CALAS

S.C.P. GRIMAUD

Me RAMILLON

S.C.P. POUGNAND

S.E.LA.R.L. DAUPHIN

& MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET DU JEUDI 28 OCTOBRE 2010

Appel d'une décision (N° RG 2009J490)

rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE

en date du 15 janvier 2010

suivant déclaration d'appel du 17 Février 2010

APPELANTE :

S.A BNP PARIBAS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 13]

représentée par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour

assistée de Me Philippe DUBOIS, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Société BANQUE PALATINE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 9]

[Localité 11]

représentée par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour

assistée de Me HUBINOIS du Cabinet CHAMBREUIL, avocat au barreau de PARIS

S.A BANQUE POPULAIRE DES ALPES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 14]

[Localité 8]

représentée par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour

assistée de Me Philippe DUBOIS, avocat au barreau de PARIS

S.A. BANQUE RHONE-ALPES - BARALP prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 16]

[Localité 7]

représentée par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour

assistée de Me Philippe DUBOIS, avocat au barreau de PARIS

S.A. CREDIT LYONNAIS - LCL prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 15]

[Localité 10]

représentée par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour

assistée de Me Philippe DUBOIS, avocat au barreau de PARIS

S.A. HSBC FRANCE, venant aux droits et actions du Crédit Commercial de France, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 12]

représentée par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour

assistée de Me Philippe DUBOIS, avocat au barreau de PARIS

Maître [I] [N] ès-qualités de liquidateur de la société ETUDES ET CONSTRUCTIONS MECANIQUES

[Adresse 3]

[Localité 7]

représenté par Me Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour

assisté de Me Philippe LAURENT, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller,

Monsieur Jean-Pierre VIGNAL, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Nadine LEICKNER, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 08 Septembre 2010, Monsieur MULLER, Président a été entendu en son rapport,

Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l'affaire a été mise en délibéré au jeudi 21 octobre 2010 ledit délibéré ayant été prorogé à ce jour, ce dont les parties ont été avisées.

------0------

La société ECM SA était une entreprise généraliste de la technique et de la fabrication de fours de traitement thermique destinés à la cémentation de pièces métalliques soumises à de fortes contraintes telles que des engrenages.

Jusqu'au mois de juillet 2003, le capital de la société ECM SA était détenu en intégralité par la société SFI SA, la société ECM SA détenant quant à elle 100 % du capital de la société ECM CONDENSO, devenue ultérieurement ECM INFRAFOURS, 91,37% du capital de la société ECM USA et 35 % du capital de la société S2T.

Aux termes d'une convention du 31 juillet 2003, la société FINANCIERE VULCAIN, dont le capital était détenu par le FCPR ASTORG III, M [P], ancien dirigeant de la société ECM SA, et divers autres actionnaires, s'est engagée à acquérir 100 % des titres de la société SFI SA, par voie de cession à titre onéreux de la pleine propriété et jouissance de 129 700 actions SFI SA et de 714 612 OCA SFI SA, et par voie d'apport de 13 200 actions SFI SA.

Le financement de cette acquisition a été organisé au travers d'un contrat de prêts signé le 26 septembre 2003 entre les sociétés FINANCIERE VULCAIN et ECM SA d'une part, et BNP PARIBAS d'autre part, cette dernière agissant tant en qualité de banque, pour elle-même et pour les « banques et institutions financières détenant ou qui détiendront à tout moment un engagement dans les prêts », qu'en qualité d'arrangeur et d'agent des prêts.

Ce contrat comprenait :

'Un prêt de financement d'acquisition (tranches A1 et A2) au bénéfice de la société FINANCIERE VULCAIN d'un montant de 25.000.000 €,

'Un prêt de financement de croissance externe (tranche B) au bénéfice de la société ECM SA d'un montant de 5.000.000 €,

'Un crédit revolving (tranches R1 et R2) au bénéfice de la société ECM SA en deux tranches de 11.000.000 € et 1.000.000 €.

Conformément aux dispositions du contrat de prêts, BNP PARIBAS a procédé à la syndication des prêts auprès des banques CREDIT COMMERCIAL DE FRANCE devenu HSBC, CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE SUD RHONE ALPES, CREDIT LYONNAIS, BANQUE POPULAIRE DES ALPES, SANPAOLO devenue BANQUE PALATINE et BANQUE RHONE ALPES.

Des actes de transferts de créances ont ainsi été régularisés entre le 16 janvier 2004 et le 26 janvier 2004 entre BNP PARIBAS et les différentes banques membres du pool.

Ces actes de transferts ont été signifiés aux sociétés FINANCIERE VULCAIN et ECM SA selon actes du 27 février 2004.

Aux termes d'un avenant n°1 du 2 février 2004, régularisé entre la société FINANCIERE VULCAIN de première part, la société ECM SA de seconde part, BNP PARIBAS de troisième part, BNP PARIBAS

et les banques et institutions financières détenant ou qui détiendront à tout moment un engagement dans les prêts de quatrième part, BNP PARIBAS es-qualités d'arrangeur de cinquième part et BNP PARIBAS es-qualités d'agent des prêts de sixième part, il a été décidé que la société ECM SA aurait le droit de renoncer, partiellement ou totalement, au bénéfice du prêt de financement de croissance externe, et sans pénalité.

Au cours du mois de mars 2005, le groupe ECM (la société FINANCIERE VULCAIN et ses filiales) a engagé des discussions avec les banques en vue de renégocier l'échelonnement des prêts en raison, notamment, du ralentissement des commandes et alors que les résultats d'exploitation de la société ECM SA se sont révélés déficitaires sur les exercices 2003/2004 et 2004/2005.

Cette situation n'a pas permis à la société ECM SA de verser à la société FINANCIERE VULCAIN les dividendes attendus, et cette dernière a dû faire appel au FCPR ASTORG III pour honorer l'échéance en intérêts du 30 mars 2005 du prêt d'acquisition.

Le 28 juillet 2005, la société FINANCIERE VULCAIN, la société ECM SA , BNP PARIBAS et les banques ont conclu un protocole d'accord (avenant n°2) modifiant le contrat de prêt initial et, le 16 septembre 2005, les mêmes parties ont régularisé un contrat d'ouverture de crédit par signature en contrepartie d'avances en compte courant bloquées et subordonnées consenties par le FCPR ASTORG III pour un montant total de 2.100.000 €.

Le 31 mars 2006, la société ECM SA a de nouveau été confrontée à des difficultés économiques résultant d'une réduction de son carnet de commandes, nonobstant un résultat net bénéficiaire à cette date, ce qui était de nature à compromettre le remboursement par la société FINANCIERE VULCAIN du prix d'acquisition du 20 septembre 2006.

Les sociétés ECM SA et FINANCIERE VULCAIN ont sollicité du président du tribunal de commerce de Grenoble La désignation d'un mandataire ad hoc et, par ordonnance du 8 septembre 2006, Maître [R] a été nommé en cette qualité avec mission d'assister les sociétés FINANCIERE VULCAIN et ECM SA dans leurs discussions avec les banques.

Un accord de principe fixant les engagements respectifs des parties a été arrêté et, par ordonnance du 7 février 2007 rendue sur requête des sociétés FINANCIERE VULCAIN, ECM SA et ECM CONDENSO, le président du tribunal de commerce de Grenoble a ouvert une procédure de conciliation désignant Maître [R] en qualité de conciliateur.

Cette procédure a donné lieu à un protocole de conciliation signé le 7 février 2007 entre les sociétés FINANCIERE VULCAIN, ECM SA et ECM CONDENSO de première part, BNP PARIBAS, HSBC, CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE SUD RHONE ALPES, CREDIT LYONNAIS, BANQUE POPULAIRE DES ALPES, BANQUE PALATINE et BANQUE RHONE ALPES de seconde part, et le FCPR ASTORG III de troisième part, homologué par le président du tribunal de commerce de Grenoble par ordonnance du 19 février 2007.

Cet accord a été suivi d'un avenant n°3 , signé le 30 mars 2007 entre la société FINANCIERE VULCAIN, la société ECM SA et l'ensemble des banques, d'un contrat d'ouverture de crédit par autorisation de découvert en compte (tranche R 3) au profit de la société ECM INFRAFOURS (anciennement ECM CONDENSO), d'un contrat cadre de cession de créances professionnelles, d'un avenant n°1 au contrat d'ouverture de crédit par signature, d'un avenant n°1 au contrat cadre de cession de créances professionnelles et de nouveaux contrats de sûretés.

Le groupe ECM a, à nouveau, connu des difficultés au cours du premier semestre 2007, la société ECM SA faisant face à d'importantes pertes d'exploitation (4.700.000 € en 2007) et le FCPR ASTORG III présentant un résultat net consolidé négatif au 31 mars 2007 de 25.000.000 € mettant en cause le règlement de l'échéance d'intérêts du prêt d'acquisition du 20 septembre 2007.

Le groupe ECM s'est rapproché des banques par l'intermédiaire de Maître [R] et diverses mesures temporaires ont été adoptées : le maintien des tranches R1 et R3 du crédit revolving à hauteur de leur niveau d'utilisation (9.100.000 € et 200.000 €), le remboursement de la tranche R2, effectif le 16 juillet 2007, et le maintien du crédit par signature à hauteur de la somme de 5.300.000 €.

Par ailleurs Maître [R], désigné en qualité de conciliateur par ordonnance du président du tribunal de commerce de Grenoble du 24 juillet 2007, a entamé une recherche d'investisseurs, alors que le FCPR n'était plus en mesure de faire face aux besoins en fonds propres du groupe ECM.

C'est dans ce contexte que le FCPR TN'T 1, représenté par sa société de gestion FIN'ACTIVE, spécialisé dans la reprise de LBO en difficultés, a émis une offre de reprise.

Aux termes d'un protocole d'accord de conciliation du 8 novembre 2007, signé entre les sociétés FINANCIERE VULCAIN, ECM SA et ECM INFRAFOURS, de première part, le FCPR ASTORGS III de deuxième part, le FCPR T'NT 1 de troisième part, les banques de quatrième part et BNP PARIBAS en sa qualité d'agent des prêts de cinquième part, accord constaté par le président du tribunal de commerce de Grenoble par ordonnance du 30 novembre 2007, les mesures suivantes ont été arrêtées :

Restructuration de capital :

'Acquisition, par le FCPR T'NT 1, de 100 % des titres (actions et obligations) FINANCIERE VULCAIN au prix de 1 euro au plus tard le 10 décembre 2007, sans garantie d'actifs et de passif,

'Souscription, par le FCPR T'NT 1, à une augmentation de capital de la société FINANCIERE VULCAIN de montant égal à 3.000.000 € au plus tard le 30 juin 2008, par voie d'apport en numéraire et incorporation de créance,

'Souscription, par le FCPR T'NT 1, à une augmentation de capital de la société FINANCIERE VULCAIN d'un montant égal à 24 294 350,53 euros par voie d'incorporation des créances acquises au titre du prêt d'acquisition,

'Mise à disposition de la société FINANCIERE VULCAIN, par le FCPR T'NT 1, d'apports complémentaires plafonnés à 2.000.000 €,

Restructuration des dettes :

'Cession au FCPR T'NT 1, par le FCPR ASTORG III, de la créance détenue par ce dernier sur la société FINANCIERE VULCAIN au titre des avances en compte courant consenties, d'un montant total de 2 800 802,94 euros, pour un prix global forfaitaire de un euro,

'Cession à la société FINANCIERE VULCAIN, par le FCPR ASTORG III, de la créance détenue par ce dernier sur la société ECM SA au titre de l'avance exceptionnelle consentie le 17 octobre 2007, d'un montant de 595 078,97 euros pour un prix global forfaitaire de un euro,

'Prise d'acte, par toutes les parties au protocole, du prononcé par la majorité des banques de l'exigibilité des tranches A1 et A2 du prêt d'acquisition à effet du 9 novembre 2007, et renonciation des banques à toute indemnisation à ce titre,

'Cession au FCPR T'NT 1, par les banques, des créances détenues par ces dernières sur la société FINANCIERE VULCAIN au titre du solde des tranches A1 et A2 du prêt d'acquisition d'un montant en principal de 23 600 000 € outre intérêts, pour un prix global et forfaitaire de un euro par cession, avec transmission corrélative des sûretés attachées,

'Engagement du FCPR T'NT 1, en contrepartie de la cession de créances au titre du solde du prix d'acquisition de 23 600 000 € pour un euro, de verser aux banques des compléments de prix en cas de réalisation de certains événements déclencheurs, et répartition de ces compléments de prix entre les banques en fonction de leur participation respective, laquelle est détaillée en annexe cinq et six du protocole d'accord de conciliation,

Maintien et réaménagement des crédits court terme :

'Maintien par les banques, au profit de la société ECM SA et pendant une durée de 24 mois à compter du 8 novembre 2007, de la tranche R1 du crédit revolving pour un montant en principal de 8 900 000 €, chacune des banques s'engageant à proportion de son engagement,

'Maintien par les banques, au profit de la société ECM INFRAFOURS et pendant une durée de 24 mois à compter du 8 novembre 2007, de la tranche R3 du crédit pour un montant en principal de 400 000 €,

'Maintien par les banques, à l'exception des banques HSBC et CREDIT AGRICOLE, au bénéfice de la société ECM SA et pendant une durée de 24 mois à compter du 8 novembre 2007, de l'ouverture de crédit par signature dans la limite d'un montant d'encours de 5 300 000 €,

En exécution de ce protocole, les parties ont signé le 9 janvier 2008 :

Un avenant n° 4 au contrat de prêts signé entre les sociétés FINANCIERE VULCAIN et ECM SA et les banques le 26 septembre 2003,

Un avenant n° 2 au contrat d'ouverture de crédit par signature du 16 septembre 2005, ramenant l'encours maximum de 5 787 000 € à 5 300 000 €,

Un avenant n° 1 au contrat d'ouverture de crédit par autorisation de découvert en compte du 30 mars 2007,

Un avenant n° 2 au contrat cadre de cession de créances à titre de garantie (tranche R1),

Un accord de liaison entre les sociétés FINANCIERE VULCAIN, ECM SA, ECM INFRAFOURS, les banques et le FCPR T'NT 1.

Au dernier état de ces modifications, la société FINANCIERE VULCAIN, détenue à 100% par le FCPR T'NT 1, détenait 100% du capital de la société ECM SA qui détenait elle-même 100% des capitaux de 4 sociétés, dont la société ECM INFRAFOURS.

Par lettre recommandée du 2 juin 2008 adressée au président du conseil d'administration de la société ECM SA, le commissaire aux comptes de la société ECM SA a indiqué que : « les prévisions de trésorerie pour le premier semestre de l'exercice 2008/ 2009 mettent en évidence des besoins de trésorerie à court terme non financés à ce jour, malgré les récents apports en compte courant de votre actionnaire », ajoutant, « compte tenu de la situation, nous pensons que les faits mentionnés ci-dessus sont de nature à compromettre la continuité d'exploitation de la société ».

Puis, dans son rapport établi le 7 juillet 2008 en application des dispositions de l'article L.234-1 du code de commerce, Le commissaire aux comptes de la société ECM SA a fait part aux actionnaires de cette dernière des « faits relevés de nature à compromettre la continuité de l'exploitation », à savoir :

'Faiblesse des prises de commandes du second semestre de l'exercice 2007/2008,

'Impasses de trésorerie dans les prévisions,

'Pertes d'environ 4 400 000 € dans le projet de comptes annuels de l'exercice clos le 31 mars 2008,

'Apports de fonds insuffisants pour réduire le déséquilibre financier,

'Absence de confirmation inconditionnelle et chiffrée de son soutien financier par le FCPR T'NT 1,

concluant son rapport dans les termes suivants : « Cependant, en l'absence de prévisions de trésorerie actualisées démontrant que les besoins de financement de la société à court terme sont financés soit par des apports complémentaires de l'actionnaire, soit par des cessions d'actifs supplémentaires, il nous apparaît que, en dépit des décisions prises à ce jour, la continuité de l'exploitation demeure compromise ».

Par requête déposée au greffe du tribunal de commerce de Grenoble le 29 août 2008, les sociétés FINANCIERES VULCAIN, ECM SA et ECM INFRAFOURS ont sollicité du président du tribunal de commerce la nomination de Maître [V] en qualité de conciliateur, lequel a été désigné par ordonnance du 5 septembre 2008.

Une première réunion du pool bancaire s'est tenue le 22 septembre 2008, en l'absence de Maître [V] alors que les banques n'avaient pas été informées de sa désignation.

Une seconde réunion a été provoquée le 21 octobre 2008, alors que la société ECM SA avait informé la banque BNP PARIBAS, en sa qualité d'agent des prêts, d'une part, de la cession à la société concurrente ALD de sa participation dans une société commune, FNAG, qui avait été créée à la suite du protocole de conciliation du 7 février 2007, ce qui permettait de procurer à la société ECM la trésorerie nécessaire à son activité et, d'autre part, de l'existence d'une lettre d'intention du groupe ALD prévoyant la possibilité pour ce dernier de devenir progressivement actionnaire à 100% de la société FINANCIERE VULCAIN.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 octobre 2008, la BNP PARIBAS, en sa qualité d'agent des crédits, a indiqué aux sociétés ECM SA et ECM INFRAFOURS n'avoir découvert l'existence de la requête du 29 août 2008, de l'ordonnance du 5 septembre 2008 et de la procédure d'alerte du mois de juin 2008 qu'à l'occasion de la réunion du 21 octobre 2008, ce qui caractérisait un cas d'exigibilité en entraînait, en application du contrat de prêts du 26 septembre 2003, la suspension de la mise à disposition des tranches R1 et R3 et des ouvertures de crédit par signature.

La BNP PARIBAS a ainsi notifié, es-qualités, la suspension de toutes mises à disposition de fonds au titre des tranches R1 et R3 ainsi que toutes ouvertures de crédit par signature, adressant copie de ce courrier à Maître [V] et à Maître [R].

Par lettre recommandée du 27 octobre 2008, la société ECM a contesté les cas d'exigibilité avancés par la BNP PARIBAS, soutenant que l'avenant n°4 avait supprimé la procédure d'alerte ou l'ouverture d'une procédure de conciliation comme condition suspensive à l'octroi des financements et rappelait que l'absence de mise à disposition immédiate des fonds menaçait directement sa continuité d'exploitation alors que la trésorerie excédentaire de la société ECM, provenant de la cession des participations FNAG, avait été absorbée par le débit du montant du tirage venu à échéance et que le tirage du 22 octobre 2008 n'avait pas été renouvelé.

Sur déclaration de cessation des paiements du même jour, le tribunal de commerce de Grenoble a placé, par jugement du 4 novembre 2008, les sociétés du groupe ECM en redressement judiciaire, désignant dans chacune des procédures ouvertes Maître [V] en qualité d'administrateur et Maître [N], Maître [G] et Maître [H] aux fonctions de représentant des créanciers.

Par deux jugements du 23 décembre 2008, le tribunal de commerce de Grenoble a arrêté le plan de cession des sociétés ECM SA et ECM INFRAFOURS à MM [D] et [X], anciens dirigeants de la société ECM SA.

Par deux jugements du 3 mars 2009, le tribunal de commerce de Grenoble a converti le redressement judiciaire de chacune des sociétés ECM SA et ECM INFRAFOURS en liquidation judiciaire.

Par assignation délivrée à bref délai le 1er juillet 2009, Maître [N], agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société ECM SA a fait assigner la banque BNP PARIBAS devant le tribunal de commerce de Grenoble pour la voir condamner à lui payer une somme de 7 000 000 € de dommages et intérêts représentant le différentiel entre le passif déclaré entre ses mains et l'actif appréhendé dans le cadre de la procédure collective et ce sous réserve de modifications ultérieures.

Cette assignation a été délivrée à la banque BNP PARIBAS en sa qualité de prêteur d'agent des prêts.

La BNP PARIBAS a fait assigner en intervention forcée l'ensemble des banques constituant le pool bancaire, lesquelles ont pris des écritures pour que leur intervention volontaire soit actée.

Par jugement du 15 janvier 2010, le tribunal de commerce de Grenoble a :

'débouté HSBC FRANCE, le CREDIT LYONNAIS, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES, BANQUE PALATINE de leurs demandes d'intervention volontaire et autres prétentions,

'dit que le crédit syndiqué est une syndication indirecte et jugé que seul l'agent des prêts BNP PARIBAS a un lien de droit direct avec l'emprunteur,

'dit que Maître [N], mandataire judiciaire es-qualités de liquidateur de la société ECM a qualité pour agir,

'dit que BNP PARIBAS a commis une faute contractuelle en refusant le tirage de la somme de 724 000 € sur la ligne de 11 000 000 € au titre du crédit revolving et jugé qu'elle a ainsi provoqué une rupture abusive des concours ayant entraîné une cessation des paiements de EMC,

'dit que cette faute commise par BNP PARIBAS est le fait générateur qui a causé le préjudice final subi par la collectivité des créanciers,

'condamné BNP PARIBAS à payer à Maître [N], es-qualités, le différentiel entre le passif déclaré et l'actif appréhendé dans le cadre de la procédure collective, soit en l'état et sous réserve de modifications ultérieures, la somme de 7 000 000 € à parfaire, outre les intérêts au taux légal courus à compter de l'assignation,

'condamné BNP PARIBAS à lui payer 30 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

'condamné la même aux entiers dépens de l'instance,

'débouté BNP PARIBAS de l'ensemble de ses prétentions,

'ordonné l'exécution du présent jugement.

La banque BNP PARIBAS a interjeté appel de ce jugement et a été autorisée à assigner à jour fixe devant la cour.

Vu les assignations à jour fixe des 22, 23, 25, 26 29 et 30 mars 2010, signifiées à avoué le 6 mai 2010, par lesquelles la société BNP PARIBAS demande à la cour de :

'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 15 janvier 2010 et, statuant à nouveau :

'déclarer recevables les interventions volontaires des sociétés HSBC FRANCE, CREDIT LYONNAIS, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES et BANQUE PALATINE,

'débouter Maître [N] de l'intégralité de ses demandes, condamner Maître [N] es-qualités à lui verser la somme de 50.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

'condamner le même aux entiers dépens de première instance et d'appel,

'subsidiairement,

'dire que la part des dommages et intérêts alloués à Maître [N] es-qualités, et devant être prise en charge par BNP PARIBAS, ne saurait excéder 30% du total ainsi alloué.

Vu les conclusions signifiées le 2 septembre 2010 par la société BANQUE PALATINE, laquelle demande à la cour de :

'lui donner acte de ce qu'elle s'associe à l'argumentation développée par les sociétés BNP PARIBAS, HSBC FRANCE, BANQUE POPULAIRE DES ALPES, BANQUE RHONE ALPES, LCL LE CREDIT LYONNAIS,

'déclarer son appel incident recevable bien-fondé,

'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Grenoble le 15 janvier 2010,

'statuant à nouveau,

'déclarer recevable son intervention volontaire et la dire bien-fondée,

'débouter Maître [N], es-qualités, de l'intégralité de ses demandes,

'condamner Maître [N], es-qualités, à lui payer la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

'condamner le même aux entiers dépens de première instance et d'appel,

'subsidiairement,

'dire que la part de dommages et intérêts alloués à Maître [N] es-qualités, et devant être prise en charge par elle ne saurait excéder sa part dans les crédits accordés.

Vu les conclusions signifiées le 3 septembre 2010 par les sociétés BANQUE POPULAIRE DES ALPES, BANQUE RHONE ALPES, HSBC FRANCE, LCL LE CREDIT LYONNAIS, par lesquelles il est demandé à la cour de :

'déclarer les appels incidents des sociétés HSBC FRANCE, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES et LE CREDIT LYONNAIS recevables et bien fondés,

'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 15 janvier 2010 et, statuant à nouveau,

'déclarer recevables les interventions volontaires des sociétés HSBC FRANCE, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES et LE CREDIT LYONNAIS et les dire bien fondées,

'débouter Maître [N] de l'intégralité de ses demandes,

'condamner Maître [N], es-qualités, à verser à chacune d'elles la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

'condamner le même aux entiers dépens de première instance d'appel,

'subsidiairement,

'dire que la part des dommages et intérêts alloués à Maître [N], es-qualités, et devant être prise en charge par chacune des sociétés HSBC FRANCE, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES et LE CREDIT LYONNAIS ne saurait excéder leur part respective dans les crédits accordés.

Vu les conclusions signifiées le 31 août 2010 par Maître [N], es-qualités de liquidateur judiciaire de la société ETUDES ET CONSTRUCTIONS MECANIQUES (ECM), lequel demande à la cour de :

'statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel,

'au fond, le dire infondé,

'confirmer le jugement entrepris en toute ses dispositions, sauf à condamner solidairement les banques BNP PARIBAS, HSBC FRANCE, CREDIT LYONNAIS, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES, BANQUE PALATINE, CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL SUD RHONE ALPES à lui payer es-qualités le différentiel entre l'actif appréhendé par ses soins dans le cadre de la procédure collective et le passif déclaré entre ses mains, à l'exception des créances bancaires, soit en l'état une somme de 14 930 446 € à titre de dommages et intérêts,

'dire que cette somme portera intérêts au taux annuellement capitalisés à compter de l'acte introductif d'instance,

'condamner les mêmes à lui payer es-qualités une somme de 30 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

'condamner les appelantes aux entiers dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS

Sur les interventions volontaires des sociétés HSBC FRANCE, CREDIT LYONNAIS, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES et BANQUE PALATINE.

Les premiers juges, considérant que le pool s'était agrégé dans le cadre d'une syndication indirecte, a débouté les banques assignées en intervention forcée et qui sont, ultérieurement, intervenues volontairement.

Les premiers juges ont retenu :

'que l'acte de prêt du 26 septembre 2003 avait été signé uniquement par la banque BNP PARIBAS,

'que cette dernière avait déclaré représenter le pool bancaire,

'que toutes les opérations de tirage et/ou utilisation du crédit avaient été passées entre l'emprunteur et la banque BNP PARIBAS,

'que les créances au passif du redressement judiciaire puis de la liquidation judiciaire avaient été déclarées sous la seule signature de la banque BNP PARIBAS.

Maître [N] s'associe sur ce point à l'appel interjeté par les banques.

Il convient d'observer, d'une part, que la banque BNP PARIBAS a signé le contrat de prêt du 26 septembre 2003 en sa triple qualité de banque prêteuse, d'arrangeur et d'agent des prêts et que la syndication s'est accompagnée de cessions de créances de la banque BNP PARIBAS au profit des autres banques, cessions qui ont été notifiées aux emprunteurs, ce qui démontre que la syndication directe était convenue entre les parties, et d'autre part, que le contrat de prêts lui-même contient des dispositions montrant que les parties ont entendu recourir à une syndication directe.

Il sera relevé à cet égard que les différents prêts ont été consentis par « les banques », sans solidarité entre elles, que s'agissant des tranches R1 et R2 du crédit revolving, chaque banque s'est engagée à mettre les fonds à disposition « en proportion de son engagement » et « dans la limite de son engagement », et que, d'une façon générale, « tous les versements en faveur des emprunteurs au titre du contrat de financements seront effectués directement par chaque banque par virement au compte de l'emprunteur concerné », que s'agissant des tranches A1, A2 et B les échéances prévues « correspondent à la somme des remboursements qui devront être effectués par l'emprunteur auprès de chacune des banques à hauteur de leur participation respective », des comptes spéciaux étant ouverts au nom de chaque emprunteur dans les livres de chacune des banques du pool afin d'y recevoir les crédits consentis par chacune des banques .

Les avenants n° 2, 3 et 4, au demeurant signés par l'ensemble des banques du pool, n'ont pas eu pour effet de mettre fin à la syndication directe au motif que les opérations de tirage et/ou d'utilisation des crédits ainsi que le remboursement des échéances en capital et intérêts ont été confiés par l'avenant n° 2 à l'agent des prêts (BNP PARIBAS), à charge pour ce dernier de répartir les sommes perçues entre les banques, alors que ces nouvelles modalités ne concernent que l'organisation des flux financiers et sont sans effet sur la qualité des créanciers, acquise lors de la signature du contrat de prêts.

Enfin, les déclarations de créances ont certes été effectuées par la banque BNP PARIBAS, mais avec la mention de chacune des banques du pool, de la part d'engagement de chacun des membres du pool et en joignant les mandats délivrés à cette fin par chaque banque membre du pool.

Il s'en déduit, s'agissant d'une syndication directe, que les banques avaient bien un intérêt à agir relativement à la demande formulée à l'encontre de la banque BNP PARIBAS, et ce à proportion de leurs engagements respectifs, alors que cette dernière a été assignée en réparation du dommage causé par une

rupture abusive des concours bancaires consentis par l'ensemble des banques et non pour une faute propre à la mission et au mandat d'agent des prêts.

Il convient par voie de conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté HSBC FRANCE, le CREDIT LYONNAIS, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES, BANQUE PALATINE de leurs demandes d'intervention volontaire et autres prétentions, et de déclarer recevables les interventions volontaires des sociétés HSBC FRANCE, CREDIT LYONNAIS, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES et BANQUE PALATINE.

Sur la rupture fautive des concours

Maître [N] estime que les banques, en rompant les concours bancaires consentis à la société ECM SA, se sont affranchies tant des dispositions contractuelles que des dispositions légales prévues au code monétaire et financier.

Il estime, s'agissant des dispositions contractuelles, que la banque a irrégulièrement rompu les concours en se référant à des causes d'exigibilité anticipée qui avaient été supprimées par l'avenant n° 4 et, au surplus, en ne laissant aucun délai aux sociétés du groupe ECM, qui aurait pu permettre à ces dernières de régulariser leur situation ou au moins de s'expliquer, délai prévu par les dispositions de l'article 4.4 du protocole de conciliation du 8 novembre 2007, et sans davantage en aviser Maître [R], conformément aux dispositions de l'article 5.8 du même acte, pour que ce dernier intervienne en qualité de médiateur après une mise en demeure d'avoir à remplir les obligations adressée à la partie défaillante.

Maître [N] invoque par ailleurs les dispositions de l'article L313-12 du code monétaire et financier, faisant valoir que la situation de la société ECM n'était pas irrémédiablement compromise et que la banque BNP PARIBAS ne saurait invoquer un comportement gravement répréhensible imputable aux sociétés du groupe ECM pour justifier leur décision.

Il soutient que la rupture a été préméditée par la banque BNP PARIBAS à seule fin d'appréhender le prix de cession des parts détenues par ECM dans la société FNAG et de notifier aux débiteurs du groupe ECM des cessions de créances qui n'avaient été consenties qu'à titre de garantie à seule fin de réaliser autant que possible un encours qu'elle jugeait périlleux, alors qu'avant le 23 octobre 2008, les sociétés du groupe ECM étaient rigoureusement à jour de leurs engagements et disposaient des fonds nécessaires leur permettant d'assurer leur financement à court terme.

Il affirme enfin, que la banque BNP PARIBAS a fait obstacle au bon déroulement de la procédure collective en coupant tous les contacts avec le service comptable de la société ECM et en ne débloquant pas en temps utile les fonds indispensables au financement de la poursuite d'activité.

Il n'est pas contesté par la banque BNP PARIBAS que les évènements visés par elle par son courrier du 23 octobre 2008, à savoir : la requête aux fins de nomination d'un conciliateur du 29 août 2008, l'ordonnance du 5 septembre 2008 nommant Maître [V] en qualité de conciliateur et la procédure d'alerte déclenchée par les commissaires aux comptes au mois de juin 2008, ont été supprimés par l'avenant n° 4 du 9 janvier 2008 de la liste des cas d'exigibilité anticipée prévus au contrat de prêts du 26 septembre 2003.

Elle ne saurait réduire la portée de la décision en cause en invoquant une simple « suspension » de la mise à disposition des fonds requis, alors qu'elle soutient par ailleurs que la violation par les emprunteurs de l'obligation générale de sincérité et d'exactitude mise à leur charge était de nature à faire disparaître totalement la relation de confiance devant exister entre eux et qu'elle estime que ces faits caractérisent un comportement gravement répréhensible aux sens des dispositions de l'article L313-12 du code monétaire et financier.

Au demeurant, la suspension de la mise à disposition des fonds avait pour conséquence inéluctable la cessation des paiements des sociétés du groupe ECM, ce que la banque BNP PARIBAS ne pouvait ignorer en prenant connaissance des termes de la requête aux fins de désignation d'un conciliateur et, surtout, de la procédure d'alerte initiée par les commissaires aux comptes.

En réalité, la BANQUE BNP PARIBAS a, par son courrier du 23 octobre 2008, rompu les concours bancaires prévus par le contrat de prêts du 26 septembre 2003 et par ses avenants.

Chaque emprunteur a effectué diverses déclarations à la date de signature du contrat de prêts (article 4.2), et notamment que « ni lui, ni les sociétés du groupe ECM ne font l'objet, en France ou à l'étranger, d'une procédure d'alerte, aucun mandataire ad hoc ou conciliateur n'a été désigné, notamment dans le cadre des dispositions de la loi n° 84-148 du 1er mars 1984, afin de rechercher la conclusion d'un accord avec ses/leurs créanciers, il (elles) n'est (ne sont) pas en état de cessation des paiements et aucune procédure de redressement ou de liquidation judiciaire n'a été ouverte à son (leur) encontre » (article 4.2.6).

Aux termes des dispositions de l'article 4.2 « ces déclarations effectuées par chaque emprunteur à la date de signature dont l'exactitude est l'une des conditions déterminantes : de la signature du contrat de prêts par les banques et par l'agent des prêts, et de l'octroi des prêts, ce que chaque emprunteur reconnaît, seront réputées réitérées pour chacune des tranches des prêts, à la date de réalisation de l'acquisition et à chaque date d'utilisation et au début de chaque période d'intérêts ».

Ces dispositions n'ont pas été supprimées par l'avenant n° 4.

Il s'en déduit que les emprunteurs étaient soumis à une obligation contractuelle de sincérité, obligation qui rejoint l'obligation générale de loyauté qui pèse sur tout contractant.

Il n'est pas contesté que les banques n'ont pris connaissance de la désignation de Maître [V] et de la procédure d'alerte qu'à l'occasion de la réunion du pool bancaire du 21 octobre 2008, alors qu'une réunion du pool bancaire s'était tenue le 22 septembre 2008 sans que ces évènements soient évoqués et qu'à sept reprises, entre les 23 septembre et 13 octobre 2008, la société ECM SA a adressé à la banque BNP PARIBAS des avis de tirages confirmant l'exactitude et l'actualité des déclarations effectuées lors de la signature du contrat de prêts.

Il ne saurait être sérieusement soutenu que la banque BNP PARIBAS, et les autres banques membres du pool, ont « prémédité » la rupture des concours bancaires, à seule fin d'appréhender l'actif disponible des sociétés du groupe ECM, alors qu'elles ont pris connaissance des évènements justifiant leur décision le 21 octobre 2008 et que la rupture a été notifiée dès le 23 octobre 2008, ce qui exclut toute préméditation ou tout calcul, étant observé que la rupture des concours entraînait nécessairement en vertu des dispositions des article 4.2 du contrat cadre de cession de créances professionnelles du 30 mars 2007 la notification aux débiteurs du groupe ECM des cessions de créances consenties à titre de garantie alors que les banques étaient propriétaires des créances cédées par le groupe ECM, et ce depuis l'émission des bordereaux de cession.

La rétention volontaire, par la société ECM, des informations en cause constitue un manquement à l'obligation de sincérité et de loyauté rappelée ci-dessus et elle caractérise un « comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit » au sens des dispositions de l'article L313-12 alinéa 2 du code monétaire et financier.

Le caractère volontaire du manquement ressort :

'du document intitulé « réunion pool bancaire ECM 1 juillet 2008 » (pièce 24 BNP), rédigé par la société ECM, qui passe sous silence la lettre recommandée du 2 juin 2008 adressée au président du conseil d'administration de la société ECM SA, par laquelle le commissaire aux comptes de la société ECM SA indiquait que : « les prévisions de trésorerie pour le premier semestre de l'exercice 2008/ 2009 mettent en évidence des besoins de trésorerie à court terme non financés à ce jour, malgré les récents apports en compte courant de votre actionnaire », ajoutant, « compte tenu de la situation, nous pensons que les faits mentionnés ci-dessus sont de nature à compromettre la continuité d'exploitation de la société ».

'du document intitulé « réunion pool bancaire ECM 22 septembre 2008 » (pièce 14 BNP), rédigé par la société ECM, qui omet de faire état du rapport établi le 7 juillet 2008 par les commissaires aux comptes en application des dispositions de l'article L.234-1 du code de commerce par lequel ces derniers ont fait part aux actionnaires de la société ECM des « faits relevés de nature à compromettre la continuité de l'exploitation », (faiblesse des prises de commandes du second semestre de l'exercice 2007/2008, impasses de trésorerie dans les prévisions, pertes d'environ 4 400 000 € dans le projet de comptes annuels de l'exercice clos le 31 mars 2008, apports de fonds insuffisants pour

réduire le déséquilibre financier, absence de confirmation inconditionnelle et chiffrée de son soutien financier par le FCPR T'NT 1), concluant leur rapport dans les termes suivants : « cependant, en l'absence de prévisions de trésorerie actualisées démontrant que les besoins de financement de la société à court terme sont financés soit par des apports complémentaires de l'actionnaire, soit par des cessions d'actifs supplémentaires, il nous apparaît que, en dépit des décisions prises à ce jour, la continuité de l'exploitation demeure compromise », et qui néglige également de faire mention de la requête déposée au greffe du tribunal de commerce de Grenoble le 29 août 2008, par laquelle les sociétés FINANCIERES VULCAIN, ECM SA et ECM INFRAFOURS ont sollicité du président du tribunal de commerce la nomination de Maître [V] en qualité de conciliateur, et de la désignation de ce dernier par ordonnance du 5 septembre 2008.

'des « avis de tirage » des 23, 25, 29 septembre 2008 et des 6 et 13 octobre 2008 (pièces 37, 38, 39, 40, 41 BNP) par lesquelles la société ECM confirmait « que les déclarations que nous avons effectuées aux termes du contrat de prêts sont exactes et complètes à la date du présent avis de tirage », ce qui était inexact au regard des évènements rappelés ci-dessus.

Maître [N] ne saurait justifier a posteriori ces omissions volontaires en soutenant que la cession des parts FNAG avait procuré à la société ECM une trésorerie mettant un terme à la procédure d'alerte et, par ailleurs, que la lettre d'intention du groupe ALD prévoyant la possibilité pour ce dernier de devenir progressivement actionnaire à 100% de la société FINANCIERE VULCAIN était de nature à assurer définitivement la pérennité du groupe ECM alors que ces évènements sont postérieurs à l'omission en cause.

Au demeurant, il sera observé, d'une part, que la cession FNAG, même si elle permettait la levée des réserves exprimées par les commissaires aux comptes, ne mettait que provisoirement le groupe ECM à l'abri d'une rupture de sa trésorerie de court terme (page 28 du rapport [T]) et ne permettait pas de réduire l'endettement (de 3.000.000 € au 29 août 2008, page 7 de la requête du même jour) à l'égard des fournisseurs, lesquels « ont durci leur position » (page 6 de la requête) et n'était pas de nature à compenser « les pertes subies par le groupe en raison de la chute considérable de son carnet de commandes et des retards de paiement de ses clients » (page 7 de la requête) et, d'autre part, que les discussions avec la société ALD n'étaient pas encore menées à leur terme.

La société ECM avait d'ailleurs conscience de la nécessité d'associer les banques à ses discussions en vue de l'ouverture du capital des sociétés du groupe (page 8 de la requête) ce qui ne pouvait se faire qu'en toute transparence.

En omettant de tenir les banques informées de la procédure d'alerte, de la présentation d'une requête aux fins de nomination d'un conciliateur, de la nomination de Maître [V] en cette qualité, requête faisant état des graves difficultés auxquelles le

groupe était confronté, et en procédant à des déclarations mensongères la société ECM a altéré la confiance, base du crédit, du créditeur dans le crédité et il ne saurait être reproché à la banque BNP PARIBAS d'avoir mis fin, à titre personnel et es-qualités, aux concours bancaires consentis en vertu du contrat de prêts et ce sans préavis et sans avis consultatif de Maître [R], et ce même si cette décision a pu entraîner ou au moins précipiter la décision de procéder à la déclaration de cessation des paiements qui a été effectuée dès le 27 octobre 2008, étant précisé que le grief tenant à l'attitude de la banque BNP PARIBAS, postérieurement au prononcé du jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire, à laquelle il est reproché d'avoir indûment supprimé l'accès de la société ECM à ses comptes courants sur Internet et d'avoir retenu le reversement de sommes encaissées, difficultés qui ne sont même pas évoquées par le « bilan économique et social » établi par Maître [V] en vue de l'audience du 18 décembre 2008 (annexe 7 du rapport [T]), est sans incidence sur la décision de liquidation judiciaire.

Il convient par voie de conséquence d'infirmer le jugement entrepris, et de débouter Maître [N], es-qualités, de l'ensemble de ses demandes.

Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles ont pu exposer.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déclare recevables les interventions volontaires des sociétés HSBC FRANCE, CREDIT LYONNAIS, BANQUE RHONE ALPES, BANQUE POPULAIRE DES ALPES et BANQUE PALATINE,

Déboute Maître [N], es-qualités, de l'ensemble de ses demandes,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

SIGNE par Monsieur MULLER, Président et par Madame LEICKNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10/00861
Date de la décision : 28/10/2010

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-10-28;10.00861 ?
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