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17/09/2008 | FRANCE | N°05/00796

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 17 septembre 2008, 05/00796


RG N° 07 / 01470

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU MERCREDI 17 SEPTEMBRE 2008

Appel d'une décision (N° RG 05 / 00796)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 29 mars 2007
suivant déclaration d'appel du 17 Avril 2007



APPELANTE :

Madame Marie-Thérèse X...


...

38000 GRENOBLE

Comparante et assistée par Me Laure GERMAIN-PHION (avocat au barreau de GRENOBLE)

INTIMÉE :

L'Association AFIPAIEM prise en la personne de son représentant légal en exer

cice domicilié en cette qualité audit siège
3 Avenue Marie Reynoard
38029 GRENOBLE CEDEX 2

Représentée par Me Laurent CLEMENT-CUZIN (avoca...

RG N° 07 / 01470

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU MERCREDI 17 SEPTEMBRE 2008

Appel d'une décision (N° RG 05 / 00796)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 29 mars 2007
suivant déclaration d'appel du 17 Avril 2007

APPELANTE :

Madame Marie-Thérèse X...

...

38000 GRENOBLE

Comparante et assistée par Me Laure GERMAIN-PHION (avocat au barreau de GRENOBLE)

INTIMÉE :

L'Association AFIPAIEM prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
3 Avenue Marie Reynoard
38029 GRENOBLE CEDEX 2

Représentée par Me Laurent CLEMENT-CUZIN (avocat au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,
Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller,
Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 02 Juillet 2008,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 17 Septembre 2008.

L'arrêt a été rendu le 17 Septembre 2008.

Marie-Thérèse X... a été engagée en qualité de psychologue pour une durée indéterminée à compter du 1er septembre 1977 par l'association familiale de l'Isère pour l'aide aux enfants infirmes mentaux, devenue l'association familiale de l'Isère pour enfants et adultes handicapés intellectuels (AFIPAIEM).

Elle a été affectée en septembre 1979 à l'IME Henri-Daudignon, spécialisé dans l'accueil d'enfants et adolescents autistes ou déficients intellectuels, institut dont la capacité est de 90 enfants, répartis en fonction de leur âge dans deux sections : éducation (6 à 14 ans) et pré-professionnelle (14 à 20 ans).

Elle occupait au moment de son licenciement l'emploi de psychologue clinicienne et relevait du statut de cadre pour un salaire mensuel de l'ordre de 3500 euros.

A la suite d'avertissements ou mise en garde notifiés au cours du premier semestre de 2003, Marie-Thérèse X... a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble le 18 juillet 2003 d'une demande aux fins d'indemnisation d'un harcèlement moral.

Le bureau de conciliation a ordonné le 18 septembre 2003 une mesure de médiation qui a abouti en mars 2004 à la signature d'un accord, homologué par le conseil de prud'hommes, prévoyant notamment que l'employeur renonçait à se prévaloir des faits ou sanctions antérieurs, que Marie-Thérèse X... s'engageait à respecter ses fonctions et prévoyant la signature par les parties d'une fiche de fonctions.

Elle a été mise à pied à titre conservatoire le 24 mai 2005 au visa de faits survenus le 18 mai précédent et, par lettre du 26 mai 2005 confirmant cette mise à pied, elle a été convoquée à un entretien fixé au 6 juin 2005, préalable à un éventuel licenciement, puis a été licenciée pour faute grave le 22 juin 2005.

Marie-Thérèse X... a contesté cette mesure devant le conseil de prud'hommes de Grenoble, saisi le 4 juillet 2005 et a sollicité une indemnisation distincte de nouveau pour harcèlement moral.

Par jugement du 29 mars 2007, le conseil a jugé que son licenciement était intervenu pour une cause réelle et sérieuse et non pour une faute grave, a jugé que les faits allégués de harcèlement moral n'étaient pas établis, a condamné l'AFIPAIEM au paiement de 1. 000 euros de frais irrépétibles et au paiement des sommes suivantes avec intérêts de droit à compter du 8 juillet 2005 :
13. 033 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,
10. 200 euros d'indemnité compensatrice de préavis,
1. 020 euros au titre des congés payés afférents,
a débouté Marie-Thérèse X... du surplus de ses demandes et a condamné l'employeur aux dépens.

Marie-Thérèse X... a relevé le 17 avril 2007 un appel limité à la requalification du licenciement, au rejet de ses demandes relatives au harcèlement moral et à l'indemnisation du caractère illicite du licenciement.

Elle demande à la cour de constater qu'elle a été victime de harcèlement moral, de juger que son licenciement était nul en ce qu'il traduisait lui-même des faits de harcèlement moral, de condamner en conséquence son ancien employeur à lui verser, en plus des condamnations dont la confirmation est sollicitée, les sommes de :
40. 800 euros, soit l'équivalent d'un an de salaire, de dommages et intérêts pour préjudice moral,
81. 600 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul, subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
en tout état de cause 3. 000 euros en réparation du manquement par l'employeur à son obligation d'adaptation à l'évolution de ses fonctions,
2. 000 euros pour frais irrépétibles.

Marie-Thérèse X... conteste point par point chaque grief.

Elle expose que la médiation n'avait été qu'un intermède dans une stratégie de harcèlement mise en oeuvre par la hiérarchie de l'IME en particulier après le départ en 2005 du Dr A... qui la soutenait.

Elle invoque notamment les éléments suivants :
- le manque d'objectivité et de loyauté du directeur à son égard,
- des pratiques humiliantes et sa dévalorisation au regard de son équipe de travail,
- sa soumission à des " injonctions paradoxales ", le refus de l'employeur d'organiser des réunions de service à des horaires compatibles avec les siens puis des reproches de ne pas assister à ces réunions,
- sa mise à l'écart lors de l'élaboration des projets personnels individualisés (PPI) des jeunes,
- une augmentation considérable de sa charge de travail.

L'AFIPAIEM interjette appel incident, demande à la cour de confirmer les dispositions du jugement qui lui sont favorables, d'infirmer les autres, de débouter Marie-Thérèse X... de ses demandes et de la condamner à indemniser ses frais irrépétibles à hauteur de 5. 000 euros.

L'ancien employeur soutient que la psychologue clinicienne était en perpétuel désaccord avec un nombre très important de collègues, qui s'en plaignaient, que son attitude avait donné également lieu à des plaintes de familles et que ce comportement récurrent avait été constaté par trois directeurs successifs.

L'association soutient que l'intéressée avait repris son même comportement quelques semaines après l'accord de 2004, ce qui avait contraint l'employeur à réagir pour le bon fonctionnement de l'institution et le bien être des jeunes résidents.

Elle conteste que Marie-Thérèse X... rapporte aucun fait précis de harcèlement moral et fait observer qu'aucun arrêt de travail pour état dépressif ne lui avait été prescrit.

L'ancien employeur s'explique sur les quatre griefs énoncés dans la lettre de licenciement. Il fait valoir notamment qu'en 2003 trois dossiers d'enfants sur soixante-seize étaient à jour, qu'en 2005 c'était toujours de cas, que Marie-Thérèse X... ne portait aucune annotation sur les fiches PPI ni aucun rapport sur les enfants, qu'elle n'en faisait qu'à sa tête, se prenait pour un psychiatre, qu'elle ne respectait aucun planning ni aucun horaire de réunion.

Sur quoi :

sur le harcèlement moral :

Attendu que Marie-Thérèse X... reproche au directeur par intérim de l'IME, Pierre B..., d'être resté inerte alors qu'elle aurait été victime du mauvais comportement de divers collègues de travail ;

Qu'elle fait état de la carence de sa hiérarchie à la suite d'un incident qui l'avait opposée en janvier 2005 à un autre salarié, M. C..., qui lui aurait notamment dit qu'elle était une mauvaise psychologue ;

Qu'elle reproche au même directeur d'avoir refusé de la recevoir et de l'avoir renvoyée vers une chef de service, Irène D..., responsable de la section éducation, laquelle n'aurait pas suffisamment réagi ;

Mais attendu que le compte rendu rédigé le 20 janvier 2005 par cette responsable indique qu'un conflit ancien opposait les deux protagonistes à propos d'une méthode de prise en charge des jeunes, dite méthode " TEACCH ", qu'elle-même se trouvait dans une impasse face à l'attitude de M. C... qui reprochait à Marie-Thérèse X... de le harceler et face à l'incommunicabilité entre Marie-Thérèse X... et elle-même ;

Attendu que Marie-Thérèse X... fait état de l'arrêt d'un groupe de régulation auquel elle participait ; qu'elle estime avoir fait l'objet à cette occasion de graves allégations remettant en cause ses compétences professionnelles et invoque également un manque de réaction de son directeur ;

Que les pièces produites sur ce point font apparaître que cette décision est toutefois intervenue sur l'initiative de trois éducatrices, par un courrier adressé en se sens à la hiérarchie ;

Que le directeur n'a pas décidé arbitrairement d'arrêter ce groupe ; que les éducatrices signataires de ce courrier du 20 janvier 2005 ne mettaient pas en cause les compétences de Marie-Thérèse X... mais estimaient que la confiance était insuffisamment installée et que le climat existant ne permettait pas un travail constructif ;

Attendu que Marie-Thérèse X... fait état des pratiques dévalorisantes, déstabilisatrices et humiliantes manifestées en public par les membres de la direction à son égard ;

Que l'attestation Marie-Frédérique Y..., monitrice éducatrice, n'indique pas de faits datés, sauf un du 17 mai 2005 survenu lors d'une réunion que Marie-Thérèse X... aurait été brutalement sommée de quitter ; que cet incident est en réalité le même que celui qui a été reproché dans la lettre de licenciement à propos du grief d'insubordination sur lequel il sera statué ci-après ;

Que le témoignage de l'orthophoniste Sylvie E... n'indique pas non plus qui aurait sommé l'intéressée de se taire ;

Mais qu'au demeurant des pièces produites par la partie adverse illustrent le contexte dans lequel Marie-Thérèse X... avait pu être apostrophée ;

Attendu que Marie-Thérèse X... a contesté avoir commis une faute le 18 mai 2005, en faisant valoir qu'elle avait été témoin avec l'éducateur spécialisé Pascal F... d'une scène de maltraitance de deux adolescents sur deux jeunes, l'un autiste l'autre trisomique, qu'elle était intervenue pour la faire cesser et que cela lui avait été reproché ;

Que Pascal F... atteste qu'à l'occasion de cet incident, P. B... s'était adressé à Marie-Thérèse X... avec véhémence devant du personnel, n'avait pas voulu la laisser parler et lui avait intimé l'ordre de se taire ;

Attendu que cet incident n'a pas été repris dans la lettre de licenciement ;

Que l'éducateur technique spécialisé James G..., également témoin de cet incident, donne une autre version de ces faits du 18 mai 2005, critique l'intervention de Marie-Thérèse X... qu'il qualifie d'interrogatoire musclé des jeunes, dénonce vigoureusement le caractère non approprié de la réaction de Marie-Thérèse X... précisément sur le plan psychologique, en indiquant qu'à la suite de l'intervention de sa collègue durant ce qu'il qualifie d'intrusion, il n'avait pas eu les moyens de retrouver vis-à-vis de ces jeunes sa place de responsable et estime avoir eu le sentiment d'être maltraitant en ne pouvant rien faire plus rapidement ;

Attendu que dans un rapport adressé le 27 février 2005 au directeur de l'établissement Marie-Odile H..., responsable de la section pré-professionnelle, s'était plainte du comportement manifesté par Marie-Thérèse X... lors des réunions de synthèse et d'équipe à propos du cas de l'enfant J. F. et explique que, lors d'une réunion avec la famille de cet enfant, Pierre B... était intervenu fermement pour demander à Marie-Thérèse X... de se taire car " ses propos (étaient) en dehors du contexte et surtout propices à angoisser ces parents déjà très inquiets de l'orientation de leur enfant " ;

Que ces témoignages contraires à ceux produits par l'appelante permettent de considérer que les décisions ou réactions de l'employeur étaient justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement au sens de l'article L. 122-52 du code du travail ;

Que, par ailleurs, le fait pour P. B... d'avoir interrompu une séance de travail thérapeutique pour demander à Marie-Thérèse X... de lui prêter un test ne constitue pas en soi un acte de harcèlement moral ;

Attendu qu'une bonne partie des témoignages invoqués par Marie-Thérèse X... au soutien de ses moyens expriment, en réalité, soit une remise en cause, soit une critique des méthodes, des choix de gestion et de l'organisation de l'IME, critiques qu'avait pu partager Marie-Thérèse X..., mais ne font pas référence à des faits précis et circonstanciés de harcèlement moral dont l'intéressée aurait été victime ;

Qu'ainsi, le témoignage de sa collègue de travail Colette I... contient des considérations d'ordre général sur l'évolution, à ses yeux négatives, du métier de psychologue d'établissement mais ne fait pas le constat d'actes de harcèlement moral ;

Attendu que Marie-Thérèse X... était la seule psychologue de l'IME et couvrait les deux sections, mais ne démontre pas qu'elle avait été sciemment mise à l'écart de réunions organisées aux mêmes horaires pour chacune des sections, ni qu'elle avait été soumise à des " injonctions paradoxales " ;

Qu'elle ne démontre pas qu'elle était convoquée à deux réunions en même temps ; que Mireille J... explique que le système avait été modifié à l'époque de l'ancienne direction à la demande du psychiatre de la section éducation (le Dr K...) qui refusait le turn over et que la nouvelle direction avait refusé de modifier cette situation au motif que cela aurait supprimé les réunions communes SE / SPP ;

Qu'un document sous forme de questions / réponses, non daté, fait apparaître qu'à la remarque suivante : " en juin 2002, la question du dédoublement des réunions SE / SPP a été posée et n'a pas reçu de réponse dans le cadre de l'expression des salariés ", il avait été répondu : " il n'y aura pas de dédoublement cela pose des problèmes d'organisation plus que de résultats satisfaisants " ;

Attendu que Marie Odile H... explique sur ce point, dans une attestation du 26 juin 2006, que Marie-Thérèse X... ne travaillant que pour 1 / 3 de son temps sur cette section éducation, il ne lui était pas possible d'être présente à toutes les réunions d'équipe, mais que Marie-Thérèse X... refusait de prendre en compte les décisions prises en son absence ;

Qu'un organigramme du personnel de l'IME montre que les deux sections étaient composées d'une trentaine de personnes en tout et que chacune avait son service médical et paramédical ; qu'il n'est pas inconcevable que les exigences du service et la fréquence des réunions aient conduit à tenir simultanément une réunion pour chaque service ; qu'il n'apparaît en tout cas pas que cette situation a été mise en place ou maintenue par la nouvelle direction en dehors de toute raison objective, dans le but de nuire sciemment et uniquement à Marie-Thérèse X... ;

Attendu que Marie-Thérèse X... ne démontre pas en quoi elle aurait été évincée de l'équipe réunie pour l'élaboration des projets personnels individualisés, lors des réunions préparatoires, de synthèse et de finalisation, ni qu'elle aurait été exclue du comité rédactionnel du projet d'établissement et des réunions d'admission ;

Que son nom apparaît d'ailleurs sur certaines fiches de prolongation destinées à la C. D. E. S. pour l'année scolaire 2004-2005 pour les enfants Asmaë, Marie, Anthony, Yohann ;

Attendu que l'examen ci-après des motifs du licenciement fait apparaître qu'en réalité, elle s'abstenait de produire tous les travaux écrits attendus d'elle dans le cadre de la procédure d'élaboration de ces PPI ;

Que Marie Odile H... indique que Marie-Thérèse X... " se met en marge de l'équipe médico-psychologique : elle ne participe jamais aux réunions d'équipe médico-psychologique 2 fois par trimestre environ, ni aux réunions d'élaboration autour du projet toutes deux dirigées par le Dr K..., médecin psychiatre de l'établissement... il devient difficile de mener le travail de chef de service comme je le conçois dans la mesure où ce décalage et ce non respect du cadre sont permanents " ;

Attendu que dans son attestation déjà citée 2006, M. O. H... confirme que Marie-Thérèse X... se situait en dehors de tout groupe, en observateur critique de la vie institutionnelle et remettait systématiquement en cause le travail du psychiatre, dont elle ne reconnaissait pas l'autorité de toutes les décisions prises en réunion, que ce soient les réunions thérapeutiques ou les réunions générales de la section éducation ;

Attendu que Marie-Thérèse X... soutient également que le harcèlement moral s'était manifesté par une augmentation considérable de sa charge de travail du fait de l'accueil de 18 nouveaux enfants dans le cadre de la création, en 2001, d'une section spécialisée accueillant des autistes et des enfants atteints de psychoses déficitaires graves et du fait de la mise en oeuvre des 35 heures dans l'établissement ;

Mais que l'employeur fait observer que si elle avait été remplacée par deux psychologues, Sylvie L... et David M..., ceux-ci travaillaient chacun à temps partiel ; qu'une offre d'emploi avait été proposée à Marie-Hélène N... pour 0, 30 équivalent plein temps ; que Sylvie L..., embauchée à temps partiel, proteste vigoureusement dans un document produit par l'employeur contre les reproches faits par Marie-Thérèse X... à Pierre B... de l'avoir remplacée par l'embauche par favoritisme d'une associée de sa propre épouse ; qu'aucune preuve n'est produite que l'employeur aurait volontairement surchargé de travail l'intéressée ;

Attendu que Marie-Thérèse X... a travaillé sous la direction de Robert O... jusqu'en 2001 puis ensuite sous celle de Jean-Paul P..., directeur de l'IME jusqu'en 2004 et, en pratique, sous celle de Pierre B..., directeur adjoint depuis février 2002 puis directeur intérimaire ;

Attendu que ce n'est pas parce que l'employeur a fait état, dans le cadre de l'instance en contestation du licenciement, de pièces faisant référence aux faits intervenus entre janvier 2002 et septembre 2003, que le directeur de l'établissement n'aurait pas signé de manière loyale le protocole de médiation ni renoncé à se prévaloir de ces faits, en dépit de ce que Marie-Thérèse X... lui reproche ;

Attendu que la lettre de licenciement énonce : " en outre les fautes que nous vous reprochons, interviennent dans un contexte déjà lourdement entaché par des difficultés antérieures " ; que l'employeur était en droit de tirer les conséquences du constat du non respect d'engagements pris par le salarié, même si le précédent conflit avait abouti à un accord entre les parties qui comportait des engagements réciproques ; que dans la mesure où la salariée a contesté son licenciement et a elle-même invoqué le passé, il était par ailleurs légitime que l'employeur donne sa version de ce même passé ;

Attendu que dans ses écritures devant le conseil de prud'hommes, Marie-Thérèse X... exposait qu'à l'arrivée d'une nouvelle équipe qui avait souhaité faire table rase de l'organisation et des modes de fonctionnement antérieurs, elle avait émis des réserves et elle était devenue une personne indésirable, " un véritable bouc émissaire " ;

Mais qu'il ne peut être ignoré que Marie-Thérèse X... reconnaît elle-même qu'elle était déjà en bute avec sa hiérarchie avant l'arrivée de Pierre B..., lorsque Robert O... était en fonction, et qu'il ne peut être ignoré non plus que, selon ses propres explications, elle s'était heurtée à l'hostilité de ce dernier depuis un avertissement décerné en 1984 et qu'elle lui avait adressé de vaines revendications sur sa date d'embauche et sur ses conditions de travail (absence de téléphone et défaut d'aération de son bureau) et qu'une partie de l'équipe lui était hostile depuis les années 1994 à 1998 ;

Attendu que Robert O..., qui indique avoir dirigé l'établissement de 1979 à 2001, expose de son côté qu'il était difficile de travailler avec Marie-Thérèse X... dans la mesure où il avait l'impression qu'elle le suspectait sans arrêt d'oeuvrer contre elle, qu'elle avait eu des épisodes houleux avec le médecin psychiatre ; qu'il estime que Marie-Thérèse X... présentait un tempérament imprévisible et en permanence " en apparence insatisfait " mais qu'il s'était abstenu de tout commentaire à son sujet dans les fiches de travail qu'il avait laissées, afin de lui " laisser sa chance... de travailler clairement avec cette nouvelle équipe, sans a priori et sans influence " ;

Attendu que Jean-Paul P... expose pour sa part que la procédure qui avait abouti à une médiation avait fait suite à des sanctions répétées pour des manquements professionnels sérieux (mauvaise tenue des dossiers, parfois absence d'examens et d'évaluation, retard dans les bilans mettant en jeu l'avenir des enfants et des adolescents, difficultés dans ses rapports avec la majorité du personnel et notamment les équipes éducatives... difficultés relationnelles avec la hiérarchie, refus de la subordination avec les médecins psychiatres...), estime qu'il " semblerait qu'au fil du temps les capacités professionnelles et relationnelles de Mme X... se sont dégradées entraînant inéluctablement ce processus de rupture de contrat que nous avons tenté d'éviter en acceptant une médiation " ;

Attendu que l'assistante sociale de l'AFIPAIEM depuis 1979, Christine Q..., témoigne que les difficultés professionnelles générées par Marie-Thérèse X... perduraient depuis de nombreuses années et s'étaient intensifiées déjà sous la direction de Robert O..., antérieurement à l'arrivée de P. B... ;

Attendu qu'un médecin psychiatre de l'établissement, Yves K..., témoigne le 30 mai 2006 de l'ancienneté des relations difficiles de Marie-Thérèse X... avec les membres du personnel notamment avec les éducatrices et avec l'ancien directeur et de la dégradation de la situation avant l'arrivée de P. B... ;

Qu'il témoigne des fréquentes attitudes d'opposition qu'il attribue à l'intéressée, de ses prises à partie de membres de l'équipe lors des synthèses, du fait qu'il lui arrivait de s'adresser aux parents dans des termes dramatiques qui mettaient tout le monde très mal à l'aise et qui déstabilisaient les parents ; qu'il ajoute que, dans le cadre de son travail thérapeutique, elle faisait comme si elle était seule responsable de cette modalité de travail ;

Qu'il explique que ses questions adressées à Marie-Thérèse X... sur les raisons de son comportement la renforçaient dans son opposition ; qu'il estime que son attitude entraînait une souffrance du personnel ;

Attendu que, certes, divers auteurs d'attestations dont Marie-Thérèse X... invoque le témoignage, expliquent que le fonctionnement ce type d'établissement et la complexité de la prise en charge d'enfants et d'adolescents en grandes difficultés induisent des tensions au sein même du personnel et peuvent déboucher sur un phénomène de désignation d'un bouc émissaire ;

Mais que cette analyse à caractère psychologique ou comportemental peut aussi revenir à inverser les termes du litige et à présumer que tout salarié auquel des reproches sont faits par l'employeur est victime d'un harcèlement ;

Attendu que Marie-Thérèse X... invoque la situation de Christine R... en faisant valoir qu'elle aussi avait été victime d'un mauvais comportement de Pierre B... en 1997 lorsque celui-ci était en fonction dans un autre IME de l'association ; que cette salariée avait apparemment été victime d'accusations qui se sont avérées infondées, dont elle a été lavée mais que les pièces produites ne démontrent pas que le traitement de cet incident par P. B... prouvait que celui-ci se livrait de manière coutumière à un harcèlement moral sur le personnel placé sous son autorité ;

Attendu que l'employeur produit, en miroir aux multiples attestations produites par son adversaire, des attestations toutes aussi nombreuses de salariés ou de professionnels, dont certains extérieurs mais amenés à fréquenter l'IME H. Daudignon comme l'IME où l'intéressé travaillait précédemment, qui excluent que P. B... ait jamais eu le comportement de harceleur moral qui lui est attribué, certains de ces témoins soulignant au contraire ses capacités d'ouverture, de dialogue et d'humanité ;

Attendu qu'une des deux délégués du personnel, Barbara T..., infirmière, indique dans le même sens que la seule plainte de harcèlement dont elle avait eu connaissance était précisément celle de Mme X..., que l'organisation du travail mise en place par P. B... avait clarifié les fonctions et les responsabilités de chacun et que les nouvelles procédures (écrits, protocoles) constituaient un outil logique et qui fonctionnait ;

Que cette infirmière témoigne en revanche de sa dégradation des relations de travail avec Marie-Thérèse X... depuis 2001, du fait, selon ce témoin et représentant du personnel, de ses attaques systématiques à l'encontre des médecins psychiatres puis des chefs de service éducatif, ce qui avait généré un climat de tension permanent et de plus en plus éprouvant dès 2004 ;

Attendu que Marie-Thérèse X... n'établit pas avoir subi des agissements répétés de harcèlement moral au sens de l'article L. 122-49 ni de faits qui permettraient de présumer l'existence d'un tel harcèlement et pour lesquels l'employeur ne rapporterait pas la preuve contraire au sens de l'article L. 122-52 ;

Attendu qu'il résulte en revanche du dossier que Marie-Thérèse X... était entrée en conflit, depuis une période antérieure à celle qu'elle invoque pour soutenir qu'un dossier avait été monté contre elle pendant de nombreux mois, avec la quasi-totalité des chefs de service de l'IME ou des cadres ou des professionnels référents de l'institution : son directeur, les deux chefs de sections Marie-Odile H... et Irène D..., le médecin psychiatre de la section éducation, l'économe Jean-Luc U...
V... (trois lettres de plaintes de juin, décembre 2003, mai 2005) et que certains de ses collègues avaient le sentiment d'être confrontés avec elle à une situation bloquée ;

Attendu que la variété des témoignages contraires produits par l'employeur, les éléments circonstanciés qu'ils contiennent sur les traits de caractère et de comportement de Marie-Thérèse X... dans son environnement professionnel, l'ancienneté de certains de ces éléments rapportés, enlèvent tout crédit à la thèse d'une stratégie de harcèlement qui aurait été patiemment fomentée contre elle, mais démontrent au contraire que les incidents dont elle s'emparent ne sont qu'une réaction, appropriée ou en tout cas compréhensible, à son propre comportement ;

sur le licenciement :

Attendu que le licenciement pour faute grave de Marie-Thérèse X... a été motivé par les éléments suivants énoncés dans la lettre du 22 juin 2005 :
- refus réitéré d'accomplir des taches relevant de ses attributions,
- attitude globale négative et critique, impossibilité de collaborer en équipes,
- non respect du devoir de réserve et de sa hiérarchie,
- insubordination à des ordres directs ;

Attendu que dans cette lettre, au titre des éléments objectifs matériellement vérifiable, il est reproché à Marie-Thérèse X... un refus persistant de produire la majorité de ses rapports sur les fiches spécifiques destinées à être adressées à la CDES ou à la COTOREP en fonction de l'âge de l'enfant ;

Que l'employeur produit une liste nominative de dossiers datée du 10 juillet 2003 dont il résulte que 3 dossiers psychologiques d'enfants étaient à jour en 2003 et " 73 non à jour dans le placard prévu service médical " ;

Que Marie-Thérèse X... fait valoir que cette pièce a été établie de manière " clandestine ", en tout cas non contradictoirement à son égard et répond que les dossiers psychologiques des enfants étaient rangés dans son bureau, pour des raisons de confidentialité ;

Attendu toutefois qu'il ne lui a pas été reproché de s'être abstenue de tenir les dossiers individuels des enfants pris en charge mais de n'avoir pas produit la majorité des rapports écrits qui étaient attendus d'elle selon la procédure en vigueur dans l'établissement ;

Qu'il ne s'agit pas d'une insuffisance professionnelle susceptible de résulter d'une mauvaise formation ou d'une formation incomplète, mais d'une négligence et d'une abstention pure et simple à rendre les travaux écrits exigés ;

Attendu que Marie-Thérèse X... invoque un manque de formation au nouveau cadre législatif ;

Attendu que dans une attestation du 23 juin 2006, Irène D..., rappelle les termes et l'incidence concrète de la loi du 2 janvier 2002, la nécessaire lisibilité du travail de chacun, les exigences résultant du droit d'accès de la personne prise en charge ou sa famille aux informations la concernant, ce qui avait entraîné, dans l'établissement, la tenue de dossiers écrits de synthèse, la tenue d'éléments transmissibles, différents des notes personnelles ; qu'elle fait également valoir que les professionnels avaient été préparés aux écrits, notamment l'équipe paramédicale en novembre 2004 ;

Que cette responsable de section explique que le temps de présence de Marie-Thérèse X... aux réunions institutionnelles avait été réparti en 1 / 3 sur la section éducation et 2 / 3 sur la section préprofessionnelle ;

Que ce même témoin indique que Marie-Thérèse X... avait manifesté à des degrés divers une résistance à ces mesures en revenant sur le cadre antérieur du dispositif de synthèse ; que ce témoin indique dans cette attestation et dans un rapport de la journée du 23 mai 2005 que, deux ans après la mise en place du système Marie-Thérèse X... rappelait encore son incompréhension du cadre de fonctionnement,

Que, selon Mme D..., les difficultés relationnelles de travail avec Marie-Thérèse X... s'étaient amplifiées en février 2005 ;

Attendu que la définition de poste, signée entre les parties, non datée, mais dont Marie-Thérèse X... indique dans son dossier par mention sur sa pièce no21 qu'elle a été établie à la suite de la médiation le 23 mars 2004, lui attribue quatre catégories de fonctions en sa qualité de psychologue clinicienne :
- un rôle psychométrique comprenant notamment la rédaction d'un rapport psychométrique concernant l'enfant dont la situation sera présentée à la prochaine de réunion de synthèse avec l'ensemble de l'équipe pluri-disciplinaire, rapport comprenant lui-même bilan cognitif, méthode projective et entretien,
- un rôle de prise en charge en entretien individualisé de mode thérapeutique,
- la participation aux réunions institutionnelles,
- les relations avec les familles ;

Attendu que Marie-Thérèse X... indique qu'elle rédigeait une note d'évaluation après avoir rencontré les enfants, qu'elle se présentait aux réunions avec ces notes, qu'il ne lui avait jamais été demandé de donner une copie de cette évaluation avant la réunion de synthèse et qu'elle rédigeait un compte rendu après chaque synthèse ;

Mais attendu que cette affirmation sur l'absence de demande d'un document d'évaluation avant la réunion de synthèse est contredite par les indications de cette fiche de poste ;

Attendu que le compte rendu de l'entretien préalable rédigé par la psychologue Marianne W...qui a assisté Marie-Thérèse X... le 6 juin 2005, fait apparaître que l'intéressée avait invoqué l'impossibilité de produire certains comptes rendus, non pas par refus, mais en raison de difficultés consécutives au fait que des concertations et échanges pluridisciplinaires nécessaires à leur élaboration n'avaient pu se réaliser ;

Attendu que Marie-Thérèse X... explique dans le même sens qu'avant de rédiger la fiche de prolongation CDES elle souhaitait rencontrer les différents intervenants auprès du jeune et qu'elle n'avait pu se concerter avec les éducateurs et instituteurs des deux équipes à partir de début 2005 ;

Mais que la chef de service réplique en substance, dans le rapport du 20 mai 2005, qu'il fallait tenir des délais, que le temps pour rencontrer les différents intervenants était difficile à mettre en place, qu'un temps avait été fixé avec les référents du groupe mais que Marie-Thérèse X... n'avait pas pu toujours venir, qu'elle sentait chez Marie-Thérèse X... une résistance à intégrer les échéances de travail pour la remise de bilans, d'écrits de synthèse et que finalement la responsable avait du assurer la quasi-totalité des prolongations de séjour en 2005 ;

Attendu que si Mme X... justifie avoir établi des fiches de réorientation d'enfants vers un autre IME et avoir établi les fiches de renseignement concernant des stagiaires, l'employeur établit pour sa part que les fiches de PPI établies après les réunions de synthèse pour la période 2004-2005 pour la section pré-professionnelle et les fiches de synthèse pour la même période pour l'autre section, concernant en tout une vingtaine d'enfants (Elodie, Zeineb, Maxime, Yanis, Jérémy, Dounia, Mélanie, Maroine, Hanane, Eddie, Josias, Ludovic, Youness, Jeffrey, Youcef, Manfred, Nicolas, Johan, Elodie, Géraldine, Martin, Laetitia), sont restées vierges de toute note psychologique ;

Que l'absence de ces rapports ou comptes rendus n'était donc pas ponctuelle ou exceptionnelle ;

Que sur cette carence, Irène D... faisait observer à sa hiérarchie qu'elle pouvait avoir de la part de Marie-Thérèse X... " des renvois différents... une supputation de ma part de fixer la réflexion de la synthèse empêchant l'élaboration et le croisement des regards interdisciplinaires " et, paradoxalement, une interrogation de Marie-Thérèse X... lors d'une synthèse sur l'absence d'écrit d'un éducateur concernant son activité ;

Attendu qu'Irène D... a indiqué en février 2005 au directeur de l'établissement que " Depuis 2 ans un cadre de synthèse est établi, responsabilisant chaque personnel en l'engageant dans un travail écrit de sa réflexion, incluant son analyse de la situation de l'enfant et de ses modalités d'action en terme de projet.
Marie-Thérèse X... semble contester ce travail d'écriture de la psychologue dans ce canevas de synthèse. Le renvoi de cette pratique dans d'autres établissements n'a pas modifié son point de vue. Aucun écrit personnel avant ou après la synthèse " ;

Que ce responsable indiquait que chaque fois qu'elle avait " essayé de provoquer un échange pour dissoudre les malentendus (elle s'était) heurtée à des attitudes d'évitement (manque de temps, impossibilité de rencontre en raison du découpage SE / SPP) et des attitudes très défensives, demande de médiation avec le délégué du personnel avec une projection paranoïaque " ;

Qu'Irène D... a précisé le 20 mai 2005, dans ce rapport circonstancié de trois pages, que " malgré le rappel de son engagement en médiation avec (M. B...) de faire un écrit succinct avant la synthèse, aucune élaboration écrite n'est fait avant ou après la synthèse, ce qui empêche toute prise en compte des éléments qu'elle a amenés en synthèse, en terme de suivi de l'évolution du jeune... " ;

Attendu que dans la mesure où Marie-Thérèse X... a fait l'objet d'un rappel sur cette question, elle ne peut valablement invoquer, pour contester son licenciement, que son employeur avait toléré l'absence de production de ces rapports ;

Attendu que Marie-Thérèse X... ne conteste pas avoir fait l'objet d'une mise en garde écrite le 7 avril 2005 sur son attitude négative à l'égard des membres de l'équipe de travail ;

Attendu que Marie Odile H... a indiqué dans un rapport du 27 février 2005 que " le travail en réunion de synthèse est compliqué dans la mesure où les interventions de madame X... sont souvent négatives par rapport à l'équipe et que sa prise de parole est peu structurée et ne donne jamais lieu à un écrit... " ;

Que dans un autre rapport du 18 mai 2005, cette responsable faisait part de son indignation et de son inquiétude à propos de Marie-Thérèse X... : " je ne vois pas comment, dans l'avenir, l'équipe de cadres de direction peut avoir une quelconque autorité si une personne, elle-même cadre, refuse d'entendre ce que je lui dis et dans la minute suivante refuse d'obtempérer à un ordre venant de vous-même directeur de l'établissement " ;

Attendu que Marie Odile H... explique dans une attestation du 26 juin 2006 que depuis son arrivée dans l'établissement (avril 2002), elle n'avait eu en main aucun écrit psychologique pour les réunions de synthèse, que durant l'année 2004-2005, Mme X... était arrivée à plusieurs reprises en réunion sans avoir au préalable rencontré les jeunes ou sans avoir les bilans des tests ;

Attendu que les éléments produits par l'employeur, y compris ceux émanant d'autres salariés que ces chefs de section, l'enseignant S..., la monitrice Z..., y compris ceux précédemment analysés au titre de l'examen de la demande de reconnaissance d'un harcèlement moral, démontrent la réalité du grief d'attitude négative et non constructive de nature à rendre difficile le travail avec les autres collaborateurs membres de l'équipe médico-psychologique ;

Attendu que la lettre cite enfin trois incidents datés :
du 11 avril 2005 (avoir fait participer une stagiaire à un groupe sans que celui-ci en soit informé et avoir fait filmer la séance sans l'accord préalable de la hiérarchie et des familles puis refus de s'en expliquer devant le directeur),
du 17 mai 2005 (refus d'assister à une formation prévue pour l'ensemble de son équipe),
du 23 mai 2005 (manquement au devoir de réserve) ;

Attendu qu'il a été reproché à Mme X... d'avoir, le 11 avril 2005, fait participer une stagiaire à un groupe d'atelier thérapeutique sans en informer le docteur Yves K... et d'avoir fait filmer la séance sans l'accord préalable de la hiérarchie et des familles puis d'avoir refusé de venir s'expliquer alors que Pierre B... lui en avait intimé l'ordre ;

Que la matérialité de ces faits n'est pas contestée ; que le film a été tourné apparemment le 24 mars 2005 par une stagiaire à la demande des animatrices du groupe et de la psychologue qui les supervisait (lettre des orthophonistes Sylvie E... et Pascale XX...) ;

Attendu que Marie-Thérèse X... indique que le directeur-adjoint avait eu connaissance de ce fait dès le 29 mars 2005 ; mais que la procédure disciplinaire a été engagée le 26 mai 2005, donc moins de deux mois après ;

Attendu que dans un rapport du 11 avril 2005 à la direction, le Dr K... faisait observer que la psychologue stagiaire était également sous la responsabilité du médecin psychiatre, c'est à dire de lui-même, qu'il convenait qu'elle lui soit présentée afin qu'il soit informé des conditions et du contenu de son stage, que l'enregistrement filmé d'une séance ne respectait pas le cadre légal, qu'aucune autorisation n'avait été demandée ni au médecin, ni à la direction, ni aux parents des enfants (un groupe thérapeutique de quatre enfants et deux thérapeutes, le support relationnel utilisé étant le cheval) et que Marie-Thérèse X... devait s'expliquer devant la direction à propos de cet enregistrement filmé d'une séance ;

Attendu que Marie-Thérèse X... fait valoir qu'elle n'avait pas pu présenter cette stagiaire au Dr K... car celui-ci n'était présent dans l'établissement qu'un jour par semaine à un horaire non compatible avec celui de l'étudiante ; mais que le stage de l'intéressée, Céline YY... avait débuté en décembre 2004 et devait se prolonger jusqu'en juillet 2005 ; que dans ces conditions, Marie-Thérèse X... ne peut sérieusement soutenir qu'elle avait été dans l'impossibilité absolue d'organiser une rencontre entre décembre 2004 et avril 2005 ; que d'ailleurs Céline YY... reconnaît, dans sa lettre produite aux débats, une maladresse ;

Qu'il appartenait à Marie-Thérèse X..., puisqu'elle reconnaît que c'était elle qui avait présenté cette étudiante à P. B..., de faire en sorte qu'elle rencontre aussi le psychiatre et de faire en sorte que son comportement lors de son stage soit conforme aux règles en vigueur dans l'établissement et soit précédé des autorisations requises ;

Que le fait pour Marie-Thérèse X... d'avoir été chargée de superviser le groupe d'équithérapie ne signifie pas pour autant qu'elle pouvait s'affranchir du contrôle du médecin sur cette activité, précisément à caractère thérapeutique ni qu'elle pouvait s'affranchir des règles de protection du droit à l'image nécessitant l'accord des personnes intéressées ou de leur famille, que le film soit ou non à usage interne ; qu'au contraire, ses responsabilités de cadre auraient dû l'inciter à faire respecter le droit à l'image ;

Que Marie-Thérèse X... ne démontre pas que la possibilité de filmer des enfants à usage interne sans l'autorisation de leur famille était acquise et permanente dans l'établissement ou qu'en début de chaque année l'IME demandait l'autorisation aux familles de filmer ou photographier les enfants à usage interne ;

Que l'existence même du contrôle par le psychiatre, et des conséquences de ce contrôle en terme d'autorisation sur les personnes présentes lors de cette activité, y compris lorsqu'il s'agit de stagiaires, n'a rien d'incohérent ni d'exceptionnel et n'était pas de nature à dévaloriser Marie-Thérèse X... dans ses attributions ainsi que la salariée le soutient ; que sa réaction concourt au contraire à la démonstration de sa volonté de s'émanciper de toute cadre institutionnel ;

Attendu que Marie-Thérèse X... ne conteste pas qu'elle ne s'est pas rendue à la convocation orale de son directeur pour s'expliquer sur cette question, mais invoque le fait qu'il s'agissait d'un entretien disciplinaire et qu'elle avait légitimement refusé de s'y soumettre parce que la convocation avait été formulée dans des termes qu'elle estimait vexatoires (" Mme X... dans mon bureau ") et parce que le directeur avait refusé qu'elle soit accompagnée d'un délégué du personnel ;

Mais qu'en refusant de déférer le 12 avril 2005 à une convocation de son supérieur, qui avait précisément pour objet de recueillir sa version sur des faits dénoncés par le Dr K..., avant toute mise en oeuvre d'une procédure disciplinaire, Marie-Thérèse X... a commis une faute ;

Attendu qu'il lui a été reproché d'avoir, le 17 mai 2005, refusé d'assister à une formation prévue de longue date pour l'ensemble de l'équipe médico-psychologique ;

Attendu que Marie-Thérèse X... fait valoir qu'elle avait été retenue par une demi-journée pédagogique prévue ce même jour depuis novembre 2004, que la formation litigieuse avait été décidée dans l'urgence, qu'elle n'y avait pas été conviée, qu'elle estimait qu'elle n'en avait pas besoin car c'était une formation " basique " alors qu'elle venait de participer au mois de mars précédent à un colloque sur l'autisme et que cette formation était réservée à l'équipe paramédicale, dont elle-même ne faisait pas partie ;

Qu'elle reproche au contraire à son employeur d'avoir commis un abus de pouvoir en l'ayant sommée publiquement de quitter la pièce pour suivre cette réunion ;

Mais attendu que la chef du service éducatif précise dans son rapport du 18 mai 2005 que cet après midi-là de 14 à 17 h une formation sur l'autisme avec un médecin du CADIPA avait été décidée par le directeur qui en avait donné l'information " suite aux journées de formation précédentes du 17 au 18 février 2005 et renouvelées dans les deux semaines précédentes ", que cette formation était destinée à l'équipe médico-psychologique tandis que le " personnel éducatif et pédagogique " se réunissait par ailleurs, que le directeur avait ordonné à l'intéressée de quitter la réunion où elle était, pour aller à la formation CADIPA mais que Marie-Thérèse X... était restée assise et avait participé aux réunions SE et SPP ;

Attendu que Marie-Thérèse X... ne peut sérieusement contester appartenir à l'équipe médico psychologique de l'IME plutôt qu'à l'équipe éducative qui elle seule était directement concernée par la demi-journée pédagogique ;

Que dans une lettre du 27 juin 2003, Jean Pierre P... lui avait fait observer que la fonction de psychologue en institution n'était pas indépendante, qu'elle était cadre technique et dépendait hiérarchiquement du directeur de l'institution, du médecin psychiatre en sa qualité de responsable de la fonction de soins : médical et paramédical et thérapeutique ;

Attendu que cet incident et celui du 11 avril précédent constituent deux cas d'insubordination ;

Attendu qu'il lui a enfin été reproché d'avoir, le 23 mai 2005, manqué à son devoir de réserve en ayant pris à témoin une famille en présence de leur enfant, cette famille ayant envoyé une lettre d'indignation à la psychologue et à la direction et la conduite de Marie-Thérèse X... ayant été considérée par l'employeur comme mettant gravement en cause l'équilibre des enfants ;

Attendu que ces faits ont été détaillés dans le rapport du 25 mai 2005 d'Irène D..., qui explique que lors de cette rencontre, Marie-Thérèse X... avait adressé des reproches à la famille ZZ... et aux professionnels, avait fait état d'un refus de la chef de service éducatif de remettre en oeuvre un groupe d'expression thérapeutique pour lequel elle se sentait habilitée, ce qui avait amené la famille à poser des questions sur cette décision, que Marie-Thérèse X... avait proposé de demander à l'enfant son accord pour un suivi psychologique individuel, ce à quoi Irène D... s'était opposé en rappelant avec bon sens que l'enfant n'avait pas sa place dans les tensions entre adultes, qu'à la sortie de la séance, Mme ZZ... avait perçu les tensions entre professionnels et avait senti que les axes de projet n'avait pas été traités en synthèse, qu'I. D... lui avait présenté des excuses puis que Marie-Thérèse X... avait eu un entretien particulier avec Mme ZZ... et que celle-ci était revenue vers I. D... " les larmes aux yeux ", Marie-Thérèse X... lui ayant dit qu'elle " était sanctionnée à cause d'elle " ;

Attendu que Marie-Thérèse X... conteste avoir pris l'initiative de remettre en place un groupe de parole suite au décès brutal d'une jeune participante du groupe dont faisait partie cet enfant (Nicolas ZZ... atteint de trisomie 21) et au mal être de certains adolescents, dont Nicolas qui avait perdu son père en juin 2003, soutient qu'Irène D... s'opposait par des prétextes à ce groupe et qu'elle-même s'était contentée, le 23 mai, de donner son analyse psychologique des difficultés de l'enfant et que le manquement au devoir de réserve résidait en fait dans la difficulté pour I. D... d'expliquer à la mère de l'enfant les motifs de l'absence de mise en place de ce groupe ;

Mais attendu que Catherine ZZ... a écrit le 24 mai 2005 à Marie-Thérèse X... et aux responsables de l'IME pour faire part de son indignation, pour demander que l'intéressée n'approche plus son fils Nicolas, en reprochant à la psychologue d'avoir transformé la synthèse de son fils en règlement de comptes entre elle et la direction et de l'avoir pris en otage en lui " faisant entendre et encaisser toutes (ses) revendications auprès de la direction " au lieu d'avoir exposé ses arguments lors de la rencontre entre professionnel ; que C. ZZ... ajoutait qu'à la sortie de la réunion, l'enfant s'était terré dans une cage d'escaliers et avait pleuré ;

Que dans une attestation du 20 juin 2006, Catherine ZZ... confirme qu'elle avait envoyé cette lettre non à la demande de P. B... mais sur le conseil de la présidente du conseil d'établissement, Mme AA..., confirme aussi le déroulement de cet incident et indique que Marie-Thérèse X... lui avait dit, avant le 10 mai 2005, qu'elle était en conflit avec Mme D... qui pensait qu'elle n'était pas capable d'assurer ce groupe et lui avait demandé d'intervenir lors de la synthèse de son fils pour convaincre les professionnels, ce que la mère de l'enfant avait refusé, en indiquant qu'elle n'avait pas à se mêler de ce problème entre professionnels ;

Que la prise à partie dans de telles circonstances d'une famille pour des raisons relevant d'un conflit strictement personnel entre la salariée et son employeur, constitue bien un manquement de la psychologue à ses obligations de réserve ;

Attendu que le licenciement repose sur des éléments bien réels et nullement imaginaires et qu'il ne peut non plus être considéré comme un élément constitutif du harcèlement moral allégué ;

Attendu qu'aux termes du constat d'accord après médiation, par lequel l'association renonçait à se prévaloir de faits sanctions ou avertissements antérieurs, par lequel Marie-Thérèse X... renonçait à ses réclamations devant le conseil de prud'hommes, il avait été convenu entre les parties qu'au-delà des termes et expressions composant cette fiche de missions, chacun s'engageait à " faire vivre l'esprit du texte "... " dans le respect du rôle et des responsabilités, notamment hiérarchiques, de l'un et de l'autre et de la considération de chacun, avec le souci constant de résoudre par un dialogue ouvert, confiant, constructif et en recherche permanente de l'intérêt collectif, des difficultés du quotidien inhérentes au travail en commun " ;

Attendu que Marie-Thérèse X... n'a pas tiré les conséquences de cet engagement ;

Attendu que non seulement il n'est pas établi qu'un harcèlement moral ait été mis en place à l'encontre de Marie-Thérèse X... mais que l'employeur a plutôt fait preuve de patience que de harcèlement moral ;

Que le licenciement n'est pas nul ;

Attendu qu'au contraire, les premiers juges ont fait une exacte appréciation des éléments qui leur étaient soumis en considérant que les faits reprochés à Marie-Thérèse X... étaient établis mais aussi en retenant qu'ils n'étaient pas suffisants pour rendre impossible le maintien de la salariée dans l'établissement le temps de son préavis ;

Que le conseil de prud'hommes a par ailleurs justement pris en compte l'ancienneté de la salariée au service de l'association ;

Que Marie-Thérèse X... a manifesté dans sa carrière des qualités professionnelles qui lui ont été reconnues par des parents, des psychologues cliniciens, des orthophonistes, des psychomotriciennes, des moniteurs éducateurs et des éducateurs spécialisés de l'établissement, par une enquêtrice, mais aussi par des médecins psychiatres les Dr Muriele A..., Denise BB... épouse CC... et Jeanne DD..., comme le révèle la lecture attentive fait par la cour des nombreuses attestations produites par l'appelante ;

Qu'il est légitime d'en tenir compte pour se prononcer sur la proportionnalité de la mesure ;

Attendu que le montant lui-même des indemnités de rupture ne fait pas litige à titre subsidiaire ;

Que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de l'association ses frais irrépétibles en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Déboute Marie-Thérèse X... du surplus de ses demandes et l'association AFIPAEIM de ses prétentions ;

Condamne Marie-Thérèse X... aux dépens de l'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame VERDAN greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Numéro d'arrêt : 05/00796
Date de la décision : 17/09/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Grenoble


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-09-17;05.00796 ?
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