R. G. N° 07 / 04458
Grosse délivrée
à :
S. C. P. CALAS
S. C. P. GRIMAUD
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
2E CHAMBRE CIVILE
ARRET DU MARDI 20 MAI 2008
Appel d'un Jugement (N° R. G. 07 / 01757)
rendu par le Tribunal de Grande Instance de VALENCE en date du 06 novembre 2007 suivant déclaration d'appel du 04 Décembre 2007 et ordonnance de référé du Premier Président du 20 Février 2008 fixant l'affaire par priorité
APPELANTS :
1. S. C. I. DES LONES
Zone Industrielle Fixemagne
26140 ST RAMBERT D'ALBON
2. Monsieur Grégory X...
...
26140 ST RAMBERT D'ALBON
représentés par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour
assistés de Me DAYREM, avocat au barreau de VALENCE
INTIME :
Monsieur André Z...
...
26140 ST RAMBERT D'ALBON
représenté par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour
assisté de Me GABET, avocat au barreau de VALENCE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame B. BRENNEUR, Président,
Madame H. PIRAT, Conseiller,
Monsieur J. L. PIERRE, Conseiller,
Assistés lors des débats de Madame M. C. OLLIEROU, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 08 Avril 2008,
Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.
La Cour statue sur l'appel interjeté par la SCI DES LONES et M. X..., à l'encontre d'un jugement rendu par le Tribunal de grande instance de VALENCE, le 6 novembre 2007, qui les a :
- condamnés, sous astreinte de 100 € par jour de retard, à la mise en place d'un remblai conforme à la description du rapport d'expertise de M. B..., du milieu de la limite entre les copropriétés jusqu'à la rue de l'Ouest, conformément au plan de délimitation des parcelles de M. C...;
- condamnés à payer à M. Z... la somme de 1 000 € au titre de la remise en état du mur, 1 500 € à titre de dommages-intérêts et 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Exposé des faits et des moyens des parties.
M. Z... est propriétaire d'un tènement immobilier comprenant les numéros 338, 339, 340.
M. X..., gérant de société est propriétaire d'une maison d'habitation avec commerce, numéros 335, 336, 337.
Ces parcelles, qui jouxtent directement le fonds de M. Z..., ont été rétrocédées par M. X... à la SCI des LONES aux fins de construction et de commercialisation.
Un mur sépare les deux fonds.
M. X... a obtenu un permis de construire le 10 janvier 2005.
M. Z... s'est plaint que les travaux de décaissement entrepris avaient endommagé son mur.
Par ordonnance de référé du 6 juillet 2005, M. B... a été désigné en qualité d'expert avec pour mission de vérifier la conformité des travaux de décaissement par rapport au permis de construire et de chiffrer toutes mesures nécessaires pour garantir la solidité des constructions immobilières de M. Z... et le maintien de son terrain à bref délai et à long terme
L'expert a déposé son rapport le 22 janvier 2007. Il précise que les documents fournis par la SCI ne permettent pas de vérifier la conformité des travaux de décaissement au permis de construire. Il indique qu'il conviendrait de procéder à une reconstruction à neuf et en béton du mur. Il souligne que la situation de décaissement observée est dangereuse et qu'un apport de matériaux s'impose afin de consolider le talus abrupt actuel.
M. Z... a demandé la création d'un remblai conforme à la description du rapport d'expertise en s'appuyant sur un plan de délimitation non contradictoire établi par M. C....
Le Tribunal a estimé que le plan de délimitation de M. C... constituait un plan de bornage amiable de délimitation établi entre l'Office public départemental d'HLM et M. Z.... Il a dit que ce bornage amiable était opposable aux parties, peu important qu'il n'ait pas été publié. En application du rapport d'expertise, le tribunal a ordonné la réparation en nature du préjudice de M. Z... .
Par ordonnance de référé du 20 février 2008, Monsieur le Premier président a arrêté sous astreinte l'exécution provisoire de l'exécution du remblai.
M. X... et la société des LONES ont fait un appel à jour fixe.
Au soutien de leur appel, ils soutiennent que le plan de séparation de M. C... ne peut constituer un procès-verbal de bornage.
Subsidiairement, ils demandent à la Cour de dire qu'en aucun cas la signature d'un procès-verbal de bornage ne peut établir la propriété de chacun des signataires sur leur propres parcelles et que le bornage ne tend pas à un transfert de propriété. Ils précisent qu'ils versent aux débats les éléments qui établissent leur propriété sur la parcelle 337, et notamment l'acte de vente du 28 mai 2004. La revendication de M. Z... sur la parcelle 337 n'a donc aucune pertinence, de sorte que la SCI est libre d'entreprendre les travaux qu'elle souhaite sur sa parcelle.
Ils estiment que M. Z... est responsable du retard du chantier, ce qui leur a créé un préjudice. Les travaux auraient dû commencer au deuxième trimestre 2005. Ils ne pourront commencer qu'après l'arrêt à venir et l'obtention d'un nouveau permis de construire, soit au quatrième trimestre 2008.
Ils réclament sa condamnation à leur payer la somme de 304 785, 40 € à titre de dommages-intérêts se décomposant ainsi :
-30 287, 60 € HT, au titre du dépôt d'un nouveau permis de construire,
-204 379, 80 € HT, au titre du coût de la construction supplémentaire,
-29 000 €, au titre du financement (augmentation des taux de 2 % sur le coût de la construction de 1 550 000 €)
-2 x 3 059 €, au titre de l'imposition foncière 2007 et 2008
-35 000 € au titre des difficultés de commercialisation du fait de la création des nouveaux marchés immobiliers sur la commune.
Ils demandent qu'il leur soit donné acte qu'ils s'engagent à ce que le mur séparant les propriétés sera au droit de l'immeuble édifié parfaitement reconstitué et consolidé par leurs soins, de concéder la propriété du mur édifié en limite à M. Z..., de dire que le mur de la construction X... qui sera établi sur la limite de propriété sera mitoyen et de dire que les autres parties du mur qui ne sont pas intégrées à la construction X... seront la seule propriété de M. Z.... Ils sollicitent enfin 7 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
M. Z..., aux termes de ses conclusions déposées le 8 avril 2008, sollicite la condamnation de M. X... et de la SCI DES LONES, sous astreinte de 100 € par jour de retard, a créer un remblai conforme à la description du rapport d'expertise de M. B..., du milieu de la limite entre les deux propriétés jusqu'à la rue de l'Ouest, conformément au plan de délimitation des parcelles de M. C... et les condamner conjointement et solidairement à lui payer la somme de 1 000 € pour la remise en état du mur.
Ils réclament leur condamnation à lui verser 5 000 € à titre de dommages-intérêts et 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR QUOI, LA COUR,
Attendu que pour un plus ample exposé des faits, des moyens et des prétentions des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et régulièrement communiquées.
Attendu que la SCI DES LONES est régulièrement propriétaire de la parcelle 337 dans sa totalité, selon acte de vente du 28 mai 2004, qui mentionne pour cette parcelle 337 une surface de 1a 03ca ; que l'établissement matériel de l'étendue de la parcelle résulte également du plan annexé au permis de construire de M. X... conforme au document fiscal officiel qui rappelle la surface (1a 03 ca) et ne reprend pas le « décrochement » de la parcelle 337 au profit de la parcelle 338 du plan C... ; que la propriété de M. X... et de la SCI sur la parcelle 337 résulte encore du plan cadastral informatisé qui ne reprend pas non plus le « décrochement » du plan de M. C... ; que sur les nombreuses photos produites aux débats, prises par l'huissier, ainsi que dans ses divers constats, le « décrochement » ne figure pas ;
Attendu que sur les photos produites, la séparation des deux parcelles est parfaitement identifiables par le muret en galets établi en fin des parcelles à l'ouest dans l'alignement du mur en pisé litigieux et par le piquet encore scellé dans le mur (constat de Maître D... du 18 avril 2007) ;
Attendu que le plan de séparation de M. C... n'a pas été établi en présence de M. X..., ou de la SCI, et ne mentionne ni les numéros des parcelles, ni l'identité des propriétaires ; qu'il ne comporte pas l'accord des parties sur la délimitation des fonds et encore moins leur accord sur la propriété des parcelles litigieuses ; qu'il ne peut être opposable à M. X... et à la SCI DES LONES et est contredit par les titres de propriété de ces derniers, les photos produites ; que la délimitation matérielle de la parcelle 337 résulte clairement de l'acte de propriété ; que la revendication de M. Z... sur la parcelle 337, propriété de la SCI, ne saurait aboutir ; que les travaux entrepris ne se situent pas sur la parcelle 338 de M. Z... ;
Attendu qu'il résulte des pièces produites que les travaux de décaissement ont été commencés par la SCI DES LONES sur la parcelle 337 et que le décaissement s'arrête à environ un mètre du mur de M. Z... ; qu'une banquette a été conservée ;
Attendu que M. X... a demandé à l'expert E... son avis sur le risque d'effondrement du mur de M. Z... ; que le 8 janvier 2008, M. E... a rendu son avis selon lequel : « il n'y a aucun risque de glissement... Le terrain n'a pas bougé depuis le décaissement. La banquette à la base du mur est parfaitement stable. Le mur n'a pas été déchaussé... Le décaissement n'a pas eu et n'a aucun effet sur le mur et n'augmente pas son risque d'effondrement » ;
Attendu que M. E... décrit le mur de M. Z... comme étant en très mauvais état et n'étant pas entretenu ; qu'une partie est déjà complètement effondrée ; que le mur est hors d'état et irrécupérable sur toute sa longueur ; que « le décaissement n'a eu aucun effet sur l'état du mur. Le remblaiement n'aura aucun intérêt et n'a aucune chance de sauver un mur condamné à l'effondrement du seul fait de son état » ;
Attendu que l'avis officieux, mais régulièrement soumis aux débats contradictoires, de M. E... est corroboré par les constats d'huissier et les photos produits ; que l'ensemble de ces documents établissent le mauvais état du mur de M. Z... (le trou dans le mur préexistait aux travaux selon le procès-verbal de constat) et démontrent l'inutilité du remblaiement ; que M. X... et la SCI n'ayant pas endommagé le mur, les demandes de M. Z... de ce chef seront rejetées ;
Qu'il suit de ce qui vient d'être exposé que M. Z... ne peut prétendre que les travaux entrepris se situent sur sa parcelle 338 ou sur une partie de la parcelle 337 sur laquelle il aurait un droit, de sorte que la SCI DES LONES est libre d'entreprendre les travaux qu'elle souhaite sur sa parcelle 337 qui lui appartient de manière incontestable et que les demandes de M. Z... ne sauraient prospérer ;
Sur le préjudice
Attendu que M. X... et la SCI ne justifient pas que l'action de M. Z... les aient mis dans l'impossibilité de construire, ni que la commercialisation entraînera un manque à gagner ; que la Cour a les éléments pour fixer à 7 000 € le montant des dommages-intérêts qu'il convient de leur allouer en réparation de leur préjudice ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant en audience publique, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
RÉFORME le jugement entrepris,
ET STATUANT À NOUVEAU,
DÉBOUTE M. Z... de ses demandes concernant les droits qu'il évoque sur la parcelle 337,
CONDAMNE M. Z... à payer à M. X... et à la SCI DES LONES la somme de 7 000 € à titre de dommages-intérêts,
DONNE ACTE à M. X... et à la SCI DES LONES qu'ils s'engagent à ce que le mur séparant les propriétés sera aux droits de l'immeuble édifié parfaitement reconstitué et consolidé par leurs soins,
CONDAMNE M. Z... à payer à M. X... la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour des motifs tirés de l'équité ;
CONDAMNE M. Z... aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise et autorise la SCP GRIMAUD, avoués, à les recouvrer directement.
PRONONCE par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile,
SIGNE par Mme BRENNEUR, Président, et par M. C. OLLIEROU, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.