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14/05/2008 | FRANCE | N°06/00316

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 14 mai 2008, 06/00316


RG No 07 / 01895

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU MERCREDI 14 MAI 2008

Appel d'une décision (No RG 06 / 00316)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 17 avril 2007
suivant déclaration d'appel du 16 Mai 2007

APPELANTE :

La S. A. S ALINEA prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
3 rue des Glaireaux- Cap des H
B. P. 405
38524 SAINT EGREVE CEDEX

Représentée par Monsieur HENRIQUET (Directeur) assisté par Me Louis- Al

ain LEMAIRE (avocat au barreau D'AVIGNON) substitué par Me BONZI- ETIENNE (avocat au barreau d'AVIGNON)



INTIME : ...

RG No 07 / 01895

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU MERCREDI 14 MAI 2008

Appel d'une décision (No RG 06 / 00316)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 17 avril 2007
suivant déclaration d'appel du 16 Mai 2007

APPELANTE :

La S. A. S ALINEA prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
3 rue des Glaireaux- Cap des H
B. P. 405
38524 SAINT EGREVE CEDEX

Représentée par Monsieur HENRIQUET (Directeur) assisté par Me Louis- Alain LEMAIRE (avocat au barreau D'AVIGNON) substitué par Me BONZI- ETIENNE (avocat au barreau d'AVIGNON)

INTIME :

Monsieur José- Luis Z...

...

Comparant et assisté par la SCP FESSLER- JORQUERA- CAVAILLES (avocats au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,
Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,
Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 03 Avril 2008,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 14 Mai 2008.

L'arrêt a été rendu le 14 Mai 2008.

EXPOSE DU LITIGE

José- Luis Z..., travailleur handicapé, catégorie A, a été embauché par contrat à durée indéterminée, le 28 octobre 1999, en qualité de magasinier cariste, par la Sarl ALINEA.
Il a été élu membre suppléant du Comité Central d'Entreprise en novembre 2003, membre titulaire du Comité d'Établissement (liste CGT) en novembre 2005, et était membre du CHSCT depuis deux mandats.
Le 6 octobre 2005, la direction lui a annoncé qu'il quittait son poste de magasinier pour être affecté au service clientèle.
José- Luis Z..., n'acceptant pas cette mutation et soutenant avoir fait l'objet, à compter du mois de novembre 2003, d'un certain nombre de reproches et de convocations à des entretiens préalables à une sanction, a saisi le Conseil de Prud'hommes de Grenoble qui, par jugement du 17 avril 2007, a dit que la Sarl ALINEA n'avait pas sollicité l'accord du salarié pour son changement de poste et a constaté l'existence d'une discrimination et d'un harcèlement liés à son appartenance syndicale.
Le conseil a ordonné la réintégration de José- Luis Z... à son ancien poste de magasinier, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 14 mai 2007, se réservant le droit de liquider l'astreinte, et a condamné la sarl ALINEA à payer à José- Luis Z... la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts et celle de 700 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La Cour est saisie par l'appel interjeté le 16 mai 2007 par la sarl ALINEA, à qui le jugement a été notifié le 19 avril 2007.

La Sarl ALINEA sollicite l'infirmation du jugement et la condamnation de José- Luis Z... à lui verser 2 000 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle expose, en ses conclusions régulièrement déposées, visées et développées oralement à l'audience :
- que José- Luis Z... n'a pas fait l'objet de discrimination quant à sa rémunération puisqu'il a vu son salaire augmenter de 4 % en moyenne et de 18, 19 % de 2000 à 2006, l'inflation ayant été, pour la période considérée, de 12, 90 %, et qu'un autre magasinier cariste embauché en 1999 a suivi les minima de classification de 2004 à 2006 et a vu son évolution salariale augmenter de 18, 85 % de 2000 à 2006 ;
- que José- Luis Z... n'a pas fait l'objet de sanctions disciplinaires plus qu'un autre salarié : qu'il a reçu un avertissement pour la conduite d'un appareil de levage, alors qu'il est titulaire d'un permis cariste et a été formé à la conduite d'engins clark, et trois courriers de rappel des règles à observer ;
- que son changement de poste, dont il prétend qu'il est intervenu le lendemain de sa candidature sur la liste CGT, était en réalité lié à l'annonce soudaine de la démission d'un magasinier au service clientèle, le 29 septembre 2005 ;

- qu'en permutant sur ce poste, José- Luis Z... restait dans le même secteur d'activité ; qu'il changeait légèrement d'horaires mais avait plus de contact avec le personnel, ce qui ne peut être que favorable à l'exercice de ses fonctions de délégué du personnel ;
- que le prétendu harcèlement lié aux fonctions syndicales n'est pas établi, ni la mise à l'écart, étant rappelé que le handicap de José- Luis Z... étant physique et non pas d'ordre psychologique, le service clientèle était plus adapté pour lui que son ancien poste de magasinier cariste.

José- Luis Z..., intimé, demande à la cour de confirmer le jugement. Il réclame le versement de la somme de 25 000 € à titre de dommages et intérêts et celle de 3 000 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Il expose, en des conclusions régulièrement déposées, visées et développées oralement à l'audience, que les faits de harcèlement et de discrimination liés à l'appartenance syndicale sont avérés :
- que l'employeur lui a imposé, sans son assentiment exprès, une modification de ses conditions de travail en violation du statut protecteur ;
- qu'il a fait l'objet d'un harcèlement systématique et de sanctions disciplinaires injustifiées ;
- qu'il a fait systématiquement l'objet d'obstruction dans le cadre de la prise de ses heures de délégation ;
- qu'il a subi un blocage salarial absolu.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues oralement et sans modification à l'audience.
Il n'est pas contesté que José Z... n'a fait l'objet, au cours des quatre premières années d'activité au sein de l'entreprise, jusqu'au mois de novembre 2003, d'aucune observation dans l'exécution de son travail.
Cependant sa rémunération brute, qui était à l'embauche de 1 049 €, n'a pas subi d'autres augmentations que celles liées à l'évolution du SMIC et à l'attribution d'une prime d'ancienneté.
Ainsi son salaire brut de base est actuellement de 1 254 €, sans que l'employeur justifie l'absence de toute augmentation par des éléments objectifs.
Au contraire, il résulte de l'entretien d'évaluation du 17 novembre 2005 que son responsable n'a rien à redire sur son travail, mais qu'il note : " Sur les six derniers mois, j'ai trouvé José négatif envers la SARL ALINEA ", sans autre précision.

Dans cette même évaluation, José Z... fait remarquer : " trop de sanctions pour pas grand-chose ", et exprime son souhait de voir son salaire évoluer et de " passer maîtrise par rapport à la grille Alinéa employé ".
Par ailleurs, à compter du mois de juin 2004, José Z... a fait l'objet de plusieurs reproches et d'un avertissement pour des motifs qu'il a contestés.
Ainsi le 15 juin 2004, il a été convoqué à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pour des faits d'utilisation anormale des appareils de levage et de manutention le 11 juin 2004.
Il a fait valoir qu'il s'agissait d'un appareil (préparateur de commande qui monte jusqu'à 9 mètres de hauteur) pour la conduite duquel il n'avait pas reçu de formation, et que les faits reprochés avaient pour cause une saturation des stocks empêchant une utilisation adéquate des appareils de manutention, ce que l'employeur n'a pas admis puisqu'il lui a notifié un avertissement le 25 juin 2004, sans toutefois donner d'autre explication sur les faits eux- mêmes que le constat que le salarié était titulaire du permis cariste et d'une autorisation de conduire les " clarks " de l'entreprise.
Le 25 juin 2004, José Z... a été de nouveau convoqué à un entretien préalable à une sanction pour " une discussion pendant les heures de travail, le 18 juin 2004, alors que le quai est plein de marchandises à ranger ". Ces faits n'ont, en définitive, pas fait l'objet d'une sanction.
Le 6 octobre 2005, soit le lendemain de la communication à la direction de l'entreprise des listes CGT sur lesquelles il figurait, José Z... s'est vu refuser la signature d'un bon d'heure de délégation, et a appris qu'il allait rapidement changer de poste, par permutation avec un salarié du service clientèle dont les horaires de travail n'étaient pas les mêmes que les siens.
Or force est de constater que la SARL ALINEA, qui soutient qu'un magasinier du service clientèle avait annoncé son intention de démissionner le 29 septembre 2005, n'apporte aucun document de nature à étayer cette affirmation et à expliquer le choix de José Z... pour le remplacer, plutôt que l'un des deux autres magasiniers, sans charge de famille.
Ensuite et pendant une année, José Z... a reçu pas moins de dix lettres recommandées avec avis de réception pour différents motifs, dont un problème d'heures de délégation un dimanche, un rappel de l'interdiction faite au personnel d'emprunter certains accès pendant les heures d'ouverture du magasin, une erreur de vérification de stock pour un article, un entretien prolongé avec un stagiaire sur des sujets ne concernant pas les tâches quotidiennes.
Le caractère systématique des remarques et reproches de l'employeur ressort d'ailleurs de l'attestation établie le 29 novembre 2006 par M. B..., responsable hiérarchique de José Z... à l'époque des faits. Celui- ci indique qu'il avait reçu des consignes précises, de la part du directeur adjoint, qui " visaient à surveiller et à mettre la pression sur José Z... dans le but de le pousser à la démission ".

Le fait que ce témoin ait noté, dans son entretien annuel de progrès du 11 août 2006, que " Sans José, idéal sur toute l'équipe. Avec José mauvaise ambiance " et qu'il ait fait l'objet le 29 septembre 2006 d'un avertissement pour avoir injurié José Z..., puis qu'il ait été licencié (procédure initiée le 24 novembre 2006) ne permet pour autant pas de discréditer son témoignage en faveur de ce salarié.
L'ensemble de ces éléments démontre l'existence de harcèlement et de discrimination liés à l'appartenance syndicale, et il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fait droit à la demande de réintégration de José Z... à son ancien poste.
En ce qui concerne le montant des dommages et intérêts dus en réparation du préjudice subi, il convient d'en fixer le montant à la somme de 20 000 €, et d'allouer à José Z... une somme de 1 000 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions
- Condamne la SARL ALINEA à payer à José Z... la somme de 1 000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en cause d'appel,
- Condamne la SARL ALINEA aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame VERDAN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Numéro d'arrêt : 06/00316
Date de la décision : 14/05/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Grenoble


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-05-14;06.00316 ?
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