RG No 07 / 00576
No Minute :
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU MERCREDI 19 DECEMBRE 2007
Appel d'une décision (No RG 06 / 00044)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 25 janvier 2007
suivant déclaration d'appel du 09 Février 2007
APPELANT :
Monsieur Guy X...
...
38570 THEYS
Comparant et assisté par Me Pierre JANOT (avocat au barreau de GRENOBLE)
INTIMEE :
La SARL ALTER EGO prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
10 rue Henri Bergson
38100 GRENOBLE
Représentée par Madame BORCHIER (Gérante) assistée par Me Franck BENHAMOU (avocat au barreau de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,
Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller,
Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,
Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 14 Novembre 2007,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 19 Décembre 2007.
L'arrêt a été rendu le 19 Décembre 2007. Notifié le :
Grosse délivrée le :
RG No 07 / 576 BV
Monsieur X... a été embauché par la Société MICROFILMS le 11 juillet 1980 en qualité de chef de laboratoire. Son contrat a été transféré en septembre 1999 à la Société ALTER EGO.
Au cours de l'année 2002, la Société ALTER EGO a mis en place, avec différents partenaires, au concours de photographies dénommé " carnet de voyage ".
Monsieur X... a été chargé de cette opération, reconduite en 2003.
La Société ALTER EGO a décidé de ne pas poursuivre l'opération en 2004. Elle a été remplacée par la Société A2C, une de ses clientes et concurrentes.
Le 30 décembre 2005, la Société ALTER EGO a licencié Monsieur X... pour faute grave, lui reprochant d'avoir continué à travailler pour l'opération " Carnet de voyage ", malgré ses mises en garde et de l'avoir dénigrée.
Par jugement du 25 janvier 2007, le Conseil de Prud'hommes de Grenoble a débouté Monsieur X... de ses demandes.
Ayant relevé appel, Monsieur X... sollicite :
-1. 314,00 € à titre de mise à pied
-788,40 € à titre de congés payés
-6. 570,00 € à titre de préavis
-35. 430,00 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
-52. 560,00 € à titre de dommages-intérêts
-2. 000,00 € au titre de l'article 700du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il expose que :
-il a reçu un avertissement le 17 octobre 2005 pour participation au jury " Carnet de voyage " pour la session 2005 et divulgation à un concurrent d'informations (A2C)
-il avait reçu un avertissement le 16 avril 2004 pour avoir participé à l'opération " Carnet de voyage " pendant ses heures de travail.
-l'interdiction de participer à l'opération " Carnet de voyage " est injustifiée : il y a participé à titre individuel et non au nom de la société ALTER EGO, à titre bénévole ; l'opération n'avait aucun caractère commercial.
-s'il est vrai qu'il siégeait dans le jury aux côtés de la Société A2C, cela ne signifiait pas d'accointances avec celle-ci, concurrents D'ALTER EGO, mais aussi sous-traitante.
-la clause de son contrat de travail lui interdisait de prendre part à d'autres activités rémunérées ou non sans l'autorisation écrite de son employeur est illicite. La Société ALTER EGO ne démontre l'existence d'aucun préjudice.
-il a respecté le principe de loyauté : il n'est pas intervenu en qualité de salarié de ALTER EGO et n'a rien dévoilé de cette dernière.
La Société ALTER EGO conclut à la confirmation du jugement.
Elle fait valoir que :
-le licenciement ne sanctionne pas un fait déjà sanctionné par l'avertissement du 17 octobre 2005 qui lui a rappelé l'interdiction de participe à l'opération " Carnet de voyage " sous quelque forme que ce soit, en 2005, et dans les années à venir.
-malgré cette mise en demeure, Monsieur X... a continué à prendre part à l'opération.
-il a contrevenu à son obligation de loyauté et de réserve. L'opération était de nature commerciale, gérée par des concurrents dont A2C (concurrents à hauteur de 85 % pour certaines activités). La participation de Monsieur X... à l'opération entraînait de la confusion dans l'esprit des clients D'ALTER EGO.
-Monsieur X... a travaillé sur l'opération pendant ses heures de travail et avec le matériel de la Société.
MOTIFS DE L'ARRET :
1o) Le licenciement :
La lettre de licenciement adressée à Monsieur X... était ainsi motivée :
" Courant de l'année 2002, notre Société a mis en place avec différents partenaires un concours de photographie dénommée " Carnet de Voyages "
Il s'agissait d'une manifestation assurant une communication large de notre savoir-faire.
Vous aviez à l'époque été choisi par notre Société pour la représenter lors de cette opération qui a été reconduite à l'identique pour l'année 2003.
Par la suite, nous n'avons plus participé à l'opération pour 2004, décision du 7 avril 2004.
Notre participation dans l'organisation de ce concours a alors été reprise par une Société cliente mais surtout concurrente, la Société A2C
Nous vous avons alors surpris en train de " travailler " sur ce dossier pendant vos heures de travail dans nos locaux.
Nous vous avons alors formellement interdit de participer à une nouvelle opération, ce qui a motivé le 1er avertissement, le 16 avril 2004.
Nous avons su par la suite que vous participez dans le cadre d'un statut inconnu de nous à l'opération 2004 aux côtés de la Société A2C
Nous vous avons alors par lettre recommandée formellement interdit toute nouvelle participation à cette manifestation dans l'avenir par courrier en date du 10 novembre 2004, vous rappelant l'obligation de réserve figurant sur votre contrat de travail et l'interdiction qui vous était faite de participe ou de vous intéresser à d'autres activités professionnelles rémunérées ou non sans notre autorisation expresse.
Pourtant, nous avons appris que malgré cette mise en demeure vous aviez quand même envisagé de participer à l'organisation de ce concours pour l'année 2005.
Vous avez reconnu les faits et vous avez d'ailleurs admis vous être rendu au sein de la Société A2C.
Nous avons d'ailleurs appris par la suite que vous avez, lors d'un déplacement, tenu à l'encontre de notre Société des propos dénigrants et communiqué des informations confidentielles sur certains travaux effectués par nos clients.
Vous ne pouviez ignorer que la Société A2C est un concurrent et que le fait d'intervenir à ses côtés sur une opération, telle que " Carnet de voyages " sur laquelle ALTER EGO n'intervient plus cause un préjudice à notre entreprise en créant un doute dans l'esprit de la clientèle, ce préjudice est d'autant plus important du fait de votre qualité de cadre.
Nous vous avons, par un second avertissement en date du 17 octobre 2005, demandé de renoncer à cette opération et à ce comportement déloyal.
Vous nous avez alors opposé une fin de non recevoir en prétendant que votre participation à cette opération avait un caractère amical... Vous avez don maintenu votre participation à l'opération " Carnet de Voyages " de 2005, ignorant ainsi notre mise en garde et instructions ".
Le 17 octobre 2005, Monsieur X... avait reçu un avertissement de la part de son employeur dénonçant :
-sa présence le 13 octobre 2005 chez A2C pour la nouvelle opération " Carnet de Voyages 2005 " et sa participation au jury
-la tenue, le même jour, chez A2C de discours sur les méthodes de travail de ses collègues qu'il critique et la communication à A2C de renseignements.
Par l'avertissement ci-dessus rappelé, l'employeur de Monsieur X... a épuisé son pouvoir disciplinaire à l'égard des faits dénoncés.
La Société ALTER EGO ne rapporte pas la preuve qu'après le 17 octobre 2005, Monsieur X... ait d'(une part continué à participer à l'opération " Carnet de Voyages " et notamment au jury et d'autre part, tenu de nouveaux propos dénigrants à l'égard de son employeur et communiqué des informations confidentielles sur des travaux effectués par des clients.
Un même fait ne peut faire l'objet de deux sanctions successives.
Le licenciement de Monsieur X... est en conséquence dénué de cause réelle et sérieuse.
2o) Sur les demandes de Monsieur X... :
Au titre de la mise à pied, il est dû à Monsieur X..., la somme de 1. 314 € correspondant à 18 jours de salaire.
Au titre du préavis, il est dû à Monsieur X..., l'équivalent de 3 mois de salaire, soit la somme de 6. 570 € (article 4 de la Convention Collective des industries chimiques et connexes).
Sur les sommes ci-dessus fixées, il convient d'ajouter 10 % au titre des congés payés afférents, soit la somme de 788,40 €.
Au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, il est dû en application de la Convention Collective nationale des industries chimiques et connexes (article 14) à Monsieur X..., selon les règles définies et rappelées ci-dessous :
-de 0 à 10 ans : 4 / 10ème de mois par année à compter de la date d'entrée dans l'entreprise
-de 10 / 15 ans : 6 / 10ème de mois par année au-delà de 15 ans
-au-delà de 15 ans : 8 / 10ème de mois par année au-delà de 15 ans.
-l'indemnité est majorée après 5 ans d'ancienneté
-d'un mois pour les cadres âgés de + de 45 ans
-de 2 mois pour les cadres âgés de + de 50 ans
la somme s'établit ainsi :
-1ère tranche 8. 760 €
-2ème tranche 6. 570 €
-3ème tranche 15. 720 €
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31. 050 €
-+ 2 mois 4. 390 €
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35. 430 €
Eu égard à l'ancienneté de Monsieur X... au moment de son licenciement-plus de 25 ans-eu égard à son âge-54 ans-aux difficultés qu'éprouve Monsieur X... à retrouver un emploi, le préjudice subi est important. Il sera fixé à la somme de 39. 420 €.
L'équité commande la condamnation de la Société ALTER EGO à payer à Monsieur X... 1. 800 € en application de l'article 700 du Nouveau Code Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi
Infirme le jugement en toutes ses dispositions
Statuant à nouveau
Dit le licenciement de Monsieur X... sans cause réelle et sérieuse.
Condamne la Société ALTER EGO à verser à Monsieur X... :
1. 314,00 euros à titre de salaire su mis à pied
6. 570,00 euros à titre d'indemnité de préavis
788,40 euros à titre de congés payés afférents
35. 430,00 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
39. 420,00 euros à titre de dommages-intérêts
1. 800,00 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Condamne la Société ALTER EGO aux dépens de première instance et d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame VERDAN greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.