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12/11/2007 | FRANCE | N°04/00020

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 12 novembre 2007, 04/00020


R. G. No 06 / 00139
F. L.
No Minute :



Grosse délivrée

le :

à :

SCP GRIMAUD

SCP CALAS

SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC

SCP POUGNAND

Me RAMILLON

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU LUNDI 12 NOVEMBRE 2007



Appel d'un Jugement (No R. G. 04 / 00020)
rendu par le Tribunal de Grande Instance de BOURGOIN-JALLIEU
en date du 22 décembre 2005
suivant déclaration d'appel du 05 Janvier 2006

APPELANTE :

CREDIT AGRICOLE SUD RHONE-ALPES poursuites

et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
BP 67
15-17 rue Paul Claudel
38041 GRENOBLE CEDEX

représentée par...

R. G. No 06 / 00139
F. L.
No Minute :

Grosse délivrée

le :

à :

SCP GRIMAUD

SCP CALAS

SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC

SCP POUGNAND

Me RAMILLON

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU LUNDI 12 NOVEMBRE 2007

Appel d'un Jugement (No R. G. 04 / 00020)
rendu par le Tribunal de Grande Instance de BOURGOIN-JALLIEU
en date du 22 décembre 2005
suivant déclaration d'appel du 05 Janvier 2006

APPELANTE :

CREDIT AGRICOLE SUD RHONE-ALPES poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
BP 67
15-17 rue Paul Claudel
38041 GRENOBLE CEDEX

représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour
assistée de Me HERNANDEZ, avocat au barreau de BOURGOIN JALLIEU

INTIMEE :

S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
Z. I.
38110 SAINT CLAIR DE LA TOUR

représentée par la SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC, avoués à la Cour
assistée de la SCP TEJTELBAUM-TARDY / CHARVET, avocats au barreau de BOURGOIN-JALLIEU et plaidant par Me TEJTELBAUM-TARDY

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Françoise LANDOZ, Président,
Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller,
Madame Véronique KLAJNBERG, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Hélène LAGIER, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 15 Octobre 2007, Madame LANDOZ a été entendue en son rapport.

Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries.

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.

Exposé du litige

Par acte notarié du 29 décembre 1998, la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes a consenti un prêt dit de consolidation de trésorerie à la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR représentée par Jacques B... et Robert A....

Par acte du 1er décembre 2003, la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes a fait assigner la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR devant le Tribunal de Grande Instance de BOURGOIN-JALLIEU en paiement de la somme de 92. 717,05 € outre " intérêts postérieurs " et celle de 2. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement du 22 décembre 2005 le Tribunal a décidé que la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes, professionnelle du crédit, avait commis une faute en ne vérifiant pas la validité des pouvoirs de Messieurs
B...
et A...à l'origine de son appauvrissement et que la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR ne s'était pas enrichie dès lors qu'elle n'était pas débiteur principal des dettes apurées ; il a rejeté la demande de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes et la demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts de la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR.

La Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes a interjeté appel de cette décision le 5 janvier 2006.

Elle soutient que Jacques B... et Robert A...pouvaient être valablement considérés comme disposant des pouvoirs pour engager la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR et qu'elle a été confrontée à une représentation en apparence légitime de celle-ci.

Elle indique qu'elle a accepté de consentir le prêt en se fondant notamment sur le procès-verbal d'une délibération de l'assemblée générale extraordinaire des associés de la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR du 26 octobre 1998 qui faisait apparaître que Jacques B... et Robert A...étaient nommés co-gérants de la S. C. I. ; qu'il lui était impossible de faire d'autres vérifications puisque la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR n'avait pas été immatriculée.

Elle rappelle le contexte du prêt, la signature par un représentant de la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR d'un protocole transactionnel conclu entre le Crédit Mutuel Agricole d'Anjou, le CID-UNATI de l'Isère et la S. C. I. qui laissait apparaître un accord parfait entre les signataires, protocole qui avait pour vocation de solutionner les difficultés financières de la S. C. I. et qui mentionnait expressément le prêt à contracter.

Elle ajoute que ce n'est que quatre ans plus tard que l'acte qui justifiait le pouvoir de représentation de Messieurs
B...
et A...a été qualifié de faux par la juridiction pénale.

À titre subsidiaire, elle maintient que la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR, en ne répondant pas sur ses fonds de son engagement de caution à l'égard du Crédit Mutuel Agricole d'Anjou a bien évité une perte, et donc bénéficié d'un enrichissement sans cause justifiant l'action du Crédit Agricole.

Enfin, la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes conteste avoir commis une faute à l'encontre de la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR et s'oppose à la demande en remboursement des sommes versées par celle-ci au titre du prêt.

Elle demande à la Cour de réformer le jugement déféré, de condamner la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR à lui payer la somme de 92. 717,05 € outre intérêts et capitalisation et celle de 20. 000 € à titre de dommages-intérêts et de lui allouer une indemnité de 4. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

-o0o-

La S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR répond que la jurisprudence refuse d'admettre la croyance légitime du tiers en l'apparence lorsque ce tiers a commis des négligences ou imprudences ; qu'en l'espèce, l'acte notarié révèle que les deux personnes qui ont déclaré agir au nom de la S. C. I. ont présenté des pouvoirs donnés non pas par les organes représentatifs de celle-ci mais par l'UDI CID-UNATI d'une part et le CID-UNATI Bâtiment de l'Isère d'autre part.

Elle fait état de la décision du Tribunal Correctionnel de BOURGOIN-JALLIEU qui a retenu que l'assemblée générale du 26 octobre 1998, dont Robert A...tirait sa qualité de co-gérant était fictive, et que la dite assemblée n'avait pas fait l'objet d'une publication annonçant le changement de gérance.

Elle maintient que le Crédit Agricole aurait dû procéder à des vérifications qui lui auraient permis de s'assurer de la qualité des représentants de la personne morale et que sa faute est flagrante, ce qui lui interdit de se prévaloir d'une croyance légitime en un mandat apparent.

Elle sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes sur le fondement du mandat apparent.

La S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR maintient également qu'il n'y a pas eu enrichissement sans cause de sa part mais simplement disparition de son obligation de cautionner le prêt souscrit par le CID-UNATI auprès du Crédit Mutuel Agricole d'Anjou.

Elle fait valoir que la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes qui ne démontre pas que le prêt a bien été versé entre les mains de la S. C. I. ne dispose d'aucun titre à son encontre.

Elle maintient encore qu'en raison de sa faute la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes ne peut revendiquer le bénéfice de l'action " de in rem verso ".

Elle reprend sur le fondement de la responsabilité de la banque, sa demande en remboursement des sommes déjà versées au titre du prêt litigieux et sa demande en réparation de son préjudice qu'elle fixe à 20. 000 €.

Elle sollicite l'allocation de la somme de 5. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Motifs et décision

L'acte notarié du 29 décembre 1998 contient au chapitre " désignation de l'emprunteur " les indications suivantes :

La société Civile Particulière dénommée SOCIÉTÉ CIVILE IMMOBILIÈRE DE SAINT CLAIR DE LA TOUR, au capital de 692 000 francs dont le siège social est à SAINT CLAIR DE LA TOUR (Isère) Zone Industrielle, dont les statuts ont été établis par acte sous seing privé en date à SAINT CLAIR DE LA TOUR du 22 février 1974, enregistré à BOURGOIN-JALLIEU le 8 Mars suivant bordereau 143 / 2 folio 74

Ladite société non immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de BOURGOINJALLIEU, celle-ci n'étant pas obligatoire à l'époque de sa constitution.

Représentée par :

Monsieur Jacques B... demeurant à CORBELIN (Isère) Arlacot, agissant en qualité de Président de l'UDI CIDUNATI DE L'ISÈRE,

Et par Monsieur Robert A...demeurant à LA CHAPELLE DE LA TOUR (Isère) Le Flachet, agissant en qualité de Président du SYNDICAT CIDUNATI DU BATIMENT DE L'ISERE

l'UDI CIDUNATI DE L'ISÈRE et le SYNDICAT CIDUNATI DU BATIMENT DE L'ISÈRE seuls membres de la S. C. I. DE SAINT CLAIR DE LA TOUR

Messieurs
B...
et A...spécialement habilités à l'effet des présentes en vertu d'une délibération de l'assemblée générale extraordinaire des associés de la SCI DE SAINT CLAIR DE LA TOUR en date du 26 octobre 1998 dont un extrait certifié conforme demeurera annexé aux présentes après mention.

Dans la mesure où l'acte de prêt était passé par devant un notaire, la croyance de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes qu'elle contractait avec les représentants légaux de la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR et que ceux-ci étaient régulièrement habilités à engager la S. C. I. était légitime.

De même, aucune faute ne peut être reprochée à l'organisme prêteur de ne pas avoir fait des vérifications sur la véracité des pouvoirs de Messieurs
B...
et A..., les mandataires prétendus de la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR étant censés avoir donné au notaire rédacteur de l'acte, les éléments justifiant de leur qualité.

En tout état de cause, aucune circonstance ne permettait à la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes de douter de la sincérité des déclarations de Messieurs
B...
et A...qui indiquaient agir en leur qualité l'un de Président de l'UDI CID-UNATI de l'Isère et l'autre de Président du SYNDICAT CID-UNATI DU BATIMENT de l'Isère, ces deux syndicats étant présentés comme les seuls membres de la S. C. I. DE SAINT CLAIR DE LA TOUR.

Le fait qu'une décision pénale ait déclaré fictive l'assemblée générale en vertu de laquelle Messieurs
B...
et A...prétendaient détenir leurs pouvoirs, n'est pas de nature à ôter, a posteriori, la légitimité à l'époque de la signature du contrat de prêt au profit de la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR, de la croyance de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes qu'elle avait affaire avec les personnes capables d'engager ladite S. C. I..

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR est valablement engagée à l'égard de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes et qu'elle est tenue de payer le solde du prêt qui lui a été consenti, lequel lui a d'ailleurs permis d'échapper aux poursuites engagées contre en qualité de caution sur ses biens immobiliers.

Le jugement déféré sera réformé en toutes ses dispositions et la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR condamnée à payer à la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes la somme de 92. 717,05 € au titre du solde du prêt à la date du 30 juin 2003 outre les intérêts au taux contractuel et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code Civil.

La Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes ne justifie pas d'un autre préjudice que celui réparé par l'allocation des intérêts capitalisés ; sa demande de dommages-intérêts sera rejetée.

En revanche, il paraît inéquitable de laisser à sa charge les frais qu'elle a dû exposer pour faire valoir ses droits et non compris dans les dépens ; la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR devra lui payer la somme de 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par ces motifs

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,

Condamne la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR à payer à la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes la somme de 92. 717,05 € outre intérêts dans les conditions du prêt avec la capitalisation et une indemnité de 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Rejette la demande de dommages-intérêts de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes,

Condamne la S. C. I. SAINT CLAIR DE LA TOUR à tous les dépens de première instance et d'appel et autorise la S. C. P GRIMAUD, avoués, à recouvrer directement contre elle, les frais avancés sans avoir reçu provision.

PRONONCÉ en audience publique par Madame LANDOZ, Président, qui a signé avec Madame HULOT, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Numéro d'arrêt : 04/00020
Date de la décision : 12/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-12;04.00020 ?
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