RG No 06 / 03534
No Minute :
Notifié le :
Grosse délivrée le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU MERCREDI 24 OCTOBRE 2007
Appel d'une décision (No RG 05 / 01222)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 11 septembre 2006
suivant déclaration d'appel du 14 Septembre 2006
APPELANTE :
La S.A.S. EURO SYSTEM prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
26 chemin de la Digue
BP 28
38761 VARCES CEDEX
Représentée par Monsieur assisté par Me Dominique BRET (avocat au barreau de GRENOBLE)
INTIME :
Monsieur Georges Y...
...
Comparant et assisté par Me Wilfried SAMBA-SAMBELIGUE (avocat au barreau de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,
Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller,
Madame Hélène COMBES, Conseiller,
Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 26 Septembre 2007,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 24 Octobre 2007.
L'arrêt a été rendu le 24 Octobre 2007.
RG No 063144 HC
EXPOSE DU LITIGE
Georges Y... a été embauché en qualité de technicien de maintenance par la société Euro System le 21 août 1991, dans le cadre d'un contrat pour travailleur étranger et le 1er juin 1992, la relation contractuelle s'est poursuivie sous le régime d'un contrat à durée indéterminée
Il a été licencié pour faute grave le 8 novembre 2004, le motif étant d'avoir emprunté sans autorisation un véhicule de la société et d'avoir eu un accident le 30 octobre 2004.
Il a contesté son licenciement devant le conseil de Prud'hommes de Grenoble qui par jugement du 11 septembre 2006 a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la société Euro System à lui payer :
-737,97 euros au titre de la mise à pied et 73,79 euros au titre des congés payés afférents
-3. 406 euros au titre de l'indemnité de préavis et 340,60 euros au titre des congés payés afférents
-5. 381,48 euros au titre de l'indemnité de licenciement
-20. 436 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-20. 436 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non concurrence
Le conseil a ordonné le remboursement des indemnités de chômage dans la limite d'un mois.
La société Euro System a relevé appel le 14 septembre 2006.
Elle demande à la Cour de réformer le jugement, de dire que le licenciement est fondé sur une faute grave et de statuer sur la restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire.
Elle fait valoir que le conseil de Prud'hommes a été de parti pris et qu'il n'a pas tenu compte des pièces qu'elle a versées aux débats.
Elle rappelle les usages en vigueur dans l'entreprise selon lesquels un véhicule de service ne peut être utilisé à des fins personnelles et n'est assuré que pour un usage professionnel.
Elle invoque la note interne du 6 mai 1996 et précise qu'elle a été affichée sur le tableau d'affichage et indique qu'un cahier est également à la disposition des salariés qui doivent y noter l'éventuel usage d'un véhicule.
Elle fait valoir que le 29 octobre 2004, lorsqu'il a pris le véhicule Clio, Georges Y... n'a pas sollicité d'autorisation et n'a pas respecté la procédure interne commettant de ce fait une faute grave.
Elle conteste que le véhicule ait été à la disposition du salarié depuis plusieurs semaines.
Sur la clause de non concurrence, elle relève que Georges Y... ne verse aucune pièce démontrant son préjudice ni qu'il a postulé à des emplois qui lui auraient été refusés en raison de la clause.
Georges Y... conclut à la confirmation du jugement sauf à ramener le montant de l'indemnité de licenciement à la somme de 5. 286 euros.
Il réclame 1. 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Il conteste la faute grave qui lui est reprochée et invoque l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.
Il fait valoir à cet égard qu'il n'a emprunté aucun véhicule sur le parking de la société le week-end du 1er novembre 2004 ;
qu'il disposait en effet du véhicule depuis 4 semaines à la suite d'une panne de son véhicule personnel, ce qu'avait autorisé l'employeur.
Il relève que ce n'est qu'après son licenciement qu'une note interne a précisé les conditions d'utilisation des véhicules de la société.
Il soutient encore que la société Euro System ne rapporte pas la preuve que sa responsabilité est engagée dans l'accident survenu le 30 octobre.
Il rappelle qu'en 13 ans au sein de la société, aucun reproche ne lui a été fait et que la société Euro System a attendu le mois de février 2006 pour le remplacer.
Il invoque l'illicéité de la clause de non concurrence qui ne comporte pas de contrepartie financière.
DISCUSSION
Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;
1-Sur le licenciement
Attendu que la lettre de licenciement pour faute grave est ainsi rédigée :
" Au cours du week-end du 1er novembre 2004, vous avez " emprunté " sans autorisation un véhicule automobile appartenant à la société stationné dans notre parking. De surcroît vous avez eu le 30 octobre 2004 un accident de la circulation dans lequel votre responsabilité semble totalement engagée. " ;
Attendu que Georges Y... ne conteste pas que les véhicules de l'entreprise sont des véhicules de service dont l'utilisation est réservée au cadre professionnel sauf accord de l'employeur, mais soutient qu'il disposait d'une telle autorisation ;
Attendu que peu importe dès lors de déterminer s'il a eu communication de la note du 6 mai 1996, la preuve de l'autorisation de l'employeur pour une utilisation personnelle du véhicule concerné lui incombant ;
Attendu que les attestations qu'il produit aux débats ne sont pas de nature à établir la réalité d'une telle autorisation ;
que les salariés qui ont témoigné en sa faveur (Philippe A..., Michel B...) se contentent d'indiquer que l'utilisation de ce véhicule depuis plusieurs semaines se faisait à la vue de tous, ce qui ne peut être assimilé à une autorisation de l'employeur ;
que le fait qu'une personne extérieure à l'entreprise (Véronique D...) ait pu constater que pendant tout le mois d'octobre Georges Y... avait le véhicule à sa disposition ne conforte pas davantage son affirmation d'une autorisation de l'employeur ;
Attendu que l'attestation de Daniel C... n'est pas davantage probante, celui-ci affirmant que Georges Y... empruntait le véhicule avec l'accord de la direction, sans donner la moindre précision sur les conditions dans lesquelles il a connu l'existence de cet accord ;
Attendu qu'aucune de ces pièces ne permet de retenir qu'en dépit des instructions écrites et de la tenue d'un cahier d'utilisation des véhicules, une certaine tolérance s'était instaurée dans l'entreprise et que tous les salariés en bénéficiaient jusqu'à l'incident du samedi 30 octobre 2004 ;
qu'il ne saurait être reproché à l'employeur d'avoir rappelé les règles en vigueur après l'incident du 30 octobre ;
Attendu qu'en empruntant sans autorisation et pour ses besoins personnels un véhicule dont l'utilisation était réservée au cadre professionnel, Georges Y... a commis une faute justifiant la rupture du contrat de travail ;
Attendu que cette faute ne présentait cependant pas un degré de gravité tel que le contrat de travail ne pouvait être exécuté pendant la durée du préavis ;
Attendu que le jugement sera infirmé en ce qu'il a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et confirmé en ses dispositions relatives à l'indemnité de préavis et à l'indemnité de licenciement, sous réserve du montant reconnu par Georges Y... (5. 286 euros) ;
2-Sur la clause de non concurrence
Attendu que la clause de non concurrence insérée au contrat est nulle en ce qu'elle ne comporte aucune contrepartie financière ;
Attendu que le conseil de Prud'hommes a fait une exacte appréciation du préjudice qu'a subi Georges Y... du fait de la restriction pendant deux ans et sans contrepartie de sa liberté de travailler ;
Attendu qu'il sera alloué à Georges Y... la somme de 1. 500 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
-Infirme le jugement rendu le 11 septembre 2006 par le conseil de Prud'hommes de Grenoble en ce qu'il a jugé le licenciement de Georges Y... dépourvu de cause réelle et sérieuse.
-Statuant à nouveau, déboute Georges Y... de sa demande de dommages-intérêts et dit n'y avoir lieu à remboursement par la société Euro System à L'ASSEDIC des indemnités de chômage.
-Confirme le jugement pour le surplus, sauf à préciser que le montant de l'indemnité de licenciement est ramené à 5. 286 euros.
-Y ajoutant, condamne la société Euro System à payer à Georges Y... la somme de 1. 500 euros au titre des frais irrépétibles.
-Condamne la société Euro System aux dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame VERDAN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.