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18/01/2007 | FRANCE | N°05/4623

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 18 janvier 2007, 05/4623


RG No 05 / 04623 J. L. B. No Minute :

Grosse délivrée

le :
S. C. P. CALAS
S. C. P. GRIMAUD
Me RAMILLON
S. C. P. POUGNAND
S. E. LA. R. L. DAUPHIN et MIHAJLOVIC

COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
STATUANT EN MATIERE DE BAUX COMMERCIAUX
ARRET DU JEUDI 18 JANVIER 2007
Appel d'une décision (No RG 03 / 02498) rendue par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE en date du 10 octobre 2005 suivant déclaration d'appel du 09 Novembre 2005

APPELANTE :

S. C. I. AKKAYA poursuites et diligences de son représentant lÃ

©gal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège 5 Rue Jean-Paul Sartre 38320 EYBENS

représentée par...

RG No 05 / 04623 J. L. B. No Minute :

Grosse délivrée

le :
S. C. P. CALAS
S. C. P. GRIMAUD
Me RAMILLON
S. C. P. POUGNAND
S. E. LA. R. L. DAUPHIN et MIHAJLOVIC

COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
STATUANT EN MATIERE DE BAUX COMMERCIAUX
ARRET DU JEUDI 18 JANVIER 2007
Appel d'une décision (No RG 03 / 02498) rendue par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE en date du 10 octobre 2005 suivant déclaration d'appel du 09 Novembre 2005

APPELANTE :

S. C. I. AKKAYA poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège 5 Rue Jean-Paul Sartre 38320 EYBENS

représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour assistée de Me Jean-Damien MERMILLOD-BLONDIN, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :
Madame Germaine Z... épouse A...... 38320 EYBENS

représentée par la SELARL DAUPHIN et MIHAJLOVIC, avoués à la Cour assistée de Me Dominique BRET, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me REVEL-MOUROZ,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Allain URAN, Président de Chambre, Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller, Madame Françoise CUNY, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Eliane PELISSON, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 07 Décembre 2006, Monsieur URAN, Président a été entendu en son rapport
Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience publique de ce jour,
------0------
La S. C. I. AKKAYA est propriétaire, sur adjudication du 25 septembre 2001, d'un bâtiment à usage de commerce et d'habitation situé à EYBENS, square des maisons neuves, dans lequel est exploité un fonds de commerce de café-restaurant sous l'enseigne " Omni-Bar " en vertu d'un bail commercial renouvelé pour une période de 9 années à compter du 1er janvier 1993.
Se plaignant d'incidents de paiement répétés, ayant donné lieu à la délivrance de deux commandements visant la clause résolutoire, elle a fait assigner, par acte du 5 mai 2003, Madame Germaine Z... épouse A..., propriétaire du fonds exploité dans les lieux, aux fins d'entendre prononcer la résiliation judiciaire du bail, ordonner l'expulsion et fixer l'indemnité d'occupation.
La défenderesse s'est opposée à ces prétentions et a demandé au tribunal de l'autoriser à céder son droit au bail à la société Lyonnaise de banque qui souhaitait exercer dans les lieux une activité non autorisée par le bail d'origine.
Par jugement du 10 octobre 2005 le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE a rejeté la demande en résiliation judiciaire du bail et a autorisé la locataire à poursuivre l'exécution de son projet de cession de droit au bail.
La SCI AKKAYA a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 9 novembre 2005.
Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 19 octobre 2006 par la SCI AKKAYA qui demande à la Cour, par voie d'infirmation, de prononcer la résiliation judiciaire du bail, d'ordonner l'expulsion de Madame A... sous astreinte de 150 € par jour de retard et le transport du mobilier garnissant les lieux loués dans un garde-meubles en garantie des sommes dues, de fixer l'indemnité d'occupation à la somme trimestrielle de 2 217,51 €

et de condamner l'intimée à lui payer deux indemnités de 2 000 € chacune au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel aux motifs que depuis qu'elle est propriétaire des locaux loués Madame A... ne s'est acquittée des loyers dus qu'à la faveur de commandements de payer sous la menace d'une expulsion, que ces retards systématiques de paiement, aggravés par le fait que les charges récupérables n'ont pas plus été réglées, justifient que soit prononcée la résiliation du bail sur le fondement des articles 1184 et 1741 du Code Civil, résiliation qui s'impose d'autant plus qu'en violation du règlement de copropriété la locataire a fait installer sans autorisation une enseigne et que le fonds n'est plus exploité depuis le mois d'octobre 2005, qu'elle n'a en rien refusé abusivement de consentir à la déspécialisation demandée au profit du candidat acquéreur du droit au bail dès lors qu'elle s'est bornée à émettre des réserves en l'état d'un projet soumis à de trop nombreux aléas et conditions, que l'abandon de son projet d'installation par la lyonnaise de banque confirme la légitimité de ses craintes, qu'elle n'a commis aucune faute ayant fait perdre à Madame A... une chance de vendre son fonds puisque la Lyonnaise de banque, qui en atteste, a renoncé à son projet pour des raisons purement internes et que la locataire est seule, par ses manquements répétés, à l'origine de la présente procédure qui a pu décourager d'autres acquéreurs potentiels.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 25 octobre 2006 par Madame Germaine A... qui sollicite la confirmation du jugement, sauf en ce qu'il a autorisé la cession du droit au bail au profit de la Lyonnaise de banque en raison de l'abandon de ce projet d'acquisition, et la condamnation de l'appelante à lui payer la somme de 100 000,00 € à titre de dommages-intérêts, outre une indemnité de procédure de 3 000 €, aux motifs qu'elle est aujourd'hui à jour du paiement de ses loyers, que les retards ponctuels, dus à des difficultés financières consécutives notamment à un braquage survenu le 15 septembre 2002, ont été régularisés, que la bailleresse a fait preuve de mauvaise foi en refusant la mensualisation du loyer qui lui était demandée et en ne retirant pas les courriers recommandés contenant les chèques, qu'en lui offrant récemment le renouvellement du bail la SCI a renoncé à invoquer les retards de paiement, qu'aucune stipulation du bail ne lui fait obligation d'acquitter de quelconques charges communes d'entretien, dont

la réalité n'est au demeurant pas justifiée, que le bail autorise la pose d'une enseigne, qu'elle exploite toujours le bar PMU même si elle a abandonné l'activité de petite restauration, que la procédure abusive engagée et poursuivie en appel par la SCI bailleresse lui a fait perdre trois occasions de vendre son fonds de commerce, ce qui lui cause un préjudice égal au prix espéré augmenté des frais et honoraires de mise en vente.

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MOTIFS DE L'ARRET
Sur la demande principale en résiliation judiciaire du bail
Les incidents de paiement invoqués par la bailleresse ont donné lieu à la délivrance de trois commandements de payer :
le premier en date du 19 juin 2001 signifié à la SARL " Omni-bar ", alors propriétaire du fonds de commerce donné en location-gérance à Madame A..., ne visant pas la clause résolutoire,
le deuxième en date du 3 juin 2002, visant la clause résolutoire, signifié à Madame A..., qui par acte notarié du 4 mars 2002 avait fait l'acquisition du fonds de commerce, pour recouvrement de la somme de 2 210,51 € représentant le loyer du deuxième trimestre de l'année 2002,
le troisième en date du 23 octobre 2002, visant la clause résolutoire, signifié à Madame A... pour recouvrement de la somme de 2 210,51 € représentant le loyer du 4ème trimestre de l'année 2002.
Saisi par la SCI AKKAYA, le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE, par une première ordonnance en date du 18 septembre 1992, a constaté que le loyer du deuxième trimestre 2002 était payé et que seul le dernier tiers du loyer du troisième trimestre demeurait impayé. Reconnaissant la bonne foi de la locataire, qui offrait le règlement immédiat du reliquat impayé, il a suspendu les effets de la clause résolutoire.
Par une seconde décision du 14 mars 2003, statuant sur le commandement du 23 octobre 2002, il a constaté qu'il ne subsistait aucun arriéré et que la SCI renonçait à sa demande initiale en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire.
Ne pouvant se prévaloir des incidents de paiement antérieurs au 4 mars 2002 qui ne sont pas le fait de Madame A..., alors simple locataire-gérante du fonds, la bailleresse ne peut sérieusement se fonder sur les deux seuls retards ponctuels de paiement de l'année 2002, rapidement régularisés, pour demander la résiliation judiciaire du bail.
Aucune preuve n'est, en effet, apportée d'une volonté délibérée de la locataire de se soustraire à l'exécution de ses obligations contractuelles.
Madame A..., dont la bonne foi a été judiciairement reconnue, justifie au contraire de ses nombreuses demandes insatisfaites de fractionnement mensuel du loyer, ce qui démontre l'existence de réelles difficultés de trésorerie, et établit qu'elle a été victime le 15 septembre 2002 d'une agression avec arme ayant eu un grave retentissement sur son état de santé, cette circonstance étant de nature à expliquer l'incident de paiement du mois d'octobre 2002.
Comme le fait observer à juste tire le tribunal, le loyer est au demeurant ponctuellement payé depuis la fin de l'année 2002, ce qui interdit à la SCI AKKAYA de faire état d'incidents de paiement répétés. A cet effet la Cour estime que les deux retards de paiement de 6 jours enregistrés au cours de l'année 2006 ne peuvent en aucun cas être qualifiés de manquement grave.
Surtout, en offrant à Madame A... le renouvellement du bail à compter du 1er août 2006, la bailleresse a implicitement mais nécessairement considéré que les fautes alléguées ne présentaient aucun caractère de gravité ; étant observé que son congé du 6 janvier 2006 ne contient aucune réserve relative à l'issue de la procédure en cours, dont l'existence n'est pas même mentionnée.
C'est en outre sans aucun fondement que la SCI AKKAYA reproche à sa locataire un non paiement de charges, la pose d'une enseigne, ainsi qu'un défaut d'exploitation.
Aucune clause du bail initial du 1er janvier 1983 et de son avenant du 8 octobre 1983 ne prévoit, en effet, que le preneur devra s'acquitter en sus du loyer d'une quote-part de charges communes, tandis qu'aucune demande en paiement n'est formée au titre de prétendues charges récupérables, dont aucun des trois commandements de payer ne fait état.
Quant à l'enseigne la locataire dispose d'une autorisation expresse donnée dans le bail lui-même, et il n'est pas démontré que l'enseigne, par sa nature ou son emplacement, contreviendrait aujourd'hui à cette autorisation.
Il n'est enfin nullement justifié du défaut d'exploitation allégué, même si Madame A... reconnaît, comme le note la commission de conciliation, que l'activité de petite restauration n'est plus exercée depuis octobre 2005 ; étant observé qu'à l'occasion de son congé du 6 janvier 2006 la bailleresse a reconnu l'existence du droit au renouvellement, lequel suppose une exploitation effective.
La décision déférée, qui a refusé de prononcer la résiliation du bail, mérite par conséquent confirmation.
Sur la demande reconventionnelle
Ainsi qu'elle l'a écrit le 24 novembre 2005 au conseil de la SCI AKKAYA, la société Lyonnaise de banque a renoncé à son projet d'acquisition du droit au bail pour des raisons internes étrangères à la procédure de résiliation en cours.
Par courrier du 6 décembre 2005 au conseil de Madame A... elle a d'ailleurs expliqué que sa décision était fondée sur des éléments défavorables relatifs à la sécurité propre du site.
La défection de la société Lyonnaise de banque, qui est sans lien avec la présente procédure, ne saurait par conséquent ouvrir droit à dommages-intérêts.
Il en est de même des projets ultérieurs de vente du fonds, dont rien ne permet d'affirmer qu'ils ont échoué en raison du maintien par la bailleresse de sa demande de résiliation judiciaire du bail. Il résulte, en effet, du courrier du conseil de Madame D... en date du 3 mars 2006 que la cession du fonds était subordonnée à la fixation judiciaire du loyer du bail renouvelé, tandis que le courrier du conseil de M. E..., autre candidat acquéreur, en date du 9 juin 2006 ne vise pas explicitement la menace de résiliation du bail.
En toute hypothèse, et surtout, fondée sur un manquement principal réel, mais insuffisant, l'action introduite par la SCI AKKAYA, après deux tentatives infructueuses en référé, n'apparaît pas inspirée par la mauvaise foi ou la malveillance, en sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive ; étant observé au demeurant qu'aucune preuve n'est apportée d'une perte de valeur du fonds, dont rien ne permet d'affirmer qu'il ne pourra plus être cédé au prix initial escompté.
La demande reconventionnelle en dommages-intérêts sera par conséquent rejetée, alors qu'au surplus il n'est pas justifié de frais de mise en vente exposés en pure perte.
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PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SCI AKKAYA de ses demandes en résiliation judiciaire du bail, expulsion et fixation d'une indemnité d'occupation,
-donne acte à Madame Germaine A... de l'abandon de sa demande en déspécialisation après la défection de la société Lyonnaise de banque,
Y AJOUTANT :
-déboute Madame Germaine A... de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts,
CONDAMNE la SCI AKKAYA à payer à Madame Germaine A... une nouvelle indemnité de 2 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, la condamnation prononcée de ce chef en première instance étant confirmée,
CONDAMNE la SCI AKKAYA aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SELARL d'avoués DAUPHIN-MIHAJLOVIC,
PRONONCÉ publiquement par Monsieur URAN, Président qui a signé avec Madame PELISSON, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 05/4623
Date de la décision : 18/01/2007
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Grenoble, 10 octobre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2007-01-18;05.4623 ?
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