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25/04/2002 | FRANCE | N°97/00495

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre commerciale, 25 avril 2002, 97/00495


RG N° 97/00495 N° Minute : Grosse délivrée le : S.C.P. CALAS S.C.P. GRIMAUD Me RAMILLON S.C.P. POUGNAND S.E.LA.R.L. DAUPHIN etamp; NEYRET AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE GRENOBLE CHAMBRE COMMERCIALE ARRÊT DU JEUDI 25 AVRIL 2002 Appel d'une décision (N° RG 95J00515 - troisième chambre) rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE en date du 23 août 1996 suivant déclaration d'appel du 12 Décembre 1996 et suivant assignation en intervention forcée du 17 janvier 2000 et après arrêt avant dire droit du 27 mai 1999 APPELANT : Monsieur Lucien X... Enseigne "LA FONTAINE" C.C

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RG N° 97/00495 N° Minute : Grosse délivrée le : S.C.P. CALAS S.C.P. GRIMAUD Me RAMILLON S.C.P. POUGNAND S.E.LA.R.L. DAUPHIN etamp; NEYRET AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE GRENOBLE CHAMBRE COMMERCIALE ARRÊT DU JEUDI 25 AVRIL 2002 Appel d'une décision (N° RG 95J00515 - troisième chambre) rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE en date du 23 août 1996 suivant déclaration d'appel du 12 Décembre 1996 et suivant assignation en intervention forcée du 17 janvier 2000 et après arrêt avant dire droit du 27 mai 1999 APPELANT : Monsieur Lucien X... Enseigne "LA FONTAINE" C.C. LE Y... 38640 CLAIX représenté par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour INTIMES : Maître Christophe ROUMEZI ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Monsieur Serge Z... 57 Bld des Alpes 38240 MEYLAN et APPELANT INCIDENT suivant conclusions en date du 27/06/1997 et ASSIGNANT EN INTERVENTION FORCEE suivant assignation en date du 17 janvier 2000 représenté par la SCP HERVE JEAN POUGNAND, avoués à la Cour assisté de Me COUTTON, avocat au barreau de GRENOBLE S.A. ICIMMO IMMOBILIER prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 3 rue de Narvick 38000 GRENOBLE ASSIGNÉE EN INTERVENTION FORCÉE suivant assignation en date du 17 janvier 2000 représentée par la SCP CALAS, avoués à la Cour assistée de Me DALMAS, avocat au barreau de GRENOBLE COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Allain URAN, Président de chambre, Madame Christiane BEROUJON, Conseiller, Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller, Assistés lors des débats de Madame Eliane A..., Greffier. DÉBATS : A l'audience publique du 14 Mars 2002, Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries, Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour,

Monsieur Serge Z..., propriétaire d'un fonds de commerce de restauration-pizzeria dans le centre commercial Le Y... à CLAIX a obtenu le 27 novembre 1987 un prêt de 200.000 F auprès de la Caisse d'Epargne, destiné à l'aménagement et à l'équipement des locaux, garanti par une inscription de nantissement sur le fonds.

Le 23 août 1993 la Caisse d'Epargne a fait assigner Monsieur Z... en paiement de la somme de 178.866,22 F restant due sur le prêt.

Par acte sous seing privé du 11 octobre 1993 Monsieur Z... a vendu son fonds de commerce à Monsieur Lucien X... moyennant le prix de 150.000 F payable pour partie en douze mensualités de 10.000 F.

Le 10 février 1995 Monsieur Serge Z... a été déclaré en liquidation judiciaire et Maître ROUMEZI a été désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Le 15 février 1995 la Caisse d'Epargne des Alpes a fait assigner Monsieur Lucien X... aux fins de faire constater la reprise frauduleuse du fonds de commerce et d'entendre condamner ce dernier à lui payer la somme de 150.000 F correspondant au prix de cession.

Maître ROUMEZI, ès qualités, est intervenu volontairement à l'instance pour demander l'annulation de la vente du fonds sur le fondement de l'article 1167 du Code civil, le retour du bien dans le patrimoine de Monsieur Z..., la condamnation de Monsieur X... à lui payer la somme de 160.000 F à titre d'indemnité d'occupation et d'exploitation du fonds et subsidiairement la condamnation de

Monsieur X... à lui payer la somme de 150.000 F outre intérêts au titre du prix de vente du fonds.

Par jugement du 23 août 1996 le Tribunal de Commerce de Grenoble, après avoir constaté que la Caisse d'Epargne avait retiré sa demande, a condamné Monsieur Lucien X... à payer au liquidateur judiciaire, avec exécution provisoire, la somme de 103.746 F au titre du solde du prix de vente du fonds après déduction du droit d'entrée de 46.254 F payé par l'acquéreur.

Monsieur Lucien X... a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 12 décembre 1996.

Par arrêt avant dire droit du 27 mai 1999 la Cour de céans a invité Maître ROUMEZI à mettre en cause la société ICIMMO, qui serait l'actuel propriétaire des droits sur le fonds de commerce litigieux. Cette mise en cause a été effectuée par acte du 17 janvier 2000, et les deux instances ont été jointes par ordonnance du 02 mars 2000.

Par dernières conclusions signifiées et déposées le 13 mars 2001 Monsieur Lucien X... s'oppose par voie de réformation du jugement à l'ensemble des demandes formées par Maître ROUMEZI, ès qualités, dont il prétend obtenir une indemnité de 5.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile au motif essentiel qu'ignorant tout des obligations contractées par Monsieur Z... envers la Caisse d'Epargne il n'a en aucune façon participé à la prétendue fraude paulienne.

Par conclusions du 02 juillet 1997 Maître ROUMEZI, ès qualités, qui se porte appelant incident, sollicite principalement l'annulation de la vente et la réintégration du fonds dans l'actif de la liquidation judiciaire en application de l'article 1167 du Code civil, ainsi que la condamnation de Monsieur X... au paiement d'une indemnité

d'occupation de 160.000 F.

Subsidiairement il réclame la condamnation de l'acquéreur au paiement de la somme de 150.000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 1995 capitalisés annuellement, au titre du prix de vente du fonds.

En tout état de cause il demande la condamnation de Monsieur X... à lui payer une somme de 30.000 F pour appel abusif, outre une indemnité supplémentaire de 15.000 F pour frais irrépétibles.

Il soutient en substance :

- que la complicité de fraude résulte de la circonstance que profitant de l'absence de publicité légale Monsieur X... a pris possession du fonds, en vertu de l'acte de cession parfait entre les parties, sans craindre un quelconque recours de la part des créanciers inscrits,

- que l'acquéreur doit une indemnisation au titre de son occupation fructueuse du fonds pendant plusieurs années,

- qu'en toute hypothèse, au cas où la fraude ne serait pas retenue, la cession du fonds oblige l'acquéreur au paiement du prix qui ne peut en aucun cas être diminué des sommes versées au propriétaire des murs.

Par conclusions signifiées et déposées le 11 mai 2000 la SA ICIMMO IMMOBILIER, qui déclare ne plus être titulaire du droit au bail après substitution intervenue au profit du Crédit Agricole Rhône-Alpes, aujourd'hui au bénéfice d'un bail professionnel conclu avec la SCI "Le Petit Rochefort", fait observer qu'elle n'est en rien concernée par l'éventuelle fraude paulienne alors que Monsieur X... lui a cédé le nouveau bail que lui avait consenti la SCI propriétaire des murs.

Elle sollicite la condamnation de la partie succombante à lui payer une indemnité de 8.000 F pour frais irrépétibles.

MOTIFS DE L'ARRÊT :

La cession du fonds de commerce par acte du 11 octobre 1993, en vertu duquel Monsieur X... a pris possession des lieux avant de conclure avec la SCI "Le Petit Rochefort" un nouveau bail commercial à effet du 1er janvier 1995, a été consentie et acceptée moyennant le prix de 150.000 F s'appliquant aux éléments incorporels pour 100.000 F et aux éléments corporels pour 50.000 F.

Maître ROUMEZI, ès qualités, ne se propose pas d'établir que ce prix, équivalent aux bénéfices commerciaux des deux derniers exercices comptables, aurait été manifestement inférieur à la valeur réelle du fonds.

Sa requête du 09 mai 1995 au juge commissaire, tendant à la réalisation de l'actif dépendant de la liquidation judiciaire, fait état de la présence d'un matériel d'exploitation d'une valeur estimée de 4.780 F, tandis que la valeur du droit au bail peut raisonnablement être fixée à la somme de 46.254 F que Monsieur X... a dû verser à la SCI bailleresse à titre d'indemnité de pas de porte.

Il n'est dès lors en aucune façon démontré que le prix convenu de 150.000 F contribuait à appauvrir le patrimoine du vendeur.

Quant à la complicité de fraude, qui est exigée du tiers contractant à titre onéreux par l'article 1167 du Code civil, elle n'est pas plus caractérisée alors que le vendeur déclare faussement dans l'acte de cession que le fonds n'est grevé d'aucune inscription de privilège ou de nantissement et qu'aucun élément ne laisse supposer que, nonobstant cette mention, l'acquéreur avait connaissance de l'inscription prise par la Caisse d'Epargne.

Il ne peut par ailleurs être sérieusement soutenu que, profitant de l'absence de publicité légale, Monsieur X... aurait tenté d'échapper au recours des créanciers inscrits dès lors qu'en application de l'article 22 de la loi du 17 mars 1909, devenu l'article L 143-12 du Code du commerce, le privilège du créancier gagiste suit le fonds en quelques mains qu'il passe.

Il n'est enfin nullement établi que la situation de Monsieur Z... était gravement obérée au jour de la vente, consentie plus de dix-huit mois avant l'ouverture de la procédure collective, ni que ce dernier aurait tenté de distraire le bien du gage de ses créanciers avec la participation d'un tiers complice.

Les conditions de l'action paulienne n'étant pas réunies, Maître ROUMEZI, ès qualités, sera par conséquent débouté de sa demande en révocation de la vente du fonds de commerce litigieux et en paiement d'une indemnité d'occupation.

En revanche, si Monsieur X... n'a pas à faire la preuve du paiement effectif de la fraction du prix payée au comptant (30.000 F) puisque l'acte en fait expressément état, il ne justifie nullement du paiement du solde du prix stipulé payable en douze mensualités de 10.000 F chacune à compter du 1er novembre 1993.

Au contraire par courrier du 05 juillet 1995, adressé au mandataire judiciaire, le Conseil de Monsieur Z..., chargé de la rédaction de l'acte de vente, a indiqué que malgré de nombreuses relances et

promesses de règlement Monsieur X... ne s'était jamais acquitté des mensualités de paiement.

La demande subsidiaire en paiement du prix sera par conséquent accueillie à concurrence de la somme de 120.000 F, dont le Tribunal a déduit à tort les 46.254 F, payés par Monsieur X... à la SCI bailleresse lors de la conclusion du nouveau bail commercial, qui ne peuvent être qualifiés d'acompte sur le prix de vente du fonds.

La société ICIMMO IMMOBILIER, cessionnaire du droit au bail des locaux commerciaux dans lesquels le fonds litigieux était exploité, mais n'ayant à aucun moment poursuivi cette exploitation, sera mise hors de cause.

Bien qu'infondé le présent appel n'apparaît pas abusif.

En revanche tant Maître ROUMEZI, ès qualités, que la SA ICIMMO IMMOBILIER, qui a payé 180.000 F de droit au bail à Monsieur X..., lequel n'a jamais acquitté le solde du prix de vente du fonds, ont exposé des frais de procédure qu'il serait inéquitable de laisser intégralement à leur charge.

PAR CES MOTIFS LA COUR : Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

REFORME partiellement le jugement déféré,

STATUANT à nouveau,

DÉBOUTE Maître ROUMEZI, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de Monsieur Serge Z..., de sa demande en révocation de la vente de fonds de commerce du 11 octobre 1993 et en réintégration dudit fonds dans l'actif de la liquidation judiciaire, LE DÉBOUTE également de sa demande en paiement de la somme de 160.000 F à titre de dommages-intérêts,

CONDAMNE Monsieur Lucien X... à payer à Maître ROUMEZI, ès qualités, la somme de 18.293,88 Euros (120.000 F) avec intérêts au taux légal à compter du 07 septembre 1995, date de la demande en justice par voie d'intervention volontaire devant le Tribunal,

DIT que les intérêts seront capitalisés par année entière à compter du 02 juillet 1997 dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,

Y AJOUTANT,

MET hors de cause la SA ICIMMO IMMOBILIER,

DIT n'y avoir lieu à dommages-intérêts pour appel abusif,

CONDAMNE Monsieur Lucien X... à payer à Maître ROUMEZI, ès

qualités, une indemnité supplémentaire de 760 Euros en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile et une indemnité de même nature et de même montant à la SA ICIMMO IMMOBILIER,

CONDAMNE Monsieur Lucien X... aux entiers dépens de première instance et d'appel. PRONONCE publiquement par Monsieur BERNAUD, Conseiller, et signé par Monsieur URAN, Président, et Madame A..., Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 97/00495
Date de la décision : 25/04/2002
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ACTION PAULIENNE - Conditions - Fraude - Complicité d'un tiers - Preuve

La complicité de fraude, qui est exigée du tiers contractant à titre onéreux par l'article 1167 du Code civil n'est pas caractérisée lorsque le vendeur déclare faussement dans l'acte de cession que le fonds n'est grevé d'aucune inscription de privilège ou de nantissement et qu'aucun élément ne laisse supposer que, nonobstant cette mention, l'acquéreur avait connaissance de l'inscription prise par la Caisse d'épargne


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2002-04-25;97.00495 ?
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