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11/09/2001 | FRANCE | N°99/2620

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 11 septembre 2001, 99/2620


Par jugement du 1er février 1996 le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance d'Annecy a prononcé sur la demande principale de la femme et sur la demande reconventionnelle du mari le divorce de Patrick Y... et de Cécile Z...aux torts partagés. Il a débouté Patrick Y... de sa demande de prestation compensatoire parce que sa situation précaire venait de son incurie dans la gestion de commerces pour laquelle sa femme lui avait apporté un soutien financier et qu'il était diplômé et encore jeune. Sur appel de Patrick Y... la Cour de Chambéry a adopté le 28 avril 1997

la motivation du Tribunal et ajouté qu'une prestation compen...

Par jugement du 1er février 1996 le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance d'Annecy a prononcé sur la demande principale de la femme et sur la demande reconventionnelle du mari le divorce de Patrick Y... et de Cécile Z...aux torts partagés. Il a débouté Patrick Y... de sa demande de prestation compensatoire parce que sa situation précaire venait de son incurie dans la gestion de commerces pour laquelle sa femme lui avait apporté un soutien financier et qu'il était diplômé et encore jeune. Sur appel de Patrick Y... la Cour de Chambéry a adopté le 28 avril 1997 la motivation du Tribunal et ajouté qu'une prestation compensatoire à verser par l'épouse au mari ne peut que se concevoir que de manière tout à fait exceptionnelle. Saisie par Patrick Y... la Cour de Cassation par arrêt du 1er avril 1999 a rejeté le moyen critiquant le prononcé du divorce aux torts partagés mais a dit que s'appuyant sur des motifs pour partie d'ordre général et pour partie inopérant la Cour de Chambéry n'avait pas donné de base légale à sa décision. Désignée comme Cour de renvoi la Cour de céans a été saisie par P. Y... le 18 juin 1999. Il insiste sur le patrimoine de son ex-épouse qui a pu déclarer être constitué d'actifs bruts variant de 27. 000. 000, 00 F pour l'année 1996 à 32. 000. 000, 00 F pour l'année 1999 et sur le fait que durant la vie commune leur ménage avait un train de dépenses mensuelles de 100. 000, 00 F. Invoquant aussi son mauvais état de santé il demande une prestation compensatoire d'un montant en capital de 4. 000. 000, 00 F et une indemnité de 10. 000, 00 F pour ses frais irrépétibles. Cécile Z...conteste que son mari se soit occupé très activement des trois enfants, assure que la maison en communauté vaut entre 3 et 3, 5 millions de francs et qu'il a gaspillé des fonds à l'occasion de son activité déficitaire de fleuriste et elle prétend que la situation de P. Y... ne répond pas aux conditions légales d'attribution d'une prestation compensatoire. Elle sollicite outre le débouté de P. Y... sa condamnation à lui payer la somme de 10. 000, 00 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
SUR QUOI LA COUR ATTENDU que demandeur de prestation compensatoire Patrick Y... doit démontrer non seulement que le divorce prononcé en 1996 crée à son détriment une disparité dans les conditions de vie de son épouse et de lui-même mais encore justifier de ses besoins ;
ATTENDU qu'à cette fin il met en évidence la richesse de Cécile Z...formée de valeurs mobilières de plus de 27. 000. 000, 00 F selon déclaration pour l'impôt de solidarité sur la fortune de 1996 ;
ATTENDU que l'avis fiscal d'imposition des revenus de Cécile Z...dans l'année 1994- à une époque proche de celle du divorce-montre qu'elle avait déclaré les sommes de 72. 639, 00 F au titre de revenus non commerciaux et de 622. 794, 00 F au titre de revenus de capitaux mobiliers ;
ATTENDU que Patrick Y... affirme que du temps de la vie commune le budget mensuel du ménage était de 100. 000, 00 F ;
ATTENDU qu'un tel train de vie au moment de la séparation des époux est contredit par l'ordonnance de non conciliation du 8 juillet 1992 dont il n'est pas prétendu qu'elle ait donné lieu à critique, qui fait mention de ce que P. Y... percevait de son commerce-déficitaire-de fleuriste la somme mensuelle de 5 à 6. 000, 00 F tandis que C. Z...tirait par mois 2. 000, 00 F de son atelier de peinture, 6. 000, 00 F de son enseignement à l'école maternelle, 20. 000, 00 F de ses biens propres, dernière somme dont la moitié était consacrée au remboursement d'un emprunt immobilier.
ATTENDU que les dépenses mensuelles alléguées par P. Y... sont incompatibles avec les pièces versées au débat ;
ATTENDU que les remarques non démenties adressées par Joseph Z...à sa fille Cécile dans une correspondance du 9 septembre 1991 font apparaître que la fortune de celle-ci, quoique affectée d'une réserve d'usufruit au profit de ses parents donateurs, fut pour une part importante absorbée dans la gestion insouciante de fonds de commerce de P. Y... au temps de la vie commune ;
ATTENDU que de l'attestation de P. A..., qui est la seule à laquelle P. Y... se réfère explicitement dans ses conclusions, on ne saurait déduire qu'il a dû consacrer à l'éducation des trois enfants communs un temps anormalement long afin de combler les absences de leur mère, au point que cela réponde à l'une des prévisions de l'article 272 du code civil ; QU'en effet P. A... précise dans son témoignage daté du 28 juin 1992 qu'il ne connaissait la famille Y... que depuis le mois de novembre 1991, soit sept mois ;
ATTENDU par ailleurs que l'attestation des consorts X... au contenu proche de celle de P. A... n'est pas datée, relate l'absence de l'épouse à un seul repas et énonce de façon générale que P. Y... s'occupait des trois enfants même lorsque leur mère était là ; QUE cela est insuffisant pour retenir que ces soins étaient rendus nécessaires par le désintérêt habituel de la mère ;
ATTENDU que du strict point de vue des capacités professionnelles les possibilités de gain de Cécile Z...et de Patrick Y... sont équivalentes dès lors que la première peut enseigner la peinture et que le second est titulaire de diplômes de vendeur et d'apprentissage horticole ;
ATTENDU que le certificat médical du 30 janvier 1997 aux termes duquel Patrick Y... souffre d'un syndrome dépressif anxieux depuis sa séparation d'avec sa femme et celui délivré à titre gratuit à une date illisible prescrivant de l'aspégic et du doliprane ne sont pas de nature à établir que l'état de santé de l'appelant est déficient au point de lui interdire toute activité rémunératrice alors qu'il est à peine quadragénaire ;
ATTENDU que si P. Y... a été marié pendant quinze ans la vie commune n'a duré que onze ans étant à observer que l'ordonnance de non conciliation de 1992 n'avait prévu de pension alimentaire qu'au bénéfice des enfants ;
ATTENDU qu'une lettre de l'avocat de P. Y... au notaire B... en date du 19 octobre 2000 révèle que la liquidation des intérêts patrimoniaux des ex-époux est en cours ; QUE P. Y... qui bénéficie d'un régime de participation aux acquêts ne donne aucun élément d'appréciation de la créance que selon la lettre il espère en raison de la plus-value des titres de Cécile Z...entre la date de leur attribution et le jour de la dissolution du mariage ;
ATTENDU en outre que dans ses conclusions dites récapitulatives et en réponse signifiées le 9 mai 2001 P. Y... n'a pas contesté pouvoir tirer selon ce qu'a fait écrire C. Z...des avantages pécuniaires de la vente de la villa de Veyrier du Lac estimée par les deux parties ensemble près de 4. 000. 000, 00 F ;
ATTENDU que P. Y... n'était à la date du divorce ni âgé puisqu'il avait 37 ans pour être né le 29 octobre 1958, ni invalide ; QU'il ne démontre pas avoir recherché même au temps de l'amélioration sensible du marché du travail un emploi rémunérateur qui lui permettrait la constitution de droits en vue de sa retraite encore lointaine ;
ATTENDU en définitive que s'il est incontestable que par sa fortune personnelle C. Z...bénéficiera de conditions de vie meilleures que celles de P. Y... il est à retenir que celui-ci tout en se référant expressément aux recommandations de l'article 272 du Code Civil n'a pas mis la Cour en mesure d'estimer ses besoins et leur légitimité par rapport aux ressources de C. Z...; QUE sa demande de prestation compensatoire, dont il ne déduit au demeurant le montant d'aucun calcul méthodique, ne peut qu'être rejetée ;
ATTENDU que l'équité ne justifie pas l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS Publiquement et contradictoirement sur renvoi de cassation après débat hors la présence du public après en avoir délibéré conformément à la loi, Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 1er avril 1999 cassant et annulant en ses dispositions relatives à la prestation compensatoire l'arrêt rendu le 28 avril 1997 par la Cour de Chambéry et renvoyant quant à ce la cause et les parties devant la Cour de céans. Statuant dans les limites de sa saisine sur l'appel formé par Patrick Y... du jugement du 1er février 1996 rendu par le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance d'Annecy. Confirme le dit jugement en ce qu'il a débouté Patrick Y... de sa demande de prestation compensatoire. Rejette toute autre demande. Condamne P. Y... aux dépens de première instance et d'appel et accorde à Maître RAMILLON le bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Prononcé par Monsieur le Président DOUYSSET et signé par Monsieur le Premier Président CATTEAU et par le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Numéro d'arrêt : 99/2620
Date de la décision : 11/09/2001

Analyses

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Règles spécifiques au divorce - Prestation compensatoire - Attribution - Conditions - Disparité dans les conditions de vie respectives des époux - Preuve

Le demandeur d'une prestation compensatiore doit démontrer non seulement que le divorce crée à son détriment une disparité dans les conditions de vie de son épouse et de lui-même, mais encore justifier de ses besoins. Ainsi, même si la fortune personnelle de l'épouse lui assure incontestablement des conditions de vie meilleures que celles de son époux,iil appartient à ce dernier de mettre la cour en mesure d'estimer ses besoins et leur légitimité par rapport aux res- sources de l'épouse, faute de quoi la cour ne pourra que rejetter la demande de prestation compensatoire


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2001-09-11;99.2620 ?
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