COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 19 JUILLET 2024
N° RG 22/00332 - N° Portalis DBVY-V-B7G-G5SM
[B] [C]
C/ la SOCIETE GENERALE venant aux droits de la S.A. BANQUE LAYDERNIER Prise en la personne de son représentant légal en exercice
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BONNEVILLE en date du 10 Janvier 2022, RG F 20/00073
Appelante
Mme [B] [C]
née le 13 Décembre 1986 à , demeurant [Adresse 2]
Représentée par Me Nathalie MASCHIO, avocat au barreau de BONNEVILLE
Représentée par Me Clarisse DORMEVAL, avocat au barreau de CHAMBERY
Intimée
la SOCIETE GENERALE venant aux droits de la S.A. BANQUE LAYDERNIER Prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 1]
Représentée par Me Virginie BARATON, avocat au barreau de CHAMBERY
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, le 14 septembre 2023 par Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller faisant fonction de Président, à ces fins désigné par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Madame Isabelle CHUILON, conseillère, assisté de Monsieur Bertrand ASSAILLY, greffier, à l'appel des causes, dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré.
Et lors du délibéré par :
Monsieur Cyril GUYAT, Président,
Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,
Madame Françoise SIMOND, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
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Exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties
Mme [B] [C] a été engagée, à compter du 22 juillet 2015, par la SA Banque Laydernier, en qualité de 'conseiller de clientèle professionnels', statut cadre, niveau conventionnel H, par contrat de travail à durée indéterminée prévoyant une rémunération annuelle fixée à 39.000 €, versée en 13 mensualités, outre une prime de performance, pour un temps de travail de 210 jours/an (forfait annuel en jours).
La convention collective nationale de la Banque est applicable.
Mme [B] [C] été affectée, initialement, au sein de l'agence de [Localité 3], son contrat de travail prévoyant une clause de mobilité.
Par la suite, la salariée a été :
-en congé pathologique du 5 au 10 juillet 2018,
-en congé maternité du 11 juillet 2018 au 3 novembre 2018,
-en congé supplémentaire de 90 jours calendaires, rémunéré à 50 %, du 4 novembre 2018 au 1er février 2019,
-en congé allaitement de 45 jours calendaires, rémunéré à 100 %, du 2 février 2019 au 18 mars 2019,
- en congés payés, du 19 mars 2019 au 2 avril 2019.
Le 22 janvier 2019, Mme [C] était reçue dans le cadre d'un entretien préparatoire à la reprise d'activité, au cours duquel la SA Banque Laydernier l'informait que le poste de conseiller de clientèle professionnels qu'elle occupait sur l'agence de [Localité 3] antérieurement à son congé maternité avait été pourvu durant son absence et qu'il convenait de la repositionner sur un poste similaire.
Par courrier recommandé du 24 janvier 2019, la SA Banque Laydernier confirmait à Mme [B] [C] sa nomination au poste de conseiller de clientèle professionnels au sein de l'agence de [Localité 9] à effet du 3 avril 2019 et l'augmentation de sa rémunération annuelle à hauteur de 884 €.
Par lettre recommandée du 27 mars 2019, reçue le 1er avril 2019, Mme [C] faisait part à son employeur qu'elle refusait le poste de conseiller clientèle professionnels à [Localité 9] et qu'elle se présenterait le 3 avril à l'agence de [Localité 3] dans le cadre de la reprise de ses fonctions.
Le 3 avril 2019, Mme [B] [C] se présentait à l'agence de [Localité 3]. Elle était reçue par le DRH et le directeur de groupe auxquels elle confirmait son refus d'être affectée sur le poste de conseiller clientèle professionnels à l'agence de [Localité 9].
Par courrier du 3 avril 2019, Mme [B] [C] a été convoquée à un entretien préalable fixé le 16 avril 2019 en vue d'une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement pour faute grave et a été mise à pied à titre conservatoire.
Lors de l'entretien du 16 avril 2019, qui s'est tenu en présence d'un délégué syndical, la salariée a confirmé son refus d'occuper le poste de conseiller clientèle professionnels sur l'agence de [Localité 9].
Par LRAR du 24 avril 2019, Mme [B] [C] a été licenciée pour faute et dispensée d'exécuter son préavis de trois mois.
Par courrier du 27 novembre 2019, Mme [C], par le biais de son conseil, contestait son licenciement, considéré comme discriminatoire et nul, et sollicitait auprès de la Banque Laydernier sa réintégration à son poste, ainsi qu'un rappel de salaire et une indemnisation complémentaire.
Par lettre recommandée du 10 décembre 2019, la Banque Laydernier lui répondait qu'elle n'entendait pas revenir sur sa décision de licenciement.
Par requête du 19 juin 2020, Mme [B] [C] a saisi le Conseil de prud'hommes de Bonneville aux fins de contestation de son licenciement.
Par jugement en date du 10 janvier 2022, le Conseil de prud'hommes de Bonneville a:
-Dit et jugé que le licenciement de Mme [B] [C] repose sur une cause réelle et sérieuse et n'est entaché d'aucune cause de nullité ;
-Dit et jugé que Mme [B] [C] n'a fait l'objet d'aucun traitement discriminatoire ;
-Débouté Mme [B] [C] de l'ensemble de ses demandes;
-Condamné Mme [B] [C] aux dépens de l'instance ;
-Débouté les deux parties de leurs demandes d'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [B] [C] a interjeté appel à l'encontre de cette décision par déclaration enregistrée le 25 février 2022 au réseau privé virtuel des avocats.
Suite à des fusions-absorptions intervenues le 1er janvier 2023, la Société Générale vient désormais aux droits et obligations de la Banque Laydernier.
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Par dernières conclusions notifiées le 31 janvier 2023, auxquelles la Cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, Mme [B] [C] demande à la Cour de:
-Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bonneville le 10 janvier 2022 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
-Juger que le licenciement de Mme [B] [C] notifié le 24 avril 2019 est nul ;
-Ordonner en conséquence la réintégration sans délai de Mme [B] [C] à son poste de conseiller de clientèle de professionnels au sein de l'agence de la Banque Laydernier de [Localité 3]-[Localité 5] dès la décision à intervenir ;
-Condamner la SA Banque Laydernier à payer à Mme [B] [C] la somme mensuelle de 3.451 € à titre de rappel de salaire à compter de la date de son licenciement le 24 avril 2019 et ce jusqu'à sa réintégration effective ;
- Si sa réintégration s'avérait impossible, condamner la SA Banque Laydernier à payer à Mme [B] [C] la somme totale de 41.412 € à titre de dommages et intérêts en réparation tant de son préjudice matériel que de son préjudice moral;
Subsidiairement,
-Juger le licenciement de Mme [B] [C] notifié le 24 avril 2019 sans cause réelle et sérieuse ;
-Condamner en réparation la SA Banque Laydernier à payer à Mme [B] [C] la somme totale de 41.412 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à la perte de son travail et du préjudice distinct subi ;
-Juger qu'en tout état de cause ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la demande de Mme [B] [C] le 19 juin 2020 ;
-Débouter la SA Banque Laydernier de l'intégralité de ses demandes;
-Condamner la SA Banque Laydernier à payer à Mme [B] [C] la somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Mme [B] [C] soutient en substance que :
La Banque Laydernier a délibérément porté atteinte aux dispositions de l'article L.1225-25 du code du travail, en ne la réintégrant pas, à son retour de congé maternité, à son poste de conseiller de clientèle professionnels au sein de l'agence de [Localité 3], qu'elle occupait depuis plus de trois ans, alors que celui-ci était disponible, et en décidant de la muter à [Localité 9] sur un poste non similaire.
Le fait pour une salariée de ne pas retrouver son emploi lors du retour de congé maternité s'analyse en une présomption de discrimination en raison de sa situation de grossesse ou de famille, fait prohibé par les dispositions de l'article L.1132-1 du code du travail.
Elle n'a pas à apporter la preuve de la discrimination, c'est à l'employeur de démontrer que la mesure en cause était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
La réintégration doit se faire en priorité dans le précédent emploi, peu importe la stipulation d'une clause de mobilité dans le contrat de travail, laquelle ne peut prévaloir sur l'obligation de l'employeur de réintégrer la salariée à son poste, de sorte qu'elle aurait dû retrouver ses fonctions sur l'agence de [Localité 3].
Ce n'est que dans l'hypothèse où l'ancien poste a disparu, c'est-à-dire où les tâches entièrement confiées à la salariée en congé maternité ont été supprimées, que l'employeur peut lui imposer sa réintégration dans un emploi similaire et envisager une mobilité. Le fait que le poste soit occupé par un autre salarié ne correspond pas à une indisponibilité au sens du code du travail. Il ne faut pas confondre poste non vacant et poste indisponible. L'indisponibilité correspond à la situation où le poste a été totalement supprimé dans l'entreprise. Or, son poste était toujours disponible puisqu'il n'avait pas été supprimé, mais attribué à une autre salariée.
L'obligation de fournir un emploi similaire implique que l'employeur n'impose pas une modification du contrat de travail. L'emploi similaire ne doit pas s'apparenter à un changement de lieu d'exercice du travail. Cela signifie que l'employeur ne peut pas imposer une mutation en faisant jouer l'éventuelle clause de mobilité prévue au contrat de travail.
L'employeur avait connaissance, dès son départ en congé maternité, qu'elle souhaitait reprendre son poste, habitant [Localité 3], n'ayant pas de moyen de locomotion, et étant parvenue à obtenir une place en crèche pour son enfant correspondant à ses jours et horaires de travail au sein de l'agence de [Localité 3]. À aucun moment son employeur, qui a fait montre, incontestablement, d'un manque de loyauté à son égard, ne lui a laissé entendre le contraire. Elle n'a jamais fait l'objet de l'entretien préalable au congé maternité prévu par l'accord conclu avec les représentations syndicales au titre de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Travaillant depuis plus de trois ans au sein de l'agence de [Localité 3], l'employeur connaissait sa situation et les difficultés qu'engendrait pour elle une modification de son lieu de travail.
Pour autant, la Banque Laydernier va attendre le 22 janvier 2019 pour l'informer de son remplacement et lui notifier une mutation forcée, la mettant, ainsi, devant le fait accompli, sans qu'elle ne soit entendue dans ses difficultés, alors qu'elle était dans une situation de particulière vulnérabilité à la suite de la naissance de son enfant.
L'employeur a procédé à son remplacement définitif au bout, seulement, de son 2ème mois de congé maternité. Il ne justifie pas avoir tout mis en 'uvre pour qu'elle puisse retrouver son ancien poste et, notamment, avoir été dans l'impossibilité de recourir à un remplacement temporaire, ni que sa décision de mutation ait été prise dans l'intérêt de l'entreprise. De plus, il ne démontre pas avoir été dans l'incapacité de transférer, sur l'agence de [Localité 9], la collaboratrice nouvellement embauchée pour assurer son remplacement sur l'agence de [Localité 3] pendant son congé maternité, sachant qu'il pouvait, tout-à-fait, faire application, à son égard, de la clause de mobilité figurant à son contrat de travail.
Elle avait une parfaite connaissance des clients dans son portefeuille, ainsi que du marché des professionnels dans le secteur de [Localité 3], au regard de son ancienneté et de ses qualités reconnues dans le monde bancaire. Elle aurait très bien pu reprendre son poste sans que les clients n'y voient un inconvénient et sans que l'intérêt de l'entreprise ne soit altéré. Sa réintégration à son ancien poste n'aurait été aucunement préjudiciable à l'entreprise.
Le poste situé à [Localité 9], soit à plus de 30 km de son domicile, ne portait pas sur un emploi similaire et entraînait une modification substantielle de son contrat de travail, tant en termes de lieu de travail, de jours de travail, que de fonctions. Elle l'a immédiatement refusé, en ce qu'il était assimilable à une rétrogradation et compte tenu des répercussions importantes engendrées sur l'organisation de sa vie personnelle et familiale, sans compter le manque à gagner du fait de l'existence de frais supplémentaires.
Dans le secteur de la banque, les conseillers affectés à la seule clientèle professionnelle sont appréciés à un niveau supérieur que ceux travaillant auprès de la clientèle composée de particuliers. Le poste de conseiller clientèle professionnels sur [Localité 3] était plus prestigieux du fait d'une clientèle 'haut de gamme' et 'coeur de cible'.
De plus, le poste de conseiller de clientèle professionnels à [Localité 9] a été créé par la Banque Laydernier 'sur le papier', mais n'a jamais existé, dans les faits, et n'existe toujours pas à ce jour au sein de cette agence. En réalité, si elle avait accepté cette mutation, elle aurait travaillé davantage pour les particuliers que pour les professionnels, ainsi que Mme [P], dont elle fournit le témoignage, en a fait la triste expérience. Contrairement à ce que soutient la Banque Laydernier, la composition des portefeuilles clients entre les deux agences n'était pas similaire, ainsi qu'il ressort du tableau comparatif produit. Au surplus, le départ de deux collaborateurs en une semaine d'intervalle laisse supposer la mauvaise ambiance qui régnait au sein de l'agence de [Localité 9].
Ainsi, sa mutation sur l'agence de [Localité 9] ne correspondait pas à un emploi similaire de niveau équivalent, mais à une rétrogradation, quand bien même sa rémunération aurait été maintenue. L'augmentation de 884 € dont l'employeur fait mention ne correspond qu'à la stricte application d'un accord conventionnel et n'est pas liée à son nouveau poste.
Dans ces conditions, elle était parfaitement fondée à refuser de reprendre un poste de travail différent de celui qu'elle occupait avant son congé maternité et l'employeur ne peut pas la sanctionner pour ce motif.
Le licenciement étant la conséquence de son refus, légitime, d'accepter la modification de ses fonctions, laquelle a été imposée de manière discriminatoire, celui-ci est, dès lors, nul, ou à titre subsidiaire, sans cause réelle et sérieuse.
En cas de licenciement nul, tout salarié a droit à être réintégré dans l'entreprise. Le fait d'avoir trouvé un nouvel emploi ne constitue pas une impossibilité matérielle et ne fait pas obstacle à sa réintégration. Elle a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des autres revenus dont elle a pu bénéficier pendant cette période.
La Banque Laydernier a refusé sa réintégration le 10 décembre 2019, alors que le 7 janvier 2020 elle postait une annonce pour recruter un conseiller clientèle professionnels pour son agence de [Localité 3]. En refusant, à ce moment là, de la réintégrer à son poste alors qu'il était disponible et qu'aucun reproche ne lui avait été formulé au cours des 3 années durant lesquelles elle l'avait occupé, la société a caractérisé son attitude discriminatoire.
Elle a subi des préjudices liés à la perte abusive de son travail mais également un préjudice moral distinct du fait que le licenciement est intervenu après une mise à pied à titre conservatoire délivrée de manière particulièrement brutale et vexatoire.
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Par conclusions récapitulatives d'intimée notifiées le 25 février 2023, auxquelles la Cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, la SA Société Générale venant aux droits et obligations de la Banque Laydernier, demande à la Cour de :
-Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bonneville en date du 10 janvier 2022 en toutes ses dispositions ;
-Condamner Mme [B] [C] à payer à la Societé Générale venant aux droits de la Banque Laydernier la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
La Société Générale venant aux droits de la Banque Laydernier fait valoir que :
La salariée n'a fait l'objet d'aucun traitement discriminatoire.
Le licenciement n'a pas été notifié pendant une période légale de protection, ce que ne soutient d'ailleurs plus Mme [C] en cause d'appel.
Mme [C] a été licenciée en raison de son refus d'accepter sa mutation au poste de conseiller clientèle professionnels sur l'agence de [Localité 9], laquelle n'emportait aucune modification de son contrat de travail, mais un simple changement de ses conditions de travail.
L'employeur a respecté les dispositions légales relatives au retour de congé maternité de la salariée, lesquelles au surplus ne sont pas sanctionnées par la nullité, ainsi que l'accord d'entreprise.
Un licenciement ordonné en violation de l'article L.1225-25 du code du travail ne peut être déclaré que sans cause réelle et sérieuse, mais pas nul.
Le poste occupé par Mme [C] au sein de l'agence de [Localité 3] n'étant plus vacant du fait de son remplacement, cette salariée a été repositionnée sur un emploi similaire (même poste, au sein de l'agence de [Localité 9], située dans sa zone de mobilité), sans que son contrat de travail ne soit modifié. Elle a seulement été changée d'agence.
La modification de la répartition des jours de travail sur la semaine ne constitue pas une modification du contrat de travail mais un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur.
Il n'existe aucun droit acquis sur le précédent emploi qui ne serait plus vacant. La salariée n'était pas titulaire de son poste et ne peut pas prétendre bénéficier d'une priorité. Elle n'avait pas à muter le collaborateur en poste. Il n'a jamais été promis à Mme [C] de lui conserver 'son poste' au sein de l'agence de [Localité 3].
Les convenances personnelles de la salariée d'occuper un poste dans sa commune de résidence ne sauraient être prioritaires sur l'intérêt de l'entreprise et de la clientèle. Sa réaffectation sur l'agence de [Localité 9] a été dictée par des considérations opérationnelles, dans l'intérêt de l'entreprise et de la clientèle.
C'est dans ce même intérêt qu'il a été décidé de laisser la remplaçante de la salariée sur le poste qu'elle occupait déjà depuis 10 mois, en ce que le suivi de la clientèle professionnels n'est pas compatible avec un changement trop fréquent de conseiller.
La salariée n'a pas à se substituer à l'employeur pour décider de l'organisation la plus adéquate au bon fonctionnement des agences et des mesures à prendre, en vertu de son pouvoir de direction, pour pallier les absences des salariés, tout en servant au mieux la clientèle.
Contrairement à ce qu'elle prétend, la salariée n'a pas été mise devant le fait accompli à son retour de congé maternité, lequel a été anticipé.
La clause de mobilité a été loyalement mise en 'uvre, avec un délai de prévenance raisonnable, pour permettre de réintégrer la salariée sur un poste similaire à celui qu'elle occupait avant son départ en congé maternité.
La réaffectation de Mme [C] sur l'agence de [Localité 9] ne constituait pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale, d'autant plus qu'à l'issue de son licenciement, elle a été embauchée par le Crédit Lyonnais et affectée sur une double agence [Localité 3]-[Localité 9].
Mme [C] ne peut affirmer que sa réaffectation sur [Localité 9] était assimilable à une rétrogradation alors qu'elle a été repositionnée sur le même poste, à savoir celui de conseiller clientèle professionnels.
Contrairement à ce qu'insinue la salariée, le poste de conseiller de clientèle professionnels sur [Localité 9], qu'elle a refusé, n'était pas fictif ou créé pour les besoins de la cause.
La salariée n'apporte aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination. Le droit français ne pose aucune présomption de discrimination au seul motif que la salariée n'aurait pas retrouvé, à son retour de congé maternité, son précédent emploi. De son côté, elle justifie que ses décisions étaient étrangères à toute discrimination. Elle mène d'ailleurs une véritable politique en faveur des salariées de retour de congé maternité.
La réintégration de Mme [C] dans le même emploi est impossible. Mme [C] ne peut sérieusement solliciter l'équivalent de 12 mois de salaire alors même qu'elle a retrouvé un emploi avant l'expiration de son préavis. Si la réintégration était ordonnée, la salariée devrait rembourser les indemnités de préavis et de licenciement versées, et il devrait être tenu compte qu'elle a perçu des salaires au titre de son emploi auprès du LCL postérieurement à son licenciement.
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L'instruction de l'affaire a été clôturée le 13 juillet 2023. L'audience de plaidoiries a été fixée au 14 septembre 2023.
L'affaire a été mise en délibéré au 30 novembre 2023, prorogé au 19 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Suivant les dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail: 'Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d'horaires de travail, d'évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d'alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d'alerte, au sens, respectivement, du I de l'article 6 et des 1° et 2° de l'article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique'.
Toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions précitées est nul, en application de l'article L.1132-4 du code du travail.
Sur le plan probatoire, l'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, il appartient, d'abord, au salarié concerné de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008, l'employeur devant, quant à lui, dans un second temps, prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant, alors, sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
En l'espèce, Mme [C] soutient que le véritable motif de son licenciement serait lié à son état de grossesse ou sa situation de famille, de sorte qu'elle aurait, ainsi, fait l'objet d'une mesure discriminatoire, atteinte de nullité.
Au soutien de ses allégations, la salariée fait valoir que:
-Elle n'a pas réintégré, à son retour de congé maternité, le poste de conseiller clientèle professionnels à [Localité 3], qu'elle occupait précédemment, et a fait l'objet d'une mutation imposée sur l'agence de [Localité 9]. Ce qui est matériellement démontré;
-Elle n'a, antérieurement à son licenciement, jamais essuyé la moindre critique ou remarque de la part de son employeur dans l'accomplissement de ses fonctions. Ce qui n'est pas contesté;
-Son employeur a refusé sa réintégration en décembre 2019 alors qu'il publiait, dans le même temps, en janvier 2020, une offre d'emploi correspondant à son ancien poste de conseiller clientèle professionnels à [Localité 3]. Ce qui est matériellement démontré.
Par conséquent, il apparait que la salariée présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte liée à son état de grossesse ou sa situation de famille.
De son côté, l'employeur soutient que ses décisions (de mutation et de licenciement) sont justifiées par des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination liée à l'état de grossesse ou à la situation de famille de la salariée, en l'occurrence par le refus persistant de Mme [C] d'occuper le poste de conseiller clientèle professionnels à l'agence de [Localité 9] sur lequel elle avait été affectée pour des considérations opérationnelles, dans l'intérêt de la banque et de la clientèle.
Il est donc nécessaire, à ce stade, d'examiner le bien-fondé de la mesure de licenciement.
L'article L.1232-1 du code du travail rappelle que tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Celle-ci s'entend d'une cause objective, reposant sur des griefs suffisamment précis, vérifiables et établis, qui constituent la véritable raison du licenciement.
Selon les dispositions de l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige sur le licenciement, le juge auquel il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Il doit, notamment, apprécier si la sanction prononcée est proportionnée à la nature et à la gravité des faits reprochés. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l'espèce, Mme [C] [B] a fait l'objet d'un licenciement pour faute 'simple', c'est-à-dire pour cause réelle et sérieuse, par la SA Banque Laydernier.
La lettre de licenciement du 24 avril 2019, qui fixe l'objet du litige, est rédigée comme suit:
' Nous nous sommes rencontrés lors d'un RDV au siège le 22 janvier dernier pour faire un point sur votre retour de congé maternité. Au cours de cet entretien, je vous confirme que le poste de [Localité 3] a été pourvu durant votre congé maternité par le recrutement d'une collaboratrice en CDI afin de reprendre le portefeuille de clients qui ne pouvait rester vacant durant près de 10 mois.
Vous aviez connaissance de cette situation puisque vous vous êtes rendue à l'agence à plusieurs reprises durant votre congé maternité, en évoquant le fait que vous retrouveriez votre poste à votre retour, ce qui n'a pas manqué de préoccuper la collaboratrice en poste, et nécessitant de notre part une intervention auprès d'elle pour la rassurer sur sa situation.
Lors de cet entretien j'évoque avec vous un poste de CC PRIV/PRO sur [Localité 9], poste que vous déclinez immédiatement en mettant en avant le fait que vous n'avez pas de voiture personnelle, et vous avez insisté sur votre retour sur un poste de CC PRO.
Nous avons eu l'occasion d'aborder votre mobilité, et vous m'avez exprimé qu'un repositionnement sur [Localité 8] ou [Localité 4] serait aussi compliqué.
C'est au cours d'un échange téléphonique du 24 janvier que je vous confirme votre repositionnement sur un poste de CC PRO sur [Localité 9]. Je vous explique que le départ du DAG (démissionnaire) sera l'occasion de redéfinir les portefeuilles et ainsi constitué un portefeuille de CC PRO.
Nous vous avons proposé ce poste considérant que l'agence de [Localité 9] se trouve à 27 km de [Localité 3] (32 mn source via Michelin) et ne modifie en rien votre contrat de travail.
Je vous confirme votre affectation par courrier le jour même.
Le 28 mars (soit 6 jours avant retour) vous nous adressez un mail pour nous informer de l'envoi d'une lettre recommandée avec AR que nous accusons réception 1er avril, dans laquelle vous nous indiquez refuser le poste de [Localité 9] et que vous vous présenterez sur [Localité 3] le 3 avril au matin, jour de votre reprise.
Le 3 avril au matin, M. [L] [R] directeur du groupe Arve [Localité 5] et moi-même vous avons accueilli à [Localité 3] afin que vous nous exposiez les motivations de votre refus de vous rendre sur l'agence de [Localité 9], et vous nous avez confirmé que vous ne vous rendrez pas sur votre lieu de travail, estimant que cette mutation était contraire au code du travail et à votre situation de retour de congé maternité.
Votre refus de mutation sur le poste de CC PRO à [Localité 9] ne constitue en rien à une modification de votre contrat de travail, mais un simple changement de vos conditions de travail. De plus votre contrat de travail comporte une clause de mobilité. Cette situation et votre refus de vous rendre sur l'agence de [Localité 9], remet en cause la confiance indispensable à l'exécution de votre contrat de travail, et nous oblige à prononcer votre licenciement'.
Le contrat de travail de Mme [C], prévoyait, en effet, une clause de mobilité, rédigée en ces termes: 'Il est convenu que le développement de votre carrière et les besoins de la Banque pourront nécessiter de votre part une mobilité fonctionnelle dans le respect de votre niveau de qualification et de classification'.
À l'issue du congé maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente (C. trav., art. L. 1225-25). La réintégration doit se faire en priorité sur le précédent emploi (Cass. soc., 25 mai 2011, n°09-72.556). À défaut, le licenciement, consécutif au refus de la salariée, peut être annulé par le juge saisi. L'employeur s'expose, par ailleurs, à une condamnation pour discrimination indirecte en raison du sexe.
Cependant, repose sur une cause réelle et sérieuse le licenciement consécutif au refus par un salarié d'accepter un simple changement dans ses conditions de travail. Tel est le cas s'agissant d'une salariée qui, de retour de congé de maternité, refuse un poste impliquant un changement de lieu de travail (d'[Localité 6] à [Localité 7]), dès lors que, appréciant les éléments de fait et de preuve, les juges ont relevé qu'il était de l'intérêt de l'entreprise de conserver au poste anciennement occupé par l'intéressée le salarié qui l'y avait remplacée et que l'employeur avait proposé à la salariée un poste similaire sans modifier un élément essentiel de son contrat de travail (Cass. soc., 22 mai 1997, n°94-40.297; Cass. soc., 21 sept. 2005, n°03-45.196).
Lorsqu'une clause de mobilité est incluse dans un contrat de travail, le changement d'affectation du salarié ne constitue pas une modification du contrat, mais un simple changement de ses conditions de travail et le refus du salarié de rejoindre sa nouvelle affectation constitue, en principe, une faute grave. Il a été jugé que, dès lors que le contrat de travail de la salariée, de retour de congé de maternité, comportait une clause de mobilité, le refus de rejoindre, sans aucune justification, sa nouvelle affectation dans un poste similaire à celui occupé avant son congé, était constitutif d'une faute grave (Cass. soc., 7 oct. 1997, n°95-41.857).
En l'espèce, l'employeur, au travers des pièces communiquées, démontre que:
'Il n'a pas été possible de réintégrer la salariée sur le précédent emploi qu'elle occupait antérieurement à son départ en congé maternité, du fait que le poste n'était plus disponible, mais tenu par sa remplaçante, Mme [N] [T], laquelle s'est vue proposer, à compter du 8 septembre 2018, un CDI à l'issue de son contrat d'apprentissage réussi auprès de la Banque Laydernier, qui souligne l'intérêt pour l'entreprise de conserver des jeunes qu'elle a formés en son sein.
'L'intérêt de l'entreprise, d'autant plus dans un contexte concurrentiel et de difficultés de recrutement, justifiait de ne pas laisser le poste de Mme [C] vacant, en attendant son retour effectif à une date hypothétique, et d'y conserver la salariée qui l'avait remplacée depuis 10 mois (Mme [T]), dans un souci de satisfaction et de fidélisation de la clientèle composée exclusivement de professionnels, laquelle, particulièrement exigeante, nécessite des compétences techniques spécifiques, une réactivité et un suivi de proximité, incompatibles avec un changement trop fréquent de conseiller.
' Mme [C] a été réintégrée sur un emploi similaire, n'entraînant pas de modification de son contrat de travail dans ses divers éléments essentiels, que ce soit sur le plan du salaire, de la qualification, des fonctions (conseiller de clientèle professionnels), et des responsabilités.
Seul le lieu de travail a été modifié, passant de l'agence de [Localité 3] à celle de [Localité 9]. Or, la Cour relève que ces deux agences sont situées dans la même zone géographique et distantes, entre elles, d'à peine une trentaine de kilomètres, alors que la salariée était soumise à une clause de mobilité, qu'elle a acceptée, lors de la signature de son contrat de travail, et qu'elle n'a jamais dénoncée.
Par ailleurs, la Cour observe que, contrairement à ce que soutient la salariée, Mme [C] n'avait pas vocation, en étant affectée sur l'agence de [Localité 9], à être soumise à des contraintes différentes en termes d'horaires de travail, lesquelles se seraient, de surcroît, révélées incompatibles avec son organisation familiale, dans la mesure où elle relevait du statut de cadre autonome et où elle disposait, par définition, d'une certaine liberté dans l'organisation de son emploi du temps.
En outre, à l'exception d'un témoignage, dépourvu, à lui seul, de force probante, aucun élément sérieux ne permet de considérer que le poste sur lequel la salariée était nouvellement affectée revêtait un caractère fictif et moins 'prestigieux', de sorte que sa mutation s'apparentait à une 'rétrogradation'; Ce d'autant plus que, Mme [C], ayant refusé ledit poste, elle n'a pas pu procéder, elle-même, à de telles constatations.
La salariée produit une attestation émanant de Mme [P], ayant travaillé de janvier 2018 à janvier 2019 à l'agence de [Localité 9], rédigée en ces termes: ' (...) Il est important de noter ici, que le poste mixte (privé/professionnel) est moins valorisé que celui de chargé de clientèle professionnelle.' (...) '[B] [C] aurait forcément eu à gérer des centaines de clients particuliers. L'organisation n'est pas possible autrement et il est ridicule de vouloir faire croire le contraire! Elle aurait dû également remplacer au guichet assez régulièrement. On est très loin du poste qu'elle avait à l'agence de [Localité 3]. J'ai décidé d'apporter ce témoignage car l'équivalence de poste n'était évidemment pas possible au vu du fonctionnement même de cette petite agence. J'ai quitté cette entreprise qui ne tient pas ses engagements'.
Mme [C] prétend, qu'en réalité, si elle avait accepté la mutation qui lui était imposée sur [Localité 9], elle aurait été amenée, malgré l'intitulé donné à son nouveau poste par l'employeur, à endosser un emploi non similaire à celui qu'elle occupait précédemment, en gérant une clientèle constituée très majoritairement de particuliers, comme Mme [P], qu'elle avait vocation à remplacer, ainsi qu'en témoigne le fait, qu'initialement, un poste mixte de conseiller clientèle particuliers et professionnels, lui ait été proposé, quelques jours seulement avant que cette salariée ne quitte l'entreprise.
Or, la SA Banque Laydernier expose qu'une redéfinition des portefeuilles avait été opérée suite à la démission du directeur de l'agence de [Localité 9], intervenue également en janvier 2019, de telle manière que celui de Mme [C] ne soit composé que de clientèle professionnels, conformément à sa demande. Elle produit de nombreuses pièces au soutien de ses allégations (cf courrier de démission et certificat de travail de M. [U], effectifs et portefeuilles clients professionnels des agences de [Localité 9] et [Localité 3], portefeuille moyen des conseillers de clientèle professionnels, contrat de travail Mme [P], fiche individuelle Mme [K] ...).
Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que le poste de conseiller clientèle professionnels sur l'agence de [Localité 9], offert par la Banque Laydernier, revêtait un caractère fictif et dévalorisant pour la salariée.
' La reprise d'activité de la salariée a été préparée et anticipée par la Banque Laydernier. Elle s'est effectuée en conformité avec l'accord d'entreprise ' sur les objectifs en matière d'égalité professionnelle et de mixité entre les femmes et les hommes' signé le 27 février 2018 entre les organisations syndicales et la Banque Laydernier, lequel prévoit que les salariées en congé maternité soient reçues par le DRH, au plus tard 4 semaines avant la date prévue de reprise d'activité, dans le cadre d'un entretien ayant pour but d'organiser «les conditions de leur prise de fonction, soit dans leur emploi d'origine, soit dans un emploi similaire de qualification professionnelle équivalente, soit dans un emploi correspondant à une évolution professionnelle. Ces emplois s'inscrivent dans leur zone de mobilité, sauf demande particulière des intéressées (...) ».
Or, après avoir été reçue en entretien le 22 janvier 2019, Mme [C] a été informée, dès le 24 janvier 2019, soit bien en amont de la reprise du travail (près de 2 mois et demi avant), de sa nouvelle affectation, ce qui lui laissait la possibilité de s'organiser, notamment par rapport à la garde de son enfant et à l'obtention d'un moyen de transport. Les contraintes personnelles de la salariée n'avaient pas à primer sur l'intérêt de l'entreprise, tel que décrit précédemment, dès lors que l'employeur démontre, par ailleurs, avoir veillé à ce qu'aucune atteinte disproportionnée ne soit causée à sa vie privée et familiale et avoir tenu compte de ses desiderata (Mme [C] souhaitant, en effet, conserver un portefeuille de clientèle professionnels et refusant une mutation sur les agences de [Localité 8] et [Localité 4]).
'De manière générale, la politique de la Banque Laydernier allait, à l'époque des faits, dans le sens d'un soutien à la reprise d'activité des salariées en congé maternité, cette entreprise ayant pris diverses mesures et développé des partenariats à cette fin (comme par exemple l'achat de places en crèche).
Ainsi, il apparaît que Mme [B] [C] a refusé, de manière réitérée, sa mutation au poste de conseiller clientèle professionnels sur l'agence de [Localité 9] alors que:
-elle n'emportait aucune modification de son contrat de travail, mais seulement de son lieu de travail,
-elle était soumise à une clause de mobilité régulière,
-les dispositions légales et conventionnelles relatives à son retour de congé maternité ont été respectées par l'employeur.
Ce refus persistant de la salariée n'était pas justifié par un motif légitime. Il ne reposait, en définitive, que sur l'existence de contraintes qui lui étaient strictement personnelles (à savoir l'absence de moyen de locomotion et le fait qu'elle ait obtenu pour son enfant une place dans une crèche de [Localité 3] fermant à 18h30), dont l'employeur n'avait pas à subir les conséquences, dès lors qu'elles n'étaient pas conciliables avec l'intérêt de l'entreprise et de la clientèle.
Par conséquent, la Société Générale, venant aux droits et obligations de la Banque Laydernier, démontrant que ses décisions (de mutation et de licenciement) étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et que le licenciement de Mme [C] reposait sur une cause réelle et sérieuse, il convient de confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions, étant précisé qu'il n'appartient pas à la Cour, dans le cadre de la présente procédure, de se positionner sur l'éventuel caractère discriminatoire du refus de réintégration dont la salariée a fait l'objet le 10 décembre 2019, celui-ci étant, par définiton, postérieur à son licenciement.
Mme [C] [B] succombant en toutes ses prétentions, elle devra assumer la charge des entiers dépens de 1ère instance et d'appel. En revanche, pour des raisons d'équité et compte tenu de la situation financière de chacune des parties, il convient de les débouter de leurs demandes respectives formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
Dans les limites de l'appel,
Confirme le jugement du Conseil de prud'hommes de Bonneville du 10 janvier 2022 en toutes ses dispositions;
Et y ajoutant,
-Condamne Mme [B] [C] aux dépens en cause d'appel;
-Déboute les parties de leurs demandes respectives formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel.
Ainsi prononcé publiquement le 19 Juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Isabelle CHUILON, Conseillère en remplacement du Président légalement empêché, et Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier P/Le Président