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27/06/2024 | FRANCE | N°22/01783

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 27 juin 2024, 22/01783


COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE











ARRÊT DU 27 JUIN 2024



N° RG 22/01783 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HDHX



[X] [O]

C/ S.A. SNCF etc...





Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'ANNECY en date du 09 Septembre 2022, RG F 22/00105



Appelante



Mme [X] [O]

née le 20 Janvier 1973 à [Localité 6], demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Hélène DOYEN de la SCP LE RAY BELLINA DOYE

N, avocat au barreau de CHAMBERY



Intimées



S.A. SNCF, demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Marie GIRARD-MADOUX de la SCP GIRARD-MADOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY


...

COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 27 JUIN 2024

N° RG 22/01783 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HDHX

[X] [O]

C/ S.A. SNCF etc...

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'ANNECY en date du 09 Septembre 2022, RG F 22/00105

Appelante

Mme [X] [O]

née le 20 Janvier 1973 à [Localité 6], demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Hélène DOYEN de la SCP LE RAY BELLINA DOYEN, avocat au barreau de CHAMBERY

Intimées

S.A. SNCF, demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Marie GIRARD-MADOUX de la SCP GIRARD-MADOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY

E.P.I.C. SNCF, demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Marie GIRARD-MADOUX de la SCP GIRARD-MADOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Mars 2024 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente,

Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHUILON, Conseillère,

qui en ont délibéré

assistés de Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,

********

Exposé du litige':

Mme [O] a été embauchée au cadre permanent de la SNCF le 11 octobre 1999 sur un poste d'agent du service commercial train «'ASCT'» (contrôle).

Le 9 octobre 2014, Mme [O] a été victime d'une agression dans un train dans l'exercice de ses fonctions et a fait l'objet d'un arrêt de travail durant plusieurs mois.

Le 4 février 2015, le médecin du travail a déclaré Mme [O] inapte définitivement au poste d'ASCT et, définitivement inapte au contact clientèle et à revoir avant le 18 février 2015. Le 23 février 2015, elle a été déclarée inapte au poste de travail.

Une procédure de reclassement été engagée par l'employeur et Mme [O] a réalisé une mission de transition professionnelle au sein du pôle gestion- finances de l'établissement Infralog à [Localité 5] du 15 juillet 2015 au 31 janvier 2016 et elle s'est vue proposer un poste au service comptabilité fournisseurs -Pôle assistance factures fournisseurs à [Localité 5] à compter du 1er février 2016. Elle a signé le 10 mars 2016 une fiche «'formule de consultation'» acceptant cette mobilité à compter du 1er février 2016. Mme [O] a été mutée au sein de l'EPIC SNCF.

Mme [O] a ensuite bénéficié d'un jour de télétravail par semaine depuis novembre 2016.

Le 7 juillet 2017, le médecin du travail a conclu à son aptitude au poste avec restriction permanente à savoir, nécessité d'un poste de travail à proximité du domicile pour raisons médicales.

Mme [O] a signé un avenant le 5 octobre 2017 aux termes duquel elle bénéficiait de deux jours de télétravail par semaine.

Le 8 mars 2018, Mme [O] a fait l'objet d'un arrêt de travail pour «'épisode dépressif'» par son médecin généraliste.

Le 11 septembre 2019, Mme [O] a été jugée inapte à son poste par le médecin du travail comme suit «'pas de possibilité de reprise sur le poste de gestionnaire de réclamation fournisseurs grands comptes inapte définitif à ce poste de travail.

Préconisations médicales :

- reprise du travail à mi-temps thérapeutique telle qu'il est prescrit par le médecin de soins,

-organisation du temps partiel thérapeutique peut se faire soit par demi-journée de travail soit par journée pleine de travail en alternant une journée travaillée avec une journée de repos : organiser d'un commun accord entre le manager et l'agent.

-Poste de reclassement à chercher en priorité à proximité du lieu d'habitation de l'agent et dans un autre établissement que le CCF

1034 fait à ce jour : le poste émissions de reclassement doive respecter les restrictions aptitude émission le 1034 c'est-à-dire : pas de contact avec la clientèle voyageurs, pas de travail en horaires décalés et pas d'efforts physiques

-prévoir une orientation vers EIM afin d'avoir un accompagnement dans la recherche de poste ou de missions adaptées'».

Mme [O] a été reçue le 11 septembre 2019 par le responsable des ressources humaines dont le compte-rendu a été transmis par mail à Mme [O] le 12 septembre 2019 et dont l'objet était «'d'identifier les éléments qui permettront la mise en 'uvre de votre reclassement'» à savoir parcours professionnel, obtention de diplômes, souhaits de l'agent...

Le 23 septembre 2019, Mme [O] a signé un contrat d'accompagnement professionnel d'une durée de 6 mois ayant pour objet de mettre en 'uvre un accompagnement individuel dans le reclassement selon les besoins identifiés de la salariée à savoir, des ateliers de rédaction de CVs, un appui technique à la recherche d'emploi.

Mme [O] a fait l'objet d'un arrêt de travail du 8 octobre 2019 au 4 novembre 2019 par son médecin traitant pour «'état d'angoisse extrême'».

En vue de sa reprise du travail le 5 novembre 2019, Mme [O] a été affectée sur un poste au sein de la Direction de la traction TER Auvergne Rhône Alpes de l'EPIC SNCF à [Localité 5].

Mme [O] a repris le travail puis a quitté son poste le 7 novembre 2019.

Par courrier du 9 novembre 2019, Mme [O] a refusé de prendre son poste et indiquait exercer «'son droit d'alerte'» puis «'un droit de retrait 2019, Mme [O] a refusé de prendre son poste et indiquait exercer «'son droit d'alerte'» par courrier du 11 novembre 2019.

Par courrier du 13 novembre 2019, l'employeur informait Mme [O] qu'aucun danger grave et imminent n'était établi, qu'il lui était demandé de reprendre sa mission sans délai et qu'un refus de sa part l'exposerait à une retenue sur salaire et d'éventuelles poursuites disciplinaires.

Lors de la visite du 18 novembre 2019, le médecin du travail l'a déclarée apte avec les «'préconisations médicales suivantes': mi-temps thérapeutique tel qu'il est prescrit par le médecin de soins, organisation du mi-temps thérapeutique soit par demi-journée de travail soit par journée pleine de travail en alternant journée travaillée avec une journée de repos, poste de reclassement à chercher en priorité à proximité du lieu d'habitation de l'agent. »

A compter du 1er janvier 2020, le contrat de travail s'est poursuivi au sien de la SA SNCF à la suite de l'entrée en vigueur d'une réforme ferroviaire et la SA SNCF vient aux droits de l'EPIC SNCF dans la cause.

Le 8 janvier 2020, le Médecin du travail a confirmé les préconisations précédentes.

Depuis sa reprise en date du 1er juillet 2020, Mme [O] travaille exclusivement en télétravail.

Mme [O] occupe depuis 2022 un poste de technicien comptable polyvalent à 100 % en télétravail.

Le 6 juillet 2020, le Médecin du travail a confirmé les préconisations précédentes.

Par jugement de départage du 9 septembre 2022, le conseil des prud'hommes d'Annecy, Albertville a':

- Condamné la SNCF à payer à Mme [O] la somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts pour la violation de l'obligation de prévention et de sécurité de résultat relative à l'avis du médecin du travail du travail du 7 juillet 2017 assortie des intérêts au taux légal à compter de l'expiration du délai d'appel

- Débouté Mme [O] de dommages et intérêts au titre d'un harcèlement moral

- Débouté Mme [O] de dommages et intérêts au titre d'une discrimination en raison de son état de santé et l'avancement de carrière

- Débouté Mme [O] de ses demandes indemnitaires hâtives à l'exercice du droit de retrait

- Débouté Mme [O] de dommages et intérêts au titre de la violation par l'employeur de son obligation de reclassement et de la demande d'astreinte afférente à l'absence de reclassement

- Condamné la SNCF à verser à Mme [O] la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- Rejeté la demande de la SNCF fondée sur l'article 700 du code de procédure civile

- Rejeté toutes les autres demandes, demande plus amples et contraires

- Laissé les dépens de l'instance à la charge de la SNCF et au besoin l'y a condamné.

La décision a été notifiée aux parties et Mme [O] en a interjeté appel par le Réseau Privé Virtuel des Avocats le 14 octobre 2022 et la SA SNCF, appel incident par voie de conclusions.

Par conclusions du'30 août 2023, Mme [O] demande à la cour d'appel de':

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a cantonné les dommages intérêts dus à Madame [O] à la somme de 5.000 euros au titre de la violation de l'obligation en matière de prévention et de sécurité de résultat.

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame [X] [O] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires.

Dès lors et statuant de nouveau,

- Condamner la SNCF à payer à Madame [X] [O] la somme de 10 000 € nets de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts pour la violation par son employeur de ses obligations de prévention et de sécurité de résultat à l'égard de la salariée relative à l'avis du médecin du travail du 7 juillet 2017, assortie des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir.

- Condamner la SNCF à verser à Madame [X] [O] la somme de 10.000 euros nets de CSG CRDS à titre de dommage intérêts au titre du harcèlement moral subi du fait de son employeur.

- Condamner la SNCF à verser à Madame [X] [O] la somme de 10.000 euros nets de CSG CRDS à titre de dommage intérêts au titre de la discrimination subie en raison de son état de santé et de l'exécution déloyale du contrat de travail par son employeur en étant privée d'avancement.

- Ordonner le classement de Madame [O] par la société nationale SNCF à la classification F.01.21, statut Cadre et à tout le moins E.02.23 statut Maîtrise, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à venir.

- Déclarer que la Cour se réservera le droit de liquider l'astreinte.

- Condamner la SNCF à verser à Madame [X] [O] la somme de 10.000 euros nets de CSG CRDS à titre de dommage intérêts au titre de la violation par l'employeur de ses obligations de reclassement et d'exécuter loyalement le contrat de travail en ne respectant pas les restrictions et préconisations du médecin du travail.

- Déclarer que Madame [X] [O] avait un motif raisonnable de penser être exposée à une situation de travail qui présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

- Condamner en conséquence la SOCIETE NATIONALE SNCF à payer à Madame [X] [O] les sommes de :

* 2 511,50 € bruts à titre de rappel de salaire pour la période du 19 novembre 2019 au 31 janvier 2020.

* 251,15 € bruts au titre des congés payés afférents.

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé l'indemnité de première instance au titre des frais irrépétibles à la somme de 1.000 euros et en ce qu'il a condamné la SNCF aux entiers dépens.

Y ajoutant,

- Condamner la SOCIETE NATIONALE SNCF à payer à Madame [X] [O] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure en cause d'appel.

- Assortir les condamnations des intérêts de droit.

- Condamner la SOCIETE NATIONALE SNCF aux entiers dépens.

Par conclusions en réponse du 11 avril 2023, la SA SNCF demande à la cour d'appel de':

- Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Annecy le 9 septembre 2022 en ce qu'il a :

- Condamné la SNCF à payer à Madame [X] [O] la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour la violation par l'employeur de son obligation en matière de prévention et sécurité de résultat relative à l'avis du médecin du travail du 7 juillet 2017, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'expiration du délai d'appel,

- Condamné la SNCF à verser à Madame [X] [O] la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Laissé les dépens de l'instance à la charge de la SNCF et au besoin l'y condamne.

- Le confirmer pour le surplus,

Statuant à nouveau,

- Débouter Madame [X] [O] de l'ensemble de ses demandes,

- Condamner Madame [X] [O] à verser à SNCF la somme

L'ordonnance de clôture a été rendue le'mars 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI':

Sur'le respect de l'obligation de prévention et de sécurité, de l'obligation de reclassement et l'exécution déloyale du contrat de travail :

Moyens des parties :

Mme [O] soutient d'abord que l'employeur a manqué à son obligation de prévention et de sécurité et demande des dommages et intérêts à ce titre.

Elle expose qu'après son arrêt maladie à la suite d'une agression dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail, elle a dû faire face très rapidement à une importante charge de travail et à une importante fatigue en raison de son lieu d'affectation sur [Localité 5] et des déplacements pour s'y rendre entrainant une dégradation de son état de santé. Le médecin du travail ayant dû conclure à une restriction permanente à savoir la nécessité d'un poste de travail à proximité de son domicile pour raisons médicales. Toutefois aucune mesure n'a été prise par l'employeur sauf un jour puis deux jours de télétravail après 9 mois de présence dans le service, engendrant un burn-out. Elle a ensuite travaillé durant son arrêt de travail depuis son domicile pour assurer la passation des dossiers en toute connaissance de cause de l'employeur et a subi un AVC le 10 avril 2018.

Mme [O] soutient également que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement et demande des dommages et intérêts à ce titre. Elle expose qu'aucune proposition de reclassement ne lui a été transmise depuis le11 septembre 2019, n'ayant effectué que de simples missions et a dû postuler elle-même en concurrence avec les autres salariés sur des postes ouverts dans l'entreprise.

La SA SNCF venant aux droits de l'EPIC SNCF expose pour sa part avoir tout mis en 'uvre pour assurer le reclassement de Mme [O] dans le respect des préconisations du médecin du travail, ce dernier ayant été consulté préalablement à toute proposition de poste, s'assurant de la conformité de ces propositions avec l'état médicalement constaté de Mme [O]. La SA SNCF soutient avoir même fait preuve de mesure lors de l'exercice abusif du droit de retrait par la salariée en ne la sanctionnant pas pour cette insubordination répétée durant plusieurs mois. L'employeur soutient que dès que la salariée a fait état d'une prétendue situation de harcèlement moral, une enquête a été diligentée et l'ensemble des salariés pouvant avoir connaissance des faits allégués a été interrogé.

S'agissant de l'obligation de prévention, l'employeur expose que les mesures utiles ont été prises, par exemple, une évaluation des RPS en juin 2021, la mise en place d'un dispositif d'alerte interne auprès de la Direction de l'éthique, rappelé par affichage réglementaire, des modules sensibilisation au harcèlement moral...

Sur ce,

Il résulte des dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, une obligation légale de sécurité qui impose à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs notamment par des actions de prévention des risques. Il appartient au salarié de démontrer le préjudice qu'il invoque, dont les juges du fond apprécient souverainement l'existence. Enfin l'article L. 4121-2 du même code définit les principes généraux de prévention que doit respecter l'employeur pour mettre en 'uvre ces mesures.

S'agissant du manquement à l'obligation légale de sécurité, qui constitue une obligation de moyens, il est de principe que l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, satisfait à son obligation de sécurité. Il appartient au salarié de démontrer le préjudice qu'il invoque.

Aux termes des dispositions de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. L'employeur doit en respecter les dispositions et fournir au salarié le travail prévu et les moyens nécessaires à son exécution en le payant le salaire convenu. Le salarié doit s'abstenir de tout acte contraire à l'intérêt de l'entreprise et de commettre un acte moralement ou pénalement répréhensible à l'égard de l'entreprise. Il lui est notamment interdit d'abuser de ses fonctions pour s'octroyer un avantage particulier.

Il résulte des dispositions des articles L. 1226-2 et L. 1226-10 du code du travail' dans leur version applicables au présent litige, que lorsque le salarié est victime d'un accident ou d'une maladie, quelque soit son origine professionnelle ou non, est déclaré inapte par le médecin du travail, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

En l'espèce, il est constant que le 9 octobre 2014, Mme [O] a été victime d'une agression dans un train dans l'exercice de ses fonctions et a fait l'objet d'un arrêt de travail durant plusieurs mois.

Le 4 février 2015, le médecin du travail l'a déclarée, inapte définitivement au poste d'ASCT et, définitivement inapte au contact clientèle et à revoir avant le 18 février 2015. Le 23 février 2015, elle a été déclarée inapte au poste de travail.

Il n'est pas contesté qu'à ce stade, une procédure de reclassement été engagée par l'employeur et que Mme [O] a réalisé une mission de transition professionnelle au sein du pôle gestion- finances de l'établissement Infralog à [Localité 5] du 15 juillet 2015 au 31 janvier 2016 et s'est ensuite vue proposer un poste au service comptabilité fournisseurs -Pôle assistance factures fournisseurs à [Localité 5] à compter du 1er février 2016 qu'elle a accepté le 10 mars 2016 une fiche «'formule de consultation'» acceptant cette mobilité à compter du 1er février 2016.

Mme [O] a ensuite bénéficié d'un jour de télétravail par semaine à compter de novembre 2016.

Le 7 juillet 2017, le médecin du travail concluait à son aptitude au poste avec restriction permanente à savoir, nécessité d'un poste de travail à proximité du domicile pour raisons médicales.

Mme [O] a signé un avenant le 5 octobre 2017 aux termes duquel elle bénéficiait de deux jours de télétravail par semaine.

Il ressort des échanges de mails entre les parties que la SA SNCF n'a eu connaissance de cet avis que 14 février 2018 par Mme [O]. La SA SNCF justifie avoir pris contact par courriel avec le médecin du travail le 27 février 2018 pour échanger sur la situation de Mme [O] et la restriction relative au travail à proximité de son domicile, et avoir demandé si les deux jours de télétravail déjà accordés suffisaient dans le cadre de la restriction et dans le cas contraire, quelles actions la SNCF pouvait mettre en place pour s'y conformer sachant qu'elle ne disposait pas d'antenne locale à proximité de [Localité 4] pour positionner la salariée.

La SA SNCF justifie également avoir programmé une nouvelle visite du médecin du travail pour le 4 avril 2018, date notifiée à Mme [O] le 7 mars 2018 par mail, visite que Mme [O] répondait ne pas avoir demandée. Le lendemain 8 mars 2018, Mme [O] a fait l'objet d'un arrêt de travail pour «'épisode dépressif'» par son médecin généraliste et il n'est pas contesté que Mme [O] ne s'est pas rendue à la visite prévue avec le médecin du travail le 4 avril 2018.

Le 11 septembre 2019, Mme [O] a été jugée inapte à son poste par le médecin du travail comme suit «'pas de possibilité de reprise sur le poste de gestionnaire de réclamation fournisseurs grands comptes inapte définitif à ce poste de travail.

Préconisations médicales :

- reprise du travail à mi-temps thérapeutique telle qu'il est prescrit par le médecin de soins,

-organisation du temps partiel thérapeutique peut se faire soit par demi-journée de travail soit par journée pleine de travail en alternant une journée travaillée avec une journée de repos : organiser d'un commun accord entre le manager et l'agent.

-Poste de reclassement à chercher en priorité à proximité du lieu d'habitation de l'agent et dans un autre établissement que le CCF

1034 fait à ce jour : le poste émissions de reclassement doive respecter les restrictions aptitude émission le 1034 c'est-à-dire : pas de contact avec la clientèle voyageurs, pas de travail en horaires décalés et pas d'efforts physiques

-prévoir une orientation vers EIM afin d'avoir un accompagnement dans la recherche de poste ou de missions adaptées'».

Il en ressort que le médecin du travail préconisait «'par priorité'», à l'instar de l'avis de juillet 2017, que le poste de reclassement de reclassement était à rechercher par l'employeur à proximité du lieu d'habitation de Mme [O] et dans un autre établissement que le CCF mais non nécessairement, c'est-à-dire selon les possibilités de reclassement à la disposition de l'employeur sachant que l'avis posait aussi des restrictions s'agissant d'une reprise à mi-temps thérapeutique à organiser de manière particulière.

Mme [O] a été reçue le 11 septembre 2019 par le responsable des ressources humaines.

Le 23 septembre 2019, Mme [O] a signé un contrat d'accompagnement professionnel suite à la déclaration d'inaptitude.

Mme [O] a fait l'objet d'un arrêt de travail du 8 octobre 2019 au 4 novembre 2019 par son médecin traitant pour «'état d'angoisse extrême'».

En vue de sa reprise du travail le 5 novembre 2019, Mme [O] a été affectée sur un poste au sein de la Direction de la traction TER Auvergne Rhône Alpes de l'EPIC SNCF à [Localité 5].

Mme [O] a repris le travail puis a quitté son poste le 7 novembre 2019.

Par courrier du 9 novembre 2019, Mme [O] a refusé de prendre son poste et a indiqué exercer «'son droit d'alerte'» puis «'un droit de retrait » par courrier du 11 novembre 2019.

Par courrier du 13 novembre 2019, l'employeur informait Mme [O] qu'aucun danger grave et imminent n'était établi, qu'il lui était demandé de reprendre sa mission sans délai et qu'un refus de sa part l'exposerait à une retenue sur salaire et d'éventuelles poursuites disciplinaires.

Lors de la visite du 18 novembre 2019, le médecin du travail la déclarait apte avec les «'préconisations médicales suivantes'»': mi-temps thérapeutique tel qu'il est prescrit par le médecin de soins, organisation du mi-temps thérapeutique soit par demi-journée de travail soit par journée pleine de travail en alternant journée travaillée avec une journée de repos, poste de reclassement à chercher en priorité à proximité du lieu d'habitation de l'agent. »

Le 8 janvier 2020, le médecin du travail confirmait les préconisations précédentes et que «'poste de reclassement à chercher en priorité à proximité du lieu d'habitation de l'agent'».

Le 30 juin 2020, l'employeur indique avoir sollicité le médecin du travail s'agissant d'une mission au service des achats à compter du 6 juillet 2020, et qu'elle sera contactée le 1er ou 2 juillet pour en discuter avec le médecin du travail et le responsable de mission. La SA SNCF l'invite également à consulter «'en complément'» sur la plateforme Viséo les offres sur lesquelles elle pourrait postuler.

Mme [O] a repris en date du 1er juillet 2020 exclusivement en télétravail.

Mme [O] occupe depuis 2022 un poste de technicien comptable polyvalent à 100 % en télétravail.

Il ressort de l'analyse des éléments susvisés, que la SA SNCF, à qui était imposé dans la mesure du possible de trouver un poste a proximité du domicile de la salariée en plus d'autres restrictions, ne justifie pas avoir mis en 'uvre tous les moyens à sa disposition permettant de reclasser Mme [O] sur un poste à proximité de son lieu d'habitation de février 2018 à juillet 2020 en application des recommandations du médecin du travail et a ainsi manqué à son obligation de santé et sécurité par voie de confirmation du jugement déféré.

Toutefois, la salariée ne démontre pas l'existence d'un préjudice à ce titre. En effet la seule attestation de son médecin traitant qui se contente de reprendre les propos de la patiente qui rattache son état psychologique à une perte de considération au travail, une perte de reconnaissance et un épuisement professionnel, sans autres éléments médicaux concordants extérieurs, ne permet pas de démontrer que le non-respect de l'obligation de sécurité ait aggravé l'état de santé de Mme [O] qui subissait déjà depuis plusieurs années les conséquences psychologiques d'une agression dans le cadre de l'exercice de son activité professionnelle à l'origine de son premier arrêt de travail. Mme [O] doit par conséquent être déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Il résulte également des élément ci-dessus exposés que l'employeur ne justifie pas avoir fait des propositions de reclassement écrites et individualisées et a manqué à l'exécution loyale du contrat de travail, après juillet 2020, le seul fait de avoir invité la salariée à postuler sur des postes sur une plateforme interne à l'entreprise en concurrence avec les autres salariés à compter d'avril 2020 sans priorité compte tenu des restrictions du médecin du travail et de son état de santé, ne satisfait pas à l'obligation de reclassement incombant à l'employeur. Toutefois il est constant qu'à compter du 7 juillet 2020 des missions à 100 % en télétravail ont été proposées à Mme [O], le caractère temporaire du poste n'interdisant pas à l'employeur de le proposer en reclassement, ce jusqu'à une prise de poste acceptée en décembre 2021 à 100 % en télétravail. L'employeur ayant ainsi manqué à son obligation de reclassement jusqu'à avril 2020. Il convient de condamner l'employeur à lui verser la somme de 3000 € de dommages et intérêts à ce titre par voie d'infirmation du jugement déféré.

Sur la discrimination à raison de l'état de santé et la demande de reclassification :

Moyens des parties :

Mme [O] soutient que tout au long de ces années, elle é été lésée professionnellement et injustement privée de l'évolution de sa carrière compte tenu de ses qualifications professionnelles et en raison de son état de santé. Non seulement l'employeur n'a jamais aménagé son poste de travail afin qu'il corresponde à son état de santé mais elle a vu sa charge de travail augmenter au point de tenir seule 80 % de la charge de travail du service. Elle a fait un burn-out le 8 mars 2018. Le diplôme interne TC VOY obtenu en 2010 devait lui permettre d'être directement positionnée à la classification E dès décembre 2015, alors qu'elle ne l'a obtenue que lors de sa prise de poste au CCF de [Localité 5] le 1er février 2016. Elle a tenu un poste de qualification E du 15 juillet 2015 au 31 juillet 2016. Depuis, elle reste positionnée qualification E alors qu'elle aurait déjà dû obtenir la qualification F dans un processus d'obtention du statut cadre. Mme [O] sollicite outre des dommages et intérêts à ce titre sa reclassification au niveau F.01.21 statut cadre et à tout le moins E.02.23 statut maitrise à compter de la notification de la décision sous astreinte.

La SA SN SNCF expose qu'elle s'est montrée diligente voire bienveillante à l'égard de Mme [O] dans la mesure où elle a très rapidement été reclassée au poste de contrôleur en 2015 après l'avis d'inaptitude médicale, n'a pas fait l'objet de sanctions disciplinaires malgré son droit d'alerte injustifié et son droit de retrait abusif, qu'elle a bénéficié d'une promotion en position PR avec hausse de salaire à effet du 1er avril 2019. La salariée est placée sur la qualification E niveau 1PR18 et s'est vu octroyer le 1er avril 2022 une promotion de rémunération à la position de rémunération 18 et elle a bénéficié de promotions tout au long de sa carrière. L'employeur est par ailleurs seul juge de l'aptitude de ses salariés. Son diplôme externe a été reconnu alors que ce n'est pas systématique et elle avait été positionnée sur un poste du collège maitrise. S'il lui avait été indiqué qu'après une durée de 2,5 ans de tenue de poste effective, une évolution sur un poste de cadre serait étudiée en fonction des avis des managers et sa qualité de service, compte tenu de ses longues périodes d'arrêts maladie, le terme de la période de 2,5 ans nécessaire pour appréhender ses aptitudes professionnelles a simplement été reporté dans le temps.

Sur ce,

Il appartient au salarié qui se prévaut d'un statut ou d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification conventionnelle qu'il revendique.

La classification d'un salarié dépend des fonctions effectivement exercées que le juge apprécie.

L'article L. 1132-1 du code du travail prévoit qu'aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

Par ailleurs, l'article L. 1134-1 du code du travail dispose que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, Mme [O] expose n'avoir pu bénéficier de l'évolution de sa carrière et de sa juste classification de manière discriminatoire en raison de son état de santé.

Toutefois il est constant que l'évolution prévisible de la carrière de Mme [O], comme celle des autres salariés dans la même situation, était fonction de la durée d'occupation du poste mais également des évaluations par ses supérieurs hiérarchique de la qualité de service et de la performance démontrée, et que le fait d'avoir été l'objet de suspensions de son contrat de travail n'ont pas permis à l'employeur d'apprécier ses compétences dans l'exercice des fonctions et sa capacité à obtenir le niveau supérieur. Par conséquent, la salariée ne démontre pas qu'elle aurait dû forcément bénéficier du niveau E puis F si elle n'avait pas eu ses problèmes de santé et ses arrêts de travail.

Faute de présenter des éléments laissant supposer l'existence une discrimination en raison de son état de santé, la salariée doit donc être déboutée de ses demandes à ce titre par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur le harcèlement moral':

Moyens des parties :

Mme [O] soutient avoir été victime de harcèlement moral'et sollicite des dommages et intérêts à ce titre. Elle expose avoir subi une dégradation de ses conditions de travail, puisque l'employeur n'a pas rempli ses obligations en matière de reclassement, lui a imposé de travailler en refusant d'adapter son poste conformément au suivi et restrictions médicales malgré ses demandes ayant pour conséquence l'altération de son état de santé. Elle a été tenue à l'écart de l'enquête ayant eu lieu à la suite de la dénonciation des agissements de harcèlement moral et n'a pas été destinataire du rapport d'enquête.

La SA SNCF expose avoir, à la suite de la dénonciation de faits de harcèlement moral, entendu l'ensemble des salariés (12 personnes) ayant pu connaitre des faits allégués en janvier et février 2020 et que les allégations ne sont corroborées par aucun élément mais que l'enquête a mis à jour une salariée revendicative adoptant un comportement inapproprié comme se plaignant beaucoup , critiquant la hiérarchie, leRH., les méthodes de travail....dans l'attente disproportionnée d'une reconnaissance forte de l'entreprise qui passerait par l'acceptation de ses désidératas.

Sur ce':

Aux termes des articles L.1152-1 et L. 1152- 2 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Suivants les dispositions de l'article L 1154-1 du même code, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral; dans l'affirmative, il appartient ensuite à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Le harcèlement moral n'est en soi, ni la pression, ni le surmenage, ni le conflit personnel ou non entre salariés, ni les contraintes de gestion ou le rappel à l'ordre voire le recadrage par un supérieur hiérarchique d'un salarié défaillant dans la mise en 'uvre de ses fonctions.

Les règles de preuve plus favorables à la partie demanderesse ne dispensent pas celle-ci d'établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants qu'elle présente au soutien de l'allégation selon laquelle elle subirait un harcèlement moral au travail.

Il incombe dès lors à l'employeur de démontrer que les faits ainsi établis sont étrangers à tout harcèlement moral.

Pour caractériser le harcèlement moral, Mme [O] allègue les faits suivants':

- La dégradation de ses conditions de travail du fait du non-respect par l'employeur des préconisations du médecin du travail et de son obligation de reclassement

- L'absence de prise en compte comme temps de service le temps consacré à son suivi médical suite à sa rechute après son agression en 2014 comme l'exige l'accord agression

- L'absence de communication du rapport d'enquête suite à sa dénonciation de faits de harcèlement moral

L'employeur a justifié et ce n'est pas contesté par la salariée, qu'il a procédé comme il lui incombe, à une enquête et à l'audition de nombreux salariés suite à la dénonciation par Mme [O] d'une situation de harcèlement moral. Toutefois, il n'entre pas dans les obligations de l'employeur de communiquer au salarié le rapport d'enquête.

Mme [O] n'explicite pas et ne fonde son allégation relative à l'absence de prise en compte comme temps de service, du temps consacré à son suivi médical, sur aucun élément concret et objectif. Ce fait n'est pas établi.

S'il a été établi que l'employeur a pu manquer à son obligation de sécurité en ne démontrant pas avoir recherché de manière sérieuse un poste de reclassement à proximité du domicile de Mme [O], ce seul manquement dont par ailleurs Mme [O] n'a pas justifié qu'il lui avait causé un préjudice, ne suffit pas à démontrer l'existence d'éléments précis, concordants et répétés permettant de présumer que Mme [O] a subi des agissements répétés de la part de son employeur pouvant caractériser un harcèlement moral.

Mme [O] doit par conséquent être déboutée de ses demandes à ce titre par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur la demande de rappel à la suite de l'exercice du droit de retrait':

Moyens des parties :

Mme [O] sollicite un rappel de salaires s'agissant des jours considérés par l'employeur en absence injustifiée du 19 novembre 2019 au 31 janvier 2020 à la suite de son droit de retrait. Elle expose avoir été informée par simple courriel du 5 novembre 2019 qu'elle était attendue le jour même à [Localité 5] pour des journées complètes dans le cadre d'une mission sans cohérence avec son projet professionnel et préconisations du médecin du travail, à savoir sans trajet sur [Localité 5].

La SA SN SNCF fait valoir que le droit de retrait de Mme [O] était injustifié et qu'une demi-journée seulement après son arrivée sur son nouveau poste le 9 novembre 2019, elle a exercé abusivement son droit de retrait. Devant son refus persistant malgré ses explications et plusieurs mises en demeure de reprendre son poste, la salariée a été déclarée valablement en absences injustifiées. Elle a fait preuve de bienveillance en n'initiant pas de procédure disciplinaire à son encontre alors qu'elle était fondée à la faire, le poste étant en conformité avec les préconisations du médecin du travail.

Sur ce,

Il ressort des dispositions de l'article L. 4131-1 du code du travail'que le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d'une telle situation. L'employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection.

S'il est de principe que la cause du danger peut résulter de l'état de santé du salarié, notamment s'il lui est demandé d'exécuter un travail dans les conditions contraires aux réserves émises par le médecin du travail, en l'espèce le médecin du travail n'avait ni formellement interdit l'exercice de l'activité de Mme [O] sur [Localité 5], ni imposé l'organisation des jours de travail de la salariée, mais avait seulement préconisé par priorité la recherche d'un poste à proximité de son domicile à savoir [Localité 4] et l'aménagement par demi-journées ou en alternant une journée travaillée et une journée de repos. Par conséquent, Mme [O] ne justifie pas de l'existence d'un danger imminent fondant son droit de retrait du 9 novembre 2019 s'agissant d'une mission temporaire courte de deux fois 5 jours travaillés sur deux semaines avec aménagement compte tenu des rendez-vous médicaux de la salariée.

Il convient de débouter la salariée de sa demande à ce titre par voie de confirmation du jugement déféré

Sur les demandes accessoires':

Il convient de confirmer la décision de première instance s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.

La SNCF, partie perdante qui sera condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, devra payer à la salariée la somme de 2000 € au titre de ses frais irrépétibles engagés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS':

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a':

- Débouté Mme [O] de dommages et intérêts au titre d'un harcèlement moral

- Débouté Mme [O] de dommages et intérêts au titre d'une discrimination en raison de son état de santé et l'avancement de carrière

- Débouté Mme [O] de ses demandes indemnitaires hâtives à l'exercice du droit de retrait

- Débouté Mme [O] de dommages et intérêts au titre de la violation par l'employeur de son obligation de reclassement et de la demande d'astreinte afférente à l'absence de reclassement

- Condamné la SNCF à verser à Mme [O] la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- Rejeté la demande de la SNCF fondée sur l'article 700 du code de procédure civile

- Rejeté toutes les autres demandes, demande plus amples et contraires

- Laissé les dépens de l'instance à la charge de la SNCF et au besoin l'y a condamné

L'INFIRME pour le surplus,

STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,

JUGE que la SA SN SNCF a manqué à son obligation de sécurité,

DEBOUTE Mme [O] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre,

JUGE que la SA SN SNCF a manqué à son obligation de reclassement,

CONDAMNE la SA SN SNCF à payer à Mme [O] la somme de 3000 € de dommages et intérêts à ce titre.

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la SA SN SNCF à payer à Mme [P] la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE la SA SN SNCF aux dépens en cause d'appel.

Ainsi prononcé publiquement le 27 Juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, et Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Chbre sociale prud'hommes
Numéro d'arrêt : 22/01783
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;22.01783 ?
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