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20/06/2024 | FRANCE | N°22/02049

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 20 juin 2024, 22/02049


COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE







ARRÊT DU 20 JUIN 2024



N° RG 22/02049 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HEQ3



[S] [E]

C/ S.A.S. SMS MMS MACONNERIE

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANNEMASSE en date du 05 Décembre 2022, RG F21/00120







APPELANT :



Monsieur [S] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Audrey GUICHARD, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
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INTIMEE :



S.A.S. SMS MMS MACONNERIE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Jean-marie LAMOTTE de la SELARL LAMOTTE & AVOCATS, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS



COMPOSITION...

COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 20 JUIN 2024

N° RG 22/02049 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HEQ3

[S] [E]

C/ S.A.S. SMS MMS MACONNERIE

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANNEMASSE en date du 05 Décembre 2022, RG F21/00120

APPELANT :

Monsieur [S] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Audrey GUICHARD, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

INTIMEE :

S.A.S. SMS MMS MACONNERIE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Jean-marie LAMOTTE de la SELARL LAMOTTE & AVOCATS, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue en audience publique le 19 Mars 2024, devant Madame Valéry CHARBONNIER, Conseiller désigné(e) par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui s'est chargé(e) du rapport, les parties ne s'y étant pas opposées, avec l'assistance de Mme Sophie MESSA, Greffier à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,

et lors du délibéré :

Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente,

Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHUILON, Conseillère,

********

Exposé du litige':

M. [E] a été engagé le 23 septembre 2015 par la SAS SMS MMS maçonnerie en contrat à durée indéterminée en qualité de maçon d'abord à temps complet puis à temps partiel.

Par courrier du 7 décembre 2018, M. [E] a adressé sa démission à son employeur.

M. [E] a été de nouveau engagé par la SAS SMS MMS maçonnerie en contrat à durée indéterminée le 7 janvier 2019 avec reprise de son ancienneté à compter du 1er octobre 2015.

La SAS SMS MMS maçonnerie soutient avoir adressé à M. [E] le juillet 2019 un courrier d'avertissement remis en mains propres que M. [E] conteste avoir reçu.

Par courrier du 13 juillet 2021, la SAS SMS MMS maçonnerie a convoqué M. [E] à un entretien préalable à un licenciement fixé au 26 juillet 2021 et lui a notifié une mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier du 29 juillet 2021, M. [E] a été licencié pour faute grave.

M. [E] a saisi le conseil des prud'hommes d'Annemasse en date du'21 septembre 2021 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes outre condamner l'employeur au titre du travail dissimulé et obtenir des rappels de salaires.

Par jugement du 5 décembre 2022, le conseil des prud'hommes d'Annemasse':

- Jugé que l'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'heures n'est pas caractérisée

- Jugé que le licenciement pour faute grave est nul mais que le licenciement est avec cause réelle et sérieuse

En conséquence,

- Débouté M. [E] de sa demande de rappel de salaire au titre du mois de mars 2020 et avril 2020

- Débouté M. [E] de sa demande d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé

- Accordé à M. [E] la somme de 1228,50 € outre 123 € de congés payés afférents au titre du rappel de salaire au titre de la mise à pied et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer ces sommes

- Accordé à M. [E] la somme de 2943,36 € € au titre de l'indemnité de licenciement et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer cette somme

- Accordé à M. [E] la somme de 4095,10 € outre 409 € de congés payés afférents au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer ces sommes,

- Accordé à M. [E] la somme de 2000 € à titre des dommages et intérêts et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer cette somme

- Accordé à M. [E] la somme de 1000 € au titre l'article en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer cette somme

- Débouté la SAS SMS MMS maçonnerie de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens de l'instance.

La décision a été notifiée aux parties et M. [E] en a interjeté appel par le Réseau Privé Virtuel des Avocats le 12 décembre 2022 et la SAS SMS MMS maçonnerie, appel incident par voie de conclusions.

Par conclusions en réponse du 10 juillet 2023 , M. [E] demande à la cour d'appel de':

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a':

* Condamné la société SMS MMS Maçonnerie à payer à Monsieur [S] [E] la somme de 1228,50 euros outre 123 euros de congés payés au titre du rappel de salaire au titre de la mise à pied ;

* Condamné la société SMS MMS Maçonnerie à payer à Monsieur [S] [E] la somme de 2943,36 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

* Condamné la société SMS MMS Maçonnerie à payer à Monsieur [S] [E] la somme de 4095,10 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis;

* Condamné la société SMS MMS Maçonnerie à payer à Monsieur [S] [E] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance ;

* Débouté la société SMS MMS Maçonnerie de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens de l'instance

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a':

* Dit et jugé que l'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'heures n'est pas caractérisée ;

* Dit et jugé que le licenciement pour faute grave est nul mais le licenciement est avec cause réelle et sérieuse ;

En conséquence :

- Débouté M. [E] de sa demande de rappel de salaire au titre du mois de mars 2020

- Débouté M. [E] de sa demande de rappel de salaire au titre du mois d'avril 2020

- Débouté M. [E] de sa demande d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé

- Accordé à M. [E] la somme de 2000 euros au titre de dommages et intérêts et condamné la société SMS MMS Maçonnerie à lui payer cette somme ;

Par conséquent,

- Condamner la SAS SMS MMS maçonnerie à lui payer les sommes suivantes':

* 145,8 euros à titre de rappel de salaire au titre du mois de mars 2020 outre 15 euros au titre des congés payés afférents ;

* 263,65 à titre de rappel de salaire au titre du mois de avril 2020 outre 26,4 euros au titre des congés payés afférents ;

* 12 285,30 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé ;

* 2000 euros nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du retard dans le paiement du salaire;

* 15 000 euros nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du licenciement nul et subsidiairement, 12 285,30 euros au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- Débouter la SAS SMS MMS maçonnerie de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Y ajoutant,

- Condamner la SAS SMS MMS maçonnerie à payer à M. [E] la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance.

Par conclusions du'15 mai 2023, la SAS SMS MMS maçonnerie demande à la cour d'appel de':

- Statuant sur l'appel principal interjeté par M. [E] à l'encontre du jugement du Conseil des Prud'hommes d'Annemasse du 05 décembre 2022

- Statuant sur l'appel incident de la SAS SMS MMS maçonnerie

- Confirmer ledit jugement en ce qu'il a':

* dit et jugé que l'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'heures n'est pas caractérisée ;

* débouté M. [E] de ses demandes de rappel de salaires au titre des mois de mars et avril 2020 ;

* débouté M. [E] de sa demande d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé;

- Le réformer pour le surplus en ce qu'il a':

* Dit et jugé que le licenciement est avec cause réelle et sérieuse

* Accordé à M. [E], les sommes de :

-1 228,50 euros bruts outre 1 23,00 euros bruts à titre de congés payés afférents à titre de rappel de salaires mise à pied conservatoire ;

- 2 943,36 euros nets à titre d'indemnité de licenciement ;

- 4 095, 10 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 409,00 euros bruts au titre des congés payés afférents

- 2 000,00 euros à titre de dommages et intérêts ;

- 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

- condamné la SAS SMS MMS MACONNERIE aux dépens

Statuant à nouveau,

- Débouter M. [E] de ses demandes de rappel de salaires au titre des mois de mars et avril 2020

- Le débouter de sa demande au titre du travail dissimulé

- Le débouter de sa demande de prononcé de la nullité de son licenciement et de dommages et intérêts à ce titre

- Dire et juger que son licenciement notifié le 29 juillet 2021 reprose sur ne faute grave justifiée

- Le débouter en conséquence de toutes demandes liées à la requalification de son licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'il s'agisse du paiement de sa mise à pied conservatoire, de son indemnité compensatrice de préavis, de son indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Plus généralement,

- Le débouter de toutes autres demandes, fins et conclusions

- Condamner M. [E] au paiement d'une somme de 3500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le'15 février 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI':

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail':

Moyens des parties :

M. [E] soutient que l'employeur n'a pas exécuté loyalement son contrat de travail puisqu'il attendu ses réclamations à réception du solde de tout compte pour lui régler ses heures supplémentaires dues depuis 2019 sur les bulletins de paie de juillet 2021 et il demande des dommages et intérêts à ce titre.

L'employeur conteste et soutient qu'il réglait régulièrement les heures supplémentaires, le reliquat étant compensé sous forme de jours de repos que le salarié pouvait prendre librement et que M. [E] n'a jamais réclamé le paiement d'autres heures supplémentaires pendant l'exécution du contrat de travail. L'employeur lui a en outre spontanément réglé le reliquat non pris sous forme de jours de repos avec le solde de tout compte.

Sur ce,

Aux termes des dispositions de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. L'employeur doit en respecter les dispositions et fournir au salarié le travail prévu et les moyens nécessaires à son exécution en le payant le salaire convenu. Le salarié doit s'abstenir de tout acte contraire à l'intérêt de l'entreprise et de commettre un acte moralement ou pénalement répréhensible à l'égard de l'entreprise. Il lui est notamment interdit d'abuser de ses fonctions pour s'octroyer un avantage particulier.

M. [E] ne conteste pas que les heures supplémentaires lui ont été réglées mais invoque un préjudice au titre d'un retard de paiement au terme du contrat de travail.

La SAS SMS MMS maçonnerie verse aux débats pour justifier le paiement des heures supplémentaires, les bulletins de paie qui font état de leur paiement et le reçu pour solde de tout compte non contesté par M. [E] qui démontre le paiement d'un reliquat d'heures supplémentaires.

Le salarié verse au soutien de sa demande des SMS non authentifiés en langue étrangère dont il verse une traduction partielle et personnelle non certifiée. Il ne justifie pas non plus avoir réclamé le paiement du reliquat d'heures supplémentaires au cours de l'exécution du contrat de travail ni ne démontre l'existence d'un préjudice ou son étendue au titre d'un prétendu retard de l'employeur. Il doit par conséquent être débouté de sa demande de dommages et intérêts par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur la demande de rappel de salaire':

Moyens des parties :

M. [E] soutient que l'employeur a fraudé le dispositif d'activité partielle en déclarant 36 heures pour le mois de mars 2020 à déduire au titre du dispositif d'activité partielle alors qu'il a travaillé 152 heures, puis 65 heures alors qu'il a travaillé 136 heures pour le mois d'avril 2020 comme cela ressort du décompte. L'employeur ne produisant aucun décompte détaillé des heures travaillées au visa de l'article D. 3171-8 du code du travail'contredisant sérieusement les éléments versés par le salarié. M. [E] demande des dommages et intérêts au titre du retard de paiement des heures supplémentaires et le paiement d'un rappel de salaire au titre des retenues sur salarie au titre de la prétendue activité partielle.

La SAS SMS MMS maçonnerie fait valoir que M. [E] a été placé en activité partielle pour 36 heures au mois de mars 2020 et 65 heures au mois d'avril 2020 et qu'il a perçu en sus de son salaire une allocation correspondant à 70 % de son salaire brut. Le salarié ne démontre ne rapporte pas la preuve qu'il aurait effectivement travaillé sur les périodes concernées et n'a jamais contesté ses bulletins de paie pendant l'exécution de la relation contractuelle.

Sur ce,

L'article L. 3171-4 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

En application de ces dispositions, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties.

Aux termes de dispositions de l'article L. 5122-1 du code du travail, le contrat de travail des salariés placés en activité partielle est suspendu pendant les périodes où ils ne sont pas en activité. Il en résulte que pendant ces périodes, le salarié ne doit, ni être sur son lieu de travail, ni se tenir à la disposition de l'employeur ou se conformer à ses directives, et l'employeur a l'interdiction de lui demander de travailler, y compris en télétravail.

Dans la situation d'une période de chômage partiel avec une seule réduction du nombre d'heures travaillées et une activité essentiellement réalisée en télétravail, il appartient à l'employeur de communiquer de manière précise au salarié ses horaires de travail ou ses journées ou demi-journées travaillées s'il est soumis à une convention de forfait en jours.

En l'espèce, il est constant que M. [E] a été placé en activité partielle pour 36 heures au mois de mars 2020 et 65 heures au mois d'avril 2020.

M. [E] produit un décompte journalier pour le mois de mars 2020 mentionnant 152 heures de travail et pour le mois d'avril 2020 mentionnant 136 heures de travail. M. [E] justifie l'existence de tableaux similaires pour chaque mois de salaire ainsi que deux SMS dont la traduction n'est pas certifiée du 16 mars et du 8 avril 2021.

La SAS SMS MMS maçonnerie à qui incombe de démontrer qu'elle a informé de manière précise le salarié de ses horaires de travail ou de ses journées ou demi-journées travaillées et de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, n'en justifie pas, se contentant de contester les éléments versés par le salarié.

Il convient dès lors, par voie d'infirmation du jugement déféré, de condamner la SAS SMS MMS maçonnerie à verser à M. [E] les sommes suivantes':

- 145,8 € à titre de rappel de salaire pour le mois de mars 2020 outre 15 € de congés payés afférents

- 263,65 € de rappel de salaire pour le mois d'avril 2020 outre 26,4 € au titre des congés payés afférents

Sur le travail dissimulé':

Moyens des parties :

M. [E] soutient que le fait de déclarer un nombre d'heures travaillées inférieur au nombre d'heures réelles est nécessairement volontaire. Il demande une indemnisation à ce titre.

La SAS SMS MMS maçonnerie conteste toute intention de travail dissimulé et soutient qu'elle réglait régulièrement les heures supplémentaires et que le salarié n'a d'ailleurs jamais fait de réclamation à ce titre au cours de la relation contractuelle et qu'elle n'a pas fraudé le dispositif de chômage partiel.

Sur ce,

Il résulte des dispositions de l'article L. 8221-5 du code du travail qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur':

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche';

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie';

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'activité en application des dispositions de l'article L.'8221-3 du code du travail', l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :

1° Soit n'a pas demandé son immatriculation au registre national des entreprises en tant qu'entreprise du secteur des métiers et de l'artisanat ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire, ou a poursuivi son activité après refus d'immatriculation, ou postérieurement à une radiation ;

2° Soit n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale en vertu des dispositions légales en vigueur. Cette situation peut notamment résulter de la non-déclaration d'une partie de son chiffre d'affaires ou de ses revenus ou de la continuation d'activité après avoir été radié par les organismes de protection sociale en application de l'article'L. 613-4'du code de la sécurité sociale ;

3° Soit s'est prévalue des dispositions applicables au détachement de salariés lorsque l'employeur de ces derniers exerce dans l'Etat sur le territoire duquel il est établi des activités relevant uniquement de la gestion interne ou administrative, ou lorsque son activité est réalisée sur le territoire national de façon habituelle, stable et continue.

L'article L. 8223-1 du code du travail dispose qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L.'8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le paiement de cette indemnité suppose de rapporter la preuve, outre de la violation des formalités visées à l'article L.8223-1 du code du travail, de la volonté de l'employeur de se soustraire intentionnellement à leur accomplissement. Ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie ni se déduire de la seule application d'une convention de forfait illicite.

Cette indemnité forfaitaire n'est exigible qu'en cas de rupture de la relation de travail. Elle est due quelle que soit la qualification de la rupture, y compris en cas de rupture d'un commun accord.

Cette indemnité est cumulable avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture du contrat de travail, y compris l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ou l'indemnité de mise à la retraite.

En l'espèce, l'employeur a été condamné à payer un rappel de salaire à M. [E] pour l'avoir fait volontairement travailler pendant la suspension du travail due au chômage partiel, ce fait caractérise son intention de dissimuler une'partie de l'activité de son salarié.

La SAS SMS MMS maçonnerie doit par conséquent être condamnée à verser à M. [E] la somme de 12'285,30 € à ce titre.

Sur le bien-fondé du licenciement pour faute grave:

Aux termes du courrier de licenciement pour faute grave du'29 juillet 2021, il est reproché à M. [E] d'avoir':

- Le 12 juillet 2021, refusé d'appliquer les consignes données à savoir de « laisser» ses documents d'identité à l'agent de sécurité à l'entrée du domaine, obligation mise en place pour des conditions de sécurité signifiée par le partenaire dont le salarié avait été informé au préalable à deux reprises, caractérisant une insubordination, et par son comportement, «bloqué» l'accès à la propriété et provoqué un retard pris dès le premier jour de chantier , le client ayant signifié la fin de la collaboration.

- Généré ainsi préjudice résultant d'un manque à gagner de 245 000 euros, une dégradation de l'image de la société et des relations avec les partenaires et clients

- Avoir adopté une attitude virulente et contestataire le 15 juillet 2021 en se rendant au service de sécurité pour solliciter un document justifiant le caractère impératif de dépôt de votre carte d'identité malgré ma mise à pied conservatoire impliquant de ne plus retourner à l'entreprise ou sur un quelconque chantier

Moyens des parties :

La SAS SMS MMS maçonnerie expose que le contrat de travail dispose que M. [E] doit se conformer aux directives et aux instructions de l'employeur et s'engager à prendre toutes les mesures nécessaires pour mener à bien la mission confiée. Que M. [E] a commis manquement gravement à cette obligation contractuelle en refusant d'appliquer les consignes et directives imposées à l'employeur sur le chantier du prince d'Abu Dhabi le 12 juillet 2015 alors qu'il l'avait informé par avance des conditions d'entrée sur le chantier. Il a ensuite pris à partie les agents de sécurité, bloquant l'entrée à tous les intervenants pendant 15 minutes.

Ensuite en dépit de sa mise à pied conservatoire notifiée le 13 juillet 2021 à la suite de ces faits, M. [E] n'a pas hésité à se rendre de nouveau sur le chantier le 15 juillet 2021 et à adopter une attitude virulente à l'égard des agents de sécurité du domaine, ces faits ayant de graves conséquence pour la SAS SMS MMS maçonnerie en terme d'image et de réputation, entrainant la rupture de son partenariat et la perte d'une seconde mission prévue pour le 26 juillet 2021 sans parler de l'absence de perspective de chantiers à l'avenir sur les diverses propriété du propriétaire.

Les dispositions alléguées par le salarié du code pénal n'ont pas vocation à s'appliquer au sein d'une propriété privée et M. [E] ayant été informé auparavant de la règle à laquelle il ne s'était pas opposée, il n'y aucune atteinte à une liberté fondamentale et le licenciement pour faute grave est fondé.

M. [E] soutient que le licenciement est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse.

Il soutient que le contrôle d'identité auquel la société a souhaité le soumettre était totalement abusif et illégal peu important le statut du propriétaire de la demeure qui bénéficie d'une sécurité rapprochée et la volonté de sécuriser la propriété. Les mêmes règles s'appliquent sur tout le territoire et l'employeur ne justifie pas de l'identité du propriétaire. M. [E] ayant en outre finalement accepter de s'y soumettre sous la pression des gardes et de laisser sa carte d'identité pendant une journée sans garantie quant à son utilisation ni récépissé. Cette directive donnée par l'employeur état abusive et portait atteinte à plusieurs droits et libertés fondamentaux et notamment la libre circulation et la vie privée et le licenciement est nul.

Il conteste avoir adopté une attitude virulente et contestataire le 15 juillet 2021 et soutient que l'employeur ne justifie pas de l'existence d'un préjudice qui pourrait lui être imputé. Il conteste avoir provoqué un scandale mais avoir seulement manifesté son étonnement et sa réprobation. Le fait de s'être rendu à l'entrée du chantier le lendemain de l'incident ne saurait pas non plus lui être reproché alors qu'à ce moment, il n'avait toujours pas de notification écrite de sa mise à pied à titre conservatoire. M. [E] soutient que M. [R], président de la SAS SMS MMS maçonnerie a tenté de l'intimider lorsqu'il s'est rendu au dépôt le 16 juillet 2021.

M. [E] conteste que l'employeur lui ait notifié un avertissement en mains propres le 12 juillet 2019 qu'il n'aurait pas contesté, et évoque seulement une discussion houleuse avec l'un de ses collègues dont il a toujours fermement contesté la responsabilité. En tout état de cause, ce fait ne saurait justifier un licenciement deux ans plus tard pour des motifs totalement étrangers. S'il avait causé des difficultés récurrentes, l'employeur ne l'aurai past pas réembauché. L'employeur ne justifie pas de l'existence d'un préjudice et le justificatif d'envoi du document par un ami du gérant est un faux.

Sur ce,

Il est de principe que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de l'intéressé au sein de l'entreprise même pendant la durée du préavis. La mise en 'uvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits fautifs mais le maintien du salarié dans l'entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises. L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Si les faits reprochés paraissent d'une gravité telle qu'ils justifient sa mise à l'écart de l'entreprise, l'employeur peut prononcer une mise à pied conservatoire dans l'attente d'une décision à intervenir.

La gravité de la faute s'apprécie en tenant compte du contexte des faits, de l'ancienneté du salarié et des conséquences que peuvent avoir les agissements du salarié et de l'existence ou de l'absence de précédents disciplinaires.

Sur le refus de présenter et de laisser sa pièce d'identité pendant le temps de présence sur le domaine le lundi 12 juillet 2021':

S'il est de principe que ni un chef d'établissement ni un maître d'ouvrage ne peuvent exiger les pièces d'identité et/ou les cartes de séjour des personnes devant réaliser des travaux sur un chantier ou dans un établissement, car ils n'ont pas le pouvoir de police, les seules les personnes titulaires d'une autorité de police étant en droit d'exiger ces pièces d'identité, il est admis pour des raisons de sécurité qu'une entreprise demande une pièce d'identité au visiteur et conserve ce document en échange d'un badge, jusqu'à sa restitution.

En l'espèce, la SAS SMS MMS maçonnerie justifie que son client (LEM'CO74) exigeait pour effectuer les travaux dans son domaine privé que toutes les personnes entrantes présentent et laissent une pièce d'identité au gardien qui la rendait à la sortie dans le but de sécuriser les lieux. Cette consigne proportionnée ne pouvant s'analyser en un contrôle d'identité comme conclu et ne pouvant dès lors constituer une atteinte à une liberté fondamentale.

Il n'est pas contesté que M. [E] a le 12 juillet 2021 dans un premier temps refusé de présenter et de laisser sa pièce d'identité à l'entrée d'une propriété dans laquelle il devait effectuer des travaux pour son employeur, la SAS SMS MMS maçonnerie, comme tous les intervenants, et ne conteste pas avoir été informé de cette directive du client avant son intervention et qu'il l'a ensuite accepté selon lui «'sous la pression des gardes et afin de ne pas causer du retard dans la mise en 'uvre du chantiers'».

M. [W], président de LEM'CO74 et M. [K], chargé d'affaires attestent qu'ils étaient présents le 12 juillet 2021 et que M. [E] ne s'est pas plié aux règles d'entrée du domaine de [4] à [Localité 5] et ne voulait pas donner ca carte d'identité. M. [P] témoigne, qu'engagé en sous-traitance, il est resté pendant 15/20 minutes à attendre, le passage étant bloqué, qu'il est descendu et a appris que M. [E] ne voulait pas donner sa pièce d'identité, les négociations ayant duré avec la personne qui s'occupe de la sécurité pendant 15 minutes. M. [R] a confirmé qu'il est passé en premier pour rentrer dans la propriété et qu'ensuite est arrivé M. [E] qui a catégoriquement refusé de donner sa pièce d'identité.

La SAS SMS MMS maçonnerie justifie également que par courrier du 14 juillet 2021, la société LEM'CO74 lui a signifié par courrier qu'en raison des faits du 12 juillet 2021 au poste de garde et du refus de présentation d'une pièce d'identité comme prévu par M. [E], le client l'avait informé qu'il gèlerait tous les autres chantiers prévus cette année et que «'par le fait la prochaine mission que nous avions prévu de signer le 26 juillet 2021 pour un montant de 2450000 €... je suis dans le regret de mettre fin à notre collaboration'». M. [E] ne démontre pas la fausseté alléguée de ce courrier.

Le grief est par conséquent constitué.

Sur les faits du 15 juillet 2021':

Si M. [E] ne conteste pas s'être rendu sur les lieux du chantier le 15 juillet 2021, la SAS SMS MMS maçonnerie ne démontre pas qu'il ait adopté une attitude virulente et contestataire comme reproché et que M. [E] ait été notifié de sa convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement et de sa mise à pied conservatoire avant cette date. La matérialité de ces faits n'est pas démontrée.

S'agissant de l'avertissement du 12 juillet 2019, la SAS SMS MMS maçonnerie ne justifie pas de la réalité de sa notification en mains propres à M. [E] ni de la matérialité des faits reprochés.

Le seul fait démontré de ne pas avoir respecté les consignes de l'employeur le 12 juillet 2021 et d'avoir eu pour conséquence la rupture des relations contractuelle de la SAS SMS MMS maçonnerie avec un client dans le cadre d'un marché à venir, est fautif, il ne constitue pas une faute d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien de M. [E] au sein de l'entreprise même pendant la durée du préavis.

Il convient dès lors de juger par voie d'infirmation du jugement, que le licenciement de M. [E] n'est pas nul, mais qu'il est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Il convient dès lors de condamner la SAS SMS MMS à payer à M. [E] les sommes suivantes par voie de confirmation du jugement déféré':

* 2943,36 € au titre de l'indemnité légale de licenciement

* 4095,10 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

M. [E] doit en revanche être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse par voie d'infirmation du jugement déféré.

La mise à pied à titre conservatoire non justifiée, la SAS SMS MMS doit être condamnée à verser à M. [E] un rappel de salaire à ce titre de 1228,50 € par voie de confirmation du jugement déféré

Sur les demandes accessoires':

Il convient de confirmer la décision de première instance s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.

La SAS SMS MMS, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, devra payer à M. [E] la somme de 2000 € au titre de ses frais irrépétibles engagés cause d'appel.

PAR CES MOTIFS':

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a':

- Accordé à M. [E] la somme de 1228,50 € outre 123 € de congés payés afférents au titre du rappel de salaire au titre de la mise à pied et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer ces sommes

- Accordé à M. [E] la somme de 2943,36 € € au titre de l'indemnité de licenciement et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer cette somme

- Accordé à M. [E] la somme de 4095,10 € outre 409 € de congés payés afférents au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer ces sommes,

- Accordé à M. [E] la somme de 1000 € au titre l'article en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile et condamné la SAS SMS MMS maçonnerie à payer cette somme

- Débouté la SAS SMS MMS maçonnerie de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens de l'instance.

INFIRME pour le surplus,

STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,

CONDAMNE la SAS SMS MMS maçonnerie à payer à M. [E] les sommes suivantes':

* 145,8 € à titre de rappel de salaire pour le mois de mars 2020 outre 15 € de congés payés afférents

* 263,65 € de rappel de salaire pour le mois d'avril 2020 outre 26,4 € au titre des congés payés afférents

* 12'285,30 € de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé

DIT que le licenciement de M. [E] n'est pas nul,

DIT que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Y AJOUTANT,

DIT qu'il y a lieu de condamner la SAS SMS MMS aux sommes susvisées «'accordées'» par la juridiction de première instance,

CONDAMNE la SAS SMS MMS à payer la somme de 2000 € à M. [E] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Ainsi prononcé publiquement le 20 Juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, et Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Chbre sociale prud'hommes
Numéro d'arrêt : 22/02049
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.02049 ?
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