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20/06/2024 | FRANCE | N°22/01507

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 20 juin 2024, 22/01507


COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE







ARRÊT DU 20 JUIN 2024



N° RG 22/01507 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HCE4



[Z] [O]

C/ Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 7] etc...

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 7]



Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'ANNEMASSE en date du 22 Juillet 2022, RG F20/00023



APPELANT :



Monsieur [Z] [O]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Rep

résentant : Me Audrey GUICHARD, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS



INTIMEES :



UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 7]

[Adresse 6]

B.P. 37

[Localité 5]

Représentant : Me ...

COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 20 JUIN 2024

N° RG 22/01507 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HCE4

[Z] [O]

C/ Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 7] etc...

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 7]

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'ANNEMASSE en date du 22 Juillet 2022, RG F20/00023

APPELANT :

Monsieur [Z] [O]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Audrey GUICHARD, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

INTIMEES :

UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 7]

[Adresse 6]

B.P. 37

[Localité 5]

Représentant : Me Laetitia GAUDIN de la SCP CABINET DENARIE BUTTIN PERRIER GAUDIN, avocat au barreau de CHAMBERY

S.E.L.A.R.L. MJ SYNERGIE Es qualité de Mandataire Liquidateur de la SAS L'AUBERGE DE [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Jean-marie LAMOTTE de la SELARL LAMOTTE & AVOCATS, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue en audience publique le 12 Mars 2024, devant Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller désigné(e) par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui s'est chargé(e) du rapport, les parties ne s'y étant pas opposées, avec l'assistance de Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,

et lors du délibéré :

Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente,

Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHUILON, Conseillère,

********

Faits, procédure et prétentions

M. [Z] [O] a été engagé en contrat de travail à durée indéterminée le 1er octobre 2018 par la SAS l'auberge de [Localité 8] en qualité de chef de cuisine, niveau V, échelon 1, statut cadre de la convention collective des hôtels, cafés et restaurants, contrat prévoyant une durée mensuelle de travail de 184 heures, soit 42,50 heures par semaine, pour une rémunération mensuelle de 4511,24 euros brut incluant le paiement des heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale.

Le salarié a été en arrêt maladie du 3 au 31 décembre 2019, puis en congés payés à compter du 1er janvier 2020.

Par courrier du 7 janvier 2020, le salarié a été convoqué à un entretien préalable fixé au 21 janvier 2020, et a été mis à pied à titre conservatoire.

Le salarié a été placé en arrêt de travail du 10 au 31 janvier 2020.

M. [Z] [O] a été licencié pour faute gr plus puissant ave par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 6 février 2020.

Par requête du 18 février 2020, M. [Z] [O] a saisi le conseil des prud'hommes d'Annemasse aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement, de solliciter les indemnités afférentes à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

La SAS l'auberge de [Localité 8] a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce en date du 15 février 2021.

La Selarl MJ Synergie a été désignée comme mandataire liquidateur de la société.

Par jugement de départage du'22 juillet 2022, le conseil des prud'hommes d'Annemasse a:

- dit que le licenciement de M. [Z] [O] est sans cause réelle et sérieuse,

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie, les créances suivantes de M. [Z] [O] ':

* 2263,43 € au titre de la mise à pied conservatoire injustifiée, outre 226,34 € au titre des congés payés afférents,

* 1791,87 € au titre de l'indemnité de licenciement,

* 13'580,52 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 1358,05 euros au titre des congés payés afférents,

* 9053,72 € nets de CGS et Crds à titre d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- ordonné à la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie de remettre à M. [Z] [O] les documents de fin de contrat rectifiés (certificat de travail, solde de tout compte et attestation pôle emploi), dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision,

- dit que faute de respecter cette obligation la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie sera redevable d'une astreinte dont le montant sera provisoirement fixé à hauteur de 10 € par jour de retard pendant un délai maximum de six mois et qui pourra être liquidée par le conseil de prud'hommes d'Annemasse,

- condamné la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie à verser à M. [Z] [O] la somme de 1500 € en indemnisation des frais exposés et non compris dans les dépens de l'instance,

- rejeté les demandes formées par M. [Z] [O] tendant':

* à ce que le licenciement prononcé soit déclaré nul comme étant lié à son état de santé,

* à la fixation au passif de la SAS l'auberge de [Localité 8] des sommes suivantes':

-49'939,20 € à titre de rappel de salaire d'heures supplémentaires 2018- 2019 outre 4394 € au titre des congés payés afférents,

- 28'386 € au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

- 8000 € nets de CRG et CRDS à titre de dommages et intérêts du fait du préjudice subi en raison de l'exécution fautive et déloyale du contrat de travail,

- 40'000 € nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du licenciement nul,

- déclaré le jugement opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7],

- rappelé que l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7] devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes des articles L. 3253-17 du code du travail' et l'idée deL.3253-19 du code du travail' ,

- dit que l'obligation de l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7] de faire l'avance des sommes garanties, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire liquidateur et justification de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

- dit que les aides allouées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les dépens et l'astreinte ne constituent pas une créance visée aux articles L. 1253 -6 et suivants du code du travail'et doivent être exclus de la garantie de l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7],

- dit que la garantie de l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7] également plafonné en application des articles L. 3253-17 du code du travail' et D. 3253-5 du code du travail'

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie au paiement des dépens de l'instance.

M. [Z] [O] a relevé appel de cette décision par le Réseau Privé Virtuel des Avocats le 8 août 2022. La SELARL MJ Synergie ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] et l'Unedic délégation AGS-CGEA d'[Localité 7] ont formé appel incident.

Par dernières conclusions notifiées le 25 octobre 2022, auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens, M. [Z] [O] demande à la cour de :

- Confirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a':

* Ordonné à la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie les documents de fin de contrat rectifiés certificat de travail, solde de tout compte et attestation pôle emploi) dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision,

* Dit que faute de respecter cette obligation la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie sera redevable d'une astreinte dont le montant sera provisoirement fixé à hauteur de 10 € par jour de retard pendant un délai maximum de six mois et qui pourra être liquidé par le conseil de prud'hommes d'Annemasse,

* Condamné la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie à verser à M. [O] la somme de 1500 € en indemnisation des frais exposés et non compris dans les dépens de l'instance,

* Déclaré le jugement opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7],

* Rappelé que l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7] devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-8 et suivants du code du travail' que dans les termes des articles L. 3253-17 du code du travail' et l'idée deL.3253-19 du code du travail',

* Dit que l'obligation de l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7] de faire l'avance des sommes garanties, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire liquidateur et justification de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

* Dit que les aides allouées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les dépens et l'astreinte ne constitue pas une créance visée aux articles L. 1253-6 et suivants du code du travail'et doivent être exclus de la garantie de l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7],

* Dit que la garantie de l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7] également plafonné en application des articles L. 3253-17 du code du travail'et D. 3253-5 du code du travail,

* Rejeté le surplus des demandes,

* Condamné la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie au paiement des dépens de l'instance,

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a':

* Dit que le licenciement de M. [Z] [O] est sans cause réelle et sérieuse

* Fixé au passif de la liquidation judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] les sommes suivantes':

-2263,43 € au titre de la mise à pied conservatoire injustifiée, outre 226,34 € au titre des congés payés afférents,

-1791,87 € au titre de l'indemnité de licenciement,

- 13'580,52 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 1358,05 euros au titre des congés payés afférents,

- 9053,72 € nets de CGS et Crds à titre d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* Rejeté ses demandes tendant':

- à ce que son licenciement soit déclaré nul comme étant lié à son état de santé,

- à la fixation au passif de la SAS l'auberge de [Localité 8] des sommes de 49'939,20 € à titre de rappel de salaire d'heures supplémentaires 2018- 2019 outre 4394 € au titre des congés payés afférents, 28'386 € au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé, 8000 € nets de CRG et CRDS à titre de dommages et intérêts du fait du préjudice subi en raison de l'exécution fautive et déloyale du contrat de travail, 40'000 € nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du licenciement nul,

Statuant à nouveau,

- Dire que le licenciement pour faute grave notifié à M. [Z] [O] le 6 février 2020 est nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

- Fixer au passif de la liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] représentée par son mandataire liquidateur la SELARL MJ Synergie les créances suivantes de M. [Z] [O]':

- Au titre de l'exécution du contrat de travail :

* 49'939,20 € à titre de rappel de salaire d'heures supplémentaire 2018-2019 outre 4394 € au titre des congés payés afférents,

* 28'386 € au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

* 8000 € nets de à titre de dommages et intérêts du fait du préjudice subi en raison de l'exécution fautive et déloyale du contrat de travail et du manquement de l'employeur a l'obligation de prévention et de sécurité,

- Au titre de la rupture du contrat de travail':

* 14'193 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 1420 € au titre des congés payés afférents,

* 1872,75 € au titre de l'indemnité de licenciement,

* 2365 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire injustifiée outre 236 € au titre des congés payés afférents,

* 40'000 € nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du licenciement nul, et subsidiairement 9462 € au titre de l'indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance,

- Débouter les défendeurs de l'ensemble de leurs demandes.

Par dernières conclusions notifiées le 23 janvier 2023, auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens, la SELARL MJ Synergie es qualité de liquidateur de la SAS l'auberge de [Localité 8] demande à la cour de :

- Infirmer le jugement déféré,

- A titre principal, débouter M. [Z] [O] de l'intégralité de ses demandes,

- A titre subsidiaire, juger que le licenciement de M. [Z] [O] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- Le condamner au paiement :

* D'une indemnité de 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

* Aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le29 novembre 2022, auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens, l'UNEDIC délégation AGS-CGEA d'[Localité 7] demande à la cour de :

- Juger le jugement intervenir seulement opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 7] sur le fondement de l'article L. 625-3 du Code de commerce,

- Réformer le jugement déféré,

- Juger que le licenciement de M. [Z] [O] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- Débouter M. [Z] [O] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et réformer le jugement déféré qui lui a alloué 9.053, 72 € à ce titre,

- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé 2.263, 43 € de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire outre 226,34 € de congés payés afférents,

- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé 1.791, 87 € d'indemnité de licenciement,

- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé 13.580, 52 € d'indemnité compensatrice de préavis outre 1.358, 05 € de congés payés afférents,

- Débouter M. [Z] [O] de toutes ses autres demandes,

En toute hypothèse,

- Dire et juger que la procédure de liquidation judiciaire de la société l'auberge de [Localité 8] a interrompu de plein droit le cours des intérêts en application de l'article L. 622-28 du Code de commerce,

- Dire et juger qu'elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-6 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et L 3253-17 du Code du Travail,

- Dire et juger que l'indemnité qui serait fixée sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ou sur la loi du 10 juillet 1991 relative à la juridictionnelle et les dépens ainsi que l'astreinte qui serait prononcée doivent être exclus de sa garantie, les conditions spécifiques de celle-ci n'étant pas réunies notamment au visa de l'article L 3253-6 du Code du Travail,

- Dire et juger que sa garantie est encadrée par les articles L 3253-17 et D. 3253-5 du Code du Travail qui prévoient, pour toutes causes de créances confondues, le principe du plafond de garantie de l'AGS applicable aux créances qui seraient fixées au bénéfice de M. [Z] [O] au titre de son contrat de travail.

- Dire et juger que son obligation de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 octobre 2023. Le dossier initialement appelé à l'audience du 5 décembre 2023, a été renvoyé à l'audience du 12 mars 2024. À l'issue, il a été mis en délibéré au 6 juin 2024, délibéré prorogé au 20 juin 2024.

Motifs de la décision

Sur la demande au titre des heures supplémentaires

- Moyens

M. [Z] [O] soutient que son contrat de travail prévoyait une durée mensuelle de travail de 184 heures soit 42,50 heures hebdomadaires, et qu'il a effectué un nombre considérable d'heures supplémentaires au-delà des 184 heures qui n'ont pas donné lieu à contrepartie ni en repos ni en salaire.

La SELARL MJ Synergie es qualité de liquidateur de la SAS l'auberge de [Localité 8] expose que le salarié n'a jamais effectué de réclamation à ce titre durant la relation contractuelle. M. [Z] [O] n'apporte pas d'éléments suffisamment précis aux débats sur les heures supplémentaires qu'il prétend avoir accomplies pour que l'employeur puisse y répondre en produisant ses propres éléments. De plus le contrat de travail a prévu le concernant une rémunération forfaitaire incluant le paiement d'heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale jusqu'à 184 heures mensuelles pour tenir compte des variations d'horaires pouvant être les siennes. Or, ce volume d'heures n'a jamais été dépassé.

L'Unedic soutient que le salarié n'étaye pas suffisamment sa demande et ne justifie pas d'une réclamation à ce titre au cours de l'exécution du contrat de travail. Le relevé qu'il produit n'est pas contresigné par l'employeur, ne mentionne qu'une amplitude de travail, sans déduction des temps de repas. Le salarié a été indemnisé pour ses heures supplémentaires ainsi que le démontrent ses bulletins de paie.

- Sur ce

L'article L3171-4 du code du travail énonce qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles et que si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le salarié produit au soutien de sa demande un récapitulatif de sa main, jour par jour du 1er octobre 2018 au 30 novembre 2019, des horaires de travail qu'il soutient avoir effectués. Il produit également un tableau récapitulatif semaine par semaine sur la même période. Il produit enfin une attestation de M. [Y], qui indique avoir travaillé avec lui en tant que maître d'hôtel, chef de rang et responsable de salle de novembre 2018 à novembre 2019, et qui explique que le nombre d'heures supplémentaires non payées était colossal, qu'il ne lui a jamais été demandé de remplir des feuilles de présence pour justifier de ses heures supplémentaires, et que M. [O] était présent et actif toute la journée, y compris l'après-midi. Il produit enfin des échanges de courriels avec son employeur courant décembre 2019, et notamment un courriel du 2 décembre 2019 dans lequel il indique qu'il fait en moyenne des horaires de 8h30 à 15h00 et de 17h00 à 23h00, qu'il est épuisé physiquement et mentalement.

Il doit être relevé que le décompte manuscrit par jour et le décompte informatique par semaine ne fait apparaître pour aucune des semaines de la période considérée le même nombre d'heures supplémentaires effectuées.

Les éléments produits par le salarié apparaissent néanmoins suffisamment précis pour permettre à l'employeur, qui était tenu au regard notamment des dispositions de l'article 21 de la convention collective d'assurer le contrôle des heures effectuées par le salarié, d'y répondre utilement en produisant ses éléments.

La SELARL MJ Synergie, es qualité de liquidateur de la SAS l'auberge de [Localité 8], produit comme seul élément un graphique comparatif du nombre de couverts servis par l'établissement sur l'année 2019 et du nombre d'heures de travail prétendument effectuées selon le salarié, dont il ressort que ces dernières, qui restent extrêmement constantes, sont incohérentes par rapport à l'importante variation du nombre de couverts servis.

Au regard des éléments produits par chacune des parties, il convient de confirmer la décision du conseil de prud'hommes en ce qu'elle a débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.

Sur la demande au titre du travail dissimulé

- Moyens

Le salarié expose que l'employeur ne peut prétendre avoir ignoré l'ampleur des heures que réalisait son chef de cuisine. L'élément intentionnel est d'autant plus caractérisé que l'employeur n'a pas régularisé la situation malgré ses relances sur ce point.

La SELARL MJ Synergie es qualité de liquidateur de la SAS l'auberge de [Localité 8] expose que l'employeur conteste toute dissimulation d'heures supplémentaires qui ont été effectuées ; que le salarié ne produit aucun élément de nature à prouver qu'il aurait intentionnellement commis un délit de travail dissimulé.

L'Unedic soutient que le salarié ne peut se contenter d'affirmer caractériser l'intention de dissimulation des heures supplémentaires par l'employeur ; que celui-ci ne justifie pas d'éléments suffisamment précis permettant de penser que son employeur aurait intentionnellement dissimulé des heures supplémentaires.

- Sur ce

Aux termes des dispositions de l'article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Aux termes des dispositions de l'article L. 8223-1 du même code : ' En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.'

Le paiement de cette indemnité suppose de rapporter la preuve, outre de la violation des formalités visées à l'article L'8223-1, de la volonté chez l'employeur de se soustraire intentionnellement à leur accomplissement.

En l'espèce, le salarié fonde sa demande de travail dissimulé que sur l'existence d'heures supplémentaires non prévues au contrat de travail et qui n'auraient pas été déclarées par l'employeur. Or, il n'a pas été retenu l'existence d'heures supplémentaires effectuées en dehors de celles prévues au contrat de travail et qui n'auraient pas été rémunérées.

En conséquence, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a débouté le salarié de sa demande à ce titre.

Sur'le manquement à l'obligation de prévention et de sécurité et l'exécution fautive et déloyale du contrat de travail

- Moyens

Le salarié expose que ce manquement est caractérisé par le non-respect de la durée maximale du travail et le non-respect des temps de repos. Le laissant volontairement accomplir plus d'heures que la législation ne le permet et en ne respectant pas les temps de repos obligatoire, l'employeur l'a exposé à un risque dans un contexte de sous-effectif le conduisant à un véritable épuisement physique et moral constaté par l'employeur et confirmé médicalement. Par ailleurs, ce dernier n'a jamais communiqué le document unique d'évaluation des risques professionnels.

La SELARL MJ Synergie es qualité de liquidateur de la SAS l'auberge de [Localité 8] et l'Unedic contestent toute exécution fautive du contrat de travail et manquement à l'obligation de sécurité. Elle conteste l'exécution d'heures supplémentaires et fait remarquer que son arrêt de travail a évolué en régime maladie simple sans signalement ni aucune intervention de la médecine du travail. Le certificat médical a été établi après le licenciement et il n'est pas justifié d'un épuisement professionnel. En outre, il ne justifie pas du quantum de son préjudice prétendu à ce titre.

- Sur ce

Il résulte de l'article L. 4121-1 du Code du travail que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

L'article L. 4121-2 du même code précise'que l'employeur met en 'uvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L. 1152-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.

Selon la jurisprudence, l'employeur peut s'exonérer de sa responsabilité s'il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail.

Par ailleurs, il résulte de l'article R4121-1 du code du travail que l'employeur transcrit et met à jour dans un document unique les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs à laquelle il procède en application de l'article L. 4121-3. Cette évaluation comporte un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail de l'entreprise ou de l'établissement, y compris ceux liés aux ambiances thermiques.

Il sera relevé à titre liminaire que le salarié ne développe aucun moyen et ne fonde aucunement sa demande sur une exécution fautive et déloyale du contrat de travail, mais uniquement sur un manquement à l'obligation de sécurité.

Le salarié évoque un non-respect de la durée maximale de travail et le non-respect des temps de repos. Cependant, il n'a pas été retenu que celui-ci avait effectué des heures supplémentaires en dehors de celles prévues à son contrat de travail, et les éléments produits par le salarié ne permettent pas de retenir que l'employeur n'a pas respecté son obligation de sécurité dans le cadre de la durée maximale de travail et des temps de repos.

Par ailleurs, l'employeur ne produit pas le document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP), ce qui constitue un manquement à son obligation de prévention et de sécurité envers le salarié.

Le salarié justifie par les échanges de courriels avec son employeur en décembre 2019, par ses arrêts de travail en décembre 2019 et janvier 2020 ainsi que par les courriers d'un médecin généraliste qu'il a été victime d'une situation d'épuisement physique et/ou psychique notamment en lien avec son activité professionnelle. L'absence de DUERP n'a pas permis la mise en place au sein de l'entreprise de mesures de nature à prévenir ce risque d'épuisement professionnel, ce qui a contribué à la dégradation de l'état de santé du salarié et lui a donc causé un préjudice.

En conséquence, la décision sur ce point du conseil de prud'homme sera infirmée, et il sera fixé au passif de la SAS l'auberge de [Localité 8] la somme de 1000 euros net de dommages et intérêts au titre du non-respect par l'employeur de son obligation de sécurité.

Sur'le licenciement

- Moyens

Le salarié expose qu'il donnait satisfaction dans son travail tant du point de vue de ses compétences professionnelles que de son comportement'; que s'il a quitté son poste de travail le 30 novembre 2019, c'est en raison d'un état d'épuisement constaté par son employeur et corroboré par les éléments médicaux qu'il produit'; qu'il a été placé en arrêt de travail à compter du 3 décembre 2019, arrêt que l'employeur lui-même lui a conseillé de prolonger, reconnaissant son état d'épuisement. La concomitance entre l'engagement de la procédure de licenciement et la révélation de la dégradation de son état de santé laisse présumer le lien entre elles. Le licenciement est discriminatoire puisqu'on lui reproche d'avoir quitté son poste de travail pour des raisons de santé.

Subsidiairement, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse puisque le départ de son poste de travail trouvait son origine dans son état d'épuisement professionnel.

La SELARL MJ Synergie es qualité de liquidateur de la SAS l'auberge de [Localité 8] expose que le licenciement ne trouve pas sa cause dans l'état de santé du salarié, mais dans l'abandon brutal de son poste un samedi soir juste avant le service'; que la meilleure preuve en est que l'employeur s'inquiétait et se souciait, dans les courriels adressés au salarié, de son état de santé ; que celui-ci ne conteste pas avoir quitté son poste le 30 novembre 2019 sans autorisation de l'employeur, ce qui constitue un manquement grave à ses obligations contractuelles'; que le salarié n'a produit un certificat médical que trois jours plus tard'; que la procédure de licenciement n'a été engagée qu'en janvier 2020 car l'employeur attendait la fin de l'arrêt maladie du salarié.

L'Unedic expose que le salarié reconnaît avoir quitté son poste de travail, ce que l'employeur n'a jamais autorisé'; que ce dernier n'a fait que prendre acte de sa déclaration selon laquelle son état de fatigue l'avait conduit à ne pas assurer son service, et lui a demandé des explications sur son départ brutal. Il n'a cependant pas renoncé à se prévaloir de l'abandon de poste. Les messages échangés entre les parties démontrent que l'employeur ne reprochait pas au salarié son état de santé et que ce dernier constituait bien pour lui un sujet d'inquiétude. Cet abandon de poste est de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

- Sur ce

Il résulte de l'article L1132-1 du code du travail tel qu'applicable aux faits de l'espèce qu'aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap.

La loi n°2008-496 du 27 mai 2008 à laquelle se rapporte ce texte dispose d'une part que constitue une discrimination directe la situation dans laquelle sur le fondement de son appartenance, ou de son non appartenance vrai ou supposée, à une ethnie, ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation ou identité sexuelle ou son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable et d'autre part que constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'application, pour l'un des motifs mentionnées au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes à moins que cette disposition, le critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés.

En application de l'article L1132-4 du code du travail, le licenciement prononcé en raison de l'état de santé d'un salarié est nul.

L'article L 1134-1 du code du travail dispose que 'Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.

En l'espèce, le salarié établit qu'il n'a jamais fait l'objet d'une sanction depuis son entrée dans l'entreprise'; qu'après avoir quitté son poste de travail le samedi 30 novembre 2019 au soir, il a informé par courriel son employeur dès le lundi 2 décembre au matin de ce qu'il s'estimait épuisé physiquement et surtout mentalement, qu'il était dépassé par le travail'; qu'il a adressé un arrêt de travail à son employeur à la première date utile, soit le mardi 3 décembre à 8h32, étant relevé qu'il ne travaillait ni le 1er ni le 2 décembre'; que son arrêt de travail courait jusqu'au 31 décembre 2019'; que le restaurant était fermé pour congés annuels jusqu'au 14 janvier 2020 (courriel de M. [C] du 30 décembre 2019)'; qu'il n'a ainsi jamais repris le travail avant d'être convoqué le 7 janvier, soit durant ses congés, pour un entretien préalable à éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement'; que lors de cet entretien qui s'est tenu le 21 janvier 2020, le salarié a proposé une rupture conventionnelle'; que par courriel du 23 janvier 2020, il a refusé les conditions proposées par l'employeur au titre de la rupture conventionnelle'; que le salarié a finalement été licencié le 6 février 2020.

Les courriers de son médecin généraliste produits par le salarié démontrent que son arrêt de travail du mois de décembre 2020 est en lien avec une problématique professionnelle.

Ces éléments de fait établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une discrimination en raison de l'état de santé du salarié.

En réponse, l'employeur soutient que le licenciement pour faute grave est intervenu uniquement en raison de l'abandon de poste du salarié le 30 novembre au soir, avant le début du service, un soir de forte affluence.

L'employeur ne reprend pas au sein de ses conclusions les griefs figurant dans la lettre de licenciement relatifs à la forte agressivité dont aurait fait preuve le salarié durant la dernière semaine de novembre tant auprès de ses collègues que de la direction, du fait que ce comportement avait dégradé l'atmosphère de travail, poussant même certains salariés à vouloir quitter l'entreprise, du faite que lors d'un entretien 30 novembre 2019 le salarié aurait manifesté une violence verbale particulièrement forte à son encontre.

En tout état de cause, l'employeur ne produit aucun élément de nature à démontrer ni même accréditer ces griefs.

La décision de l'employeur de licencier le salarié pour faute grave en raison de son abandon de poste du 30 novembre 2019 au soir apparaît incohérente au regard du courriel envoyé par M. [I], président de la SAS l'auberge de [Localité 8], à M. [Z] [O] le 2 décembre, par lequel il semble comprendre les raisons de son départ de son poste de travail en lui disant «'j'ai bien noté votre état de fatigue physique et morale qui vous a conduit à ne pas assurer votre service samedi soir dernier. Comme votre médecin vous le conseille, je pense qu'il serait souhaitable de prendre quelques jours de repos'». Elle apparaît encore plus incohérente au regard du courriel de M. [C], directeur financier et RH, du 13 décembre 2019 qui indique au salarié «'de toi à moi, M. [I] m'a dit qu'il t'avait vraiment pas trouvé en forme'». L'employeur ne s'explique absolument pas sur l'incohérence de son attitude.

Le salarié produit des courriers de son médecin généraliste qui démontrent le lien entre ses arrêts de travail et les difficultés professionnelles qu'il allègue.

Le fait que le salarié ait quitté son poste de travail sans l'autorisation de son employeur le 30 novembre 2019 ne saurait constituer une faute grave ni même une cause réelle et sérieuse de licenciement, alors que':

- celui-ci n'avait jusqu'alors fait l'objet d'aucune sanction';

- qu'il justifie d'un arrêt de travail du 3 au 31 décembre 2019 en raison d'une problématique de santé en relation au moins partielle avec son travail';

- que l'employeur a eu, au moins dans un premier temps, une attitude compréhensive par rapport à cet abandon de poste, incitant même le salarié à se mettre en arrêt de travail, et a manifestement constaté par lui-même que le salarié n'était pas en forme.

En ne tirant pas les conséquences de ses propres constatations quant à l'état de santé du salarié qui était de nature à justifier ou au moins à éclairer les raisons de son abandon de poste, l'employeur ne justifie pas d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Ainsi, l'employeur ne prouve pas que sa décision de licencier le salarié est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

La nullité du licenciement pour discrimination liée à l'état de santé est donc prononcée. Le jugement déféré est infirmé sur ce point.

En application de l'article L 1235-3-1 du code du travail, le salarié est en droit de solliciter une indemnité au titre de la nullité du licenciement qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, soit 28270,51 euros.

Le salarié soutient qu'il n'a pu retrouver du travail avant de long mois en raison de la crise sanitaire qui a entraîné la fermeture de nombreux restaurants. Il justifie avoir perçu l'allocation de retour à l'emploi au moins jusqu'en septembre 2020 pour un montant mensuel moyen de 2218 euros. Il ne justifie pas de sa situation professionnelle après cette date. S'il évoque un préjudice moral «évident'», il ne produit aucun justificatif sur ce point. Enfin, s'il soutient que l'employeur ne lui a toujours pas restitué l'intégralité de ses outils de travail et effets personnels, il n'en justifie pas.

Au regard de ces éléments, il lui sera alloué à ce titre la somme de 28'300 € net.

Le salarié est également droit de percevoir un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire. Son salaire mensuel brut moyen sur les 12 derniers mois précédant son arrêt maladie est de 4730,98 euros. Au regard de ces éléments, la décision déférée sera infirmée, il lui sera alloué à ce titre la somme de 2365 €, outre 236 € de congés payés afférents.

Le salarié est en droit de percevoir l'indemnité compensatrice de préavis, soit pour trois mois de préavis la somme de 14'192,94 euros, outre 1419,29 euros de congés payés afférents.

Il est enfin droit de percevoir l'indemnité légale de licenciement qui, au regard de son ancienneté d'un an et sept mois à l'issue du préavis, se monte à la somme de 1872,67 euros net.

Sur la demande de remise des documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte

Il sera ordonné à la SELARL MJ Synergie ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] de remettre à M. [Z] [O] un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation France Travail rectifiée en tenant compte de la présente décision.

Il n'y a pas lieu à prononcer d'astreinte.

Sur les dépens à l'article 700 du code de procédure civile

La SELARL MJ Synergie ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8], succombant à l'instance, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

La décision déférée sera confirmée s'agissant de la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sauf à dire que cette créance sera fixée au passif de la liquidation, et il sera fixé au passif de la SAS l'auberge de [Localité 8] la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La présente décision sera déclarée opposable à l'Unedic AGS-CGEA d'[Localité 7].

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare M. [Z] [O], la SELARL MJ Synergie ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] et l'Unedic délégation AGS-CGEA d'[Localité 7] recevables en leurs appel et appels incidents,

Confirme le jugement de départage du conseil de prud'hommes d'Annemasse du 22 juillet 2022 en ce qu'il a':

- débouté M. [Z] [O] de ses demandes au titre des heures supplémentaires et du travail dissimulé,

- ordonné à la SELARL MJ Synergie ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] de remettre à M. [Z] [O] un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation France Travail rectifiés, sauf à dire que ces documents devront tenir compte de la présente décision,

- débouté la SELARL MJ Synergie ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SELARL MJ Synergie ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] aux dépens de première instance,

- déclaré le jugement opposable à l'Unedic délégation AGS CGEA d'[Localité 7],

Infirme pour le surplus le jugement de départage du conseil de prud'hommes d'Annemasse du 22 juillet 2022,

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. [Z] [O] est nul pour discrimination en raison de son état de santé,

Fixe la créance de M. [Z] [O] à':

- la somme de 1000 euros net de dommages et intérêts au titre du non-respect par l'employeur de son obligation de sécurité,

- la somme de 28'300 euros net à titre d'indemnité pour licenciement nul,

- la somme de 2365 euros, outre 236 euros de congés payés afférents, à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire,

- la somme de 14'192,94 euros, outre 1419,29 euros de congés payés afférents, au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- la somme de 1872,67 euros net à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant de la première instance,

Dit que ces sommes seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8],

Dit n'y avoir lieu à prononcer d'astreinte s'agissant de la remise des documents de fin de contrat modifiés,

Y ajoutant

Condamne la SELARL MJ Synergie ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8], aux dépens d'appel,

Fixe à 1000 euros la créance de M. [Z] [O] sur la liquidation judiciaire de la SAS l'auberge de [Localité 8] au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel

Dit que cette somme sera inscrite au passif de la liquidation judiciaire de l'auberge de [Localité 8],

Dit que la SELARL MJ Synergie sera tenue de procéder au règlement des créances fixées et que faute de fonds disponibles, elle devra adresser à l'Unedic délégation AGS CGEA d'[Localité 7] les relevés de créances prévues par les articles L 3253-19 et L 3253-20 du code du travail,

Dit que l'Unedic délégation AGS CGEA d'[Localité 7] ne devra sa garantie que dans les cas et conditions définies par L 3253-8 du code du travail et dans la limite des plafonds légaux prévue par les articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail.

Ainsi prononcé publiquement le 20 Juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller faisant fonction de Président, et Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Chbre sociale prud'hommes
Numéro d'arrêt : 22/01507
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.01507 ?
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