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11/04/2024 | FRANCE | N°22/01872

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 11 avril 2024, 22/01872


COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE











ARRÊT DU 11 AVRIL 2024



N° RG 22/01872 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HDXJ



[X] [Y]

C/ Association SAINT NABOR SERVICES





Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHAMBERY en date du 03 Octobre 2022, RG F 22/00058



Appelante



Mme [X] [Y]

née le 16 Avril 1998 à [Localité 8], demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Christian MENARD, avocat au barr

eau de CHAMBERY

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C38185-2023-000937 du 19/04/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 4])



Intimée



Associ...

COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 11 AVRIL 2024

N° RG 22/01872 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HDXJ

[X] [Y]

C/ Association SAINT NABOR SERVICES

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHAMBERY en date du 03 Octobre 2022, RG F 22/00058

Appelante

Mme [X] [Y]

née le 16 Avril 1998 à [Localité 8], demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Christian MENARD, avocat au barreau de CHAMBERY

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C38185-2023-000937 du 19/04/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 4])

Intimée

Association SAINT NABOR SERVICES, demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me François SIMON de la SELARL THEYMA, avocat au barreau de CHAMBERY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, le 8 février 2024 par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente de la Chambre Sociale, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Monsieur Cyril GUYAT, conseiller, assisté de Monsieur Bertrand ASSAILLY, greffier, à l'appel des causes, dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré.

Et lors du délibéré par :

Madame Valéry CHARBONNIER, Président,

Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller

Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,

********

Exposé du litige :

Mme [X] [Y] a été embauchée le 1er avril 2019 en contrat à durée indéterminée par l'Association Saint Nabor Services en qualité d'agent d'accueil et d'entretien.

L'association gère notamment la gestion des aires d'accueil des gens du voyage et des terrains familiaux.

Mme [Y] a fait l'objet d'un arrêt de travail à compter du mois d'août 2020.

Mme [Y] a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 21 juillet 2021.

Par requête du 6 avril 2022, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Chambéry aux fins de juger que, l'employeur a exécuté de manière déloyale son contrat de travail, faire requalifier la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir les indemnités afférentes

Par jugement du 3 octobre 2022, le Conseil de prud'hommes de Chambéry a :

Débouté Mme [X] [Y] de sa demande de rappel de salaire sur les mois de mars 2020, avril 2020 et mai 2020 et de sa demande de dommage et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, préjudice moral et travail dissimulé ;

Dit que Mme [X] [Y] n'apportait pas la preuve d'un comportement fautif de l'employeur justifiant la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail ;

Débouté Mme [X] [Y] de sa demande de paiement d'un préavis, d'une indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et préjudice moral ;

Dit que la rupture du contrat du contrat de travail produisait les effets d'une démission ;

Rejeté la demande de Mme [X] [Y] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par déclaration au RPVA du 3 novembre 2022, Mme [X] [Y] a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions du 2 février 2023, Mme [X] [Y] demande à la cour d'appel de :

Déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par Mme [X] [Y] à l'encontre du jugement déféré,

Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Chambéry du 3 octobre 2022,

Rejetant toutes fins et conclusions contraires,

Condamner l'Association Saint-Nabor Services à payer à Mme [X] [Y] les sommes de :

516,30 € au titre de rappel de salaires sur mars avril et mai 2020, outre les congés payés afférents, soit 51,63 € ;

2 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et préjudice moral,

12 600 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.

Requalifier la rupture du contrat de travail de Mme [X] [Y] en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamner l'Association Saint-Nabor Services à payer à Mme [X] [Y] les sommes de :

4 200.18 € au titre du préavis, outre les congés payés afférents, soit 420.01 € ;

1 299.41 € au titre de l'indemnité de licenciement,

10 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et à titre subsidiaire la somme de 7 350,31 € à titre de dommages et intérêts,

5 000 € au titre du préjudice moral

3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Débouter l'Association Saint-Nabor Services de ses demandes.

Condamner l'Association Saint-Nabor Services aux dépens.

Par conclusions en réponse du 6 septembre 2023, l'Association Sait Nabor Services demande à la cour d'appel de :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

Débouté Mme [X] [Y] de sa demande de rappel de salaire sur les mois de mars 2020, avril 2020 et mai 2020 et de sa demande de dommage et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, préjudice moral et travail dissimulé ;

Dit que Mme [X] [Y] n'apporte pas la preuve d'un comportement fautif de l'employeur justifiant la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail;

Déboute Mme [X] [Y] de sa demande de paiement d'un préavis, d'une indemnité de licenciement; de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et préjudice moral ;

Dit que la rupture du contrat du contrat de travail produit les effets d'une démission;

Rejette la demande de Mme [X] [Y] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamnera Mme [X] [Y] à verser à l'Association Saint Nabor Services la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI :

Sur la demande de rappel de salaires pour les mois de mars, avril et mai 2020 et l'indemnisation pour travail dissimulé.

Moyens des parties :

Mme [Y] sollicite un rappel de salaires pour les mois de mars, avril et mai 2020 et soutient que malgré sa mise au chômage partiel à compter du 17 mars 2020 jusqu'au 11 mai 2020, elle a continué à travailler à temps complet malgré l'épidémie Covid19 avec des interventions matérielles sur site tous les deux jours et du télétravail de son domicile comme il en ressort du registre du suivi des sites en période de confinement, des rapports journaliers d'activité adressés à son employeur tous les lundis produits, et du bilan mensuel de gestion de l'aire d'accueil des gens du voyage établi mensuellement par l'employeur. Elle conteste le rajout des deux colonnes à droite par l'employeur sur les RJA.

Mme [Y] sollicite également une indemnisation au titre du travail dissimulé, l'employeur ayant fraudé 'sur son dos' et qui a intentionnellement dissimulé des heures travaillées.

L'Association Saint Nabor Services conteste le travail à temps plein de Mme [Y] pendant la période de chômage partiel. Elle explique que les missions de la salariée consistaient dans le contexte du confinement, à assurer un service minimum pour activer les bornes de fluides et ne pas laisser les résidents sans eau ni électricité. Elle expose avoir mis en place une procédure de contrôle des temps de travail sur la base d'un tableau auto déclaratif renseigné par Mme [Y] elle-même et que ces temps ont ensuite été regroupés et payés. Des heures supplémentaires lui ont ainsi été payées et un complément d'activité partielle lui a été versé pour conserver une rémunération à 100 %. Elle conteste toute intention frauduleuse de dissimuler une partie de l'activité de la salariée.

Sur ce,

Aux termes de dispositions de l'article L. 5122-1 du code du travail, le contrat de travail des salariés placés en activité partielle est suspendu pendant les périodes où ils ne sont pas en activité. Il en résulte que pendant ces périodes, le salarié ne doit, ni être sur son lieu de travail, ni se tenir à la disposition de l'employeur ou se conformer à ses directives, et l'employeur a l'interdiction de lui demander de travailler, y compris en télétravail.

L'article L. 3171-4 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. En application de ces dispositions, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties.

En l'espèce, Il n'est pas contesté que Mme [Y] a été placée en chômage partiel du 17 mars 2020 au 11 mai 2020.

Il ressort de la copie d'un extrait du registre de suivi des sites en période de confinement que Mme [Y] s'est déplacée sur site (aire d'accueil des gens du voyage) les 18, 20, 21, 26, 30 mars, 3, 7, 9, 14, 16, 21, 23, 27, 29 avril et 4 et 6 mai 2020 pendant la période chômage partiel.

Si ce document ne précise pas l'amplitude du temps d'intervention sur place de Mme [Y], l'Association Saint Nabor Services, à qui il incombe de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, ne démontre pas que sa propre copie d'un extrait du registre de suivi des sites en période de confinement qui comporte en plus de manière manuscrite le temps de travail prétendu de Mme [Y], ait été rempli par Mme [Y], ce document n'étant pas signé par les parties.

Il ressort toutefois des relevés de pointage non contestés par la salariée et versés aux débats par l'employeur que Mme [Y] a travaillé sur site comme suit :1 heure le 18 mars, 2 heures le 20 mars et 30 minutes le 21 mars 2020, 10 minutes le 25 mars, 1H10 le 26 mars, 1 heure le 30 mars, 1 heure le 1er avril, 1 heure le 3 avril, 1 heure le 7 avril, 1 heure le 9 avril, 1 heure le 14 avril, 30 minutes le 15 avril, 1 heure le 16 avril, 2 heures le 21 avril, 1 heures 30 le 23 avril, 1H30 le 27 avril, 10 minutes le 30 avril, 1H15 le 4 mai, 20 minutes le 5 mai et 2 heures le 6 mai 2020.

S'il doit être noté qu'il convient en plus du temps passé sur site d'ajouter les temps de déplacement, Mme [Y] ne justifie pas comme elle le conclut, qu'en plus des interventions sur site dont le temps a été relevé, elle effectuait tous les autres jours à temps complet des formalités administratives en télétravail.

Il n'est par ailleurs pas contesté que Mme [Y] a été rémunérée pour des heures supplémentaires à la charge de l'employeur à hauteur de 7H40 pour la période du 11 mars à fin mars 2020 et de 12H78 pour le mois d'avril 2020.

Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré et de débouter Mme [Y] de ses demandes de rappels de salaires et de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé fondée sur le non-respect du chômage partiel et la dissimulation d'activité salariée.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail  :

Moyens des parties :

Mme [Y] sollicite des dommages et intérêts pour préjudice moral au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail du fait de l'exécution de son travail à temps complet pendant une période de chômage partiel et dans des conditions de stress, ayant eu peur pour sa santé du fait du contact régulier avec le personnel et les gens du voyage, difficultés de devoir respecter les gestes barrière et la perspective de devoir porter gants et masques.

L'Association Saint Nabor Services ne conclut pas sur ce point.

Sur ce,

Aux termes des dispositions de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. L'employeur doit en respecter les dispositions et fournir au salarié le travail prévu et les moyens nécessaires à son exécution en le payant le salaire convenu. Le salarié doit s'abstenir de tout acte contraire à l'intérêt de l'entreprise et de commettre un acte moralement ou pénalement répréhensible à l'égard de l'entreprise. Il lui est notamment interdit d'abuser de ses fonctions pour s'octroyer un avantage particulier.

En l'espèce, il a non seulement été jugé qu'il n'était pas démontré que Mme [Y] avait travaillé à temps complet pendant la période de chômage partiel, mais Mme [Y] ne démontre pas l'existence d'un stress particulier lié à la continuité de son activité professionnelle pendant la pandémie, ni ne pas avoir bénéficié des protections nécessaires à cette activité, concluant elle-même qu'elle savait qu'elle allait porter masque et gants. Elle doit par conséquent être déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail :

Moyens des parties :

La salariée soutient qu'elle a été contrainte de rompre son contrat de travail en raison des manquements de son employeur et que cette prise d'acte doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle expose les manquements suivants de la part de l'employeur :

Le non-respect du lieu de travail inscrit dans le contrat de travail

Le non-respect des dispositions de l'article L.1222-4 du code du travail s'agissant des caméras de vidéosurveillance installées qans qu'elle en soit informée et de manière non proportionnée à la finalité poursuivie

Le non-respect du repos hebdomadaire et journalier, Mme [Y] recevant des appels nombreux et des SMS sur son téléphone en dehors du temps de travail, le soir, la nuit en semaine mais également le week-end.

Le non-respect des dispositions relatives au contrat de prévoyance

Le non-respect de l'obligation de se sécurité de résultat s'agissant des agissements et propos dégradants et humiliants de M. [V], supérieur hiérarchique.

L'employeur fait valoir pour sa part que la prise d'acte doit produire les effets d'une démission. Il expose que:

S'agissant du lieu de travail : la clause de mobilité était parfaitement valable puisqu'elle était limitée aux départements de la Savoie et de la Haute Savoie, que l'association ne l'a jamais étendue unilatéralement et que sa mission a [Localité 6] lui a valu une augmentation de 10% de son salaire. Que la salariée n'a contesté cette affectation uniquement 16 mois après, laissant douter sur l'opportunité de cette contestation,

Sur la vidéosurveillance: les caméras ont été installées par une société tierce non employeur de la salariée dans le but de surveiller la zone du coffre-fort et pas son poste de travail, et uniquement aux heures de présences des salariés de l'entreprise sous-traitante. L'association n'avait pas accès aux contenus de la vidéosurveillance,

Sur le non-respect des repos hebdomadaires et journaliers : la salariée a de sa propre initiative, laissé son numéro de téléphone personnel à des interlocuteurs qui ne devaient, normalement, ne disposer que de son portable professionnel. Elle ne peut ainsi opposer à son employeur un prétendu manquement fautif, alors qu'elle est elle-même à l'origine de la situation qu'elle dénonce,

Sur le non-respect des dispositions relatives au contrat de prévoyance : l'association s'est bien acquittée de toutes ses obligations, puisque tous les mails échangés avec l'organisme montrent que ce sont les propres délais de traitement de l'organisme de prévoyance, extrêmement longs, qui sont à l'origine de ce retard et les délais post rupture du contrat de travail ne peuvent être invoqués en motif de prise d'acte,

Sur le non-respect de l'obligation de sécurité de résultat : la plainte contre M. [V] a été classée sans suite et le comportement de M. [V] était professionnel et bienveillant.

Sur ce,

Il est constant que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail. Il appartient au salarié de rapporter la preuve des manquements invoqués à l'encontre de son employeur.

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture, qui entraîne la cessation immédiate du contrat de travail, produit les effets soit d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission. La prise d'acte n'est soumise à aucun formalisme.

En l'espèce, Mme [Y] a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 21 juillet 2021 et reproche à son employeur les manquements suivants :

Le non-respect du lieu de travail inscrit dans le contrat de travail :

La mutation d'un salarié en présence d'une clause de mobilité stipulée dans son contrat de travail est licite et s'analyse en un changement de ses conditions de travail relevant du pouvoir d'administration et de direction de l'employeur.

Il est de jurisprudence constante que l'employeur peut en principe imposer une mutation au salarié dont le contrat de travail comporte une clause de mobilité à la condition que celle-ci définisse de façon précise sa zone géographique d'application, qu'elle soit appliquée de bonne foi et que sa mise en 'uvre soit dictée par l'intérêt de l'entreprise. Le juge doit également contrôler que son application ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit du salarié à une vie personnelle et familiale.

La bonne foi étant présumée, cet intérêt l'est aussi, et il incombe au salarié de démontrer que la décision de l'employeur a, en réalité, été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt ou bien qu'elle ait été mise en 'uvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle

Le refus par le salarié d'une nouvelle affectation aux termes de la clause de mobilité sans motif légitime peut être qualifié de faute grave.

Il est de jurisprudence constante que la mention du lieu de travail dans le contrat de travail à valeur d'information à moins qu'il soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans ce lieu.

En l'espèce, il ressort des termes de son contrat à durée indéterminée de Mme [Y] en date du 1er avril 2019, qu'elle est affectée au sein de l'aire d'accueil des gens du voyage de [Localité 7] (73) et pourra se rendre à la demande de son supérieur hiérarchique au local de l'établissement situé [Adresse 9] à [Localité 5] et qu'une aide peut être demandée à la gestion des aires et des terrains familiaux sur le territoire de la Savoie et/ou de la Haute Savoie (sites gérés par Saint Nabor Services ).

Il figure également au contrat une clause de mobilité (article 8) rédigé comme suit : «  en cas de besoin justifié notamment par l'évolution de ses activités ou de son organisation et plus généralement par la bonne marche de l'association, Saint Nabor Services se réserve le droit de muter provisoirement ou définitivement Mme [Y] dans l'un des services de l'association. En cas de mise en date de la présente clause Mme [Y] sera informé huit jours avant son affectation effective dans son nouveau service. Cette clause sera effective huit jours après réception du courrier l'informant de son nouvel emploi. En cas de refus du salarié ceci sera assimilé à une faute grave. »

Il doit être retenu que la clause de mobilité définit de façon suffisamment précise sa zone géographique d'application à savoir le périmètre limité à la Savoie et la Haute-Savoie dans l'un des services de l'association. Il convient dès lors de débouter Mme [Y] de sa demande de nullité de la clause de mobilité géographique à ce titre.

S'agissant du respect du délai de prévenance, il n'est pas contesté qu'il a été demandé à Mme [Y] en juin 2019 d'assurer le remplacement de l'agent d'accueil et d'entretien de l'aire d'[Localité 6] (74) jusqu'à l'embauche d'un agent fixe avec en contrepartie le paiement de 200 € d'heures supplémentaires et l'attribution d'un véhicule de service. Non seulement cette nouvelle affectation respecte les conditions de la clause de mobilité géographique susvisée, mais Mme [Y] a indiqué au médecin du travail avoir accepté sa nouvelle affectation dans l'espoir de promotion professionnelle sans remettre en cause cette affectation. Mme [Y] ne justifie pas avoir été contrainte de modifier du jour au lendemain son organisation personnelle et familiale ni avoir subi un état de stress et d'insécurité comme conclu. Il ne ressort pas de la réponse à son courrier de demande d'information du 23 septembre 2019, qu'elle se soit opposée à cette décision.

Ce manquement n'est pas établi.

Le non-respect des dispositions de l'article L.1222-4 du code du travail s'agissant des caméras de vidéosurveillance installées sans qu'elle en soit informée et de manière non proportionnée à la finalité poursuivie

L'article L. 1222-4 du code du travail dispose qu'aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été porté préalablement à sa connaissance.

En l'epsèce, il n'est pas justifié que Mme [Y] ait été informée par l'Association Saint Nabor Services de la présence dans les locaux professionnels de caméras.

Toutefois, il ressort des éléments versés aux débats et notamment de l'attestation de la société APER Sécurité chargée de la surveillance des locaux, qu'en l'espèce deux caméras ont été installées par la société APR Sécurité à la demande de l'Association Saint Nabor Services dans le bureau de l'aire de passage des gens du voyage à [Localité 6] pour surveiller les installations qui filment le coffret des clés des édicules et le coffre-fort, le tableau électrique général à l'entrée et la banque d'accueil, la porte de secours et la réserve des outils toutes les nuits de 17 à 8 heures et le week-ends du samedi du samedi 12 heures au lundi matin 8 heures, cette installation ayant été rendue nécessaire par la mise en cause des personnels de APR dans l'utilisation des infrastructures de l'Association Saint Nabor Services de manière inadaptée et pour protéger leurs agents en cas d'agression. La prise de vue étant sauvegardée pendant 7 jours.

Le système de vidéo-surveillance ne fonctionne donc pas en permanence mais uniquement pendant les périodes de présence des agents de sécurités APR et non des salariés de l'Association Saint Nabor Services en journée et ne filment pas le bureau, ces vidéos étant uniquement à destination du prestataire chargé de la sécurité. Mme [Y] ne justifiant pas d'une atteinte à sa vie personnelle.

Ce manquement n'est pas établi.

Le non-respect du repos hebdomadaire et journalier

Il résulte des dispositions de l'article L.3131-1 et L. 3132-2 du code du travail que tout salarié bénéficie d'un repos hebdomadaire d'une semaine à l'autre, d'au moins 24 heures consécutives. Il faut ajouter à ces 24 heures légales, l'obligation de repos quotidien de 11 heures consécutives entre 2 jours de travail. La preuve qu'il a respecté le repos quotidien incombe à l'employeur. Le salarié a également droit à la déconnexion afin de préserver sa vie personnelle et familiale.

Il ressort en l'espèce de la synthèse des appels téléphoniques reçus par Mme [Y] et versée aux débats qu'elle a reçu sur son téléphone personnel sur une période de 7 mois de relation contractuelle, 15 appels et 14 SMS en soirée y compris les week-ends. Si l'employeur ne justifie pas quant à lui de la date à laquelle Mme [Y] a bénéficié d'un téléphone professionnel, il justifie que Mme [Y] a indiqué au médecin du travail lors d'une visite qu'elle avait donné son numéro de téléphone son numéro de téléphone pour l'appeler en cas de problème et être désormais sollicitée régulièrement par le vigile alors qu'elle n'est pas d'astreinte. Le fait conclu qu'elle parlait de son téléphone professionnel ne faisant pas sens puisqu'elle a également indiqué de façon non équivoque au médecin du travail le 10 mars 2020 avoir confié son numéro privé. L'employeur n'étant par conséquent pas responsable de la situation générée par la salariée. Ce manquement n'est pas établi.

Le non-respect des dispositions relatives au contrat de prévoyance

Il ressort des mails versés aux débats, que la demande de prestation liée à l'arrêt de travail de Mme [Y] du 27 juillet 2020 au 16 août 2021 n'a en réalité été analysée par la complémentaire santé Chorus qu'en décembre 2020, puisqu'elle a réclamé le 13 décembre à l'employeur des document complémentaires alors que celui-ci indiquait à la salariée en septembre ne pas avoir de retour pour le moment. L'employeur a ensuite répondu à la demande Chorus le 4 janvier 2022 et en a informé la salariée le 12 janvier suivant et les paiements ont été effectués le 21 janvier 2022. Le retard de paiement résultant de l'organisme de prévoyance et non de l'employeur.

Ce manquement n'est pas établi.

Le non-respect de l'obligation de se sécurité de résultat s'agissant des agissements et propos dégradants et humiliants de M. [V], supérieur hiérarchique et des agressions subies sur son lieu de travail

Il résulte du rapport d'activité de l'aire d'accueil d'[Localité 6] en 2019 que le gestionnaire de l'aire a été victime le 4 novembre 2019 d'une agression physique suite à un trafic de vêtements sur l'aire et un conflit entre plusieurs usagers (coup de tête, bousculade et tentative de mise au sol) et le 15 décembre 2019, des insultes, menaces et agressions verbale ont été proférées sur l'agent de maintenance et d'entretien qui refusait d'ouvrir la porte d'un édicule technique pour permettre à un usager de se servir gratuitement en fluides. Ce rapport concluant toutefois que l'ambiance générale est restée relativement calme, les usagers étant en général cordiaux.

Le bilan mensuel de gestion de l'aire de mai 2020 fait état de relations toujours très compliquées, de l'agressivité grandissante des usagers et de menaces et d'insultes, les inquiétudes des usagers étant fortes pendante la pandémie. En juin 2020, le climat de l'aire est jugé catastrophique (menaces, insultes...)

Mme [Y] dénonce la situation de stress, les menaces subies au travail et ses inquiétudes dans un courrier adressé à son employeur le 2 octobre 2020 alors qu'elle est en arrêt de travail depuis le 27 juillet 2020. Elle y évoque également n'avoir pu bénéficier du soutien de M. [V] son supérieur hiérarchique qui est parfois désobligeant par ses propos avec des termes insultants devant des personnes du service.

Le 17 octobre 2020, Mme [Y] dépose plainte pour harcèlement moral contre l'Association Saint Nabor Services et dénonce le comportement de son supérieur hiérarchique, M. [V] depuis juin 2019 qui l'appelle souvent le soir alcoolisé, hors périodes d'astreinte pratiquement tous les jours et la dénigre.

L'Association Saint Nabor Services lui répond par courrier du 21 octobre 2020, qu'elle accuse réception du courrier reçu le 15 octobre 2020 et que le directeur général désire s'entretenir avec Mme [Y] lors de son prochain passage en Savoie mais qu'il lui est impossible de lui donner de date précise, son planning n'étant pas fixé au regard des conditions sanitaires.

Le 10 décembre 2020, Mme [Y] adresse un nouveau courrier à M. [U], directeur général de l'Association Saint Nabor Services, indiquant n'avoir toujours pas été reçue comme promis à la suite de son courrier d'octobre 2020, constate qu'aucune solution n'a été trouvée ni proposée s'agissant de son responsable M. [V], afin d'améliorer ses conditions de travail et qu'elle en est moralement atteinte, renouvelant sa demande d'entretien pour « sortir de cette situation ».

L'Association Saint Nabor Services répond le 12 janvier 2021 que M. [U] pourra recevoir Mme [Y] le 21 janvier 2020 conformément à sa demande du 10 décembre 2020.

Le 21 janvier 2021, Mme [Y] a été reçue avec un conseiller du salarié par son employeur.

Le 27 janvier 2021, Mme [Y] a adressé à son employeur dans lequel elle dénonce le contenu de son entretien, et que l'employeur veut la mettre en défaut et indique par conséquent « renouveler sa demande pour une rupture conventionnelle comme vous l'avez évoqué lors de notre rencontre pour sortir de la situation ».

Par courrier du 1er mars 2021, l'Union locale CGT adresse un courrier à l'employeur évoquant son absence de réaction sur le mal être évoqué par Mme [Y] ayant des conséquences sur sa santé mentale et le courrier sans réponse que la salariée aurait adressé en vue d'une rupture conventionnelle.

Mme [Y] a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 21 juillet 2021.

M. [T], ancien agent d'entretien technique sous la subordination de M. [V] atteste avoir entendu des propos dénigrant et rabaissant de la part envers de ce dernier envers les gestionnaires d'[Localité 3] et de [Localité 10], leur faisant subir une grosse pression et avoir vu [X] (Mme [Y] ) être très mal suite à un appel de M. [V].

M. [D], ancien responsable de développement et de l'opérationnel au sein de l'Association Saint Nabor Services atteste que M. [V] s'adressait de façon 'pas très conventionnelle ni respectueuse' aux agents, leur parlait mal, les menaçait très souvent. Certains agents dont Mme [Y] lui ayant rapporté qu'il les appelait au téléphone le soir en état d'ébriété. Il indique avoir pu s'entretenir avec la direction de ces faits graves qui n'ont donné droit à aucune sanction.

Il doit être rappelé que la question du respect de l'obligation de sécurité par l'employeur n'implique pas que les faits allégués par le salarié soient établis mais de déterminer si l'employeur en était informé et s'il a pris les mesures nécessaires et suffisantes pour non seulement établir la matérialité des faits mais s'assurer de la sécurité et de la santé physique et mentale du salarié les dénonçant.

Au vu des différents rapports susvisés puis du courrier d'octobre 2020, l'employeur était au fait des difficultés de ses agents liées à la gestion de aires de stationnement des gens du voyage et actes de violences physiques et verbales pouvant avoir lieu, cette situation s'étant aggravée pendant la pandémie. L'Association Saint Nabor Services ne justifie pas comme conclu que M. [V] serait intervenu « à chaque incident verbal ».

L'Association Saint Nabor Services était également informée du comportement de M. [V] par M. [D] puis par le courrier de Mme [Y] en octobre 2020.

Malgré les alertes découlant des rapports et les demandes expresses écrites de Mme [Y] à deux reprises en 2020, aucun entretien pour qu'elle puisse exprimer les difficultés ressenties dans la relation de travail n'a été organisé par l'Association Saint Nabor Services que le 21 janvier 2021 avec Mme [Y] et aucune autre mesure, telle qu'enquête et auditions..., n'a été mise en 'uvre s'agissant du comportement dénoncé de M. [V] ; l'Association Saint Nabor Services ne démontre pas qu'elle aurait proposé à Mme [Y] un entretien en visioconférence dès son premier courrier mais que la salariée l'aurait refusé comme conclu.

De plus aucune mesure d'enquête n'a été mise en 'uvre postérieurement à l'entretien du 21 janvier 2021 malgré l'intervention du syndicat CGT en mars 2021. Le seul fait que Mme [Y] soit en arrêt de travail ne justifiant pas l'inertie de l'employeur qui doit faire face à son obligation en vue de la reprise par la salariée de son travail dans des conditions sereines.

L'Association Saint Nabor Services ne justifie pas non plus avoir entrepris de mettre en place des mesures afin de limiter les incidents avec les résidents des aires de voyage ou de permettre aux salariés dont Mme [Y] d'y faire face.

Au vu des éléments soumis à l'appréciation de la cour, il en résulte que l'Association Saint Nabor Services a violé son obligation légale de sécurité.

Le manquement par l'employeur à son obligation légale de sécurité constitue un manquement suffisamment grave empêchant la poursuite du contrat de travail, la prise d'acte de Mme [Y] produisant ainsi les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse par voie d'infirmation du jugement déféré.

Il convient dès lors de condamner l'Association Saint Nabor Services à payer à Mme [Y] les sommes suivantes en application de la convention collective dont par ailleurs le quantum n'est pas contesté par l'Association Saint Nabor Services :

4200,18 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 420,01 € de congés payés afférents (2 mois de salaire)

1299,41 € d'indemnité de licenciement

En application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; et, si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par ce texte.

Aux termes de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (l'OIT), si les organismes mentionnés à l'article 8 de la présente convention arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n'ont pas le pouvoir ou n'estiment pas possible dans les circonstances d'annuler le licenciement et/ou d'ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d'une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.

Les dispositions susvisées de l'article 10 qui créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir à l'encontre d'autres particuliers et qui, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale de la convention ainsi qu'à son contenu et à ses termes, n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte complémentaire, sont d'effet direct en droit interne.

Selon le Conseil d'administration de l'Organisation internationale du travail, le terme "adéquat" visé à l'article 10 de la Convention signifie que l'indemnité pour licenciement injustifié doit, d'une part être suffisamment dissuasive pour éviter le licenciement injustifié, et d'autre part raisonnablement permettre l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi.

Or, la cour relève, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, l'article L. 1235-3 de ce code n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ; d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans le cas prévu à l'article L. 1235-3 du même code, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Il en ressort, d'une part, que les dispositions susvisées des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code du travail permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi, d'autre part, que le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l'employeur est également assuré par l'application, d'office par le juge, des dispositions précitées de l'article L. 1235-4 du code du travail.

Les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail étant de nature à permettre le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT.

Il résulte de ces constatations que les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la convention précitée. Il n'y a donc pas lieu d'en écarter les dispositions.

S'agissant des dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne, également invoquées par la salariée pour voir écartée l'application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, il résulte des dispositions de la Charte sociale européenne que les Etats contractants ont entendu reconnaître des principes et des objectifs, poursuivis par tous les moyens utiles, dont la mise en 'uvre nécessite qu'ils prennent des actes complémentaires d'application selon les modalités prévues par l'annexe de la Charte et l'article I de la partie V de la charte, consacré à la "mise en 'uvre des engagements souscrits", dont les Etats parties ont réservé le contrôle au seul système spécifique prévu par l'annexe de la Charte.

Il en résulte que les dispositions de la Charte sociale européenne, dont l'article 24, n'ont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers, et que le moyen tiré de l'article 24 ne peut avoir pour effet d'écarter l'application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail.

Il apparaît enfin qu'une réparation comprise entre d'un mois de salaire, par application des dispositions précitées de l'article L. 1235-3 du code du travail, constitue une réparation adéquate du préjudice et appropriée à la situation d'espèce telle qu'elle ressort des pièces produites aux débats par l'appelante.

Par conséquent les dispositions de l'article L. 1235-3 code du travail sont applicables aux faits d'espèce.

En application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; et, si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par ce texte.

Or, Mme [Y] qui disposait d'une ancienneté au service de son employeur de plus de 2 années, peut par application des dispositions précitées, prétendre à une indemnisation du préjudice né de la perte injustifiée de son emploi comprise entre 3 et 3,5 mois de salaire.

Mme [Y] justifie par le certificat médical de son médecin traitant que le 7 septembre 2020, elle subissait un état de stress important avec pleurs et irritabilité et qu'il lui a prescrit un traitement antidépresseur. Cet état d'anxiété est confirmé par le médecin du travail le 9 septembre 2020 qui évoque également une tristesse de l'humeur, une perte de poids (6Kgs) et d'appétit, d'envie et de cauchemars et le 4 avril 2021, des pleurs et nausées, ses préoccupations anxieuses sur son avenir professionnel et économique et le traitement antidépresseur toujours en cours.

Mme [Y] justifie avoir été inscrite à Pôle emploi jusque fin septembre 2022 et avoir ensuite retrouvé un emploi à temps partiel de commis dans la restauration à compter du 26 septembre 2022.

Il convient dès lors de condamner l'Association Saint Nabor Services à lui verser la somme de 7350,315 € (3,5 mois de salaires) de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande de dommages et intérêts pour conditions vexatoires de la rupture :

Moyens des parties :

Mme [Y] soutient qu'elle a subi un préjudice moral profond du fait de la situation et de la réaction de l'employeur qui a au lieu de la protéger, cherché à lui faire des reproches sur la qualité de son travail et qu'elle doit être indemnisée à ce titre.

L'Association Saint Nabor Services ne conclut pas sur ce point.

Sur ce,

Il est de principe que le salarié licencié peut prétendre à des dommages-intérêts en réparation d'un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi à la condition de justifier d'une faute de l'employeur dans les circonstances entourant le licenciement de nature brutale ou vexatoire et de justifier de l'existence de ce préjudice et que le licenciement soit ou non fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Faute pour Mme [Y] de justifier d'une faute de l'employeur dans les circonstances entourant le licenciement et de l'existence d'un préjudice distinct de celui pouvant résulter de la seule rupture de son contrat de travail, il convient de confirmer la décision déférée qui a rejeté sa demande à ce titre.

Sur les demandes accessoires :

Il convient d'infirmer r la décision de première instance s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.

L'Association Saint Nabor Services, partie perdante qui sera condamnée aux dépens de l'instance et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, devra payer à Mme [Y], la somme de 2500 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :

Débouté Mme [X] [Y] de sa demande de rappel de salaire sur les mois de mars 2020, avril 2020 et mai 2020 et de sa demande de dommage et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, préjudice moral et travail dissimulé ;

Débouté Mme [X] [Y] de sa demande d'une de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

L'INFIRME, pour le surplus

STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,

DIT que l'Association Saint Nabor Services a manqué à son obligation légale de sécurité,

JUGE que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail de Mme [Y] du 21 juillet 2021 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE l'Association Saint Nabor Services à verser à Mme [Y] les sommes suivantes :

4200,18 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 420,01 € de congés payés afférents (2 mois de salaire)

1299,41 € d'indemnité de licenciement

7350,315 € (3,5 mois de salaires) de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Y AJOUTANT

CONDAMNE l'Association Saint Nabor Services à payer la somme de 2500 € Mme [Y] à sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en première instance et en appel,

CONDAMNE l'Association Saint Nabor Services aux dépens de l'instance.

Ainsi prononcé publiquement le 11 Avril 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, et Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Chbre sociale prud'hommes
Numéro d'arrêt : 22/01872
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;22.01872 ?
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