COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 21 MARS 2023
N° RG 21/02094 - N° Portalis DBVY-V-B7F-G2Q2
S.A.R.L. YCENNA FACTORY
C/ SARL BRIGITTE CONSULTING agissant poursuites et diligences de son représentant légal
en exerice, demeurant es qualité audit siège
etc...
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'ANNECY en date du 21 Septembre 2021, RG 2020J00047
APPELANT ET DEFENDEUR AU DEFERE
S.A.R.L. YCENNA FACTORY
[Adresse 7]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Manon THOMASSIN de la SELARL TG AVOCATS, avocat au barreau de CHAMBERY
INTIME ET DEMANDEUR AU DEFERE
SARL BRIGITTE CONSULTING agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exerice, demeurant es qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Me Cédric MEILLER, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS
et par Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY
INTIME ET DEFENDEUR AU DEFERE
S.A.R.L. MA FEMME PREFERE LE BLEU prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur [Z] [U]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Wilfried WEBER de la SELARL CABINET D'AVOCATS WEBER, avocat au barreau d'ANNECY
Copies délivrées le :
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 23 Février 2023 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Frédéric PARIS, Président, chargé du rapport
Madame Françoise SIMOND, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,
Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Capucine QUIBLIER,
********
FAITS ET PROCÉDURE
La Sarl Ycenna Factory a interjeté appel le 21 octobre 2021 d'un jugement rendu par le tribunal de commerce d'Annecy le 21 mai 2021 signifié le 30 septembre 2021.
La société Brigitte Consulting a constitué avocat et a notifié ses conclusions le 14 février 2022.
La société Ma femme préfère le bleu (MFPLB) a constitué régulièrement avocat.
La société Ycenna Factory a notifié ses conclusions par le réseau privé virtuel des avocats le 24 novembre 2021.
La société Brigitte Consulting constituait à nouveau avocat le 28 février 2022.
Par voie de conclusions en date du 28 février 2022, la société Ycenna Factory a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident tendant à voir constater l'irrecevabilité des conclusions notifiées par la société Brigitte Consulting en qualité d'intimée le 14 février 2022.
Par ordonnance rendue le 27 octobre 2022, le conseiller de la mise en état a :
- déclaré irrecevables les conclusions et pièces déposées au fond par la société Brigitte Consulting les 14 février et 28 février 2022,
- rejeté la demande de la société Brigitte Consulting et de la société MFPLB tendant à voir déclarer l'appel caduc pour irrégularité de la déclaration d'appel,
- rejeté la demande de la société Brigitte Consulting tendant à voir déclarer l'appel caduc pour nullité de l'acte de signification des conclusions d'appelant à l'intime en date du 26 novembre 2021,
- rejeté la demande de la société MFPLB tendant voir déclarer l'appel irrecevable à son encontre pour défaut de la possibilité d'interjeter appel contre le jugement entrepris,
- s'est déclaré incompétent pour connaître de la recevabilité du grief fondé sur la partialité d'un magistrat composant le tribunal de première instance,
- débouté les parties du surplus de leurs prétentions,
- condamné la société Brigitte Consulting aux dépens de l'incident,
- condamné la société Brigitte Consulting à payer la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société Brigitte Consulting et la société MFPLB de leurs demandes d'indemnité procédurale et de dépens.
Par requête du 10 novembre 2022, la société Brigitte Consulting a déféré l'ordonnance à la cour d'appel.
Dans ses conclusions notifiées le 10 novembre 2022 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, la société Brigitte Consulting demande à la cour de :
- juger qu'en notifiant ses conclusions le 14 février 2022, elle n'encourt aucune forclusion,
- juger que l'irrégularité de procédure entachant les conclusions notifiées le 14 février 2022 a été régularisée par la constitution régulière le 28 février 2022,
- juger qu'en toute hypothèse, les conclusions du 14 février 2022 ont interrompu le délai de forclusion, de sorte que la nouvelle notification du 28 février 2022 les rend recevables.
Subsidiairement,
- juger que le délai de 3 mois prescrit à l'intimée non régulièrement constituée, pour conclure a commencé à courir à la date de signification par voie d'huissier du 26 novembre 2021,
- juger que les conclusions d'intimée notifiées le 28 février 2022 sont recevables,
- juger que l'appel du 21 octobre 2021de la société Ycenna Factory est entachée d'une irrégularité de fond,
- juger par conséquent nulle la déclaration d'appel du 21 octobre 2021,
- juger qu'aucune déclaration d'appel rectificative n'a été faite,
- juger par conséquent irrecevable l'appel de la société Ycenna Factory,
Subsidiairement,
- juger que l'appel de la société Ycenna Factory caduc,
à titre subsidiaire au cas où la cour déclarerait l'acte d'appel valable et l'appel recevable,
- se déclarer compétent,
- rappeler que seul l'acte d'appel opère dévolution des chefs critiqués du jugement et qu'en toute hypothèse la partialité du tribunal ne constitue pas un motif d'infirmation mais de nullité du jugement,
- déclarer irrecevable la demande d'infirmation du jugement du chef d'une prétendue partialité du tribunal de commerce d'Annecy,
- condamner la société Ycenna Factory à lui payer une somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au dépens de l'incident,
Dans l'hypothèse où infirmant l'ordonnance déférée du chef de l'irrecevabilité de l'appel de la société Ycenna Factory la Cour mettrait fin à l'instance :
- condamner la société Ycenna Factory à lui payer une somme de 7500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Ycenna Factory aux dépens d'appel et d'incident, avec pour ceux d'appel application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Bollonjeon, Avocat Associé de la Selurl Bollonjeon.
Elle soutient qu'il n'est pas contesté que la constitution initiale de l'avocat parisien du 27 octobre 2021 était nulle au regard de l'article 5 de la loi 71-1130.
L'article 911 du code de procédure civile prévoit une obligation de signification des conclusions à l'intimé qui n'aurait pas constitué avocat, sans distinguer si une constitution de l'intimé dépourvue d'opposabilité équivaut ou non à une absence de constitution de cet intimé.
L'acte de signification du 26 novembre 2021 est un exploit d'huissier fait pour servir et valoir ce que de droit, c'est-à-dire permettre à l'intimé, non constitué régulièrement, de conclure en réponse ou de ne pas conclure.
Le point de départ du délai donné à l'intimé n'ayant pas constitué avocat pour conclure est le jour de la signification des conclusions de l'appelant conformément à l'article 911 du code de procédure civile.
Cette signification du 26 novembre 2021 a ouvert un délai de trois mois à la société Brigitte Consulting pour notifier une constitution régulière et ses conclusions.
Dans le cadre d'une constitution irrégulière, le délai n'a pu commencer courir qu'à compter de la signification par voie d'huissier le 26 novembre 2021.
En constituant et notifiant ses conclusions le 28 février 2022, elle a satisfait à l'article 909 du code de procédure civile. Cela a couvert l'irrégularité initiale.
La nullité de la constitution initiale de l'intimée n'a pas été relevée d'office par application de l'article 120 du code de procédure civile, la jurisprudence considère que l'irrégularité de fond tirée d'un défaut de pouvoir du représentant d'une partie en justice peut être régularisée jusqu'au moment où le juge statue. La loi ne prévoit aucun délai préfix ou de forclusion dans ce cas.
L'irrégularité a été couverte le 28 février 2022.
La forclusion sanctionne l'inobservation d'un délai et non l'irrégularité d'un acte donc la sanction classique est la nullité.
L'intimée a notifié ses conclusions le 14 février 2022, soit durant le délai prescrit, la forclusion n'est donc pas encourue.
Le délai de forclusion s'applique à une demande en justice ou une voie de recours et non à la notification de conclusions, qui doit être faite dans un délai de trois mois suite à l'appel.
Ces délais sont indépendants.
La régularisation du 28 février 2022, a couvert l'exception de nullité des conclusions remises le 14 février, c'est-à-dire le délai de l'article 909 du code de procédure civile.
La cause de nullité concernant les conclusions notifiées le 14 février 2022 avait disparu au moment où le conseiller de la mise en état à statué. Prétendre le contraire ajouterait une condition non prévue par l'article 909 du code de procédure civile.
S'il existe un droit d'action de l'intimé pouvant encourir une forclusion, il ne peut concerner que son droit à former appel incident.
À considérer que le délai de l'article 909 du code de procédure civile soit un délai de forclusion s'appliquant à tout acte de procédure, il peut être interrompu au titre de l'article 2241 du code civil, et notamment par les conclusions même entachées du vice de procédure suite au non-respect des règles de postulation de l'avocat, comme l'a jugé la jurisprudence.
Cette interruption du délai rend les conclusions du 28 février 2022 valables.
La déclaration d'appel a été formée par une société sans représentation légale, cela constitue une irrégularité de fond, conformément à l'article 117 du code de procédure civile.
Il ne peut s'agir d'un vice de forme car il n'y a pas d'indication erronée de la représentation légale mais une absence.
En toute hypothèse, l'article 115 du code de procédure civile prévoit qu'un vice de forme doit être régularisé avant toute forclusion, c'est-à-dire avant le 22 novembre 2021. Ce qui n'a pas été le cas.
N'ayant pas été régularisé, l'appel est nul.
Subsidiairement, si la déclaration d'appel n'est pas nulle, elle est caduque.
La notification de ses conclusions par l'appelante le 24 novembre 2021, à un avocat dépourvu du pouvoir de représentation, est irrégulière.
Elle ne respecte pas les dispositions de l'article 902 du code de procédure civile. Elle a été faite pour servir et valoir ce que de droit, elle omet d'aviser l'intimé de la nécessité de constituer avocat et d'avoir à conclure dans le délai prévu par l'article 909 du code de procédure civile.
Elle ne permet pas de garantir l'efficacité de la procédure et les droits de la défense.
Cette signification n'indique pas de représentation légale, le représentant légal indiqué dans la notification de ses conclusions mentionne Mme [J] [C], qui a démissionné de ses fonctions et qui était mise en cause dans le litige. L'extrait de Kbis indique M. [R] [C] comme gérant.
L'acte d'huissier est nul pour irrégularité de fond, il devait respecter les dispositions des articles 117 et suivants du code de procédure civile.
La jurisprudence considère que l'article 914 du code de procédure civile ne distingue pas selon que la voie de recours intentée tend à la réformation, à l'annulation ou à la nullité du jugement, le conseiller de la mise en état était compétent pour apprécier la recevabilité de l'appel-nullité.
Selon la jurisprudence, le défaut de pouvoir juridictionnel constitue une fin de non recevoir, dont l'examen revient au conseiller de la mise en état.
Dans ses conclusions notifiées le 22 décembre 2022 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, la société Ma femme préfère le bleu demande à la cour de :
- infirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau :
- constater que la société Ma femme préfère le bleu fait sienne les motifs du déféré développés par la société Brigitte Consulting ,
En ce notamment que :
- juger qu'en notifiant ses conclusions d'intimée le 14 février 2022, la société Brigitte Consulting n'encourt aucune forclusion,
- juger que l'irrégularité de procédure entachant les conclusions de l'intimée du14 février 2022, se résout au regard du régime de nullité des articles 117 et s du code de procédure civile,
- juger que la régularisation de nouvelles conclusions sous une constitution régulière le 28 février
2022, rend les conclusions d'intimée recevables,
- juger qu'en toute hypothèse, les conclusions du 14 février 2022 ont interrompu le délai de forclusion, de sorte que la nouvelle notification du 28 février 2022 les rend recevables,
- prononcer la nullité de la déclaration d'appel de la société Ycenna Factory du 21 octobre 2021,
- juger que l'irrégularité, à supposer qu'elle ne constitue qu'un vice de forme, n'a pas été régularisée avant l'expiration du délai d'appel,
En conséquence,
- déclarer l'appel de la Sarl Ycenna Factory irrecevable,
- constater l'extinction de l'instance d'appel,
En toute hypothèse,
- condamner la Sarl Ycenna Factory à payer à la Sarl Ma femme préfère le bleu une indemnité de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile exposés en cause d'appel,
- condamner la Sarl Ycenna Factory aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me Weber, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Il n'est pas contesté que la constitution initiale de l'avocat parisien de la Sarl Brigitte Consulting du 27 octobre 2021 était nulle au regard de l'article 5 de la loi 71-1130.
Cette irrégularité a été régularisée par la constitution Me Audrey Bollonjeon, avocate au barreau de Chambéry, le 28 février 2022.
L'appelante a réitéré la notification de ses conclusions d'appel par voie d'huissier au domicile de la Sarl Brigitte Consulting le 26 novembre 2022.
Me Bollonjeon était valablement constituée lorsque le juge des incidents a été amené à statuer.
La déclaration d'appel a été formée par une société dépourvue de toute forme de représentation légale, elle n'a donc pas la capacité d'ester en justice.
Faute de régularisation de l'appel dans le délai, celui-ci est irrecevable.
Les conclusions de l'appelante notifiées le 24 novembre 2021 ne mentionnent pas d'organe de représentation, donc ce vice n'a pas été régularisé.
Dans ses conclusions notifiées le 17 janvier 2023 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, la Sarl Ycenna Factory demande à la cour de:
- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance,
En conséquence,
- constater que les conclusions d'intimé et les pièces adverses ont été notifiées le 14 février 2022 sans qu'un avocat soit régulièrement constitué,
- constater le défaut de pouvoir de l'avocat de la Sarl Brigitte Consulting ;
- constater que la notification des conclusions d'intimé de la Sarl Brigitte Consulting a été faite postérieurement au 24 février 2022,
- en conséquence déclarer irrecevables les conclusions et pièces notifiées par la Sarl Brigitte Consulting,
- déclarer l'appel interjeté par la société Ycenna Factory recevable et régulier,
- débouter la société Brigitte Consulting de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires ou divergentes aux présentes écritures,
- condamner la société Brigitte Consulting à payer à la société Ycenna Factory la somme de 7 000 € au titre de l'article 700du code de procédure civile,
- condamner la société Brigitte Consulting aux entiers dépens d'incident.
Elle fait valoir que la société Brigitte Consulting n'a pas constitué avocat dans les conditions prévues par l'article 5 de la loi n°71-1130, à savoir un avocat du ressort de la cour d'appel de Chambéry. L'avocat constitué est inscrit au barreau de Paris.
La notification des conclusions d'intimé par le réseau privé virtuel des avocats du 28 février 2022 n'a pas d'incidence, elle intervient postérieurement à l'expiration du délai prévu par l'article 909 du code de procédure civile.
La société Brigitte Consulting ne peut estimer que son délai pour conclure expirait le 28 février 2022, puisqu'au jour de la notification de ses conclusions d'intimé, sa constitution n'était pas régulière.
L'appelante n'est pas juge de la régularité de la postulation de son adversaire et le défaut de pouvoir de l'avocat ne peut profiter qu'à la partie qui l'invoque.
La notification par voie d'huissier a été réalisée à titre informatif laissant à la société Brigitte Consulting la possibilité de s'interroger sur la validité de sa constitution. Il ne s'agit pas d'une signification faite conformément aux articles 902 et suivants du code de procédure civile.
Comme l'a jugé le conseiller de la mise en état, le défaut de pouvoir de l'avocat constitue une irrégularité de fond.
Il s'agit d'une erreur de l'intimée, elle ne peut invoquer le droit à un procès équitable.
La jurisprudence considère que l'absence de mention de l'organe représentatif est une irrégularité de forme, elle nécessite donc un grief. Selon la jurisprudence, la mention du représentant légal dans les conclusions d'appelant régularise ce vice de forme.
L'appel nullité n'est recevable qu'en cas d'excès de pouvoir, or la violation des règles relatives à la composition du tribunal ne constitue pas un excès de pouvoir.
Le recours de la société Ycenna Factory tend à la réformation de la décision du tribunal de commerce, l'appelante est recevable à déférer ce moyen à la cour.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité des conclusions de la société Brigitte Consulting
Si la constitution initiale de l'avocat parisien de la société Brigitte Consulting du 27 octobre 2021 était nulle au regard de l'article 5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, l'avocat de la Sarl Ycenna Factory était tenu toutefois au vu de cette constitution de signifier ses conclusions à l'avocat constitué.
Il importe peu que l'appelante ait signifié aussi ses conclusions à la société Brigitte Consulting le 26 novembre 2021, la seule obligation procédurale dont était tenue la société Ycenna Factory étant de notifier ses conclusions à l'avocat constitué, ce qu'il a fait le 24 novembre 2021.
L'appelante n'était donc pas tenue de signifier ses conclusions en application de l'article 911 du code de procédure civile à la société Brigitte consulting, elle-même, qui avait constitué avocat.
La signification du 26 novembre 2021 n'a dès lors pas eu pour effet de reporter le délai de l'article 909 du code de procédure civile.
Il n'y a aucune violation du principe de proportionnalité, l'avocat de l'intimée étant parfaitement en mesure de vérifier si sa constitution était régulière ou non et de régulariser ensuite une constitution réalisée par un avocat postulant conformément à la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et de conclure dans les délais de l'article 909 du code de procédure civile.
Les conclusions au fond du 28 février 2022 de la société Brigitte Consulting par l'avocat constitué le même jour ont donc était signifiées après l'expiration du délai de trois mois de l'article 909 suscité.
La constitution de l'avocat postulant le 28 février 2022 au jour où le conseiller de la mise en état a statué n'a pas eu pour effet de reporter le délai de trois mois.
Les conclusions de l'avocat initialement constitué notifiées le 14 février 2022 ne pas régulières comme l'admet d'ailleurs la société Brigitte Consulting dans ses conclusions.
De telles conclusions n'ont en aucun cas interrompu le délai de l'article 909.
Le délai de l'article 909 du code de procédure civile est un délai de procédure dont le respect est impératif que doit respecter l'intimé.
Elle ne prive pas l'intimé du droit d'un procès équitable au sens de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme, chaque partie étant soumis à des délais stricts dans un souci de célérité de la procédure d'appel imposé par la loi, ce dont elles ont parfaitement connaissance.
La société Brigitte Consulting devait dès lors régulariser la procédure en procédant à la signification de nouvelles conclusions par l'avocat postulant avant l'expiration du délai de trois mois soit au plus tard le 24 février 2022.
L'ordonnance déférée jugeant à juste titre que les conclusions de la société Brigitte Consulting étaient irrecevables sera confirmée.
Sur la recevabilité de l'appel
La cour de cassation a jugé que le nom de la personne physique, organe représentant de la personne morale n'est exigé par aucun texte (Civ 2ème 14 janvier 1987 n° 85-16.017 P).
La cour de cassation a jugé que 'l'erreur dans la désignation de l'organe représentant légalement une personne morale dans un acte d'appel avec ou sans représentation obligatoire, ne constitue qu'un vice de forme' (Civ 3ème 13 novembre 2013 n° 12-24.870 P).
Il s'agit d'une jurisprudence constante et ancienne (Civ 2ème 9 janvier 1985 Bull civ II n° 6) ; Civ 1ère 5 octobre 1999 n° 95-17.030 P ; Civ 2ème 12 juillet 2001 n° 99-21.242 P).
La cour de cassation dans un arrêt de cassation du 7 juin 2018 n° 17-16.661 a jugé au visa des articles 114 et 117 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 661-1-I-6° du code de commerce que 'l'absence de mention dans l'acte d'appel de l'organe la représentant légalement constitue un vice de forme dont la nullité ne peut être prononcée qu'à charge, pour l'adversaire qui l'invoque, de prouver l'existence d'un grief'.
Elle a ajouté au visa des articles 2241, alinéa 2, du code civil et 115 du code de procédure civile 'qu'il résulte du premier de ces textes que l'acte de saisine de la juridiction, même entaché d'un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme de forclusion ; que pour constater la nullité de la déclaration d'appel, l'arrêt retient encore que ce n'est que par conclusions du 21 octobre 2015 que la société... se désigne comme représentée par M. en qualité de cogérant, soit après expiration du délai pour formaliser appel du jugement ; Qu'en statuant ainsi, alors que demeurait possible la régularisation de la déclaration d'appel qui, même entachée d'un vice de procédure, avait interrompu le délai d'appel, la cour d'appel a violé les textes susvisés.'.
En l'espèce, si l'acte d'appel du 21 octobre 2021 n'indique pas que la personne morale est représentée par un organe de la société, il reste que les conclusions de l'appelant établies le 24 novembre 2021 après l'acte d'appel indique que la société Ycenna Factory, société à responsabilité limitée immatriculée au RCS d'Annecy, est domiciliée à [Adresse 8] 'prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
L'appelante a donc donné des indications précises sur son immatriculation, son domicile et son représentant légal dans ses conclusions.
Le délai d'appel expirait le 30 octobre 2021.
L'acte d'appel ayant interrompu le délai de forclusion conformément à l'article 2241 du code civil, l'appelant pour régulariser l'acte d'appel avait un nouveau délai d'un mois soit jusqu'au 30 novembre 2021.
Les conclusions suscitées étant antérieures au 30 novembre 2021 ont régularisé l'irrégularité du dit acte d'appel.
L'intimé n'a pu avoir aucun doute sur l'identité de la personne morale, les parties ayant été en relations commerciales avant février 2018, période à laquelle la société Brigitte consulting avait consulté la société Ycenna Factory afin d'adapter un produit en incluant un logo.
L'intimée ne peut davantage soutenir à titre subsidiaire que les conclusions d'appelant ne lui ont pas été régulièrement signifiées alors que l'appelant a signifié ses conclusions régulièrement à l'avocat constitué, peu important ensuite que l'appelant a en plus signifié l'acte d'appel et ses conclusions directement à l'intimé sans préciser les dispositions de l'article 909 du code de procédure civile.
La demande de caducité n'est pas fondée.
Faute de grief établi, c'est à juste titre que le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de nullité formée par la société Brigitte Consulting.
Sur l'impartialité du tribunal de commerce
L'appelante n'a pas formé d'appel nullité.
Elle soulève le problème d'impartialité d'un membre du tribunal au soutien de son appel visant à la réformation du jugement.
Il s'agit d'un moyen que l'appelant n'avait pas à indiquer dans son acte d'appel au titre des chefs expressément critiqués.
La recevabilité et le bien fondé de ce moyen sont de la compétence de la cour d'appel et non du conseiller de la mise en état.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance en date du 27 octobre 2022 rendue par la conseillère de la mise en état de la 1ère chambre civile de la cour d'appel ;
CONDAMNE la société Brigitte Consulting aux dépens de la procédure de déféré ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Brigitte Consulting à payer à la société Ycenna Factory une somme de 1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé publiquement le 21 Mars 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Frédéric PARIS, Président, et Madame Capucine QUIBLIER, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président