La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/01/2023 | FRANCE | N°21/01492

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 26 janvier 2023, 21/01492


COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE







ARRÊT DU 26 JANVIER 2023





N° RG 21/01492 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GYFC



[L] [K]

C/ Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ANNECY etc...



Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'ANNEMASSE en date du 25 Juin 2021, RG F 19/00203







APPELANT ET INTIME INCIDENT



Monsieur [L] [K]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par Me Audr

ey GUICHARD, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS





INTIMEE



Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ANNECY

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 5]



Représentée par Me Laetitia GAUDIN de la S...

COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 26 JANVIER 2023

N° RG 21/01492 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GYFC

[L] [K]

C/ Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ANNECY etc...

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'ANNEMASSE en date du 25 Juin 2021, RG F 19/00203

APPELANT ET INTIME INCIDENT

Monsieur [L] [K]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Audrey GUICHARD, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

INTIMEE

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ANNECY

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Laetitia GAUDIN de la SCP CABINET DENARIE BUTTIN PERRIER GAUDIN, avocat au barreau de CHAMBERY

INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE

S.E.L.A.R.L. CHATEL LOUROZ liquidateur judiciaire de la SASU MG TRISKELE, sous administration provisoire de la SELARL MJ SYNERGIE prise en la personne de Maître [S] [R]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie DUMONT, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

Copies délivrées le :

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue en audience publique le 11 Octobre 2022, devant Madame Isabelle CHUILON, Conseiller désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui s'est chargée du rapport, les parties ne s'y étant pas opposées, avec l'assistance de Madame Sylvie LAVAL, Greffier lors des débats, et lors du délibéré :

Monsieur Frédéric PARIS, Président,

Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,

********

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [L] [K] a été engagé par la Sasu MG Triskele suivant un contrat de travail à durée déterminée à temps complet, du 9 septembre au 30 septembre 2018, en qualité de responsable de bar, moyennant un salaire mensuel brut de 1.669,72 euros pour un horaire hebdomadaire de 39 heures.

Ce contrat a été renouvelé, aux mêmes conditions, pour la période du 1er au 31 octobre 2018.

La convention collective des hôtels, cafés et restaurants est applicable.

Par courrier du 17 décembre 2018, M. [L] [K] a mis en demeure la Sasu MG Triskele de lui verser l'intégralité de ses salaires et de lui délivrer les documents de fin de contrat.

Par courrier du 2 janvier 2019, M. [L] [K] retournait à la Sasu MG Triskele l'ensemble des documents qu'elle lui avait envoyés (attestation pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte, bulletins de paie) y compris un chèque de 1.908,60 € non encaissé.

Par requête du 21 janvier 2019, M. [L] [K] a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes d'Annemasse afin d'obtenir le versement de diverses sommes et indemnités, ainsi que les documents de fin de contrat.

Par ordonnance du 13 mars 2019, la formation de référé du conseil de prud'hommes d'Annemasse a dit que la demande de M. [L] [K] se heurtait à une contestation sérieuse, l'en a débouté, et a renvoyé les parties à se pourvoir devant le juge du fond.

Par requête du 18 avril 2019, M. [L] [K] a saisi le conseil de prud'hommes d'Annemasse aux fins, notamment, de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, et de se voir allouer des rappels de salaires, ainsi que diverses indemnités au titre de l'exécution et de la rupture du contrat.

L'affaire a été radiée suivant jugement rendu le 12 décembre 2019.

Par jugement du 13 décembre 2019 du Tribunal de commerce de Thonon-les-Bains, la Sasu MG Triskele a été placée en redressement judiciaire, Me [V] [X] ayant été désigné en qualité de mandataire judiciaire.

Le redressement judiciaire de la société MG Triskele a été converti en liquidation judiciaire par jugement du 18 septembre 2020, Me [V] [X], sous administration provisoire de la Selarl MJ Synergie représentée par Me [S] [T], étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

L'instance a été réintroduite par M. [L] [K].

Par jugement de départage en date du 25 juin 2021, le conseil de prud'hommes d'Annemasse a :

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre des salaires des mois de septembre et octobre 2018 à la somme de 7.201,02 euros brut, étant précisé qu'il conviendra de déduire du salaire net calculé les sommes nettes déjà versées par l'employeur les 22 octobre 2018 et 13 novembre 2018 à hauteur totale de 2.100,06 euros,

- dit que le contrat de travail à durée déterminée à effet du 9 septembre 2018 conclu avec M. [L] [K] pour un poste de responsable de bar doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée,

- fixé en conséquence au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] au titre de l'indemnité de requalification à la somme de 1.669,72 euros,

- débouté M. [L] [K] de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé,

- dit que le licenciement de M. [L] [K] est sans cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [L] [K] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la rupture abusive, faute d'ancienneté suffisante dans l'entreprise,

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité de précarité à la somme de 720,10 euros,

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés à la somme de 427,53 euros,

- ordonné à la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], de remettre à M. [L] [K] les documents de fin de contrat rectifiés (certificat de travail, solde de tout compte et attestation pôle emploi), ainsi que les bulletins de paie des mois de septembre et octobre 2018, ce sous astreinte de 10 euros par jour de retard passé le délai de 2 mois suivant la notification de la présence décision,

- dit que le présent conseil se réservera la liquidation de l'astreinte,

- condamné la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], à payer à M. [L] [K] la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclaré la présente décision opposable à l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy,

- rappelé que l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-17 et L.3253-19 du code du travail,

- dit que les indemnités allouées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ne constituent pas une créance visée aux articles L.3253-6 et suivants du code du travail et doivent être exclus de la garantie de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy,

- dit que la garantie de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy est légalement plafonnée en application des articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail,

- dit que l'obligation de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy de faire l'avance des sommes garanties ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire liquidateur et justification de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire sous réserve des dispositions de l'article R.1454-28 du code du travail,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suite du décès de Me [V] [X], aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 14 juillet 2021 par RPVA, M. [L] [K] a interjeté appel sur les chefs de jugement suivants :

- fixe au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre des salaires des mois de septembre et octobre 2018 à la somme de 7.201,02 euros brut, étant précisé qu'il conviendra de déduire du salaire net calculé les sommes nettes déjà versées par l'employeur les 22 octobre 2018 et 13 novembre 2018 à hauteur totale de 2.100,06 euros,

- fixe au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] au titre de l'indemnité de requalification à la somme de 1.669,72 euros,

- déboute M. [L] [K] de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé,

- déboute M. [L] [K] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la rupture abusive, faute d'ancienneté suffisante dans l'entreprise,

-fixe au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité de précarité à la somme de 720,10 euros.

'

Dans ses dernières conclusions notifiées le 12 novembre 2021, auxquelles la cour se réfère pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [L] [K] demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre des salaires des mois de septembre et octobre 2018 à la somme de 7.201,02 euros brut, étant précisé qu'il conviendra de déduire du salaire net calculé les sommes nettes déjà versées par l'employeur les 22 octobre 2018 et 13 novembre 2018 à hauteur totale de 2.100,06 euros,

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] au titre de l'indemnité de requalification à la somme de 1.669,72 euros,

-débouté M. [L] [K] de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé,

-débouté M. [L] [K] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la rupture abusive, faute d'ancienneté suffisante dans l'entreprise,

-fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité de précarité à la somme de 720,10 euros,

Statuant à nouveau,

- dire et juger que la Sasu MG Triskele a gravement manqué à ses obligations contractuelles,

- dire et juger que l'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié est caractérisée,

- fixer la créance de la Sasu MG Triskele aux sommes suivantes :

* 9.461,73 euros nets à titre de rappels de salaire pour les mois de septembre et octobre 2018,

* 39.954,75 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé et à tout le moins 14.037,12 euros,

* 6.659,125 euros au titre de l'indemnité de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et à tout le moins, 2.339,62 euros,

* 1.500 euros nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts du fait de la rupture abusive du contrat,

* 1.332 euros au titre de l'indemnité de précarité,

* 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance,

- ordonner la rectification des documents de fin de contrat (certificat de travail, solde de tout compte et attestation destinée à pôle emploi) ainsi que des bulletins de paie (septembre et octobre 2018),

- débouter les défendeurs de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- déclarer opposable à l'Unedic délégation AGS CGEA la décision à intervenir qui devront leurs garanties selon les conditions de la loi.

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions.

M. [L] [K] fait valoir que :

Il a travaillé pour la Sasu MG Triskele du 13 août au 1er septembre 2018 sans qu'aucun contrat n'ait été établi, un salaire de 1.362,40 euros lui ayant été payé en espèces. Il fournit plusieurs attestations de clients du bar confirmant son embauche dès le mois d'août 2018.

S'agissant de la période du 9 septembre au 31 octobre 2018, il a effectué de très nombreuses heures supplémentaires, dans le cadre d'un projet de reprise de gérance qui n'a finalement pas abouti. Il était seul de l'ouverture à la fermeture du bar, soit de 09h00 à 01h00.

Les 1ers bulletins de paie, établis par le comptable, qui lui ont été communiqués, font état d'un salaire de 5.692,14 euros bruts, pour septembre 2018, et de 7.626,11 euros bruts, pour le mois d'octobre 2018. Ces documents précisent les heures supplémentaires effectuées. Il s'agit d'éléments de nature à étayer sa demande de rappel de salaires.

Or, il n'a jamais perçu la moindre rémunération s'agissant de cette période, à l'exception d'un virement de 737,66 euros en date du 13 novembre 2018.

Suite à sa mise en demeure du 17 décembre 2018, la Sasu MG Triskele lui a adressé des documents de fin de contrat erronés, une attestation pôle emploi non signée, deux bulletins de paie rectifiés, laissant apparaître un nombre d'heures très inférieur à celui réalisé, ainsi qu'un chèque de 1.908, 60 euros, qu'il lui a retourné, en ce qu'il ne correspondait à rien.

Le contrat de travail est erroné car il prévoit une rémunération inférieure au minimum conventionnel et ne précise pas la qualification du salarié.

L'infraction de travail dissimulé est caractérisée par une absence de déclaration pour la période du 13 août au 1er septembre 2018 et par la mention, sur les bulletins de paie, d'un nombre d'heures bien en deça de celui réalisé.

La volonté de dissimulation est démontrée par le cumul d'infractions et par la délivrance de bulletins de paie rectifiés, avec retrait des heures supplémentaires, adressés postérieurement à l'engagement de la procédure.

Le recours au contrat à durée déterminée n'est justifié par aucun motif, de sorte qu'il doit être requalifié en contrat à durée indéterminée, ce qui lui ouvre droit à une indemnité de requalification.

La rupture intervenue au terme du CDD, requalifié en CDI, produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, car non motivée. Il peut, dès lors, solliciter des dommages-intérêts pour rupture abusive.

L'indemnité de précarité lui reste acquise malgré la requalification du contrat en CDI.

'

Dans ses conclusions notifiées le 6 janvier 2022, auxquelles la cour se réfère pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, l'étude de Me [V] [X], es qualité de liquidateur judiciaire de la Sasu MG Triskele, placée sous l'administration provisoire de la Selarl MJ Synergie, prise en la personne de Me [S] [T], formant appel incident, demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre des salaires des mois de septembre et octobre 2018 à la somme de 7.201,02 euros brut, étant précisé qu'il conviendra de déduire du salaire net calculé les sommes nettes déjà versées par l'employeur les 22 octobre 2018 et 13 novembre 2018 à hauteur totale de 2.100,06 euros,

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité de précarité à la somme de 720,10 euros,

Statuant à nouveau,

- fixer la créance de M. [L] [K] au passif de la Sasu MG Triskele à la somme de 1.908,60 euros nette en ce compris l'indemnité compensatrice de congés payés brute pour 427,53 euros et l'indemnité de fin de contrat à durée déterminée brute pour 434,12 euros,

- débouter M. [L] [K] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [L] [K] à payer à l'étude de Me [V] [X] placée sous l'administration provisoire de la Selarl MJ Synergie prise en la personne de Me [S] [T] es qualité une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel,

- condamner M. [L] [K] aux entiers dépens de l'instance.

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions.

Le liquidateur judiciaire de la Sasu MG Triskele fait valoir que :

Le contrat de travail à durée déterminée, renouvelé, a pris fin le 31 octobre 2018, comme stipulé dans ledit contrat. Celui-ci ne prévoyait aucunement la possibilité et la nécessité de faire des heures supplémentaires.

Les bulletins de paie fournis par le salarié ne sont pas conformes à ceux établis par le comptable de la société et présentent des incohérences, s'agissant, notamment, de l'horaire hebdomadaire et de la rémunération mensuelle brute, lesquels ne correspondent pas à ce qui était prévu au contrat et à un niveau 'non cadre'.

Il appartient à M. [K] de s'expliquer sur les conditions dans lesquelles les fiches de paie dont il se prévaut ont été établies et lui ont été remises, et d'en justifier. Elles ont, de toute évidence, été falsifiées.

S'agissant d'un petit bar de quartier, il n'existait ni planning, ni système de pointage. Il était tenu principalement par la patronne, Mme [C] [Z], avec l'aide ponctuelle d'un salarié embauché en vertu d'un contrat à durée déterminée.

Les attestations versées, confirmant les jours et horaires d'ouverture de l'établissement, ainsi que la présence ponctuelle d'un serveur, démontrent que M. [K] n'a pas pu effectuer toutes les heures mentionnées sur les faux bulletins de salaire qu'il produit.

M. [K] a reçu une 1ère somme de 1.362,40 euros en espèces le 22 octobre 2018.

Contrairement à ce qu'il soutient, il n'a pas travaillé du 13 août 2018 au 1er septembre 2018, de sorte qu'il ne saurait s'agir d'un paiement de son salaire pour cette période.

Avant le 9 septembre 2018, date de sa déclaration d'embauche, il venait au bar en tant que client.

Si M. [L] [K] a fréquenté le bar exploité par la Sasu MG Triskele en août 2018 c'était pour observer son fonctionnement et faire connaissance avec la clientèle, dans la perspective de prendre le fonds de commerce en location gérance. Ce projet, établi par un notaire, n'a finalement pas abouti du seul fait de M. [K], lequel n'a pas procédé au dépôt de garantie de 18.000 euros.

Puis, un virement de 737,66 euros a été effectué le 13 novembre 2018 à son profit.

La société ne conteste pas devoir à M. [K] la somme de 1.908,60 € correspondant au solde de tout compte, comprenant l'indemnité compensatrice de congés payés brute pour 427,53 € et l'indemnité de fin de CDD (dite de précarité) brute pour 434,12 €.

Elle lui a fait parvenir un chèque correspondant à ce montant, que ce dernier lui a retourné sans l'encaisser début janvier 2019.

Suite à des violences et menaces de mort qu'il a commises sur Mme [C] [Z] le 27 octobre 2018, nécessitant l'intervention des forces de l'ordre et ayant donné lieu à un dépôt de plainte, M. [L] [K] n'a pas travaillé les 29, 30 et 31 octobre 2018. Ces trois jours d'absence ont été déduits du bulletin de salaire d'octobre 2018.

M.[K] ne démontre pas de la commission du délit de travail dissimulé, se contentant d'affirmations gratuites et mensongères.

Il n'est pas contesté que le contrat du 09 septembre 2018 ne comporte pas de motif.

Toutefois, c'est à la demande de M. [K], qui souhaitait avoir une meilleure connaissance de l'activité du fonds de commerce avant de s'engager dans une location-gérance, et qui avait besoin de temps pour réunir la somme de 18.000 euros, qu'un CDD a été signé, puis qu'il a été renouvelé.

L'indemnité de requalification ne peut dépasser un mois de salaire.

Ayant une ancienneté inférieure à un an, M. [K] n'a droit à aucune indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

'

Dans ses conclusions notifiées le 8 novembre 2021, auxquelles la cour se réfère pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy demande à la cour de :

- dire et juger sa décision uniquement opposable à l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy intervenant conformément à l'article L.625-3 du code de commerce,

- confirmer le jugement déféré,

- débouter M. [L] [K] de ses demandes,

à titre subsidiaire,

- dire et juger que l'indemnité de précarité réglée au titre de l'exécution provisoire doit venir en déduction de celle qui serait fixée,

- dire et juger que les créances de salaire réglées au titre de l'exécution provisoire doivent venir en déduction de celles qui seraient fixées,

- dire et juger que l'indemnité de requalification réglée au titre de l'exécution provisoire doit venir en déduction de celle qui serait fixée,

en toute hypothèse,

- dire et juger que la procédure de redressement judiciaire de la société MG a interrompu de plein droit le cours des intérêts en application de l'article L.622-28 du code de commerce,

- dire et juger que l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-6 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-19 et L.3253-17 du code du travail,

- dire et juger que l'indemnité qui serait fixée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ou sur la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et les dépens ainsi que l'astreinte qui serait prononcée doivent être exclus de la garantie de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy, les conditions spécifiques de celle-ci n'étant pas réunies notamment au visa de l'article L.3253-6 du code du travail,

- dire et juger que la garantie de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy est encadrée par les articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail qui prévoient, pour toutes causes de créances confondues, le principe du plafond de garantie de l'AGS applicable aux créances qui ont été et qui seraient fixées au bénéfice de M. [L] [K] au titre de son contrat de travail,

- dire et juger que l'obligation de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

- condamner M. [L] [K] aux dépens.

L'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy fait valoir que :

Elle a réglé les demandes d'avance qui lui ont été présentées, correspondant aux salaires du 9 septembre au 31 octobre 2018, à l'indemnité compensatrice de congés payés, à l'indemnité de requalification et à l'indemnité de précarité pour un total brut de 7.389,69 euros.

Le salarié n'a aucune action directe contre l'AGS.

Ses demandes ne peuvent tendre qu'à obtenir fixation des créances et non à la condamnation de l'AGS ou de l'employeur placé en procédure collective.

L'arrêt à intervenir lui est seulement opposable.

M.[L] [K] doit prouver la réalité et le caractère intentionnel du délit de travail dissimulé, lequel ne peut se déduire de la seule absence de mention d'heures supplémentaires sur les bulletins de paie, ou de l'indication d'un nombre d'heures de travail inférieur à celles réellement accomplies.

Le salarié ne justifie pas de sa demande au titre de l'indemnité de requalification.

Il a lui-même souhaité que sa relation contractuelle ne se poursuive pas à la fin de son contrat à durée déterminée, de sorte que sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive est purement artificielle. Il ne démontre, de surcroit, de l'existence d'aucun préjudice spécifique.

L'indemnité de précarité est égale à 10% de la rémunération totale brute due au salarié.

Sa garantie est limitée par la loi.Elle ne se substitue pas à l'employeur défaillant financièrement dans n'importe quelles conditions. Schématiquement, pour être garanties, les sommes dues doivent pouvoir être rattachées au contrat de travail. En sont exclus, l'indemnité fixée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, l'aide juridictionnelle et les dépens.

'

L'instruction de l'affaire a été clôturée le 1er juillet 2022.

La date des plaidoiries a été fixée à l'audience du 11 octobre 2022.

L'affaire a été mise en délibéré au 13 décembre 2022, prorogé au 26 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de rappel de salaires et d'heures supplémentaires

En application de l'article L.3171-2 du code du travail 'Lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée du travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés ». L'article L.3171-3 du même code prévoit que l'employeur tient à la disposition de l'agent de contrôle de l'inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié.

Les heures supplémentaires se décomptent par semaine en application de l'article L.3121-9 du code du travail et donnent droit, en vertu de l'article L.3121-36 du même code, à une majoration de 25% pour les 8 premières heures et de 50 % pour les heures suivantes.

Il résulte de l'article L.3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties. Toutefois, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié. Le juge forme, alors, sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande.

Au dernier état de la jurisprudence de la cour de cassation (Cass. Soc. 18 mars 2020) 'le salarié doit présenter des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur qui assure le contrôle des heures effectuées d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments'. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre partie, 'dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, le juge évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant'.

En l'espèce, M. [K] [L], qui prétend avoir réalisé de nombreuses heures supplémentaires, produit, au soutien de ses allégations, l'attestation d'un client (M. [A] [J]), mentionnant avoir été servi, lors de chacun de ses passages au bar, matin comme soir, par cet employé, ainsi que des bulletins de salaire, faisant état de l'accomplissement, du 9 au 30 septembre 2018, de 24 heures supplémentaires donnant droit à une majoration de 25% et de 102,75 heures supplémentaires donnant droit à une majoration de 50%, et s'agissant du mois d'octobre 2018, de 24 heures supplémentaires donnant droit à une majoration de 25% et de 145 heures supplémentaires donnant droit à une majoration de 50%.

Le liquidateur judiciaire de la Sasu MG Triskele conteste l'authenticité des fiches de paie dont se prévaut M. [K] [L], prétendant qu'elles auraient été falsifiées.

Il convient, en effet, d'émettre de sérieuses réserves quant à la fiabilité des bulletins de paie produits par le salarié, en ce que, non seulement, ils ne sont pas du tout compatibles avec la rémunération et le temps de travail fixés contractuellement, mais encore en ce qu'ils font mention de la réalisation d'un quantum d'heures très élevé (correspondant à 14 heures de travail par jour), sans aucun rapport avec l'activité réelle de l'établissement, décrit comme n'étant qu'un 'petit bar de quartier'.

En outre, l'attestation qu'il a remise ne démontre, aucunement, de l'accomplissement d'heures de travail dans les proportions qu'il allégue, et ce d'autant plus que le liquidateur judiciaire de la Sasu MG Triskele produit, quant à lui, trois attestations, émanant d'habitués de l'établissement, exposant que celui-ci n'ouvrait pas avant 11h00 le matin, qu'il était fermé le dimanche, et avoir été essentiellement servis par la patronne du bar, et à titre exceptionnel, par des serveurs.

Surtout, M. [K] [L] ne fournit aucun décompte des heures travaillées, se contentant de faire référence aux éléments mentionnés dans les fiches de paie litigieuses dont il se prévaut.

Dans ces conditions, force est de constater que le salarié ne présente pas d'éléments suffisamment précis et fiables quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies.

La Sasu MG Triskele, représentée par son liquidateur judiciaire, transmet, quant à elle, des bulletins de salaire établis par son comptable, lesquels sont conformes avec les mentions portées au contrat de travail, respectant les dispositions légales en vigueur, et font état de la réalisation d'heures supplémentaires.

Aucun élément sérieux ne permet de douter de leur force probante, de sorte que c'est sur la base de ces fiches de paie que la créance de M. [K] [L], due au titre des salaires des mois de septembre et octobre 2018, doit être fixée.

Ainsi, la rémunération brute se porte à 2.339,62 euros pour la période du 9 au 30 septembre 2018.

Pour le mois d'octobre 2018, il convient de soustraire du bulletin de salaire les sommes dues au titre des congés payés et de l'indemnité de précarité, qui ont donné lieu à des prétentions et décisions distinctes, de sorte que la rémunération brute se porte à 1.724,42 euros.

M. [K] a perçu une 1ère somme de 1.362,40 euros en espèces le 22 octobre 2018, ainsi qu'il ressort du reçu qu'il a signé, lequel ne fait, toutefois, aucune référence au motif du paiement, de sorte qu'il n'est pas démontré que cette somme ait servi au réglement d'une autre créance que celle due au titre des salaires de septembre et octobre 2018.

Par ailleurs, il a été procédé à un virement de 737,66 euros en faveur du salarié le 13 novembre 2018, ainsi qu'il ressort du relevé de compte courant de la société.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre des rappels de salaires et heures supplémentaires des mois de septembre et octobre 2018 à la somme de 4.064,04 euros brut, étant précisé qu'il conviendra de déduire du salaire net calculé les sommes nettes déjà versées par l'employeur les 22 octobre 2018 et 13 novembre 2018 à hauteur totale de 2.100,06 euros.

Sur l'indemnité de requalification

Le conseil de prud'hommes a dit que le contrat de travail à durée déterminée à effet du 9 septembre 2018 conclu avec M. [L] [K] pour un poste de responsable de bar doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, ce qui ne fait pas l'objet d'un appel.

Seul le montant de l'indemnité de requalification octroyée fait l'objet d'une contestation par M. [K] [L].

L'article L.1245-2 du code du travail prévoit que: 'Lorsque le conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, l'affaire est directement portée devant le bureau de jugement qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant sa saisine.

Lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Cette disposition s'applique sans préjudice de l'application des dispositions du titre III du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée'.

Selon la dernière jurisprudence de la cour de cassation, le 'mois de salaire' correspond à la «'dernière moyenne de salaire mensuel'», soit la moyenne des salaires mensuels perçus lors du dernier CDD précédant la saisine du conseil de prud'hommes (Cass. soc., 19'oct.2011, n°10-17.337'; Cass. soc., 20'nov. 2013, n°12-25.459).

Les heures supplémentaires constituant un élément de salaire, l'indemnité prévue à l'article'L.'1245-2 du code du travail doit donc être calculée en tenant compte des heures supplémentaires accomplies par le salarié (Cass. soc., 10'juin'2003, n°'01-40.779). Il n'y a pas lieu, en revanche, de prendre en compte l'indemnité de fin de contrat. En effet, l'indemnité de fin de contrat «'est destinée à compenser la précarité du salarié sous contrat à durée déterminée, ce qui exclut son intégration dans le calcul des salaires moyens versés en raison de l'emploi de l'intéressé'» (Cass. soc., 18'déc.'2013, n°12-15.454).

En l'espèce, la dernière moyenne de salaire mensuel (en incluant les heures supplémentaires et les congés payés, et en excluant l'indemnité de précarité) se porte, d'après les fiches de paie produites par le représentant de l'employeur, à 2.245,79 euros.

M. [K] [L] ne produit aucun élément permettant de lui octroyer une indemnité supérieure à un mois de salaire, de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité de requalification à la somme de 2.245,79 euros.

Sur la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé

Suivant l'article L.8221-5 du code du travail :

'Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur:

1°Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L.1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2°Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3°Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales'.

Le travail dissimulé n'est établi qu'à la condition que l'intentionnalité de l'auteur soit démontrée.

En l'espèce, pour la période du 9 septembre 2018 au 31 octobre 2018, couverte par la signature d'un contrat de travail et une déclaration d'embauche en bonne et due forme, la cour ayant considéré que M. [L] [K] n'avait pas accompli d'heures de travail au delà de ce qui est mentionné sur les bulletins de paie produits par le liquidateur judiciaire, le délit de travail dissimulé n'est pas matériellement caractérisé.

Pour la période antérieure, M. [L] [K] prétend avoir travaillé pour le compte de la Sasu MG Triskele du 13 août 2018 au 1er septembre 2018, sans avoir été déclaré et sans qu'aucun contrat n'ait été établi.

Pour justifier de ses dires, il a produit, dans un 1er temps, deux attestations:

- celle de Mme [N] [D], secrétaire comptable, mentionnant, en date du 1er avril 2019, qu'une déclaration d'embauche a été faite auprès de l'URSSAF le 09 septembre (2018),

- celle de M.[J] [A], indiquant, en date du 05 avril 2019:'Lors de mes différents passages dans ce bar, soir comme matin, c'est M.[K] qui m'a servi à chaque fois mes diverses boissons. Dès lors, j'atteste avoir vu travailler M. [K] dans ce bar depuis le mois d'août'.

Ces deux attestations, du fait, notamment, de leur imprécision, n'étant pas suffisantes pour démontrer la réalité des faits allégués par le salarié, le conseil de prud'hommes, en 1ère instance, a débouté M.[K] de sa demande.

En cause d'appel, M.[K] [L] a communiqué trois autres attestations :

- celle de Mme [G] [I], du 20 septembre 2021, précisant: 'A chaque fois que j'ai suis passer ou sweet café ou [Adresse 7] j'étais servi par monsieur [K] [L] et tout ça c'est au cours du mois d'aout 2018".

- celle de M. [H] [O], du 22 septembre 2021, mentionnant: 'Au cours du mois d'août 2018 je fréquentais régulièrement le sweet café, [Adresse 7]. J'ai été servi par M. [K] [L] qui était à l'époque seul présent sur les lieux à travailler'.

- celle de M. [M] [U], du 21 septembre 2021, rapportant: 'J'ai été souvent au sweet café [Adresse 7] et je peus vous certifié que Monsieur [K] a été présent au service le mois d'août 2018".

Tout d'abord, il convient d'émettre certaines réserves quant à la force probante de ces trois nouvelles attestations, lesquelles ont toutes été rédigées plus de 3 ans après les faits de travail dissimulé reprochés à la Sasu MG Triskele.

Surtout, leur intérêt est limité puisque la Sasu MG Triskele, selon son représentant, ne conteste pas que M. [K] [L] ait été matériellement présent au sein de son établissement dans le courant du mois d'août 2018.

Le liquidateur judiciaire de la Sasu MG Triskele démontre qu'à cette période M. [K] [L] souhaitait reprendre le fonds de commerce dans le cadre d'une location-gérance.

Ce projet était suffisamment sérieux et avancé au point de faire élaborer un acte notarié qui, finalement, ne sera pas signé par les parties.

M. [K] [L], du fait de ce projet en cours, était, dès lors, à titre personnel, directement intéressé par le fonctionnement de ce bar, ce qui explique sa présence assidue sur le site et sa proximité avec les clients, dont il faisait initialement partie, et à qui il a pu servir des consommations, sans pour autant que cela ne caractérise l'existence d'un lien de subordination vis-à-vis de la Sasu MG Triskele et, donc, d'un emploi salarié.

D'ailleurs, il sera remarqué que dans son courrier de mise en demeure du 17 décembre 2018 adressé à la Sasu MG Triskele, M. [L] [K], lui-même, évoque être salarié de l'entreprise depuis le 09 septembre 2018, et non depuis le 13 août 2018, comme il le soutient, désormais, dans le cadre de la présente procédure.

Dès lors, le délit de travail dissimulé n'étant pas caractérisé, ni dans son élément matériel, ni dans son élément intentionnel, il convient de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes ayant débouté M. [K] [L] de sa demande de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour 'rupture abusive' du contrat de travail

Dans l'hypothèse d'une requalification d'un CDD en CDI, la rupture devient un licenciement et le salarié peut, le cas échéant, obtenir des indemnités, pour licenciement irrégulier, suite au non respect de la procédure de licenciement, ou pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à défaut de lettre de licenciement motivée. De plus, si la rupture est intervenue dans l'un des cas où la loi prévoit que le licenciement est illicite, le juge peut prononcer la nullité du licenciement.

En l'espèce, M. [K] [L] sollicite des dommages-intérêts à hauteur de 1.500 euros pour 'rupture abusive' de son contrat de travail, ce qui s'analyse en une demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'article L.1235-3 du code du travail dispose : 'Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau ci-dessous'.

Pour un salarié ayant moins d'une année d'ancienneté, ledit tableau, contrairement à l'interprétation erronée qui en a été faite par le conseil de prud'hommes, prévoit que celui-ci peut prétendre à une indemnité, laquelle ne saurait, toutefois, être supérieure à 1 mois de salaire brut, le montant de l'indemnité minimale prévu étant 'sans objet'.

M. [K] [L] peut donc, en l'espèce, prétendre à une indemnité maximale de 2.245,79 euros.

Dès lors, et bien qu'il n'apporte aucun élément au sujet de sa situation et du préjudice subi, il convient de faire droit à sa demande, en infirmant le jugement du conseil de prud'hommes sur ce point, et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], les dommages-intérêts dus à M. [L] [K] au titre de la rupture abusive de son contrat de travail à la somme de 1.500 euros.

Sur l'indemnité de précarité

Suivant l'article L.1243-8 du code du travail, 'lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation.

Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié.

Elle s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l'issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant'.

La cour de cassation considère que, lorsqu'elle est perçue par le salarié à l'issue de son CDD, l'indemnité de fin de contrat lui reste acquise nonobstant une requalification ultérieure en contrat à durée indéterminée (Cass.soc., 9'mai'2001, n°98-46.205'; Cass. soc., 9'mai'2001, n°'89-44.090'; Cass. soc., 6'mai'2002, n°'00-41.992'; Cass. soc., 24'juin'2003, n°'00-42.766'; Cass. soc., 30'mars'2005, n°'03-42.667'; Cass.'soc., 15'janv. 2014, n°'12-23.523). Ainsi, la requalification ne peut effacer le fait que le salarié s'est trouvé à l'issue de son CDD en situation de précarité. Mais une condition est posée par ces arrêts': l'indemnité de fin de contrat doit avoir été perçue à l'issue du contrat, ce qui suppose que la requalification ait été demandée ultérieurement.Autrement dit, la règle ne s'applique pas en cours d'exécution du contrat.

En revanche, lorsque la relation contractuelle se poursuit en contrat à durée indéterminée, notamment en cas de requalification d'un contrat à durée déterminée, l'indemnité de précarité n'est pas due (Cass.soc., 25 novembre 2020, n°19-20.949).

En l'espèce, les parties s'accordent sur le fait que leur relation contractuelle a pris fin, de plein droit, le 31 octobre 2018, au terme prévu par le CDD renouvelé, et que nonobstant la requalification, ultérieure, en CDI, opérée par le conseil de prud'hommes, le salarié a droit à une indemnité de précarité, dont seul le montant fait l'objet d'une contestation par les deux parties.

Il apparait, à la lecture des fiches de paie remises par le liquidateur judiciaire de la Sasu MG Triskele, que M. [K] a perçu une rémunération totale brute de 4.491,57 euros, de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité de précarité à la somme de 449,16 euros.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La Sasu MG Triskele succombant, elle devra, en cause d'appel, assumer la charge des entiers dépens et verser à M. [K] [L] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes d'Annemasse du 25 juin 2021, en ce qu'il a débouté M. [L] [K] de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé.

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes d'Annemasse du 25 juin 2021 pour le surplus de ses dispositions frappées d'appel.

Statuant à nouveau,

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre du rappel de salaires et d'heures supplémentaires pour les mois de septembre et octobre 2018 à la somme de 4.064,04 euros brut, étant précisé qu'il conviendra de déduire du salaire net calculé les sommes nettes déjà versées par l'employeur les 22 octobre 2018 et 13 novembre 2018 à hauteur totale de 2.100,06 euros.

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité de requalification à la somme de 2.245,79 euros.

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], les dommages-intérêts dus à M. [L] [K] au titre de la rupture abusive de son contrat de travail à la somme de 1.500 euros.

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], la créance de M. [L] [K] due au titre de l'indemnité de précarité à la somme de 449,16 euros.

Y ajoutant,

ORDONNE à la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], de remettre à M. [L] [K] les documents de fin de contrat (certificat de travail, solde de tout compte et attestation pôle emploi), ainsi que les bulletins de paie des mois de septembre et octobre 2018 rectifiés, tenant compte de la présente décision.

CONDAMNE la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], aux entiers dépens, en cause d'appel.

CONDAMNE la Sasu MG Triskele, représentée par son mandataire liquidateur Me [V] [X], lui même représenté par la Selarl MJ Synergie, mandataire ad'hoc désigné des suites du décès de Me [V] [X], à payer à M. [L] [K] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel.

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

DÉCLARE la présente décision opposable à l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy.

DIT que la créance de salaires, l'indemnité de requalification et l'indemnité de précarité avancées par l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy au titre de l'exécution provisoire doivent venir en déduction de celles fixées par la présente décision.

RAPPELLE que l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy n'est tenue de procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-6 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-19 et L.3253-17 du code du travail, et dans la limite des plafonds légaux prévus par les articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail.

RAPPELLE que l'indemnité fixée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens sont exclus de la garantie due par l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy.

DIT que l'obligation de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Annecy de faire l'avance des sommes allouées à M. [L] [K] ne pourra s'exécuter que sur justification par le mandataire judiciaire de l'absence de fonds disponibles pour procéder à leur paiement.

Ainsi prononcé publiquement le 26 Janvier 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Frédéric PARIS, Président, et Madame Capucine QUIBLIER, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Chbre sociale prud'hommes
Numéro d'arrêt : 21/01492
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;21.01492 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award