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04/07/2017 | FRANCE | N°17/00845

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 04 juillet 2017, 17/00845


COUR D'APPEL
DE CHAMBERY
Première Présidence




AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DU PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le QUATRE JUILLET DEUX MILLE DIX SEPT,


Nous, Michel Allaix, premier président de la Cour d'Appel de CHAMBÉRY, assisté de Marina Vidal, greffier, avons rendu l'ordonnance suivante :


Dans la cause 17/ 00051 débattue à notre audience publique du 27 Juin 2017 avec l'assistance de Ghislaine Vincent (MA/ GV)- RG no 14/ 00845- chambre sociale








E

NTRE




La SAS ETABLISSEMENTS FRANK ET PIGNARD prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est sis...

COUR D'APPEL
DE CHAMBERY
Première Présidence

AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DU PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le QUATRE JUILLET DEUX MILLE DIX SEPT,

Nous, Michel Allaix, premier président de la Cour d'Appel de CHAMBÉRY, assisté de Marina Vidal, greffier, avons rendu l'ordonnance suivante :

Dans la cause 17/ 00051 débattue à notre audience publique du 27 Juin 2017 avec l'assistance de Ghislaine Vincent (MA/ GV)- RG no 14/ 00845- chambre sociale

ENTRE

La SAS ETABLISSEMENTS FRANK ET PIGNARD prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est sis Promenade de l'Arve-ZI des Pochons-BP 95-74300 THYEZ

Représentée par Me Véronique DELMOTTE-CLAUSSE, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

Demanderesse en référé

ET

M. Pascal X...

Demeurant ...

Représenté par Me Agnès RIBES, avocat au barreau de BONNEVILLE

Défendeur en référé

M. Pascal X...a été embauché en contrat à durée indéterminée le 1er avril 1988 par la société GAILLARD. Ce contrat a été transféré ultérieurement à la société FRANK ET PIGNARD.

Par jugement en date du 7 mars 2017, le Conseil des Prud'hommes de Bonneville a notamment :
- dit que le licenciement de M. Pascal X...repose sur une cause réelle et sérieuse,
- débouté M. Pascal X...de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,
- dit que la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie est applicable à M. Pascal X...,
- condamné la société FRANK ET PIGNARD à verser à M. Pascal X...la somme de
36 642, 41 € au titre du complément de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
- fixé la moyenne des salaires de M. Pascal X...à 4 579, 83 €,
- ordonné l'exécution provisoire pour les sommes qui n'en bénéficient pas de plein droit,
- condamné la société FRANK ET PIGNARD à verser à M. Pascal X...la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société FRANK et PIGNARD de ses autres demandes,
- mis les dépens à la charge de la société FRANK ET PIGNARD.

La SAS ETABLISSEMENTS FRANK ET PIGNARD a interjeté appel de ce jugement le 7 avril 2017 (déclaration d'appel no 17/ 00793 ; no RG 17/ 00845).

Par assignation en référé délivrée le 31 mai 2017 à M. Pascal X..., au détail de laquelle il sera renvoyé, la société FRANK ET PIGNARD sollicite du premier président :
A titre principal,
- d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire judiciaire attachée aux condamnations ordonnées par le jugement du conseil des prud'hommes de Bonneville du 7 mars 2017 susvisé,
A titre subsidiaire, si la juridiction du premier président estimait que l'exécution provisoire attachée aux condamnations résultant du jugement susvisé est de droit,
- de l'autoriser à déposer sur le compte séquestre de Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Thonon-les-Bains la somme égale au montant de la condamnation, soit 38 142, 41 € en principal, afin de se protéger contre une insolvabilité du salarié en cas de réformation du jugement par la cour,
- de condamner M. Pascal X...aux entiers dépens,

Ce aux motifs :
- que M. Pascal X...laisse apparaître un risque important d'insolvabilité et de non restitution des fonds versés par la société FRANK ET PIGNARD en cas de réformation du jugement susvisé, qu'il s'agit en l'espèce d'un montant de 38 142, 41 €, soit 16 mois de salaire de M. X..., que ce dernier déclarait en première instance rencontrer d'importantes difficultés pour retrouver un emploi correspondant à sa qualification, qu'il était indemnisé par Pôle Emploi à hauteur de 2 306, 40 € par mois, soit une perte de revenus de moitié, que cette situation lui occasionnait de sérieuses difficultés financières, notamment pour le règlement des échéances de son prêt immobilier dont il lui reste à devoir un montant en principal de 152 938, 09 € outre intérêts, qu'il a par ailleurs deux enfants à charge encore scolarisés, que par conséquent, le risque de non remboursement des fonds par M Pascal X...entraînerait pour la société FRANK ET PIGNARD des conséquences manifestement excessives,

- que la situation personnelle et financière de M. X...est précaire, qu'il ne rapporte aucune garantie de remboursement des sommes, qu'ainsi, ces éléments justifient que soit autorisée la consignation des sommes en cause par la société FRANK ET PIGNARD.

Dans ses dernières conclusions en date du 26 juin 2017, au détail desquelles il sera renvoyé, la société FRANK ET PIGNARD fait valoir que, contrairement à ce qu'affirme M. X..., le complément d'indemnité conventionnelle de licenciement au versement duquel elle a été condamnée, ne peut bénéficier de l'exécution provisoire de droit prévue par les dispositions combinées des articles R1454-14 et 28 du code du travail, qu'il s'agit bien d'une exécution provisoire ordonnée, pour la suspension de laquelle il suffit de démontrer l'existence des conséquences manifestement excessives qui en résulteraient.

Elle relève par ailleurs qu'aucun renseignement n'est donné par M. X...sur la situation du bien immobilier dont il indique être propriétaire et pour lequel subsiste par ailleurs un remboursement de prêt à échoir de 152 938, 09 €, qu'aucune proposition de garantie bancaire ou autre n'est formée par M. X..., et que dés lors une suspension ou à tout le moins un aménagement de l'exécution provisoire sont amplement justifiés.

Par conclusions du 22 juin 2017, au détail desquelles il sera renvoyé, M. Pascal X...demande au premier président de constater que les sommes qui lui ont été accordées bénéficient de l'exécution provisoire de plein droit, de débouter la société FRANK ET PIGNARD de sa demande de suspension ou d'aménagement de l'exécution provisoire et, reconventionnellement, de la condamner à lui payer la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, il fait valoir les arguments suivants :
- il soutient en premier lieu que l'indemnité conventionnelle de licenciement qu'il a obtenu a la nature de salaire et bénéficie à ce titre de l'exécution provisoire de plein droit, et qu'il convient pour obtenir la suspension de cette exécution provisoire de rapporter la preuve de la double condition de conséquences manifestement excessives et de la violation du principe du contradictoire ou de l'article 12 du code de procédure civile, cette double preuve n'étant pas rapportée en l'espèce,
- il rappelle par ailleurs que la société FRANK ET PIGNARD n'a jamais prétendu se trouver dans l'impossibilité de régler l'indemnité au paiement de laquelle elle a été condamnée,
- il souligne enfin qu'en cas de réformation du jugement, il serait tout à fait en mesure de restituer les sommes versées au titre de l'exécution provisoire, dans la mesure où il dispose d'un salaire net imposable de 2 969 € mensuel, et ou il est propriétaire d'une maison en indivision avec sa compagne d'une valeur de 250 000 €,
- s'agissant de la demande d'aménagement de l'exécution provisoire, il relève enfin qu'il serait illégal d'ordonner une consignation pure et simple, l'article 524 du code de procédure civile ne renvoyant qu'à l'article 521 alinéa 2 qui permet une consignation à charge pour le séquestre d'effectuer des versements périodiques au bénéficiaire selon les modalités ordonnées par le juge, et qu'en l'espèce il reste dans l'attente du versement de ses indemnités de licenciement depuis l'automne 2015.

SUR CE,

I : Sur la demande de suspension de l'exécution provisoire

Aux termes de l'article 524 du Code de procédure civile : " Lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président statuant en référé et dans les cas suivants :
1o Si elle est interdite par la loi ;
2o Si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522.
Le même pouvoir appartient, en cas d'opposition, au juge qui a rendu la décision.
Lorsque l'exécution provisoire est de droit, le premier président peut prendre les mesures prévues au deuxième alinéa de l'article 521 et à l'article 522.
Le premier président peut arrêter l'exécution provisoire de droit en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article 12 et lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ".

En l'espèce, par jugement en date du 7 mars 2017, le Conseil des Prud'hommes de Bonneville a notamment :
- dit que le licenciement de M. Pascal X...repose sur une cause réelle et sérieuse,
- débouté M. Pascal X...de se demande au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,
- dit que la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie est applicable à M. Pascal X...,
- condamné la société FRANK ET PIGNARD à verser à M. Pascal X...la somme de 36 642, 41 € au titre du complément de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
- fixé la moyenne des salaires de M. Pascal X...à 4 579, 83 €,
- ordonné l'exécution provisoire pour les sommes qui n'en bénéficient pas de plein droit,
- condamné la société FRANK ET PIGNARD à verser à M. Pascal X...la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société FRANK et PIGNARD de ses autres demandes,
- mis les dépens à la charge de la société FRANK ET PIGNARD.

Il convient en premier lieu de déterminer si la condamnation à verser la somme de 36 642, 41 € bénéficie ou non de l'exécution provisoire de plein droit, cet élément étant déterminant au regard des preuves à apporter par le demandeur à la suspension de l'exécution provisoire.

Aux termes de l'article R. 1454-28 du code du travail : " Sont de droit exécutoires à titre provisoire :
1o Le jugement qui n'est susceptible d'appel que par suite d'une demande reconventionnelle ;
2o Le jugement qui ordonne la remise d'un certificat de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l'employeur est tenu de délivrer ;
3o Le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2o de l'article R. 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement. ".

En l'espèce, la décision rendue par le conseil des prud'hommes de Bonneville en date du 7 mars 2017 est un jugement au fond.

L'article R. 1454-14 du code du travail, auquel renvoie l'article R 1454-28 ci-dessus rappelé, dispose : " Le bureau de conciliation et d'orientation peut, en dépit de toute exception de procédure et même si le défendeur ne comparaît pas, ordonner :
(...)
2o Lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable :
a) Le versement de provisions sur les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions ;
b) Le versement de provisions sur les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement ;
c) Le versement de l'indemnité compensatrice et de l'indemnité spéciale de licenciement en cas d'inaptitude médicale consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnées à l'article L. 1226-14 ;
e) Le versement de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8 et de l'indemnité de fin de mission mentionnée à l'article L. 1251-32 ;
(...) ".

En l'espèce, le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Bonneville en date du 7 mars 2017 ordonne le paiement d'une indemnité conventionnelle compensatrice de licenciement de 36 642, 41 €, qui entre dans les sommes dues au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2o de l'article R 1454-14 du code du travail.

Ce jugement, par application de l'article R 1454-28 du code du travail, est exécutoire de plein droit dans la limite maximum de neuf mois de salaire, calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. La moyenne des salaires mentionnée dans le jugement est de 4 579, 83 €, ce qui correspond pour 9 mois de salaires à un total de 41 218, 47 €. La somme de 36 642, 41 € au versement de laquelle a été condamnée la société FRANK ET PIGNARD bénéficie en conséquence de l'exécution provisoire de plein droit.

Pour obtenir la suspension de l'exécution provisoire de plein droit, la société FRANK ET PIGNARD doit rapporter la preuve de la double condition de l'existence de conséquences manifestement excessives et de la violation du principe du contradictoire ou de l'article 12 du code de procédure civile, et aucun élément relatif à la seconde condition n'est allégué ou rapporté en l'espèce.

La somme de 1 500 € correspondant à l'indemnité accordée au titre de l'article 700 du code de procédure civile bénéficie d'une exécution provisoire ordonnée, pour la suspension de laquelle la seule condition de conséquences manifestement excessives est requise, mais, au regard de la modicité de cette somme et des revenus de M. X..., il ne peut sérieusement être avancé l'existence d'un risque d'insolvabilité du bénéficiaire en cas de réformation du premier jugement.

La société FRANK ET PIGNARD sera en conséquence déboutée de sa demande de suspension de l'exécution provisoire.

II : Sur la demande d'aménagement de l'exécution provisoire

Aux termes de l'article 524 alinéa 4 du code de procédure civile : " lorsque l'exécution provisoire est de droit, le premier président peut prendre les mesures prévues au 2e alinéa de l'article 521 et 522 du code de procédure civile ".

Aux termes de l'article 521 alinéa 2 du code de procédure civile : " (...)
En cas de condamnation au versement d'un capital en réparation d'un dommage corporel, le juge peut aussi ordonner que ce capital sera confié à un séquestre à charge d'en verser périodiquement à la victime la part que le juge détermine. "

En l'espèce, la condamnation portant sur la somme de 36 642, 41 € est assortie de l'exécution provisoire de droit et le premier président peut notamment, en application de l'article 521 alinéa 2 du code de procédure civile ordonner que ce capital soit confié à un séquestre à charge d'en verser périodiquement à la " victime " la part qu'il détermine.
Il s'agit toutefois d'une faculté laissée à l'appréciation du premier président.

En l'espèce, le licenciement est intervenu en date du 2 novembre 2015, soit il y a plus de 18 mois à la date de l'audience à laquelle a été évoquée la demande de suspension ou d'aménagement de l'exécution provisoire, et il n'apparaît pas justifié d'ordonner un aménagement qui viendrait encore différer le versement de sommes au paiement desquelles la société FRANK ET PIGNARD a été condamnée.

PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, par décision contradictoire et en matière de référé,

Disons recevable le recours de la société FRANK ET PIGNARD à l'encontre du jugement du conseil des prud'hommes de Bonneville en date du 7 mars 2017,

La déboutons de sa demande de suspension de l'exécution provisoire du jugement du conseil des prud'hommes de Bonneville en date du 7 mars 2017,

La déboutons de sa demande d'aménagement de l'exécution provisoire du jugement du conseil des prud'hommes de Bonneville en date du 7 mars 2017,

Condamnons la société FRANK ET PIGNARD à verser à M. Pascal X...la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

Ainsi prononcé publiquement, le 04 juillet 2017, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Michel Allaix, premier président, et Marina Vidal, greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Numéro d'arrêt : 17/00845
Date de la décision : 04/07/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-07-04;17.00845 ?
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