AF/ SL
COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
Chambre Civile- 1ère section
Arrêt du Mardi 11 Avril 2017
RG : 15/ 01921
Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Grande Instance de THONON LES BAINS en date du 06 Mai 2015, RG 13/ 02103
Appelant
M. Eric X...
né le 25 Juin 1962 à ST GERMAIN EN LAYE (78127), demeurant ...-...-74200 ANTHY SUR LEMAN
représenté par la SCP PIANTA et ASSOCIES, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
Intimée
SA SWISSLIFE PREVOYANCE ET SANTE, dont le siège social est situé 86, boulevard Haussmann-75008 PARIS
représentée par Me Luc HINTERMANN, avocat postulant au barreau de THONON-LES-BAINS et la SCP BAULIEUX BOHE MUGNIER RINCK, avocats plaidants au barreau de LYON
- =- =- =- =- =- =- =- =-
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue en rapporteur, sans opposition des avocats, le 13 février 2017 par Mme Alyette FOUCHARD, en qualité de rapporteur, avec l'assistance de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,
Et lors du délibéré, par :
- Monsieur Philippe GREINER, Président
-Monsieur Pascal LECLERCQ, Conseiller,
- Madame Alyette FOUCHARD, Conseiller
- =- =- =- =- =- =- =- =-
EXPOSÉ DU LITIGE
M. Eric X..., maréchal-ferrant, a adhéré à un contrat d'assurance de prévoyance garanties décès, incapacité de travail et invalidité souscrit par l'association Alptis auprès de la société Swisslife Prévoyance et Santé, avec prise d'effet à compter du 15 avril 2001.
Le 19 février 2010, souffrant de lombalgies invalidantes, M. X... s'est vu délivrer par son médecin traitant un arrêt de travail et a dû subir une intervention chirurgicale au mois de juin 2010. M. X... a, dès le 6 avril 2010, régulièrement déclaré cet état à son assureur.
Après réalisation de plusieurs expertises médicales, un différend est né entre M. X... et son assureur, la société Swisslife, cette dernière invoquant une exclusion de garantie au motif que l'affection justifiant l'arrêt de travail de M. X... aurait pour origine un état antérieur à son adhésion, à savoir un accident survenu le 21 mai 1982. Il a donc été décidé, par un protocole d'accord du 10 mars 2011, de la désignation amiable d'un médecin expert, le Docteur A..., qui, dans son rapport déposé le 29 avril 2011, a relevé que l'affection responsable de l'arrêt de travail est constituée par des lombalgies invalidantes, a fixé le taux d'incapacité fonctionnelle de M. X... à 8 % avec une inaptitude définitive et totale à l'exercice de la profession de maréchal-ferrant, et a également indiqué que la date de consolidation retenue était celle du 31 mars 2011. Le Docteur A...a écarté l'existence d'un lien entre l'arrêt de travail de M. X... et l'accident de 1982.
A la suite de ce rapport médical, la société Swisslife a, par courrier du 5 septembre 2011, indiqué à M. X... qu'elle renonçait à son exclusion de garantie et a fixé le terme du règlement de ses indemnités journalières au 31 mars 2011, date de consolidation retenue par le Docteur A....
Par acte d'huissier du 4 janvier 2012, M. X..., contestant les conclusions de ce rapport et particulièrement la date de consolidation retenue, a fait assigner Alptis Assurances devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains afin d'obtenir la désignation d'un médecin expert pour que soient fixés ses taux d'invalidité fonctionnel et d'incapacité professionnelle. La société Swisslife est intervenue volontairement devant le juge des référés en sa qualité d'assureur.
Le Docteur B..., désigné en qualité d'expert judiciaire, a rendu son rapport le 16 septembre 2012, aux termes duquel il conclut que M. X... souffre d'un spondylolisthésis, anomalie congénitale par défaut d'ossification des isthmes vertébraux. Il indique que cette pathologie existait déjà le 21 mai 1982, qu'elle a continué d'évoluer et que l'arrêt de travail du 19 février 2010 constitue une évolution de cette anomalie constitutionnelle. L'expert fixe la période d'incapacité totale de travail du 19 février 2010 au 7 novembre 2011, la date de consolidation au 7 novembre 2011, le taux d'invalidité fonctionnel à 10 % et celui d'incapacité professionnelle dans la profession de maréchal-ferrant à 100 %.
Suite à ces conclusions, la société Swisslife Prévoyance et Santé a, par courrier officiel du 27 novembre 2012 adressé au conseil de M. X..., sollicité la désignation d'un tiers médecin afin qu'il donne son avis sur l'existence avérée ou non d'un état pathologique antérieur à la souscription du contrat d'assurance par M. X.... Ce dernier n'a pas donné son accord pour cette désignation.
C'est dans ces conditions que par exploit d'huissier en date du 26 septembre 2013, M. X... a assigné la société Swisslife Prévoyance et Santé devant le tribunal de grande instance de Thonon-les-bains afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 26. 368 euros en règlement de ses indemnités journalières jusqu'au 31 décembre 2012, la somme de 400 euros en remboursement de ses frais d'assistance à expertise judiciaire, et la somme de 4. 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
La société Swisslife s'est opposée aux demandes en invoquant la nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration, mais aussi l'exclusion de la garantie en application de l'article 18 du contrat d'assurance, et a sollicité le remboursement par l'assuré des indemnités journalières déjà versées.
Par jugement contradictoire rendu le 6 mai 2015, le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains a :
- débouté la société Swisslife de sa demande tendant à déclarer nul le contrat d'assurance no A1610 du 15 avril 2001,
- débouté la société Swisslife de sa demande de remboursement des indemnités déjà versées à M. X...,
- débouté M. X... de sa demande d'indemnisation par la société Swisslife au delà de la date de consolidation fixée au 7 novembre 2011,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Swisslife Prévoyance et Santé au paiement des dépens, avec droit de recouvrement direct distrait au profit de Me François Pianta pour le compte de M. X..., ces derniers comprenant les dépens de l'instance en référé, les frais d'expertise et les dépens de la présente procédure,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration du 3 septembre 2015, M. Eric X...a interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été clôturée à la date du 31 janvier 2017 et renvoyée à l'audience du 13 février 2017, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 4 avril 2017, délibéré prorogé au 11 avril 2017.
Par conclusions récapitulatives notifiées le 22 novembre 2016, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. Eric X...demande en dernier lieu à la cour de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Swisslife Prévoyance Santé de sa demande de nullité de contrat et de sa demande de remboursement des indemnités journalières déjà réglées à M. X...,
- en tout état de cause, dire et juger que cette demande reconventionnelle se heurte à la prescription prévue à l'article L. 114-1 du code des assurances,
- réformer le jugement pour le surplus,
- vu les articles 1147 et suivants du code civil,
- vu le contrat d'assurance,
- condamner la société Swisslife Prévoyance et Santé à payer à M. X... la somme principale de 26. 368 euros en règlement de ses indemnités journalières pour la période du 1er avril 2011 au 31 décembre 2012, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation de première instance valant mise en demeure,
- condamner la société Swisslife Prévoyance et Santé à payer à M. X... la somme de 400 euros en remboursement de ses frais d'assistance à expertise judiciaire,
- subsidiairement, si la cour estime que la date de consolidation doit être fixée au 7 novembre 2011,
- condamner la société Swisslife Prévoyance et Santé à payer à M. X... la somme de 9. 064 euros représentant les indemnités journalières du 1er avril 2011 au 7 novembre 2011, outre intérêts légaux à compter de l'assignation de première instance valant mise en demeure,
- condamner la société Swisslife Prévoyance et Santé à payer à M. X... la somme de 4. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Swisslife Prévoyance et Santé aux entiers dépens qui comprendront les dépens de référé, les frais d'expertises médicales, les dépens de première instance et les dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP Pianta et Associés.
Par conclusions notifiées le 11 janvier 2016, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société Swisslife Prévoyance et Santé demande en dernier lieu à la cour de :
- vu l'article L. 113-8 du code des assurances et l'article 1134 du code civil,
1.- réformer le jugement déféré en ce que le tribunal a refusé de faire application des dispositions de l'article L 113-8 du code des assurances,
- statuant à nouveau,
- annuler, le contrat d'assurance de prévoyance de M. X...,
2.- réformer le jugement déféré en ce que le tribunal a refusé de faire application des dispositions de l'exclusion des affections et accidents antérieurs à la prise d'effet des garanties, non déclarés lors de la souscription,
- statuant à nouveau,
- rejeter l'intégralité des demandes de M. X...,
3.- condamner Monsieur Eric X...à rembourser à la Société Swisslife Prévoyance et Santé la somme de 15. 691, 75 € au titre des indemnités journalières qui lui ont été versées à tort jusqu'au 31 mars 2011, sur la base des conclusions erronées du Docteur A...,
4.- à titre subsidiaire,
- confirmer le jugement déféré en ce que le tribunal a débouté M. X... de sa demande d'indemnisation au-delà de la date de consolidation fixée au 7 novembre 2011,
- rejeter, en conséquence, l'intégralité des demandes de M. X...,
- en tant que de besoin,
- condamner M. X... à payer à la Société Swisslife Prévoyance et Santé une indemnité de 2. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner enfin M. X... aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de Me Luc Hintermann, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS ET DÉCISION
1/ Sur la nullité du contrat d'assurance
En application de l'article L. 113-2 du code des assurances, l'assuré est obligé notamment de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge.
L'article L. 113-8 du code des assurances dispose par ailleurs que, indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l'article L. 132-26, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre.
En l'espèce, la société Swisslife soutient à titre principal que le contrat d'assurance souscrit par M. X... serait nul en raison de l'omission par l'assuré de l'accident survenu en 1982 à l'occasion duquel, selon l'assureur, l'existence de l'anomalie congénitale à l'origine du sinistre, lui aurait été nécessairement révélée.
M. X... soutient pour sa part que la société Swisslife aurait définitivement renoncé à se prévaloir de l'existence d'une fausse déclaration par des courriers du 5 septembre 2011, que l'exception de nullité du contrat d'assurance serait prescrite sur le fondement de l'article L. 114-1 du code des assurances et qu'en tout état de cause il n'y a pas de fausse déclaration intentionnelle de sa part.
Sur la renonciation alléguée, la lecture des deux courriers de l'assureur du 5 septembre 2011 et de l'expertise du Docteur A...du 29 avril 2011 révèle que l'assureur, à ces dates, n'avait pas connaissance du diagnostic de l'anomalie congénitale, lequel n'a été établi que par le rapport d'expertise judiciaire du Docteur B...le 16 septembre 2012. En conséquence, l'assureur ne peut avoir renoncé à invoquer une fausse déclaration qu'il ne pouvait soupçonner en septembre 2011.
Sur la prescription alléguée, il convient de rappeler qu'en application de l'article L. 114-1 du code des assurances, le délai de prescription biennal ne court, en cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, que du jour où l'assureur en a eu connaissance. Or comme il a été dit ci-dessus, l'assureur n'a eu connaissance des éléments lui permettant de soupçonner une fausse déclaration du risque qu'à la date du rapport d'expertise du Docteur B...établi le 16 septembre 2012. Or ainsi que le souligne M. X... lui-même, la première demande en nullité du contrat formée par la société Swisslife l'a été par conclusions du 14 février 2014, soit dans le délai biennal et aucune prescription n'est encourue.
Sur le fond, pour que la nullité du contrat d'assurance soit encourue sur le fondement de l'article L. 113-8 précité, il appartient à l'assureur de rapporter la preuve de la mauvaise foi de l'assuré et de l'inexactitude de ses déclarations.
Or en l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats, et particulièrement des expertises médicales successives, qu'il n'est pas établi que M. X... ait eu connaissance, dès 1982, de l'anomalie congénitale dont il souffre. En effet, il n'est aucunement démontré que des radiographies du rachis lombaire aient été réalisées à cette époque, et encore moins que le diagnostic ait alors été fait et porté à sa connaissance. Le certificat médical initial de blessures établi lors de l'accident du 21 mai 1982 met principalement en avant un traumatisme crânien avec perte de connaissance et, secondairement seulement, une contusion du flanc gauche et de la région lombaire basse avec érosions cutanées. Il n'est fait état d'aucun examen radiologique prescrit à cette occasion. Il n'est pas non plus établi que M. X... aurait souffert de douleurs lombaires dès cette époque, ce qui serait totalement incompatible avec l'exercice de son métier de maréchal-ferrant pendant près de trente ans.
A cet égard, et contrairement à ce que soutient l'assureur, l'expert judiciaire n'affirme pas que M. X... aurait eu connaissance de l'anomalie congénitale dès 1982, mais seulement que cette anomalie existait déjà en 1982, ce qui est complètement différent.
Enfin, il est fait reproche à M. X... de n'avoir pas déclaré l'existence de cet accident de 1982, dans la réponse donnée, dans le questionnaire auquel il a répondu lors de la souscription du contrat, à la question suivante : « souffrez-vous ou avez-vous souffert de maladies cardio-vasculaires ; du système nerveux (paralysies-accidents-troubles cérébraux) ; psychiques (dépressions nerveuses-psychoses) ; endocriniennes et/ ou métaboliques ; respiratoires ; des os et articulations ; colonne vertébrale (...) ». Toutefois, il n'apparaît pas que M. X... ait effectivement souffert des suites de l'accident de 1982, pour lequel aucune séquelle n'est mise en évidence, ni qu'une maladie quelconque aurait alors été révélée ainsi qu'indiqué ci-dessus. Il convient de souligner qu'il a déclaré complètement divers autres problèmes médicaux de manière tout à fait sincère.
Aussi, il ne peut être fait reproche à M. X... de n'avoir pas déclaré cet accident ancien de 19 ans lors de la souscription du contrat, dont il avait été déclaré guéri en décembre 1982, ayant repris le travail dès le 22 juin 1982. La mauvaise foi alléguée n'est pas établie et en conséquence, le contrat n'encourt aucune nullité.
2/ Sur l'exclusion de garantie
La société Swisslife soutient qu'en tout état de cause, le sinistre déclaré par M. X... étant lié à un état antérieur non déclaré, l'exclusion de garantie prévue par l'article 18 du contrat d'assurance doit s'appliquer, sans qu'il soit nécessaire de démontrer la mauvaise foi de l'assuré.
L'article 18 invoqué, intitulé « limitation des risques couverts », prévoit notamment que « sont exclues des garanties les conséquences des événements ci-après : (...) les affections ou accidents antérieurs à l'entrée en vigueur des garanties du présent contrat et non déclarés à la souscription ».
Le tribunal n'a pas examiné ce moyen et n'y a pas répondu. M. X... soutient que l'assureur a formellement renoncé à invoquer cette exclusion de garantie par les courriers du 5 septembre 2011 précités.
Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'arrêt maladie de M. X... qui a ouvert son droit à indemnité journalière, n'est pas la conséquence de l'accident du 21 mai 1982. Aux termes des courriers du 5 septembre 2011, l'assureur a seulement renoncé à l'exclusion de garantie tirée de l'absence de déclaration de l'accident du 21 mai 1982, mais non à celle résultant de l'existence possible d'une affection antérieure à l'origine du sinistre. La renonciation alléguée n'est donc pas établie.
La question est donc de savoir si l'existence de l'anomalie congénitale antérieurement à la souscription du contrat, mais révélée postérieurement à celle-ci, permet d'opposer à l'assuré l'exclusion de garantie prévue au contrat.
En application de l'article L. 113-1 du code des assurances, les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.
Il n'est pas soutenu par M. X... que la clause 18 du contrat précitée serait illicite, cette clause étant de surcroît formelle et limitée, elle est donc valable. Elle a pour effet d'exclure de la garantie due par l'assureur les conséquences des affections antérieures à l'entrée en vigueur des garanties, c'est-à-dire existantes à cette date, et ce que l'affection en cause ait été connue ou non de l'assuré à la date de souscription du contrat, la bonne ou mauvaise foi de celui-ci dans l'absence de déclaration de l'affection étant indifférente.
Par ailleurs, aucune prescription biennale ne peut être invoquée par M. X... dès lors qu'il s'agit ici pour l'assureur d'opposer à l'assuré une clause contractuelle et non d'exercer une action dérivant du contrat d'assurance.
Il est désormais établi par les conclusions de l'expertise judiciaire, non remises en cause par M. X... sur ce point, que l'anomalie congénitale dont il souffre est à l'origine de l'arrêt de travail dont il réclame l'indemnisation. L'expert conclut que cette anomalie existait nécessairement en 1982.
Toutefois, une anomalie congénitale, tant qu'elle ne s'est pas déclarée comme maladie, dont l'évolution est de surcroît incertaine (rapidité, gravité), ne peut être considérée comme une affection au sens de la clause précitée. La clause litigieuse est destinée à protéger l'assureur d'une absence d'aléa dans la survenance d'un sinistre. Or ici l'aléa est réel dès lors qu'il n'est pas démontré que l'anomalie congénitale dont souffre M. X... devait, dès l'origine, se manifester avant la fin du contrat d'assurance et déclencher ainsi nécessairement la garantie.
En outre, la pathologie dont souffre M. X... ne s'est ici déclarée que plusieurs années après la souscription du contrat d'assurance.
En conséquence, l'exclusion de garantie ne peut être opposée à l'assuré et M. X... est donc bien fondé à réclamer le paiement des indemnités journalières.
C'est à juste titre que le tribunal a rejeté la demande reconventionnelle en paiement formée par la société Swisslife en restitution des indemnités déjà versées.
3/ Sur le montant des indemnités journalières dues par l'assureur
La société Swisslife entend voir arrêter le service des indemnités journalières à la date de consolidation fixée par l'expert judiciaire, soit le 7 novembre 2011. M. X... conteste cette date et soutient ne pas être consolidé et pouvoir obtenir le paiement de ces indemnités jusqu'au 31 décembre 2012.
Le contrat d'assurance prévoit (articles 7 et 9 des conditions générales et description des garanties dans le certificat d'adhésion) que l'indemnité journalière en cas d'incapacité temporaire de travail est servie lorsque par suite d'accident ou de maladie, l'adhérent est dans l'obligation d'interrompre totalement son activité professionnelle. Son service débute à compter du 1er jour qui suit le délai de franchise. Il cesse au 1095ème jour et prend fin au plus tard au 60ème anniversaire.
Aucune clause du contrat d'assurance ne fait référence à une consolidation qui entraînerait la cessation du versement des indemnités journalières. Seule est prévue une absence de cumul possible avec la rente d'invalidité, laquelle est servie à compter de la reconnaissance de l'invalidité.
Pour bénéficier des indemnités journalières, M. X... doit justifier être en incapacité de travail, ce qu'il fait par la production de ses arrêts de travail. Pour cesser de servir les indemnités journalières, l'assureur doit établir que l'assuré est en état d'invalidité au sens du contrat, ce qu'il ne fait pas, la date de consolidation n'étant pas en soi la reconnaissance d'une invalidité. Les taux d'incapacité fonctionnelle et professionnelle déterminés par l'expert judiciaire sont inférieurs à ceux permettant le service de la rente d'invalidité, il n'y a donc pas cumul au sens du contrat. La rente d'invalidité n'est d'ailleurs pas réclamée par M. X....
Aussi, c'est à tort que l'assureur, et le tribunal avec lui, a limité le versement des indemnités journalières à la date de consolidation, laquelle n'est pas une cause contractuelle de cessation de la garantie. Le tribunal de surcroît n'a pas statué sur la demande de versement des indemnités journalières jusqu'au 7 novembre 2011, alors qu'il n'est pas discuté que la société Swisslife a cessé de les payer à la date du 31 mars 2011.
M. X... justifie de la poursuite de son arrêt de travail au-delà du 7 novembre 2011 et jusqu'au 31 décembre 2012, et réclame le paiement des indemnités jusqu'à cette dernière date. Le nombre de jours indemnisés au 31 décembre 2012 est inférieur au plafond fixé par le contrat à 1095 jours indemnisables (début de l'indemnisation le 5 mars 2010). En conséquence, il sera fait droit à la demande et la société Swisslife sera condamnée à payer à M. X... la somme de 41, 20 euros x 640 jours = 26. 368, 00 euros, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 20 septembre 2013.
4/ Sur les autres demandes
La demande formée par M. X... tendant à la prise en charge des frais d'assistance à expertise est de celles qui relèvent des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et n'a pas à faire l'objet d'une condamnation distincte.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. X... la totalité des frais exposés, et non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de lui allouer la somme de 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, la société Swisslife, qui succombe à titre principal, supportera les entiers dépens, comprenant ceux de référé et les frais d'expertise du Docteur B...avec, pour les dépens d'appel, distraction au profit de la SCP Pianta et associés, avocats, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains le 6 mai 2015 sauf en ce qu'il a :
- débouté M. Eric X...de sa demande d'indemnisation par la société Swisslife au-delà de la date de consolidation fixée au 7 novembre 2011,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Infirme le jugement déféré sur ces deux points,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare recevables l'ensemble des demandes formées par la société Swisslife Prévoyance et Santé, aucune prescription n'étant encourue, mais sur le fond, la déboute de toutes ses demandes,
Condamne la société Swisslife Prévoyance et Santé à payer à M. Eric X...la somme de 26. 368, 00 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2013 au titre des indemnités journalières dues jusqu'au 31 décembre 2012,
Condamne la société Swisslife Prévoyance et Santé à payer à M. Eric X...la somme de 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Swisslife Prévoyance et Santé aux entiers dépens de première instance et d'appel, comprenant ceux de référé et les frais d'expertise judiciaire du Docteur B..., avec, pour les dépens d'appel, distraction au profit de la SCP Pianta et associés, avocats, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé publiquement le 11 avril 2017 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Philippe GREINER, Président et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, Le Président,