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26/03/2008 | FRANCE | N°06/01632

France | France, Cour d'appel d'Agen, 26 mars 2008, 06/01632


ARRÊT DU
26 Mars 2008












D. M / S. B










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RG N : 06 / 01632
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E. A. R. L. X...



C /


S. C. A. UNICOQUE




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ARRÊT no287 / 08




COUR D'APPEL D'AGEN


Chambre Civile




Prononcé

à l'audience publique le vingt six Mars deux mille huit, par Bernard BOUTIE, Président de Chambre, assisté de Dominique SALEY, Greffier,




LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,




ENTRE :


E. A. R. L. X... prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
...

ARRÊT DU
26 Mars 2008

D. M / S. B

----------------------
RG N : 06 / 01632
--------------------

E. A. R. L. X...

C /

S. C. A. UNICOQUE

-------------------

ARRÊT no287 / 08

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

Prononcé à l'audience publique le vingt six Mars deux mille huit, par Bernard BOUTIE, Président de Chambre, assisté de Dominique SALEY, Greffier,

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

ENTRE :

E. A. R. L. X... prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est Les Petites Braudières
49310 LA SALLE DE VIHIERS

représentée par Me Jean-Michel BURG, avoué
assistée de Me Henri LOISEAU, avocat

APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AGEN en date du 12 Octobre 2006

D'une part,

ET :

S. C. A. UNICOQUE prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est Lamouthe
47290 CANCON

représentée par la SCP TESTON-LLAMAS, avoués
assistée de Me Alain PAGNOUX, avocat

INTIMÉE

D'autre part,

a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 20 Février 2008, devant Bernard BOUTIE, Président de Chambre, Dominique NOLET, Conseiller et Dominique MARGUERY, Conseiller (laquelle, désignée par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable), assistés d'Isabelle LECLERCQ, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

L'EARL X... a été créé le 15 juin 1980 sous la forme de GAEC dénommé X... Frères composé de Joël X..., le gérant actuel et de son frère Michel. Le 15 juin 1980 Marie-Odile A... épouse X... a succédé à Michel X..., son beau-frère, après avoir racheté ses parts sociales. Cet établissement a pour objet la collecte, le conditionnement, le stockage et la vente de noix et noisettes sous toutes leurs formes.

Michel et Joël X... avaient également constitué la SARL X... Frères par acte sous seing privé du 13 octobre 1985. En 1990, Michel X... avait cédé ses parts à sa belle-s œ ur qui est devenue ultérieurement gérante de la société A...-X.... Cette société avait pour activité le séchage de fruits secs, semences fourragères, maïs, tournesol et toutes opérations qui se rattachait directement ou indirectement à cet objet. Son objet social a été étendu par délibération de l'assemblée générale du 27 juin 2000 à l'activité de production agricole.

L'EARL X... a repris les engagements du GAEC X... qui avait adhéré à la coopérative UNICOQUE le 12 mars 1983 et s'était engagé à livrer la totalité des produits de son exploitation étant précisé que la SCA UNICOQUE commercialisait la production de ses adhérents au sein de la grande distribution.

Les 2 et 5 octobre 1991, les consorts B... avaient donné à bail, pour une durée de 18 ans, aux époux X...- A..., plusieurs parcelles de terres sur la commune de La Salle de Vihiers cadastrées A 216 et A 217 pour des superficies respectives de 2HA 43a et 2HA 87a qu'ils ont plantés de noisetiers. Suivant convention du 28 mai, enregistrée le 31 mai 2001, ces parcelles exploitées à l'origine par l'EARL X... ont été mises à la disposition de la SARL X....

Reprochant à l'EARL X... de ne pas lui avoir livré l'intégralité de sa production de noisettes, la coopérative UNICOQUE lui a par courrier du 4 novembre 2004 infligé une pénalité de 60. 102 pour les campagnes 2001 / 2002, 2002 / 2003, 2003 / 2004 et 2004 / 2005.

* * *

Par acte du 30 décembre 2004, l'EARL X... a fait assigner la SCA UNICOQUE aux fins d'annulation des pénalités de retard.

Par jugement du 12 octobre 2006, le Tribunal de grande instance d'AGEN a pour l'essentiel :

- déclaré la procédure préalable à la décision de pénalité régulière,
- dit que l'EARL X... a manqué à ses obligations de coopérateur en ne souscrivant pas les parts sociales pour les parcelles A 216 et A 217 et pour n'avoir pas notifiée la mise à disposition des dites parcelles,
- condamné l'EARL X... à payer à la coopérative UNICOQUE la somme de 14. 789, 90 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2004,
- ordonné l'exécution provisoire,
- rejeté les demandes fondées sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

* * *

Dans des conditions de forme et de délais non contestées l'EARL X... a relevé appel de cette décision le 20 novembre 2006.

Aux termes de conclusions en date du 7 février 2008, elle demande à la Cour d'infirmer la décision déférée et de condamner la coopérative UNICOQUE à lui rembourser la somme de 14. 789, 90 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2004 et à lui payer 15. 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 10. 000 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle soutient l'argumentation suivante :

- La coopérative n'a pas respecté les règles statutaires préalables au prononcé des pénalités.
- Les pénalités infligées à l'EARL sont mal fondées. L'EARL a cédé à la SARL les parcelles 216 et 217, plantées sans subventions de la coopérative, et non des parts sociales. Les pénalités ne pouvaient être prononcées qu'au titre du contrat originaire liant l'EARL à la coopérative soit pour la période antérieure au 31 mars 2002.
- L'EARL n'a pas manqué à ses obligations, la coopérative a toujours toléré la vente directe d'une partie de la production de ses adhérents.

* * *

Par conclusions du 1er février 2008, la coopérative UNICOQUE demande à la Cour de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné l'EARL X... à s'acquitter de pénalités mais de la réformer en prononçant également des pénalités pour les campagnes 2002 à 2005 pour un montant global de 60. 102 € et en condamnant l'appelante à lui payer 6. 000 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle expose que :

- L'EARL n'a pas respecté ses obligations d'apport total de sa récolte.
- La coopérative n'a pas autorisé la commercialisation de produits hors de ses propres circuits.
- Sur les pénalités : l'EARL devait souscrire des parts sociales supplémentaires pour les parcelles A 216 et 217.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 12 février 2008.

MOTIFS DE LA DÉCISION

* Sur le respect de la procédure préalable au prononcé des pénalités :

L'appelante critique la décision déférée en ce qu'elle a déclaré que la procédure prévue par les statuts de la coopérative UNICOQUE avait été respectée car malgré la rédaction maladroite du courrier du 14 octobre 2004, l'EARL X... ne pouvait ignorer l'objet de la convocation et disposait de tous les éléments lui permettant de préparer sa défense.

L'EARL X... a été convoquée par une lettre précisant : « … le conseil d'administration a souhaité vous entendre pour écouter les griefs que vous avez envers la coopérative concernant vos obligations d'apport total de vos récoltes ».

L'article 7 des statuts d'UNICOQUE dispose : « Avant de se prononcer sur les sanctions …. le conseil d'administration devra par lettre recommandée avec accusé de réception mettre en demeure l'intéressé de fournir ses explications ». Il ne prévoit aucune forme particulière quant au courrier qui doit être adressé à l'un de ses membres.

Les formes prescrites en matière de droit du travail aux relations employeur salarié ne sauraient être appliquées aux rapports entre une coopérative et un associé coopérateur.

C'est avec pertinence que le premier juge observe que l'intimée avait par courrier du 2 juin 2000 adressé à ses adhérents mis fin à toute tolérance concernant la vente à des tiers et que l'obligation d'apport total des récoltes était en discussion entre l'intimée et l'appelante depuis plusieurs années ainsi qu'en attestent les pièces versées aux débats. L'EARL ne peut donc raisonnablement soutenir qu'elle ignorait l'objet de la convocation.

Il est à noter que l'appelante qui soutien ne pas avoir été valablement convoquée s'est rendue devant le conseil d'administration le 29 octobre 2004 et a fourni des explications, ainsi qu'il résulte du procès verbal établi à l'issue de la réunion.

Il ne saurait donc être allégué que les droits de la défense n'ont pas été respectés, la convocation statutaire n'obéissant à aucune forme particulière et l'EARL X... ayant été mise en mesure de fournir toutes explications utiles préalablement au prononcé des pénalités. Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

* Sur le bien fondé des pénalités :

Le premier juge a retenu que l'EARL X... n'avait pas respecté l'obligation d'apport total de ses récoltes en ne dénonçant pas à la coopérative UNICOQUE la mise à disposition de deux parcelles au profit de la SARL A...-X....

L'appelante expose qu'elle n'a pas manqué à ses obligations, il n'avait pas à souscrire de parts sociales pour les parcelles A 216 et A 217 car la coopérative n'avait pas subventionné leur plantation en 1995 et elles n'ont pas été productives durant les premières années. A partir de l'année 2000, il y a eu production, mais sa non livraison était couverte par la tolérance de la coopérative.

L'article 7 des statuts de la coopérative, reprenant les dispositions de l'article R. 522-3 du Code rural dispose : « Obligations des associés coopérateurs :

L'adhésion à la coopérative entraîne pour l'associé coopérateur :
a) L'engagement de livrer la totalité des produits de son exploitation … réserve faite des quantités nécessaires aux besoins professionnels et familiaux limitées à 200 kg par an et par produit ».

Le règlement intérieur de la coopérative précise au titre II, article 5 :
a) Engagement-Apport total- « …. Tout associé est tenu à la règle de l'apport total conformément aux statuts ».

L'article 1er alinéa 2 stipule : " «... tout coopérateur qui accroît sa superficie plantée souscrit des parts supplémentaires à due proportion ".

En application de l'article R. 522-5 du Code rural, l'article 16-1 des statuts prévoit que : « l'associé coopérateur s'engage en cas de mutation de propriété, ou de jouissance de l'exploitation au titre de laquelle il a pris à l'égard de la coopérative des engagements prévus à l'article 7 ci-dessus à transférer ses parts sociales au nouvel exploitant qui, sous réserve des dispositions des paragraphes 2 et 3 ci-après, sera substitué pour la période postérieure à l'acte de mutation, dans tous le droits et obligations de son auteur vis à vis de la société ».

Aux termes de l'article 16-2, « le cédant doit dénoncer la mutation à la société par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans un délai de trois mois à dater du transfert de propriété ou de jouissance ».

En application de ces dispositions, l'EARL X... devait donc apporter l'intégralité de sa production à la coopérative UNICOQUE. Elle devait souscrire des parts sociales pour les parcelles A 216 et A 217 quel que soit le mode de financement des plantations. Elle avait également pour obligation de dénoncer à la coopérative la mise à disposition des parcelles au profit de la SARL A...-X.... En s'abstenant de respecter les prescriptions légales et statutaires, l'appelante s'est affranchie de l'obligation d'apport total de sa production et c'est donc à bon droit que le premier juge a déclaré bien fondé le principe des pénalités.

* Sur le montant des pénalités :

Le jugement déféré les a prononcées pour la période durant laquelle l'EARL était tenue par l'obligation d'apport total concernant les deux parcelles litigieuses soit jusqu'au 30 mars 2002.

L'appelante contestant le principe de la sanction, demande que les pénalités soient appliquées avec modération, rappelant qu'elles peuvent être réduites en application de l'article 1152 du Code civil.

La SCA UNICOQUE, rappelant que l'absence de souscriptions de parts sociales et de dénonciation de la mutation l'a privé de l'intégralité des apports non seulement pour les années 2001 / 2002 mais aussi pour les campagnes ultérieures sollicite la condamnation de l'appelante au paiement de 60. 102 €.

L'EARL X... a repris l'engagement du GAEC X... Frères envers la SCA UNICOQUE souscrit le 12 mars 1983 jusqu'au 31 mars 2002. Le bulletin d'engagement précisait dans son article 4 : « le présent contrat sera renouvelable par tacite reconduction pour une période de 5 ans renouvelables ». Le 17 avril 2004, la coopérative UNICOQUE et l'EARL X... ont souscrit le contrat koki-confiance aux termes duquel « … le producteur engage dans la démarche la totalité de sa production de noix et / ou de noisettes de son exploitation …. pour trois campagnes successives … le contrat se renouvelle pour une durée identique par tacite reconduction ….. ». L'appelante s'était donc engagée vis-à-vis de l'intimée au-delà du 31 mars 2002.

Il résulte par ailleurs de la jurisprudence que le coopérateur qui ne respecte pas son engagement de livrer l'intégralité de sa production doit réparer le préjudice subi par la coopérative du fait du non respect de ses obligations contractuelles jusqu'au terme de son engagement. Le préjudice de la coopérative résultant de la nécessité de faire face à des frais fixes en dépit de la défaillance des associés.

La demande d'indemnisation de la SCA UNICOQUE au titre des campagnes 2001 à 2005 étant donc déclarée fondée, il convient d'examiner l'opportunité de faire application des dispositions de l'article 1152 du Code civil au bénéfice de l'EARL UNICOQUE.

Il est constant que les pénalités statutaires ont le caractère de clauses pénales et que la Cour peut diminuer le montant des dommages et intérêts à verser en cas de non respect des obligations contractuelles.

Force est cependant de constater que c'est afin de se soustraire à son obligation d'apport intégral vis-à-vis de la coopérative que l'appelante a omis de souscrire des parts sociales pour les deux parcelles litigieuses et s'est abstenue de déclarer la mutation à la SCA UNICOQUE, un tel comportement qui peut être qualifié de dolosif ne saurait ouvrir le droit à une diminution des pénalités. L'EARL X... sera donc condamnée à verser 60. 102 € à l'intimée.

* Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive :

L'appelante sollicite à ce titre la condamnation de la SCA UNICOQUE à lui verser la somme de 15. 000 €.

L'action en justice est un droit qui ne dégénère en abus qu'en cas de malice ou de mauvaise foi qui ne sont nullement démontrés au cas présent, étant en outre posé que la saisine du Tribunal de grande instance d'AGEN et la déclaration d'appel émanent de l'EARL X....

* Sur les dépens et les frais irrépétibles :

L'EARL X... succombant aura la charge des dépens d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare l'appel recevable,

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a condamné l'EARL X... à payer à la coopérative UNICOQUE la somme de 17. 789, 90 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2004 et, statuant à nouveau,

Condamne l'EARL X... à payer à la coopérative UNICOQUE la somme de 60. 102 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2004,

Confirme le jugement déféré pour le surplus,

Condamne l'EARL X... aux dépens d'appel,

Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Bernard BOUTIE, Président de Chambre et par Dominique SALEY, Greffier présent lors du prononcé.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Numéro d'arrêt : 06/01632
Date de la décision : 26/03/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Agen


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-03-26;06.01632 ?
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