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18/03/2008 | FRANCE | N°07/00060

France | France, Cour d'appel d'Agen, 18 mars 2008, 07/00060


ARRÊT DU
18 MARS 2008

CL / SB

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R. G. 07 / 00060
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Association DÉPARTEMENTALE DE SAUVEGARDE DE L'ENFANT A L'ADULTE

C /

Dominique X... épouse Y...


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ARRÊT no 99

COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Sociale

Prononcé à l'audience publique du dix-huit mars deux mille huit par Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Nicole CUESTA, Greffière,

La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affair

e

ENTRE :

Association DÉPARTEMENTALE DE SAUVEGARDE DE L'ENFANT A L'ADULTE
Prise en la personne de son Président
19, Place d...

ARRÊT DU
18 MARS 2008

CL / SB

-----------------------
R. G. 07 / 00060
-----------------------

Association DÉPARTEMENTALE DE SAUVEGARDE DE L'ENFANT A L'ADULTE

C /

Dominique X... épouse Y...

-----------------------
ARRÊT no 99

COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Sociale

Prononcé à l'audience publique du dix-huit mars deux mille huit par Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Nicole CUESTA, Greffière,

La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire

ENTRE :

Association DÉPARTEMENTALE DE SAUVEGARDE DE L'ENFANT A L'ADULTE
Prise en la personne de son Président
19, Place de l'Hôtel de Ville
15000 AURILLAC

Rep / assistant : Me Michel PAMARTde la SCP FIDAL (avocats au barreau d'AURILLAC)

APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de FIGEAC en date du 14 décembre 2006 dans une affaire enregistrée au rôle sous le no R. G. 06 / 00065

d'une part,

ET :

Dominique X... épouse Y...

née le 12 juin 1957

...

15160 ALLANCHE

Rep / assistant : Me Pierre MERAL (avocat au barreau d'AURILLAC)

INTIMÉE

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue et plaidée en audience publique le 5 février 2008 devant Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, Benoît MORNET et Thierry LIPPMANN, Conseillers, assistés de Nicole CUESTA, Greffière, et après qu'il en a été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

* *
*

Dominique Y..., née le 12 juin 1957, a été embauchée à compter du 1er janvier 1979, par l'ASSOCIATION DÉPARTEMENTALE de SAUVEGARDE de L'ENFANT à l'ADULTE (ADSEA) du CANTAL qui a pour objet la prise en charge des personnes en difficultés médico-sociales ou handicapées et qui a un effectif de 300 salariés réparti sur plusieurs établissements, et ce, d'abord en qualité de secrétaire puis à partir du 11 mars 1995 en qualité d'agent administratif principal (secrétaire comptable) moyennant un salaire mensuel brut de 10. 067, 76 Francs.

Elle a toujours été affectée à l'institut de rééducation " Le Parc " à ALLANCHE et elle bénéficiait, en dernier lieu, d'un salaire mensuel brut s'élevant à 1. 886, 660 € outre une indemnité sujétion spéciale de 154, 89 €.

Elle s'est trouvée en situation d'arrêt de travail pour cause de maladie à dater du 2 juillet 2004.

Suivant courrier recommandé en date du 5 juillet 2006, l'employeur l'a convoquée à un entretien préalable fixé au 11 juillet 2006.

La lettre de licenciement en date du 13 juillet 2006 qui a été notifiée par l'ADSEA du CANTAL à la salariée est, ainsi, libellée :

"... nous vous notifions, conformément à l'article 26 de la CCNT du 15 mars 1996, la rupture de votre contrat de travail.
En effet, suite à un arrêt de travail depuis 2004 et une absence consécutive et ininterrompue de plus de six mois, nous sommes dans l'obligation de vous remplacer sur le poste de technicien qualifié " comptabilité " que vous occupiez à l'I. T. E. P " Le Parc " à ALLANCHE... "

Contestant ce licenciement, Dominique Y... a saisi, le 4 septembre 2006, le Conseil de Prud'hommes de FIGEAC.

Suivant jugement en date du 14 décembre 2006, cette juridiction a condamné l'ASSOCIATION DÉPARTEMENTALE de SAUVEGARDE de L'ENFANT à l'ADULTE du CANTAL à verser à Dominique Y... les sommes de 78. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et de 2. 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et enfin, a débouté l'ADSEA du CANTAL de sa demande au titre de l'article 700 précité.

L'ASSOCIATION DÉPARTEMENTALE de SAUVEGARDE de L'ENFANT à l'ADULTE du CANTAL a relevé appel de cette décision dans des conditions de forme et de délais qui n'apparaissent pas critiquables.

Ce recours a donné lieu à l'enregistrement au greffe de la Cour de deux procédures sous les numéros 07 / 59 et 07 / 60.

Elle soutient, pour l'essentiel, que le licenciement de Dominique Y... est régulier et légitime, pour être conforme à la Convention Collective qui autorise ce type de mesure après six mois d'absence du salarié et à la jurisprudence qui reconnaît à l'employeur la faculté de licencier dans la mesure où l'absence de longue durée perturbe le bon fonctionnement de l'entreprise et rend nécessaire le remplacement définitif du salarié.

Elle ajoute que du fait de sa longue absence de plus de deux ans, Dominique Y... n'a pas pu mettre à jour ses compétences professionnelles et qu'elle-même a dû former sa remplaçante avec les autres comptables de l'Association.

Elle prétend qu'à aucun moment Dominique Y... n'a indiqué ni donné de garantie quant à un retour imminent au 5 août 2006, période de surcroît de fermeture annuelle pour l'I. T. E. P. d'ALLANCHE.

Elle considère, enfin, qu'en tout état de cause, Dominique Y... ne justifie pas d'un préjudice réel et que cette dernière sollicite des dommages et intérêts pour un montant exorbitant alors qu'à son départ, elle a perçu une somme non négligeable de 12. 249, 36 € en application des textes conventionnels la désintéressant totalement de ses droits sociaux.

Elle demande, dès lors, à la Cour d'infirmer la décision déférée, de débouter Dominique Y... de la totalité de ses demandes et de la condamner au paiement d'une indemnité de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dominique Y... demande quant à elle à la Cour de dire le licenciement dont il s'agit nul et subsidiairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, de débouter l'appelante de l'ensemble de ses contestations et de la condamner à lui payer les sommes de 150. 000 € à titre de dommages et intérêts et de 4. 000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Elle soutient pour l'essentiel que la rupture est fondée sur sa maladie, ce qui est totalement prohibé par l'article L. 122-45 du Code du Travail et ce qui doit entraîner la nullité du licenciement.

Elle fait état, par ailleurs, de ce que l'employeur n'établit en rien qu'il a été contraint de la remplacer en raison de son absence, l'ADSEA n'ayant en réalité rencontré aucune difficulté du fait de celle-ci.

Elle ajoute que, de son côté, elle a toujours démontré ses facultés d'adaptation, son activité professionnelle ayant toujours donné toute satisfaction à l'ADSEA.

Elle ajoute que son entourage professionnel y compris les dirigeants de l'association connaissait parfaitement l'affection qui l'a frappée en 2004 et qui a nécessité durant de longs mois des séances de chimiothérapie, qu'elle a mis tout en oeuvre, dès le diagnostic de sa maladie, pour que son remplacement durant son absence s'effectue dans les meilleures conditions et que le licenciement est intervenu alors que sa reprise vraisemblable était annoncée pour le 5 août 2006, ses derniers bilans médicaux étant satisfaisants, ce qu'elle avait eu l'occasion d'indiquer, le 4 juillet 2006, à l'I. T. E. P D'ALLANCHE lors de la remise de son dernier certificat médical de prolongation d'arrêt de travail.

Elle fait valoir, enfin, que le licenciement intervenu dans un tel contexte lui a causé un préjudice considérable d'autant plus que ses possibilités de retrouver du travail sont très réduites.

- SUR QUOI :

Attendu qu'il convient dans un souci de bonne administration de la justice de joindre la procédure enregistrée au greffe de la Cour sous le numéro 07 / 59 à celle enregistrée au greffe de cette même Cour sous le numéro 07 / 60.

Attendu que selon les termes de l'article L. 122-45 du Code du Travail, aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail.

Que, cependant, ces dispositions légales ne s'opposent pas au licenciement motivé non pas par l'état de santé du salarié mais par la nécessité de pourvoir à son remplacement définitif en raison des perturbations que son absence prolongée apporte au bon fonctionnement de l'entreprise.

Qu'en effet, si l'état de santé n'est pas en soi un motif de licenciement, l'article L. 122-45 précité n'a pas pour autant pour objet d'interdire le licenciement lorsqu'il est fondé non pas sur la maladie du salarié mais sur la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par son absence prolongée ou des arrêts de travail répétitifs, ce qui la contraint à pourvoir à son remplacement définitif.

Qu'au cas présent, la lettre de licenciement qui lie les termes du débat vise une absence consécutive et ininterrompue de la salariée de plus de six mois, soit au-delà de la période conventionnelle de garantie d'emploi et l'obligation de la remplacer sur son poste.

Que l'obligation de remplacer la salariée sur son poste doit être avérée et ne saurait résulter des seules affirmations de l'employeur, étant précisé que doivent être établies l'impossibilité pour ce dernier de recourir au remplacement temporaire de la salariée malade et la nécessité de son remplacement définitif.

Qu'au cas présent, il n'est en rien démontré que l'absence prolongée de Dominique Y... a généré, pour l'ADSEA du CANTAL, une perturbation allant au-delà de la simple réorganisation de l'entreprise, réorganisation qui s'est mise en place dès les premiers temps de l'arrêt de travail de Dominique THERON et qui a perduré jusqu'au licenciement, sans que soit établi ni même allégué le moindre dommage pour l'association.

Que l'employeur qui, selon l'article 930-1 du Code du Travail, a l'obligation d'adaptation des salariés à l'évolution de leur poste de travail au besoin en leur proposant des formations qui participent au développement des compétences et qui n'a rien proposé de tel à Dominique Y... est mal fondé à prétendre invoquer une inadaptation de cette dernière à son emploi au seul motif de la survenance durant son absence de nouvelles règles de comptabilité.

Que lorsque, comme en l'espèce, la convention collective applicable à la relation de travail prévoit une clause de garantie d'emploi fixant la durée pendant laquelle le contrat de travail est suspendu par la maladie, la seule expiration de la période de garantie d'emploi ne donne pas au licenciement une cause réelle et sérieuse.

Attendu qu'il s'ensuit que le licenciement dont Dominique Y... a fait l'objet ne peut être considéré que comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Attendu que l'absence de cause réelle et sérieuse et le caractère abusif d'un licenciement intervenu dans des conditions vexatoires ou en cas de légèreté blâmable de l'employeur ouvrent droit à indemnisation au bénéfice de la salariée.

Qu'une telle réparation est distincte des indemnités conventionnelles de licenciement auxquelles l'intéressée est, par ailleurs, en droit de prétendre.

Qu'au cas présent, il est indéniable que les possibilités de reclassement professionnel de Dominique Y... qui réside à ALLANCHE, petite localité essentiellement agricole du CANTAL et dont l'époux est agriculteur dans cette même localité, ce qui l'ancre à cette région, et qui était âgée de 49 ans au moment de la rupture sont particulièrement limitées, l'intéressée n'ayant d'ailleurs, depuis le licenciement, pu bénéficier, en 2007, que d'un contrat de travail à temps partiel pour une durée de près de deux mois moyennant un salaire mensuel moyen de 600 € net.

Qu'il doit également être tenu compte d'un temps de présence de 27 ans au service de l'ADSEA.

Qu'il résulte, en outre, de l'attestation établie aux formes de droit par le conseiller de la salariée ayant assisté à l'entretien préalable du 11 juillet 2006 que celle-ci a, lors de cet entretien, fait part à l'employeur d'une possibilité de reprise de son poste de travail à compter du 5 août 2006, à l'issue des ses derniers examens médicaux en cours, les premiers résultats étant bons.

Que l'ADSEA, qui n'apporte aucune critique à cette pièce, a néanmoins notifié le licenciement dès le surlendemain, sans attendre les derniers résultats médicaux, cette prise de décision pour le moins hâtive au regard d'un retour envisageable de la salariée n'apparaissant pas justifiée alors que le remplacement temporaire de cette dernière continuait à être assuré normalement et que s'annonçait la période de congés annuels du mois d'août ce qui est de nature à conférer, de plus, au licenciement un caractère vexatoire pour la salariée.

Que le préjudice ainsi subi par Dominique Y... du fait de la rupture de son contrat de travail doit, dès lors, lui ouvrir droit à des dommages et intérêts lesquels, au regard des circonstances de l'espèce, ont été correctement fixés par les premiers juges.

Attendu, par conséquent, qu'il convient de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions et de débouter l'ADSEA du CANTAL de l'ensemble de ses demandes.

Attendu que les dépens de l'appel seront mis à la charge de l'ASSOCIATION DÉPARTEMENTALE de SAUVEGARDE de L'ENFANT à l'ADULTE (ADSEA) du CANTAL qui succombe pour l'essentiel, laquelle devra également verser, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, la somme de 2. 000 € à Dominique Y....

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Ordonne la jonction de la procédure enregistrée au greffe de la Cour sous le numéro 07 / 59 à celle enregistrée au greffe de cette même Cour sous le numéro 07 / 60,

Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant,

Condamne l'ASSOCIATION DÉPARTEMENTALE de SAUVEGARDE de L'ENFANT à l'ADULTE (ADSEA) du CANTAL à payer à Dominique Y... la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Rejette comme inutiles ou mal fondées toutes demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne l'ASSOCIATION DÉPARTEMENTALE de SAUVEGARDE de L'ENFANT à l'ADULTE (ADSEA) du CANTAL aux dépens de l'appel.

Le présent arrêt a été signé par Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, et par Nicole CUESTA, Greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Numéro d'arrêt : 07/00060
Date de la décision : 18/03/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Figeac


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-03-18;07.00060 ?
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