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29/01/2008 | FRANCE | N°07/00095

France | France, Cour d'appel d'Agen, 29 janvier 2008, 07/00095


ARRÊT DU

29 Janvier 2008











B.M/S.B









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RG N : 07/00095

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S.A. X...




C/



Luc Y...




S.C.P. DALLET PROUZERGUE BARRIERE DELPY CROUZET BOUCHERAT





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ARRÊT no93/2008

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COUR D'APPEL D'AGEN



Chambre Civile





Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du nouveau Code de procédure civile le vingt neuf Janvier deux mille huit,



LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,



ENTRE :



S.A. X..., prise en la personne de son représentant légal actu...

ARRÊT DU

29 Janvier 2008

B.M/S.B

---------------------

RG N : 07/00095

---------------------

S.A. X...

C/

Luc Y...

S.C.P. DALLET PROUZERGUE BARRIERE DELPY CROUZET BOUCHERAT

------------------

ARRÊT no93/2008

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du nouveau Code de procédure civile le vingt neuf Janvier deux mille huit,

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

ENTRE :

S.A. X..., prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

Dont le siège social est La Sarretie

19100 BRIVE LA GAILLARDE

représentée par la SCP A.L. PATUREAU & P. RIGAULT, avoués

assistée de Me Pierre MOREAU, avocat

APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de CAHORS en date du 15 Septembre 2006

D'une part,

ET :

Maître Luc Y...

Demeurant ...

19100 BRIVE LA GAILLARDE

représenté par la SCP VIMONT J. ET E., avoués

assisté de la SCPA BARRIERE- EYQUEM - LAYDEKER, avocats

S.C.P. DALLET PROUZERGUE BARRIERE DELPY CROUZET BOUCHERAT, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

Dont le siège social est 14 rue d'Arsonval

19100 BRIVE LA GAILLARDE

représentée par la SCP VIMONT J. ET E., avoués

assistée de la SCPA BARRIERE-EYQUEM - LAYDEKER, avocats

INTIMÉS

D'autre part,

a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 18 Décembre 2007, devant Jean-Marie IMBERT, Président de Chambre, Benoît MORNET, Conseiller (lequel, désigné par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable) et Thierry LIPPMANN, Conseiller, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées par le Président, à l'issue des débats, que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.

EXPOSE DU LITIGE

La S.A.R.L. ETABLISSEMENTS X... ET FILS, dont Jean-Pierre X... détenait 164 parts sociales, a été mise en liquidation judiciaire par jugement rendu le 15 juin 1992 par le tribunal de commerce de BRIVE-LA-GAILLARDE.

Afin qu'il soit procédé à la reprise des actifs de cette société, André B..., ancien cadre de la S.A.R.L., a chargé Maître Luc Y..., avocat au barreau de BRIVE, de créer une société anonyme et de soumettre un plan de cession à l'homologation du tribunal de commerce. Maître Y... a rédigé les statuts de la S.A. X..., dont André B... est le P.D.G. et Jean-Pierre X... l'un des associés. Il a procédé à son immatriculation au R.C.S. de BRIVE, et la société a été placée sous le régime fiscal de l'article 44 septies du Code général des impôts.

L'acte de cession du fonds de commerce faisant partie des actifs de la S.A.R.L. liquidée a été signé le 29 juillet 1992 au bénéfice de la S.A. X....

Le 7 décembre 1995, un redressement fiscal a été notifié à la S.A. X... au titre de la TVA et de l'impôt sur les sociétés, au motif qu'une partie du capital de la société créée était détenu par Jean-Pierre X..., lequel était associé de l'entreprise en difficulté pendant l'année précédent la reprise, ce qui fait obstacle au bénéfice des dispositions de l'article 44 septies du Code général des impôts.

Par acte en date du 29 janvier 2004, la S.A. X... a fait assigner Maître Y... devant le Tribunal de grande instance de BRIVE afin d'engager sa responsabilité civile pour manquement au devoir de conseil.

Le juge de la mise en état du Tribunal de grande instance de BRIVE a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de CAHORS au visa de l'article 47 du nouveau Code de procédure civile.

Par acte du 16 août 2005, la S.A. X... a mis en cause la SCP d'avocats DALLET-PROUZERGUE-BARRIÈRE-DELPY-CROUZET-LANGLADE-BOUCHERAT-HERESZTIN, venant aux droits de la SCP Luc GAILLARD-Michel PROUZERGUE, afin d'engager la responsabilité civile de la société au nom de laquelle Maître Y... était intervenu.

Par jugement rendu le 15 septembre 2006, le Tribunal de grande instance de CAHORS a mis hors de cause Maître Luc Y... à titre personnel, a dit que la SCP d'avocats DALLET - PROUZERGUE - BARRIÈRE - DELPY - CROUZET -LANGLADE - BOUCHERAT - HERESZTIN doit être déclarée responsable du préjudice subi par la S.A. X..., mais a débouté la S.A. X... de sa demande en dommages et intérêts en l'absence de préjudice.

La S.A. X... a relevé appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui n'apparaissent pas critiquables.

Elle demande à la cour de condamner la SCP d'avocats DALLET-PROUZERGUE-BARRIÈRE-DELPY-CROUZET-LANGLADE-BOUCHERAT-HERESZTIN à lui payer la somme de 178.811,26 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2004, date de l'assignation en réparation de son préjudice, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2.500 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle soutient que Maître Y... a manqué à son obligation de conseil en omettant de l'informer des conditions nécessaires à l'application de l'article 44 septies du Code général des impôts, que l'obligation incombant à l'avocat en matière fiscale est une obligation de résultat, et que ce manquement a généré un préjudice global de 178.811,26 € composé du redressement fiscal de 782.341 F auquel il convient d'ajouter l'incidence fiscale de 33,33 % qui résultera de l'imposition de cette indemnité au taux de l'impôt sur les sociétés.

* * *

Maître Luc Y... et la SCP d'avocats DALLET-PROUZERGUE-BARRIÈRE-DELPY-CROUZET-LANGLADE-BOUCHERAT-HERESZTIN concluent à la confirmation du jugement et sollicitent une indemnité de 1.500 € chacun au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Ils soutiennent que Maître Y... doit être mis hors de cause puisqu'il n'exerçait pas à titre personnel mais en qualité d'associé d'une SCP.

La SCP d'avocats DALLET-PROUZERGUE-BARRIÈRE-DELPY-CROUZET-LANGLADE-BOUCHERAT-HERESZTIN prétend rapporter la preuve de l'exécution de son devoir de conseil et soutient qu'aucun préjudice n'a été causé à la S.A. X... puisque le redressement fiscal résulte de la présence de Jean-Pierre X... comme associé, cette présence étant un choix de la S.A. X....

MOTIFS DE LA DÉCISION

I- Sur la responsabilité

Il résulte des dispositions de l'article 1147 du Code civil que l'avocat est tenu d'une obligation d'information et de conseil à l'égard de son client, notamment en matière de rédaction d'actes où il doit s'assurer de leur validité et de leur efficacité. Il doit également veiller aux conséquences fiscales de ceux-ci, en requérant, au besoin, l'avis d'un spécialiste en la matière.

Il incombe en outre à l'avocat de rapporter la preuve de ce qu'il a bien exécuté son obligation particulière d'information.

En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que Maître Luc Y..., en sa qualité d'associé de la SCP d'avocats, a procédé à la rédaction des statuts de la S.A. X... et de l'acte de cession du fonds de commerce.

Il devait donc informer sa cliente des conséquences fiscales de ces actes et notamment de l'avantage qui pouvait être le sien en application de l'article 44 septies du Code général des impôts, mais également des conditions nécessaires à l'application de ce texte et en particulier de l'interdiction faite à un associé de l'entreprise reprise de détenir une partie du capital de l'entreprise créée.

Or, la S.A. X... a cru pouvoir profiter de l'avantage fiscal résultant de la reprise d'éléments d'actif d'une entreprise industrielle en liquidation judiciaire, alors que, compte tenu de la possession par Jean-Pierre X... d'une partie du capital social de la S.A. X..., elle a subi un redressement fiscal en 1995.

Maître Luc Y... ne rapporte pas la preuve de l'exécution de son obligation particulière d'information sur les conséquences fiscales des actes qu'il a rédigés ; en effet, s'il est démontré qu'il a informé sa cliente de l'existence de l'avantage fiscal pouvant résulter de l'article 44 septies du Code général des impôts, il ne prouve pas avoir informé sa cliente de ce que la détention d'une partie du capital social de la S.A. par Jean-Pierre X..., également actionnaire de la S.A.R.L. dont le fonds de commerce était repris, faisait obstacle à cet avantage fiscal.

Il résulte de ces éléments que Maître Luc Y... a engagé la responsabilité de la SCP d'avocats pour le compte de laquelle il agisssait.

Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a mis hors de cause Maître Luc Y... à titre personnel et en ce qu'il a déclaré la SCP d'avocats DALLET-PROUZERGUE-BARRIÈRE-DELPY-CROUZET-LANGLADE-BOUCHERAT-HERESZTIN responsable du préjudice éventuellement subi par la S.A. X... du fait de ce manquement à l'obligation d'information.

II- Sur le préjudice

La SCP d'avocats défenderesse verse aux débats le mémoire introductif d'instance devant le Tribunal administratif de LIMOGES.

Ce mémoire, rédigé par l'un des associés de la SCP d'avocats, mentionne

que :

"de par sa qualité de salarié présent à l'effectif au jour de la reprise et du besoin exprimé par la S.A. X... d'avoir recours à l'actionnariat salarial faute de concours bancaires suffisants, la présence de Jean-Pierre X... (en qualité d'associé) était juridiquement et économiquement obligatoire et nécessaire".

Ce mémoire a nécessairement été soumis à l'approbation de la S.A. X... avant d'être transmis au Tribunal administratif. Et force est de constater que la S.A. X... n'a jamais contesté ni même discuté, ni auprès de son conseil, ni auprès devant le Tribunal administratif, le caractère obligatoire et nécessaire sur le plan juridique et économique de la qualité d'associé de Jean-Pierre X....

Sa qualité d'associé étant nécessaire et obligatoire pour la S.A. X..., les premiers juges en ont justement déduit que même si Maître Luc Y... n'avait pas manqué à son obligation d'information, Jean-Pierre X... aurait néanmoins été associé de la S.A. X..., de sorte qu'en l'absence de pénalité de retard, la faute commise par Maître Y... n'a causé aucun préjudice à la S.A. X....

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la S.A. X... de sa demande en dommages et intérêts.

III - Sur les dépens et les demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

Chacune des parties succombant partiellement à l'instance, il convient de laisser à la charge de chacune ses propres dépens, et de dire qu'il n'y a pas lieu à condamnation au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Déclare recevable l'appel formé contre le jugement rendu le 15 septembre 2006 par le Tribunal de grande instance de CAHORS ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Dit que chacune des parties conservera ses dépens et dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Jean-Marie IMBERT, Président de Chambre et par Dominique SALEY, Greffier.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Numéro d'arrêt : 07/00095
Date de la décision : 29/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Cahors


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-29;07.00095 ?
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