ARRÊT DU
15 JANVIER 2008
CL / NC
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R. G. 07 / 00330
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Thierry X...
Pascal Y...
Olivier Z...
Philippe A...
C /
Me Christian B...- Co-Mandataire liquidateur de S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT
Me Christian B...- Co-Mandataire liquidateur de S. A. à directoire FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION
Me Liliane C...- Co-Mandataire liquidateur de S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT
Me Liliane C...- Co-Mandataire liquidateur de S. A. à directoire FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION
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ARRÊT no 11
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Sociale
Prononcé à l'audience publique du quinze janvier deux mille huit par Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Nicole CUESTA, Greffière,
La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE :
Thierry X...
...
68310 WITTELSHEIM
Pascal Y...
...
38130 ECHIROLLES
Olivier Z...
...
09100 ST MARTIN D OYDES
Philippe A...
...
68740 RUSTENHART
Rep / assistant : la SCPA BAUDELOT COHEN-RICHELET POITVIN (avocats au barreau de PARIS)
DEMANDEURS AUX RENVOIS DE CASSATION prononcés par arrêts du 14 décembre 2006 cassant partiellement quatre arrêts de la Cour d'Appel de TOULOUSE en date du 9 décembre 2004 dans quatre affaires enregistrées au rôle sous les numéros R. G. 04 / 453 concernant Thierry X..., 04 / 455 concernant Pascal Y..., 04 / 447 concernant Olivier Z... et 04 / 461 concernant Philippe A....
d'une part,
ET :
Me Christian B...
Co-Mandataire liquidateur de S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT
...
B. P. 7004
31068 TOULOUSE CEDEX 07
Me Christian B...
Co-Mandataire liquidateur de S. A. à directoire FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION
...
B. P. 7004
31068 TOULOUSE CEDEX 07
Me Liliane C...
Co-Mandataire liquidateur de S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT
...
BP 827
31080 TOULOUSE CEDEX
Me Liliane C...
Co-Mandataire liquidateur de S. A. à directoire FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION
...
BP 827
31080 TOULOUSE CEDEX
Rep / assistant : la SCP SAINT-GENIEST & GUEROT (avocats au barreau de TOULOUSE)
DÉFENDEURS AUX RENVOIS DE CASSATION
d'autre part,
CGEA MIDI PYRÉNÉES CENTRE DE GESTION ET D'ETUDE A. G. S. (C. G. E. A.)
72 ? rue Pierre Paul de Riquet
BP 81510
31015 TOULOUSE CEDEX 06
Rep / assistant : la SCP SAINT-GENIEST & GUEROT (avocats au barreau de TOULOUSE)
PARTIE INTERVENANTE
dernière part,
A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 3 décembre 2007, sur rapport de Catherine LATRABE, devant Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, Françoise MARTRES et Thierry LIPPMANN, Conseillers, assistés de Solange BELUS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
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*
Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... ont signé avec la S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT un contrat de franchise prenant respectivement effet les 12 avril 1999, 1er juillet 2000, 1eravril 2001 et 2 avril 2001 pour l'exploitation d'une tournée de distribution et de ramassage de colis.
Invoquant les manquements de cette dernière à ses obligations contractuelles, les intéressés ont cessé leur activité respectivement le 8 août 2002, le 12 avril 2002, le 12 janvier 2003 et le 8 mai 2002, prenant acte de la rupture du contrat avant de saisir la juridiction prud'homale afin d'obtenir la requalification de la relation en contrat de travail et faire condamner les Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION à leur payer diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture des contrats.
Le réseau FRANCE ACHEMINEMENT était constitué autour de trois sociétés situées à TOULOUSE : la S. A. FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION, la S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT et la S. A. R. L. EXPLOITATION LOGISTIQUE SERVICE.
Ces sociétés ont été placées en redressement judiciaire le 17 décembre 2002 s'agissant de la S. A. FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION et le 7 janvier 2003 s'agissant de la S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT, ces dernières ayant été mises en liquidation judiciaire respectivement le 22 avril 2003 et le 4 juin 2003, le Tribunal de Commerce de TOULOUSE ayant par ailleurs ordonné la confusion de leurs patrimoines ainsi que la jonction des procédures de liquidation judiciaire, Maître B... et Maître C..., mandataires judiciaires, étant désignés en qualité de co-liquidateurs.
Suivant jugements en date du 18 novembre 2003, le Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE a requalifié les contrats de franchise de Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A..., a fixé les créances des intéressés à la valeur de cinq années de salaire net augmentée de 10 % de congés payés, diminuée des résultats d'exploitation nets, à six mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à deux mois de salaire à titre d'indemnité compensatrice de préavis, a débouté les requérants de leurs autres chefs de demandes et a dit les décisions opposables à l'AGS, faute de fonds disponibles dans l'entreprise et dans les limites et plafonds de garanties prévues aux articles L. 143-11-1 et suivants, L. 143-11-8 du Code du Travail.
Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... ayant relevé appel de ces jugements, la Cour de TOULOUSE a, par arrêts du 9 décembre 2004, confirmé les jugements querellés en ce qu'ils ont requalifié en contrat de travail salarié à durée indéterminée et à temps complet le contrat dit " de franchise ", a fixé les créances salariales des intéressés, in solidum dans les liquidations judiciaires des deux Sociétés S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT et S. A. FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION, à diverses sommes à titre de rappel de salaire, de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis, d'intérêts et sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et enfin, a débouté les appelants de leurs autres demandes.
Sur les pourvois formés par Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A..., la Cour de Cassation, Chambre Sociale, a joint ces procédures, a cassé et annulé les arrêts rendus le 9 décembre 2004, mais seulement en ce qu'ils ont débouté les salariés de leurs demandes d'indemnités de congés payés, renvoyant les parties devant la Cour d'Appel d'AGEN, la cassation étant intervenue au visa des articles R. 143-2 14o et D. 223-4 du Code du Travail et ensemble l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux motifs que :
" pour débouter les salariés de leurs demandes en paiement d'indemnités de congés payés, la Cour d'Appel retient que cette indemnité, substitut du salaire, ne peut se cumuler avec le salaire versé pendant cette période, sauf à pouvoir prétendre à des dommages-intérêts si le salarié établit que les congés payés n'ont pu être pris par la faute de son employeur ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, les arguments avancés relatifs aux obligations contractuelles de livrer les clients en toutes circonstances étant insuffisants pour démontrer un empêchement à cet égard imputable à l'employeur, étant observé qu'il était également prévu au contrat de franchise que le titulaire était autorisé à organiser son remplacement.
En statuant ainsi alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur n'avait pas mis en place un système de congés payés conforme aux dispositions légales, la Cour d'Appel n'a pas satisfait aux exigences des textes susvisés. "
Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... ont saisi la Cour de renvoi, les procédures ayant été enregistrées au greffe de la Cour sous les numéros 07 / 00330, 0700332, 07 / 00333, 07 / 00337.
Ces procédures ont fait l'objet d'une jonction sous le seul numéro 07 / 00330.
- MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... rappellent que la requalification des contrats a définitivement été jugée et qu'ils étaient donc tous bien liés par un contrat de travail aux Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT.
En ce qui concerne les sommes dues au titre des heures de travail accomplies, ils prétendent que les arrêts de la Cour d'Appel de TOULOUSE ne font pas obstacle à leurs demandes en paiement des heures supplémentaires devant la présente Cour.
Ils indiquent que la Cour d'Appel de TOULOUSE s'est bornée à juger que la preuve des heures supplémentaires n'était pas rapportée en l'état des documents produits et ils en déduisent que l'autorité de la chose jugée ne s'oppose donc pas à ce que la présente Cour constate la réalité des heures revendiquées.
Ils font valoir, en outre, que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice.
Ils exposent, à cet égard, que les horaires précis d'enlèvement et de livraison de chaque colis étaient automatiquement enregistrés au moyen d'un lecteur optique dit scanner et dévidés quotidiennement dans le serveur informatique des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et conservés par ces dernières, ce système d'enregistrement et de contrôle des horaires des enlèvements et livraisons ayant fait suite au système antérieur de relevé par Minitel.
Ils ajoutent que les Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT, et donc leurs liquidateurs en exercice, sont incontestablement en possession de l'intégralité des informations relatives aux heures de travail qu'ils ont effectuées et que depuis la date des arrêts d'appel rendus à leur égard, de nombreux événements sont intervenus qui attestent de cette possession et de leur valeur probatoire.
Ils invoquent, par ailleurs, l'article 6 § 1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et ils soutiennent qu'alors même que la demande se heurterait a priori à l'autorité de la chose jugée, il y aurait lieu de l'accueillir tant sur
le fondement du procès équitable que sur celui du droit au respect des biens, cette solution s'imposant avec d'autant plus de force que nombre de leurs collègues ont obtenu le paiement de leurs heures supplémentaires et des droits y attachés.
S'agissant de la preuve des heures effectivement réalisées, ils expliquent qu'ils versent aux débats de nombreux éléments de preuve de leur temps de travail alors que les liquidateurs ne produisent aucune pièce de nature à les contester, qu'ils détiennent l'enregistrement de l'horaire de chacun des colis enlevés ou livrés et qu'ils se refusent à les communiquer : ils en déduisent que la réalité de leur temps de travail est largement établie.
Au regard du Code du Travail et de la Convention Collective Nationale des Transports Routiers et Activités Auxiliaires de Transport du 21 décembre 1950 qui leur est applicable, ils estiment donc être en droit de réclamer les sommes leur revenant au titre des salaires pour la durée légale du travail, des heures supplémentaires, des indemnités de congés payés, des indemnités de repos compensateurs et des dommages-intérêts pour les conditions de travail imposées et absence d'affiliation aux organismes sociaux.
En ce qui concerne plus particulièrement les indemnités de congés payés, ils soutiennent qu'ils se sont trouvés dans l'obligation de travailler en permanence à double titre : ils expliquent, à cet égard, d'une part, que l'impossibilité de prendre des congés résulte de la structure même de la méthode de travail en vigueur dans le réseau, et d'autre part, que le contrat de franchise interdit expressément au " franchisé " de prendre des congés, sous peine de lourdes sanctions, notamment financières.
Ils en déduisent qu'ils ont incontestablement droit à des indemnités de congés payés.
Enfin, ils estiment avoir droit à l'indemnité légale pour travail dissimulé.
Par conséquent, Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... demandent à la Cour, vu les articles L. 120-1, L. 212-1 et L. 781-1- du Code du Travail, vu les articles 1351 du Code Civil, et 6 § 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, vu les arrêts rendus par la Cour de Cassation à leur bénéfice le 14 décembre 2006, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié le contrat de franchise des concluants en contrat de travail et annulé la clause de non concurrence qui y était contenue, le réformant pour le surplus, de :
- dire que les Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION sont leurs employeurs conjoints et, à ce titre, solidairement redevables des créances ci-après détaillées, à l'exception de celles relatives au droit d'entrée qui n'incomberont qu'à la Société FRANCE ACHEMINEMENT,
- condamner conjointement et solidairement les Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION à leur délivrer des bulletins de salaires mensuels pour les périodes de travail courues,
- fixer leur créance d'arriérés de salaires au passif des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION aux sommes suivantes :
- à Monsieur X... : 27. 226, 76 €,
- à Monsieur A... : 33. 093, 17 €,
- à Monsieur Y... : 28. 328, 85 €,
- à Monsieur Z... : 57. 124, 13 €,
- fixer leur créance d'indemnités de congés payés au passif des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION aux sommes suivantes :
- à Monsieur X... : 6. 752, 94 €,
- à Monsieur A... : 3. 414, 52 €,
- à Monsieur Y... : 4. 128, 11 €,
- à Monsieur Z... : 5. 421, 93 €,
- subsidiairement, fixer leur créance d'indemnité de congés payés au passif des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION aux sommes suivantes :
- à Monsieur Z... : 1. 992, 30 €,
- à Monsieur A... : 1. 220, 20 €,
- à Monsieur Y... : 1. 959, 70 €,
- à Monsieur X... : 3. 650, 90 €,
- fixer leur créance d'indemnité de repos compensateurs au passif des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION aux sommes suivantes :
- à Monsieur X... : 20. 998, 26 €,
- à Monsieur A... : 10. 289, 08 €,
- à Monsieur Y... : 14. 185, 53 €,
- à Monsieur Z... : 24. 264, 58 €,
- fixer à la somme de 7. 290, 11 € la somme allouée à chacun d'eux en application de l'article L. 324-11 du Code du Travail,
- dire que l'intégralité des sommes détaillées ci-dessus seront assorties des intérêts de droit à compter de la date de la demande et jusqu'aux dates respectives de mise en redressement judiciaire des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION,
- dire que les créances ci-dessus détaillées seront inscrites sur le relevé des créances salariales des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION,
- dire que les créances ci-dessus détaillées donneront lieu aux cotisations sociales de droit,
- dire que l'arrêt à intervenir sera opposable au CGEA, de dire que les créances détaillées ci-dessus seront intégralement garanties par le CGEA,
- fixer à 4. 500 € la créance de frais irrépétibles (art. 700 du NCPC) de chacun des concluants au passif des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION,
- condamner le CGEA, in solidum avec les Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION comme il est dit ci-dessus, à payer à chacun d'eux une somme de 4. 500 € au titre de frais irrépétibles (art. 700 du NCPC),
- condamner le CGEA et Maître B... et Maître C... ès qualités de liquidateurs des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION en tous les dépens.
Maître B... et Maître C..., es qualité de co-liquidateurs des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT, FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION et ELS, ainsi que le CGEA AGS, rappellent, pour leur part, que la décision rendue par la Cour d'Appel de TOULOUSE est définitive sur le point de la requalification du contrat.
Sur la demande de rappel de salaire, ils font valoir que l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de TOULOUSE n'a pas été cassé sur ce point et qu'il en va de même pour les heures supplémentaires, pour les repos compensateurs et la non affiliation aux organismes sociaux sauf à violer l'autorité de la chose jugée qui s'attache à cet arrêt.
En ce qui concerne les congés payés, ils prétendent, pour l'essentiel, que Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... ne rapportent pas la preuve de l'impossibilité dans laquelle ils se seraient trouvés de prendre des congés, étant ajouté que ces derniers n'ont jamais demandé à prendre leurs congés et qu'il leur apparaît parfaitement invraisemblable qu'ils n'aient pris aucun jour de congé durant toute la durée de la relation contractuelle, les intéressés ayant pu se faire remplacer pendant les périodes où ils interrompaient leur activité.
Ils leur font grief, enfin, de ne pas indiquer les congés payés qu'ils n'auraient pas pu prendre, faute de préciser les périodes considérées et leurs jours de repos alors qu'ils ne peuvent cumuler rémunération et congés payés.
Par conséquent, Maître B... et Maître C..., es qualité de co-liquidateurs des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT, FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION et ELS ainsi que le CGEA AGS demandent à la Cour de :
- débouter Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... de l'ensemble de leurs demandes,
- subsidiairement, dire que les congés payés non pris ne peuvent se cumuler avec les salaires, dire de même que les demandeurs ne rapportent pas la preuve d'avoir été empêchés de prendre des congés qu'ils n'ont pas demandé,
- dire que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 143-11-1 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 143-11-7 et L. 143-11-8 du Code du Travail,
- dire que les sommes réclamées sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile sont exclues de la garantie, les conditions spécifiques de celle-ci n'étant pas remplies,
- juger en toute hypothèse que les avances de l'AGS, toutes créances du salarié confondues, seront limitées au plafond 13 applicable au jour de la rupture de l'éventuel contrat de travail,
- en tout état de cause, dire que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et sur justifications par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
- statuer ce que de droit en ce qui concerne les dépens sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'AGS, et d'exclure en conséquence toute demande de provision à valoir sur la rémunération d'un éventuel expert judiciaire de la garantie de l'AGS.
- SUR CE :
- Sur les demandes de fixation de créance à titre d'arriérés de salaires, d'indemnités de repos compensateur et de congés payés y afférents et de paiement de l'indemnité prévue par l'article L. 324-11-1 du Code du Travail :
Attendu que la Cour d'Appel de TOULOUSE régulièrement saisie par Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... d'une demande à titre d'heures supplémentaires, d'indemnités de repos compensateur et de congés payés y afférents a rejeté ces prétentions par ses arrêts en date du 9 décembre 2004, ce dont les intéressés lui ont fait grief dans leur premier moyen développé devant la Cour de Cassation pour des motifs tirés d'une violation des articles L. 212-1-1 du Code du Travail et 455 du Nouveau Code de Procédure Civile et d'un manque de base légale au regard de l'article L. 212-5 du Code du Travail.
Que suivant arrêt du 14 décembre 2006, la Cour de Cassation a écarté ce moyen comme non fondé, maintenant ainsi les décisions attaquées sur ces points, la cassation qui délimite la saisine de la Cour de renvoi n'étant intervenue que sur le deuxième moyen soutenu par Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... portant sur le rejet par les décisions critiquées de leur demande en paiement d'indemnités de congés payés.
Que la question de la durée du travail a donc été définitivement tranchée, le rejet des prétentions de Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... au titre de paiement d'heures supplémentaires, de repos compensateur et de congés payés y afférent étant passé en force de chose jugée.
Que la production de nouveaux moyens de preuve tels qu'invoqués par ces derniers, relativement à de mêmes faits, à savoir, la réalisation des heures de travail effectuées, ne permet pas de revenir sur une telle décision.
Que la communication de pièces nouvelles, comme en l'espèce, des courriers relatifs à la possession par les liquidateurs des données en cause et des décisions rendues dans d'autres affaires ordonnant à ces derniers cette production sans toutefois que ces derniers aient par la suite satisfait à cette injonction, n'est pas de nature à modifier la cause de la demande.
Que des décisions intéressant d'autres parties tels des arrêts rendus dans le cadre d'autres instances ayant fait droit à des demandes formées par des collègues de Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... de paiement d'heures supplémentaires et des droits qui y sont attachés ne sauraient faire obstacle à l'autorité de la chose jugée qui s'attache, au cas présent, aux demandes des intéressés de ce chef.
Que l'application du principe de l'autorité de la chose jugée ainsi attachée à une décision de justice est compatible avec l'exigence d'un procès équitable posée par l'article 6 § 1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l ‘ Homme et des Libertés Fondamentales, étant observé en outre, qu'au cas présent, il est constant que les demandes de Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... de paiement d'heures supplémentaires et des droits qui y sont attachés ont été débattues contradictoirement tant devant la juridiction du fond que devant la Cour de Cassation.
Que le droit au respect des biens tel qu'invoqué par Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... n'est pas
davantage contraire au principe de l'autorité de la chose jugée dès lors que les conditions d'application de celui-ci se trouvent, comme en l'espèce, réunies.
Que la Cour de renvoi ne peut par conséquent que rejeter les demandes de Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... au titre des arriérés de salaires, au titre d'heures supplémentaires, de congés payés y afférent et d'indemnités de repos compensateurs.
Qu'il en va de même de la demande de ces derniers en paiement de l'indemnité prévue par l'article L. 324-11-1 du Code du Travail, Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... ayant, dans leur troisième moyen, pris en sa première branche développé devant la Cour de Cassation pour des motifs tirés d'une violation de l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile, fait grief à la Cour de TOULOUSE de ne pas avoir fait droit à cette même demande et la Cour de Cassation, dans son arrêt du 14 décembre 2006, ayant déclaré ce moyen irrecevable au motif que sous couvert d'un défaut de réponse à conclusions, celui-ci reproche à la Cour de TOULOUSE une omission de statuer susceptible d'être réparée conformément aux dispositions de l'article 463 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- Sur la demande de fixation de créance à titre d'indemnités de congés payés :
Attendu qu'il est constant que le salarié qui, par la faute de l'employeur n'a pu bénéficier de congés payés et a été contraint de travailler en lieu et place de ces congés a droit à une indemnité compensant la perte subie, peu important que les salaires et les congés payés ne puissent être cumulés pour la même période.
Que le non respect, comme en l'espèce, par l'employeur des obligations mises à sa charge notamment par les articles R. 143-2, 14o et D. 223-4 du Code du Travail, de faire figurer sur le bulletin de paie la date des congés qui seront compris dans la période de paie considérée et le montant de l'indemnité correspondante, de porter la période de congés à la connaissance du salarié deux mois au moins avant son ouverture, d'afficher l'ordre des départs et d'aviser individuellement les intéressés quinze jours avant leur départ constitue une faute ouvrant droit à des dommages-intérêts au profit des salariés qui, de ce fait, ont été privés de la possibilité de prendre leurs congés payés, l'impératif de bonne exécution du service à assurer tous les jours ouvrables en toutes circonstances mis contractuellement à la charge des " franchisés " à peine de rupture du contrat en cas de carence ou de lourdes sanctions pécuniaires mettant de fait les intéressés dans un état de dépendance vis à vis de la Société FRANCE ACHEMINEMENT ne leur permettant pas d'exiger et de prendre le congé auquel ils avaient droit chaque année.
Qu'au regard des circonstances de l'espèce et notamment de la durée de la relation de travail, le préjudice ainsi subi par Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... doit être réparé par l'allocation d'une somme respective de 3. 000 €, 2. 000 €, 2. 500 € et de 1. 500 €.
- Sur la garantie de l'AGS et sur les intérêts :
Attendu par ailleurs qu'en l'état de l'ouverture des procédures collectives intéressant la S. A. R. L. FRANCE ACHEMINEMENT et la S. A. FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION, il convient de donner acte à l'AGS de son intervention, de lui déclarer le présent arrêt commun et opposable et de fixer les
créances des salariés au passif des liquidations judiciaires en cause pour permettre à l'AGS d'en faire l'avance auprès des co-liquidateurs, et ce, dans les limites des conditions légales de son intervention.
Que selon l'article L. 143-11-1 du Code du Travail, l'AGS garantit les créances résultant d'une obligation de l'employeur née de l'exécution du contrat de travail ou d'une obligation de l'employeur naissant de la rupture du contrat de travail ; que tel est le cas, des indemnités de congés payés.
Qu'en revanche, l'AGS ne doit pas garantie des sommes dues en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile qui sont nées d'une procédure judiciaire et qui n'entrent pas dans les prévisions de l'article L. 143-11-1 précité.
Attendu qu'aux termes de l'article L. 621-48 du Code de Commerce, les intérêts ne peuvent être éventuellement dus que jusqu'au jugement de redressement judiciaire.
Que par application des dispositions de l'article 1153-1 du Code Civil, l'indemnité de congés payés ne pouvant produire des intérêts au taux légal qu'à compter du jour où elle a été fixée par le juge, soit au cas présent à compter de la présente décision, les sommes allouées de ce chef à Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... ne peuvent donc être assorties d'intérêts.
Attendu qu'il convient par ailleurs d'ordonner aux mandataires liquidateurs, es qualité, de délivrer à Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... les bulletins de salaire pour les périodes courues.
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... la totalité des frais non compris dans les dépens qu'ils ont pu être amenés à exposer pour la défense de leurs intérêts ; qu'il convient donc de leur allouer une somme de 500 €, chacun, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Attendu que tous les dépens exposés devant les juridictions du fond, y compris ceux afférents à l'arrêt cassé de la Cour d'Appel de TOULOUSE doivent être passés en frais privilégiés des procédures collectives des deux sociétés concernées, lesquelles succombent pour l'essentiel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, sur renvoi de cassation, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Dit que les Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION sont les employeurs conjoints de Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A..., et à ce titre, solidairement redevables des créances ci-après détaillées des salariés,
Fixe la créance d'indemnités de congés payés de Thierry X... à inscrire au passif des liquidations judiciaires des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION à la somme de 3. 000 €,
Fixe la créance d'indemnité de congés payés de Pascal Y... à inscrire au passif des liquidations judiciaires des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION à la somme de 2. 000 €,
Fixe la créance d'indemnités de congés payés de Olivier Z... à inscrire au passif des liquidations judiciaires des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION à la somme de 2. 500 €,
Fixe la créance d'indemnités de congés payés de Philippe A... à inscrire au passif des liquidations judiciaires des Sociétés FRANCE ACHEMINEMENT et FRANCE ACHEMINEMENT EXPLOITATION à la somme de 1. 500 €,
Fixe, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, à la somme de 500 €, chacun, la créance de Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A..., à inscrire, à ce titre, à ce même passif,
Donne acte à l'AGS de son intervention,
Déclare la présente décision commune et opposable à l'AGS dans les limites des conditions légales d'intervention de celle-ci, à l'exclusion dès lors de la somme allouée sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Ordonne aux mandataires liquidateurs, es qualité, de délivrer à Thierry X..., Pascal Y..., Olivier Z... et Philippe A... les bulletins de salaire pour les périodes courues,
Rejette comme inutile ou mal fondée toute demande contraire ou plus ample des parties,
Dit que tous les dépens exposés devant les juridictions du fond, y compris ceux afférents à l'arrêt cassé de la Cour d'Appel de TOULOUSE seront passés en frais privilégiés des procédures collectives des deux sociétés concernées.
Le présent arrêt a été signé par Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, et par Nicole CUESTA, Greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE